C-149/01 - First Choice Holidays

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EUR-Lex - 62001J0149 - FR

62001J0149

Arrêt de la Cour (sixième chambre) du 19 juin 2003. - Commissioners of Customs & Excise contre First Choice Holidays plc. - Demande de décision préjudicielle: Court of Appeal (England & Wales) (Civil Division) - Royaume-Uni. - Sixième directive TVA - Article 26, paragraphe 2 - Régime particulier de taxation des agences de voyages et des organisateurs de circuits touristiques - Base d'imposition - Marge - Montant total à payer par le voyageur. - Affaire C-149/01.

Recueil de jurisprudence 2003 page I-06289


Sommaire
Parties
Motifs de l'arrêt
Décisions sur les dépenses
Dispositif

Mots clés


Dispositions fiscales - Harmonisation des législations - Taxes sur le chiffre d'affaires - Système commun de taxe sur la valeur ajoutée - Régime particulier des agences de voyages - Base d'imposition - «Montant total à payer par le voyageur» - Notion - Montant additionnel versé par une agence intermédiaire à l'organisateur de circuits touristiques à concurrence de la remise accordée par elle au voyageur - Inclusion

irective du Conseil 77/388, art. 26, § 2)

Sommaire


$$L'article 26, paragraphe 2, de la sixième directive 77/388, en matière d'harmonisation des législations des États membres relatives aux taxes sur le chiffre d'affaires, doit être interprété en ce sens que la notion de «montant total à payer par le voyageur» au sens de cette disposition comprend le montant additionnel qu'une agence de voyages opérant en qualité d'intermédiaire pour le compte d'un organisateur de circuits touristiques doit verser à celui-ci en sus du prix acquitté par le voyageur et à hauteur de la remise consentie à ce dernier par ladite agence de voyages sur le prix du voyage fixé au catalogue de l'organisateur de circuits touristiques.

Ce montant additionnel versé par un tiers présente en effet un lien direct avec la prestation de services fournie au voyageur et est donc compris dans la contrepartie de cette prestation perçue par l'organisateur. Il ne saurait être considéré comme la contrepartie d'un service fourni par l'organisateur de circuits touristiques à l'agence de voyages et consistant à donner à celle-ci la faculté de vendre le voyage à un prix réduit.

( voir points 33-34 et disp. )

Parties


Dans l'affaire C-149/01,

ayant pour objet une demande adressée à la Cour, en application de l'article 234 CE, par la Court of Appeal (England & Wales) (Civil Division) (Royaume-Uni) et tendant à obtenir, dans le litige pendant devant cette juridiction entre

Commissioners of Customs & Excise

et

First Choice Holidays plc,

une décision à titre préjudiciel sur l'interprétation de l'article 26, paragraphe 2, de la sixième directive 77/388/CEE du Conseil, du 17 mai 1977, en matière d'harmonisation des législations des États membres relatives aux taxes sur le chiffre d'affaires - Système commun de taxe sur la valeur ajoutée: assiette uniforme (JO L 145, p. 1),

LA COUR (sixième chambre),

composée de M. R. Schintgen, président de la deuxième chambre, faisant fonction de président de la sixième chambre, MM. C. Gulmann (rapporteur) et V. Skouris, Mme F. Macken et M. J. N. Cunha Rodrigues, juges,

avocat général: M. A. Tizzano,

greffier: Mme L. Hewlett, administrateur principal,

considérant les observations écrites présentées:

- pour First Choice Holidays plc, par M. K. Prosser, QC, mandaté par M. M. Whitehouse, solicitor,

- pour le gouvernement du Royaume-Uni, par Mme R. Magrill, en qualité d'agent, assistée de M. P. Sales, barrister,

- pour le gouvernement allemand, par MM. W.-D. Plessing et M. Lumma, en qualité d'agents,

