C-259/12 - Rodopi-M 91

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ARRÊT DE LA COUR (huitième chambre)

20 juin 2013 (*)

«Fiscalité – TVA – Directive 2006/112/CE – Principes de neutralité fiscale et de proportionnalité – Comptabilisation et déclaration tardives de l’annulation d’une facture – Régularisation du manquement – Paiement de l’impôt – Budget de l’État – Absence de préjudice – Sanction administrative»

Dans l’affaire C-259/12,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par l’Administrativen sad Plovdiv (Bulgarie), par décision du 15 mai 2012, parvenue à la Cour le 24 mai 2012, dans la procédure

Teritorialna direktsia na Natsionalnata agentsia za prihodite – Plovdiv

contre

Rodopi-M 91 OOD,

LA COUR (huitième chambre),

composée de M. E. Jarašiūnas, président de chambre, MM. A. Ó Caoimh et C. G. Fernlund (rapporteur), juges,

avocat général: M. M. Wathelet,

greffier: M. A. Calot Escobar,

vu la procédure écrite,

considérant les observations présentées:

–        pour la Teritorialna direktsia na Natsionalnata agentsia za prihodite – Plovdiv, par M. S. Marinov, direktor,

–        pour Rodopi-M 91 OOD, par Mes M. Ekimdzhiev, K. Boncheva, G. Chernicherska, et S. Hadzhieva, advokati,

–        pour la Commission européenne, par Mme C. Soulay et M. D. Roussanov, en qualité d’agents,

vu la décision prise, l’avocat général entendu, de juger l’affaire sans conclusions,

rend le présent

Arrêt

1        La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de la directive 2006/112/CE du Conseil, du 28 novembre 2006, relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée (JO L 347, p. 1, ci-après la «directive TVA»).

2        Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant la Teritorialna direktsia na Natsionalnata agentsia za prihodite – Plovdiv (direction territoriale pour la ville de Plovdiv de l’Agence nationale des recettes fiscales, ci-après la «Teritorialna direktsia») à Rodopi-M 91 OOD (ci-après «Rodopi») au sujet d’une amende infligée à celle-ci pour comptabilisation et déclaration tardives de l’annulation d’une facture.

 Le cadre juridique

 Le droit de l’Union

3        L’article 184 de la directive TVA dispose:

«La déduction initialement opérée est régularisée lorsqu’elle est supérieure ou inférieure à celle que l’assujetti était en droit d’opérer.»

4        L’article 186 de la directive TVA énonce:

«Les États membres déterminent les modalités d’application des articles 184 et 185.»

5        L’article 242 de la directive TVA est rédigé comme suit:

«Tout assujetti doit tenir une comptabilité suffisamment détaillée pour permettre l’application de la [taxe sur la valeur ajoutée (ci-après la ‘TVA’)] et son contrôle par l’administration fiscale.»

6        L’article 273 de la directive TVA prévoit:

«Les États membres peuvent prévoir d’autres obligations qu’ils jugeraient nécessaires pour assurer l’exacte perception de la TVA et pour éviter la fraude, sous réserve du respect de l’égalité de traitement des opérations intérieures et des opérations effectuées entre États membres par des assujettis, et à condition que ces obligations ne donnent pas lieu dans les échanges entre les États membres à des formalités liées au passage d’une frontière.

La faculté prévue au premier alinéa ne peut être utilisée pour imposer des obligations de facturation supplémentaires à celles fixées au chapitre 3.»

 Le droit bulgare

7        L’article 72, paragraphe 1, de la loi relative à la taxe sur la valeur ajoutée (Zakon za danaka varhu dobavenata stoynost, ci-après le «ZDDS») dispose:

«Une personne immatriculée conformément à cette loi peut exercer son droit à déduction de l’impôt en amont dans la période fiscale durant laquelle ce droit est né ou dans une des douze périodes fiscales suivantes.»

8        L’article 78 du ZDDS est libellé comme suit:

«1)      La personne immatriculée est tenue, en cas de changement de l’assiette, de l’annulation d’une vente ou de changement de la nature d’une vente, de rectifier le montant de l’impôt en amont dont la déduction est demandée.