- pour la Commission des Communautés européennes, par M. R. Lyal, en qualité d'agent,

vu le rapport d'audience,

ayant entendu les observations orales de First Choice Holidays plc, représentée par M. K. Prosser, du gouvernement du Royaume-Uni, représenté par Mme P. Ormond, en qualité d'agent, assistée de M. P. Sales, et de la Commission, représentée par M. R. Lyal, à l'audience du 14 mars 2002,

ayant entendu l'avocat général en ses conclusions à l'audience du 12 septembre 2002,

rend le présent

Arrêt

Motifs de l'arrêt


1 Par décision du 13 mars 2001, parvenue à la Cour le 26 mars suivant, la Court of Appeal (England & Wales) (Civil Division) a posé, en application de l'article 234 CE, deux questions préjudicielles sur l'interprétation de l'article 26, paragraphe 2, de la sixième directive 77/388/CEE du Conseil, du 17 mai 1977, en matière d'harmonisation des législations des États membres relatives aux taxes sur le chiffre d'affaires - Système commun de taxe sur la valeur ajoutée: assiette uniforme (JO L 145, p. 1, ci-après la «sixième directive»).

2 Ces questions ont été posées dans le cadre d'un litige opposant les Commissioners of Customs & Excise (ci-après les «Commissioners»), compétents au Royaume-Uni en matière de perception de la taxe sur la valeur ajoutée (ci-après la «TVA»), à First Choice Holidays plc (ci-après «First Choice Holidays»), organisateur de circuits touristiques, à propos d'une demande de remboursement de TVA présentée par cette dernière société.

Le cadre juridique

3 L'article 11, A, paragraphe 1, sous a), de la sixième directive dispose:

«La base d'imposition est constituée:

a) pour les livraisons de biens et les prestations de services autres que celles visées sous b), c) et d), par tout ce qui constitue la contrepartie obtenue ou à obtenir par le fournisseur ou le prestataire pour ces opérations de la part de l'acheteur, du preneur ou d'un tiers, y compris les subventions directement liées au prix de ces opérations».

4 L'article 26 de la sixième directive, intitulé «Régime particulier des agences de voyages», énonce à ses paragraphes 1 et 2:

«1. Les États membres appliquent la taxe sur la valeur ajoutée aux opérations des agences de voyages conformément au présent article [...] Au sens du présent article, sont également considérés comme agences de voyages les organisateurs de circuits touristiques.

2. Les opérations effectuées par l'agence de voyages pour la réalisation du voyage sont considérées comme une prestation de service unique de l'agence de voyages au voyageur [...] Pour cette prestation de services est considérée comme base d'imposition et comme prix hors taxe, au sens de l'article 22 paragraphe 3 sous b), la marge de l'agence de voyages, c'est-à-dire la différence entre le montant total à payer par le voyageur hors taxe à la valeur ajoutée et le coût effectif supporté par l'agence de voyages pour les livraisons et prestations de services d'autres assujettis, dans la mesure où ces opérations profitent directement au voyageur.»

5 L'article 26 de la sixième directive a été transposé au Royaume-Uni par l'article 53 de la Value Added Tax Act 1994 (loi de 1994 relative à la TVA) et le Value Added Tax (Tour Operators) Order 1987 (règlement de 1987 relatif à la TVA applicable aux organisateurs de circuits touristiques). Les dispositions de la législation nationale ont été précisées dans la circulaire 709/5/88 des Commissioners, intitulée «Tour Operator's Margin Scheme» (TOMS) (régime concernant la marge applicable aux organisateurs de circuits touristiques).

Le litige au principal et les questions préjudicielles

6 First Choice Holidays organise des vacances à forfait en combinant plusieurs éléments qu'elle achète. Elle confie à des agences de voyages, dans le cadre de contrats de commission, le soin de vendre le produit final aux voyageurs.

7 Les contrats de commission conclus entre First Choice Holidays et les agences de voyages ne contiennent aucune stipulation relative au prix auquel les agences peuvent vendre les voyages. Celles-ci sont libres de les commercialiser à des prix réduits par rapport aux prix publiés dans les catalogues de First Choice Holidays. Les agences consentent habituellement des remises sur les voyages sans obtenir, dans chaque cas, l'accord préalable de celle-ci.

8 Les contrats de commission prévoient, toutefois, que First Choice Holidays recevra de l'agence le prix plein figurant au catalogue et que l'agence a droit à une commission égale à un certain pourcentage, généralement fixé à 10 %, de ce prix.

9 Dans une hypothèse où le prix plein est de 1 000 GBP et où l'agence accorde au voyageur une remise de 50 GBP, celui-ci devra payer 950 GBP à First Choice Holidays. En pratique, cette dernière recevra la somme de 950 GBP par l'intermédiaire de l'agence de voyages, laquelle, en outre, devra verser à First Choice Holidays une somme de 50 GBP correspondant à la différence entre le prix indiqué dans le catalogue et celui effectivement pratiqué. L'agence portera par ailleurs au débit de First Choice Holidays une commission de 100 GBP, soit 10 % du prix du catalogue.

10 Quand un voyage était vendu, First Choice Holidays établissait une «facture-voyageur», qu'elle envoyait à l'agence. L'exemplaire destiné au voyageur indiquait le prix du voyage figurant au catalogue, sans mentionner aucune remise ou commission. Lors de sa transmission au voyageur, l'agence soit joignait un document indiquant le prix effectif du voyage, remise déduite, soit modifiait manuellement la facture pour faire apparaître ce dernier prix. Fréquemment, First Choice Holidays ignorait le montant de la remise éventuellement consentie et donc ne connaissait pas le prix acquitté par le voyageur.

11 En 1998, First Choice Holidays a réclamé aux Commissioners le remboursement d'une somme de 921 456 GBP, au motif qu'elle aurait payé par erreur la TVA sur les remises accordées par les agences lors de la vente de ses voyages.

12 Les Commissioners ont rejeté sa réclamation.

13 First Choice Holidays a introduit un recours contre cette décision devant le VAT and Duties Tribunal, London (Royaume-Uni). Par décision du 22 novembre 1999, celui-ci a déclaré le recours recevable et bien fondé. Il a jugé que le paiement par les agences de voyages de la différence entre le prix indiqué dans le catalogue et le prix réduit se situait hors du champ d'application du régime prévu à l'article 26 de la sixième directive.

14 Les Commissioners ont interjeté appel de la décision de cette juridiction devant la High Court of Justice (England & Wales), Chancery Division (Royaume-Uni). Par décision du 28 juin 2000, celle-ci a jugé que l'article 26 de la sixième directive ne s'appliquait pas, dans l'hypothèse susvisée, à la somme de 50 GBP due par l'agence de voyages, étant donné qu'il ne s'agissait pas d'un montant «à payer par le voyageur». Elle a considéré que, en tout état de cause, cette somme pouvait raisonnablement être qualifiée soit de paiement pour le voyage, soit de rémunération d'un service fourni par First Choice Holidays à l'agence et consistant à donner à cette dernière la faculté de vendre le voyage au prix qu'elle estimait approprié. Ayant relevé que le VAT and Duties Tribunal, London, avait retenu la seconde qualification, elle a jugé qu'il s'agissait d'une constatation de fait, qu'il ne convenait pas de remettre en cause au stade de l'appel.

15 Les Commissioners ont attaqué la décision de la High Court of Justice (England & Wales), Chancery Division, devant la Court of Appeal (England & Wales) (Civil Division). Ils ont fait valoir que, dans l'hypothèse susvisée, le montant additionnel de 50 GBP versé par l'agence de voyages à First Choice Holidays pour le compte du voyageur ou à son profit direct constituait un élément, payé par un tiers, de la contrepartie totale obtenue par l'organisateur de circuits touristiques, de sorte que ce montant devait être pris en compte aux fins du calcul de la TVA.