2)      La correction intervient dans la période fiscale au cours de laquelle les changements visés au paragraphe 1 sont intervenus, au moyen de l’inscription, dans le registre d’achats et dans la déclaration fiscale pour la période correspondante, du document au sens de l’article 115 ou du nouveau document rectificatif au sens de l’article 116.»

9        L’article 112, paragraphe 1, du ZDDS dispose:

«Un document fiscal au sens de la présente loi s’entend:

1.      d’une facture;

2.      d’une déclaration concernant la facture;

3.      du procès-verbal.»

10      L’article 115 du ZDDS est libellé comme suit:

«1)      En cas de changement de l’assiette ou d’annulation d’une vente pour laquelle une facture a été émise, le fournisseur ou prestataire est tenu d’effectuer une déclaration relative à cette facture.

2)      L’avis doit être émis dans les 5 jours suivant l’apparition des circonstances prévues au paragraphe 1.

3)      En cas d’augmentation de l’assiette fiscale, il y a lieu d’effectuer une déclaration de débit; en cas de diminution de l’assiette ou d’annulation de la livraison, il convient d’accorder une note de crédit.

[...]»

11      L’article 116, paragraphe 1, du ZDDS dispose:

«Il n’est pas permis d’apporter des rectifications et ajouts à des factures et avis y afférents. Les documents erronés ou rectifiés sont annulés et de nouveaux documents sont émis.»

12      L’article 124, paragraphe 4, du ZDDS prévoit:

«La personne immatriculée est tenue de mentionner les documents fiscaux, qu’elle a reçus, dans le livre-journal des achats au plus tard dans la douzième période fiscale suivant celle au cours de laquelle ils ont été émis, mais sans aller au-delà de la dernière période fiscale visée à l’article 72, paragraphe 1.»

13      L’article 182 du ZDDS est libellé comme suit:

«1)      Lorsqu’un assujetti n’émet pas un document fiscal ou n’inscrit pas dans les registres de comptabilité, au titre des périodes concernées, le document fiscal émis ou reçu, ce qui entraîne la fixation d’un montant réduit d’impôt, il lui est infligé une amende (s’agissant de personnes physiques n’ayant pas la qualité de commerçant), ou une sanction pécuniaire (s’agissant de personnes morales ou d’entreprises individuelles), dont le montant est égal au montant de la taxe non acquittée et en tout état de cause supérieur ou égal à 1 000 [leva bulgares (BGN)].

2)      Dans le cas d’une infraction visée au paragraphe 1, lorsque l’assujetti a émis ou déclaré le document fiscal dans la période consécutive à la période fiscale durant laquelle ce document aurait dû être émis ou déclaré, l’amende ou la sanction pécuniaire s’élève à 25 % du montant de la taxe non acquittée, sans être inférieure à 250 BGN.»

 Le litige au principal et les questions préjudicielles

14      Rodopi est une société bulgare assujettie à la TVA.

15      Au cours de la période fiscale correspondant au mois de décembre 2009, cette société a inscrit dans son registre des achats et dans la déclaration qu’elle a déposée une facture émise par Moda Shport EOOD en date du 30 décembre 2009. Le montant de la TVA indiqué sur cette facture s’élève à 161 571,12 BGN (environ 82 800 euros).

16      Ladite facture n’aurait pas dû être émise. Conformément à la législation nationale, un procès-verbal daté du 15 octobre 2010 a annulé la facture en cause.

17      Rodopi n’a pris en compte ce procès-verbal ni dans sa comptabilité ni dans sa déclaration du mois d’octobre 2010. Elle l’a fait pour le mois de décembre 2010, en régularisant la déduction opérée au titre de ladite facture par l’acquittement du montant intégral de la TVA initialement déduite au titre de la facture annulée ainsi que des intérêts y afférents.

18      Le 22 février 2011, un acte de constatation d’infraction administrative a été émis, dans lequel il est indiqué, en substance, que l’infraction a été constatée par la Teritorialna direktsia au cours du mois de novembre 2010. Le 17 juin 2011, cette dernière a imposé à Rodopi une amende d’un montant équivalent à celui de la TVA indiqué sur la facture en cause.

19      La sanction a fait l’objet d’un recours en première instance devant le Rayonen sad (tribunal d’arrondissement).

20      Devant cette juridiction, Rodopi a fait valoir que l’annexe nº 12 du règlement d’application du ZDDS, qui impose en l’occurrence l’inscription de l’annulation de la facture en cause au mois d’octobre 2010, contredit l’article 124, paragraphe 4, du ZDDS, qui prévoit que l’assujetti doit inscrire les documents fiscaux reçus dans son registre des achats au plus tard au cours de la douzième période fiscale qui suit celle au cours de laquelle ces documents ont été émis, mais en tout cas avant la fin de la dernière période fiscale lors de laquelle il peut exercer son droit à déduction, c’est-à-dire douze mois après la période au cours de laquelle ce droit a pris naissance.

21      Le Rayonen sad a jugé que l’annulation de cette facture aurait dû être inscrite par Rodopi au mois d’octobre 2010, alors qu’elle ne l’a été qu’au mois de décembre 2010. Il a toutefois estimé que la décision de sanction prise par la Teritorialna direktsia était entachée d’une infraction aux règles matérielles de procédure, car elle n’avait pas respecté le délai prévu par le Zakon za administrativnite narushenia i nakazania (loi sur les infractions et sanctions administratives) pour établir l’acte constatant l’infraction.

22      La Teritorialna direktsia a formé un pourvoi en cassation devant l’Administrativen sad Plovdiv.

23      Devant cette juridiction, Rodopi fait valoir que l’amende qui lui a été imposée est contraire au droit de l’Union, et plus précisément aux principes de neutralité fiscale et de proportionnalité.

24      Selon la juridiction de renvoi, il convient, en l’espèce, de déterminer si la sanction infligée à Rodopi, au motif que celle-ci a déclaré tardivement l’annulation de la facture en cause, est conforme aux principes de neutralité et de proportionnalité, compte tenu du fait que Rodopi a payé la taxe accompagnée des intérêts y afférents.

25      Dans ces circonstances, l’Administrativen sad Plovdiv a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes:

«1)      Le principe de neutralité de l’impôt permet-il à un État membre d’infliger une sanction pour déclaration tardive de l’annulation d’une facture, alors même que l’annulation a ultérieurement été comptabilisée et que l’intéressé s’est acquitté de l’impôt – assorti d’intérêts – qui résulte de l’annulation?

Les circonstances ci-après ont-elles une incidence sur la première question:

–        le délai, dans lequel l’annulation aurait dû être déclarée, est réputé être de quatorze jours à compter de la fin du mois au cours duquel l’annulation a eu lieu;

–        l’annulation de la facture a effectivement été déclarée un mois après la fin du délai dans lequel l’annulation devait avoir été effectuée;

–        la TVA due, assortie des intérêts échus, a été versée au budget de l’État?

2)      Les articles 242 et 273 de la directive [TVA] autorisent-ils les États membres à infliger à un assujetti, qui n’a prétendument pas rempli en temps utile son obligation de comptabiliser des éléments ayant une incidence sur le calcul de la TVA, une amende pécuniaire correspondant au montant de la TVA non acquittée en temps utile, lorsque, par la suite, le manquement a été régularisé et la totalité de l’impôt, assorti des intérêts, a été acquittée?

3)      Le fait que le budget de l’État n’a subi aucun préjudice – puisque l’intéressé a déclaré par la suite l’annulation de la facture et a acquitté la totalité de l’impôt, assorti des intérêts – a-t-il une incidence?

4)      Le fait d’infliger une amende pécuniaire égale au montant total de l’impôt déjà acquitté avec les intérêts viole-t-il le principe de proportionnalité?»

 Sur les questions préjudicielles

 Sur la recevabilité

26      La Teritorialna direktsia soutient que la demande de décision préjudicielle est irrecevable, au motif qu’elle est dénuée de pertinence pour l’issue du litige au principal dès lors que seules les réponses aux questions relatives aux faits présentent un intérêt pour la solution dudit litige.