16 La Court of Appeal (England & Wales) (Civil Division), estimant que la solution du litige pendant devant elle dépend de l'interprétation de la sixième directive, a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes:

«Lorsqu'un organisateur de circuits touristiques, au sens de l'article 26 de la directive 77/388/CEE,

a) vend des voyages à forfait par l'intermédiaire d'une agence de voyages, dans le cadre d'un contrat de commission;

b) permet à l'agence de vendre les voyages à forfait en appliquant le prix du catalogue de l'organisateur diminué d'un rabais (le voyageur n'étant tenu de payer pour le voyage que le prix réduit);

c) oblige l'agence qui a vendu le voyage à un prix réduit non seulement à lui reverser le prix effectivement porté en compte au voyageur, mais également à lui payer un montant additionnel égal au rabais accordé au voyageur (lequel ne sait rien des arrangements financiers entre l'organisateur et l'agence), de sorte que l'organisateur est payé par l'agence à concurrence du prix plein du voyage tel qu'il figure dans le catalogue;

d) s'engage à payer à l'agence une commission, calculée sur la base du prix du voyage tel qu'il figure dans le catalogue, qui vient en pratique réduire par compensation le montant dû par l'agence mentionné au point c) ci-dessus;

e) ignore si l'agence a accordé un rabais lors de la vente d'un voyage particulier et ne connaît pas, le cas échéant, le montant de ce rabais;

f) en ce qui concerne sa relation avec l'agence, établit sa comptabilité sur la base du prix plein, tel qu'il figure dans le catalogue, qu'il a reçu de cette dernière pour le voyage vendu,

1) comment le montant additionnel payé par l'agence à l'organisateur [voir le point c) ci-dessus] doit-il, compte tenu des circonstances rappelées plus haut, être qualifié aux fins de l'application de l'article 26, paragraphe 2, de la directive?

2) le montant total à payer par le voyageur', au sens de l'article 26, paragraphe 2, de la directive comprend-il le montant additionnel mentionné au point c) ci-dessus?»

Sur les questions préjudicielles

17 Par ses deux questions préjudicielles, qu'il convient d'examiner ensemble, la juridiction de renvoi demande en substance si l'article 26, paragraphe 2, de la sixième directive doit être interprété en ce sens que la notion de «montant total à payer par le voyageur» au sens de cette disposition comprend le montant additionnel qu'une agence de voyages opérant en qualité d'intermédiaire pour le compte d'un organisateur de circuits touristiques doit, dans des circonstances telles que celles décrites par la décision de renvoi, verser à celui-ci en sus du prix acquitté par le voyageur et à hauteur de la remise consentie à ce dernier par ladite agence de voyages sur le prix du voyage fixé au catalogue de l'organisateur de circuits touristiques.

Observations présentées à la Cour

18 First Choice Holidays fait valoir que l'article 26 de la sixième directive institue une exception au régime général de détermination de la base d'imposition. Il ne constituerait pas un simple cas d'application des règles générales relatives à cette base prévues à l'article 11, A, paragraphe 1, sous a), de la même directive, disposition qui vise, notamment, la contrepartie obtenue par le fournisseur ou le prestataire de la part d'un tiers. Le libellé de l'article 26, paragraphe 2, de la sixième directive serait notablement différent de celui de cette dernière disposition. L'accent serait mis sur le voyageur et sur sa relation avec l'organisateur de circuits touristiques. L'absence de référence à un «tiers» ne pourrait être le résultat d'un oubli. Cette analyse serait confirmée par le libellé dudit article 26, paragraphe 2, aux termes duquel les coûts compris dans la marge de l'organisateur seraient uniquement ceux des «livraisons et prestations de services d'autres assujettis, dans la mesure où ces opérations profitent directement au voyageur». Parmi les coûts supportés par l'organisateur, seuls pourraient donc être inclus dans le calcul de la marge ceux afférents aux différents éléments constituant les vacances à forfait vendues au client.

19 À supposer même que l'expression «montant total à payer par le voyageur» inclue un montant payé par un tiers, le montant additionnel versé par l'agence à l'organisateur ne devrait pas être compris dans la base d'imposition. L'agence n'interviendrait pas en qualité de représentant du client, lequel ne serait tenu de payer pour le voyage que le prix minoré du montant de la remise. La seule opération pertinente au regard de l'article 26 de la sixième directive serait celle intervenue entre l'organisateur et le voyageur pour la fourniture de vacances à forfait. Ledit article concernerait le montant facturé par l'organisateur au titre de l'opération afférente à cette fourniture, et non le montant facturé au titre d'une autre opération pour une autre prestation. Or, dans la mesure où, ainsi que le VAT and Duties Tribunal, London, l'aurait jugé, le montant additionnel aurait été dû exclusivement au titre d'une prestation de services fournie par l'organisateur de circuits touristiques à l'agence de voyages, ce montant ne pourrait être compris dans la marge de l'organisateur au sens de l'article 26, paragraphe 2, de la sixième directive.