27      Selon une jurisprudence constante, le refus de la Cour de statuer sur une demande de décision préjudicielle introduite par une juridiction nationale n’est toutefois possible que lorsqu’il apparaît de manière manifeste que l’interprétation sollicitée du droit de l’Union n’a aucun rapport avec la réalité ou l’objet du litige au principal, lorsque le problème est de nature hypothétique ou encore lorsque la Cour ne dispose pas des éléments de fait et de droit nécessaires pour répondre de façon utile aux questions qui lui sont posées (arrêt du 11 septembre 2008, Eckelkamp e.a., C-11/07, Rec. p. I-6845, point 28 ainsi que jurisprudence citée).

28      Or, force est de constater que tel n’est pas le cas en l’espèce. En effet, l’interprétation demandée des principes de neutralité fiscale et de proportionnalité ainsi que des articles 242 et 273 de la directive TVA est en lien direct avec l’objet du litige au principal, dont le caractère réel ne paraît pouvoir être contesté. En outre, la décision de renvoi contient des éléments de fait et de droit suffisants pour que la Cour soit en mesure de répondre de façon utile aux questions qui lui sont posées. Dès lors, la demande de décision préjudicielle doit être déclarée recevable.

 Sur le fond

29      Par ses questions, qu’il convient d’examiner ensemble, la juridiction de renvoi demande, en substance, si les principes de neutralité fiscale et de proportionnalité ainsi que les articles 242 et 273 de la directive TVA doivent être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à ce que l’administration fiscale d’un État membre inflige à un assujetti, qui n’a pas rempli dans le délai prévu par la législation nationale son obligation de comptabiliser et de déclarer des éléments ayant une incidence sur le calcul de la TVA dont il est redevable, une amende pécuniaire égale au montant de cette taxe non acquittée dans ledit délai, lorsque, par la suite, cet assujetti a régularisé le manquement et s’est acquitté de la totalité de l’impôt dû, assorti des intérêts.

30      Conformément à l’article 242 de la directive TVA, tout assujetti est tenu de tenir une comptabilité suffisamment détaillée dans le but de permettre l’application de la TVA et son contrôle par l’administration fiscale. En outre, conformément à l’article 273, premier alinéa, de la directive TVA, les États membres peuvent prévoir d’autres obligations que celles prévues par cette directive lorsqu’ils jugent ces obligations nécessaires pour assurer l’exacte perception de la TVA et pour éviter la fraude.

31      La directive TVA ne prévoit pas expressément un système de sanctions en cas de méconnaissance des obligations visées à cette directive et auxquelles les assujettis sont soumis. Toutefois, il est de jurisprudence constante que, en l’absence d’harmonisation de la législation de l’Union dans le domaine des sanctions applicables en cas d’inobservation des conditions prévues par un régime institué par cette législation, les États membres demeurent compétents pour choisir les sanctions qui leur semblent appropriées. Ils sont toutefois tenus d’exercer leur compétence dans le respect du droit de l’Union et de ses principes généraux (voir, en ce sens, arrêt du 19 juillet 2012, Rēdlihs, C-263/11, point 44 et jurisprudence citée).

32      Ainsi, les sanctions que les États membres peuvent adopter afin d’assurer l’exacte perception de la TVA et d’éviter la fraude, et en particulier afin de garantir le respect par les assujettis de leurs obligations en matière de régularisation de leur comptabilité à la suite de l’annulation d’une facture sur la base de laquelle ils ont opéré une déduction, ne sauraient, en premier lieu, remettre en cause la neutralité de la TVA, laquelle constitue un principe fondamental du système commun de TVA et s’oppose à ce que des opérateurs économiques qui effectuent les mêmes opérations soient traités différemment en matière de perception de la TVA (voir, en ce sens, arrêts du 29 juillet 2010, Profaktor Kulesza, Frankowski, Jóźwiak, Orłowski, C-188/09, Rec. p. I-7639, point 26 et jurisprudence citée, ainsi que du 29 mars 2012, Belvedere Costruzioni, C-500/10, point 22).

33      À cet égard, il convient de rappeler que le système de régularisation des déductions constitue un élément essentiel du système mis en place par la directive TVA en ce qu’il a pour vocation d’assurer l’exactitude des déductions et donc la neutralité de la charge fiscale (arrêt du 30 mars 2006, Uudenkaupungin kaupunki, C-184/04, Rec. p. I-3039, point 26).