20 À la différence de First Choice Holidays, les gouvernements du Royaume-Uni et allemand ainsi que la Commission considèrent que le montant additionnel versé par l'agence de voyages doit être compris dans le «montant total à payer par le voyageur» au sens de l'article 26, paragraphe 2, de la sixième directive, en tant que contrepartie versée par un tiers, conformément à la règle énoncée à l'article 11, A, paragraphe 1, sous a), de la même directive.

Réponse de la Cour

21 Il convient de rappeler que l'article 26 de la sixième directive institue une exception au régime général relativement à la base imposable pour ce qui concerne certaines opérations des agences de voyages et des organisateurs de circuits touristiques (arrêt du 22 octobre 1998, Madgett et Baldwin, C-308/96 et C-94/97, Rec. p. I-6229, point 5).

22 En tant qu'exception au régime normal de la sixième directive, cet article ne doit être appliqué que dans la mesure nécessaire pour atteindre son objectif (arrêt Madgett et Baldwin, précité, point 34).

23 L'objectif du régime particulier de TVA institué par l'article 26 de la sixième directive est d'adapter les règles applicables au caractère spécifique de l'activité des agences de voyages et des organisateurs de circuits touristiques (arrêts du 12 novembre 1992, Van Ginkel, C-163/91, Rec. p. I-5723, point 15, ainsi que Madgett et Baldwin, précité, point 18).

24 Les services fournis par ces entreprises se caractérisent par le fait que, le plus souvent, ils se composent de multiples prestations, notamment en matière de transport et d'hébergement, qui se réalisent tant à l'intérieur qu'à l'extérieur du territoire de l'État membre où l'entreprise a son siège ou un établissement stable. L'application des règles de droit commun concernant le lieu d'imposition, la base d'imposition et la déduction de la taxe en amont se heurterait, en raison de la multiplicité et de la localisation des prestations fournies, à des difficultés pratiques pour ces entreprises, qui seraient de nature à entraver l'exercice de leur activité (arrêts précités Van Ginkel, points 13 et 14, ainsi que Madgett et Baldwin, point 18).

25 En fixant un lieu d'imposition unique et en retenant comme base d'imposition de la TVA la marge de l'agence de voyages ou de l'organisateur de circuits touristiques, c'est-à-dire la différence entre le «montant total à payer par le voyageur» hors TVA et le coût effectif, TVA comprise, supporté par l'agence de voyages ou l'organisateur de circuits touristiques pour les prestations de services d'autres assujettis, l'article 26, paragraphe 2, de la sixième directive vise à éviter les difficultés mentionnées au point précédent et, spécialement, à assurer une déduction simplifiée de la taxe payée en amont, quel que soit l'État membre où elle a été perçue.

26 La réalisation de cet objectif ne nécessite aucunement qu'il soit dérogé à la règle générale énoncée à l'article 11, A, paragraphe 1, sous a), de la sixième directive, qui, aux fins de la détermination de la base d'imposition, se réfère à la notion de «contrepartie obtenue ou à obtenir [¼ ] par le prestataire [¼ ] de la part [¼ ] du preneur ou d'un tiers».

27 Cette «contrepartie» correspond à la même donnée économique que le «montant total à payer par le voyageur» auquel se réfère l'article 26, paragraphe 2, de la sixième directive. Aussi bien dans le régime général que dans le régime particulier, cette donnée correspond au prix payé au prestataire de services. Indépendante de l'objectif poursuivi par ledit article 26, paragraphe 2, la notion en cause doit conserver la même définition juridique dans les deux régimes.

28 Dans ce contexte, les termes «à payer par le voyageur» utilisés à l'article 26, paragraphe 2, ne sauraient être interprétés littéralement en ce sens qu'ils excluraient de la base d'imposition de la TVA un élément de la «contrepartie» obtenu de la part d'un tiers au sens de l'article 11, A, paragraphe 1, sous a).

29 S'agissant de la «contrepartie» visée à cette dernière disposition, il y a lieu de rappeler qu'elle constitue la valeur subjective, à savoir celle réellement perçue dans chaque cas concret (arrêts du 24 octobre 1996, Argos Distributors, C-288/94, Rec. p. I-5311, point 16, et Elida Gibbs, C-317/94, Rec. p. I-5339, point 27).

30 La base d'imposition d'une prestation de service est constituée par tout ce qui est reçu en contrepartie du service et il doit dès lors exister un lien direct entre le service rendu et la contre-valeur reçue (voir, notamment, arrêt du 23 novembre 1988, Naturally Yours Cosmetics, 230/87, Rec. p. 6365, point 11).

31 Ce lien direct doit donc exister, également, lorsqu'un élément de la contrepartie est obtenu de la part d'un tiers.

32 Dans des circonstances telles que celles décrites par la juridiction de renvoi, le montant additionnel versé par l'agence de voyages à l'organisateur de circuits touristiques constitue une condition à laquelle ce dernier subordonne la fourniture de sa prestation de services et la commission due à l'agence de voyages est calculée sur le prix plein du voyage fixé au catalogue.

33 Un tel montant additionnel versé par un tiers présente ainsi un lien direct avec la prestation de services fournie au voyageur. Il en résulte qu'il est compris dans la contrepartie de cette prestation perçue par l'organisateur de circuits touristiques et que, par suite, il est inclus dans le «montant total à payer par le voyageur» au sens de l'article 26, paragraphe 2, de la sixième directive. Il ne saurait être considéré comme la contrepartie d'un service fourni par l'organisateur de circuits touristiques à l'agence de voyages et consistant à donner à celle-ci la faculté de vendre le voyage à un prix réduit.

34 Il convient donc de répondre aux questions préjudicielles que l'article 26, paragraphe 2, de la sixième directive doit être interprété en ce sens que la notion de «montant total à payer par le voyageur» au sens de cette disposition comprend le montant additionnel qu'une agence de voyages opérant en qualité d'intermédiaire pour le compte d'un organisateur de circuits touristiques doit, dans des circonstances telles que celles décrites par la décision de renvoi, verser à celui-ci en sus du prix acquitté par le voyageur et à hauteur de la remise consentie à ce dernier par ladite agence de voyages sur le prix du voyage fixé au catalogue de l'organisateur de circuits touristiques.

Décisions sur les dépenses


Sur les dépens 35 Les frais exposés par les gouvernements du Royaume-Uni et allemand, ainsi que par la Commission, qui ont soumis des observations à la Cour, ne peuvent faire l'objet d'un remboursement. La procédure revêtant, à l'égard des parties au principal, le caractère d'un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens.

Dispositif


Par ces motifs,

LA COUR (sixième chambre),

statuant sur les questions à elle soumises par la Court of Appeal (England & Wales) (Civil Division), par décision du 13 mars 2001, dit pour droit:

L'article 26, paragraphe 2, de la sixième directive 77/388/CEE du Conseil, du 17 mai 1977, en matière d'harmonisation des législations des États membres relatives aux taxes sur le chiffre d'affaires - Système commun de taxe sur la valeur ajoutée: assiette uniforme, doit être interprété en ce sens que la notion de «montant total à payer par le voyageur» au sens de cette disposition comprend le montant additionnel qu'une agence de voyages opérant en qualité d'intermédiaire pour le compte d'un organisateur de circuits touristiques doit, dans des circonstances telles que celles décrites par la décision de renvoi, verser à celui-ci en sus du prix acquitté par le voyageur et à hauteur de la remise consentie à ce dernier par ladite agence de voyages sur le prix du voyage fixé au catalogue de l'organisateur de circuits touristiques.