34      Or, en l’occurrence, il ressort du dossier soumis à la Cour que la sanction en cause dans l’affaire au principal, en incitant les assujettis à régulariser dans les meilleurs délais le montant de l’impôt dû lorsqu’une opération ayant servi de base à une déduction a été annulée, vise à assurer l’exacte perception de la taxe, et en particulier l’exactitude des déductions, et à éviter la fraude, sans nullement porter atteinte au principe du droit à déduction.

35      En outre, ainsi que l’a fait observer la Commission, d’une part, l’assujetti commettant une irrégularité telle que celle en cause au principal se trouve, au regard de l’objectif d’assurer l’exacte perception de la TVA et d’éviter la fraude, dans une situation différente de celle de l’assujetti ayant respecté ses obligations comptables.

36      D’autre part, l’amende pécuniaire en cause dans le litige au principal n’est pas infligée en raison d’une opération quelconque, mais du fait d’une rectification tardive par l’assujetti d’une déduction qu’il avait opérée et qui a perdu son fondement. Il ne saurait donc être considéré qu’il s’agit d’une taxe qui entraîne une double imposition contraire au principe de neutralité fiscale (voir, en ce sens et par analogie, arrêts du 11 septembre 2003, Cookies World, C-155/01, Rec. p. I-8785, point 60, et du 15 janvier 2009, K-1, C-502/07, Rec. p. I-161, points 17 à 19).

37      Il découle de ce qui précède que le principe de neutralité fiscale ne s’oppose pas à ce qu’une amende pécuniaire telle que celle en cause au principal soit infligée dans des circonstances telles que celles rappelées au point 29 du présent arrêt.

38      En second lieu, il convient de rappeler que les sanctions visées au point 32 du présent arrêt ne doivent pas aller au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre les objectifs d’assurer l’exacte perception de la taxe et d’éviter la fraude. Afin d’apprécier si une sanction est conforme au principe de proportionnalité, il convient de tenir compte, notamment, de la nature et de la gravité de l’infraction que cette sanction vise à pénaliser, ainsi que des modalités de détermination du montant de celle-ci (voir arrêt Rēdlihs, précité, points 46 et 47 ainsi que jurisprudence citée).

39      C’est toutefois à la juridiction nationale qu’il appartient d’apprécier si le montant de la sanction ne va pas au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre les objectifs indiqués au point précédent.

40      Quant aux modalités de détermination de la sanction en cause, il convient de constater que le montant de la sanction telle qu’elle est prévue à l’article 182, points 1 et 2, du ZDDS est progressif. Si la régularisation n’intervient qu’avec un mois de retard, l’amende n’est que de 25 % du montant de la TVA due. Ce n’est que si le retard excède le délai d’un mois qu’elle est augmentée à hauteur de 100 % du montant de la TVA due. Une telle sanction apparaît ainsi de nature à inciter les assujettis à régulariser aussi rapidement que possible les déductions qui ont été opérées mais n’ont plus de fondement et, ainsi, à atteindre l’objectif d’assurer l’exacte perception de la taxe.

41      Par ailleurs, il incombe à la juridiction nationale de vérifier si la déclaration tardive de l’annulation de la facture en cause n’est pas entachée de fraude à la TVA. En effet, selon une jurisprudence constante, les justiciables ne sauraient frauduleusement ou abusivement se prévaloir des normes de l’Union. De même, l’application de la réglementation de l’Union ne saurait être étendue jusqu’à couvrir les opérations qui sont réalisées dans le but de bénéficier abusivement des avantages prévus par le droit de l’Union (voir arrêt du 27 septembre 2007, Collée, C-146/05, Rec. p. I-7861, point 38 et jurisprudence citée).

42      Il convient cependant de souligner qu’un acquittement tardif de la TVA ne saurait être, per se, assimilé à une fraude (voir arrêt du 12 juillet 2012, EMS-Bulgaria Transport, C-284/11, point 74 et jurisprudence citée).

43      Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il convient de répondre aux questions posées que le principe de neutralité fiscale ne s’oppose pas à ce que l’administration fiscale d’un État membre inflige à un assujetti, qui n’a pas rempli dans le délai prévu par la législation nationale son obligation de comptabiliser et de déclarer des éléments ayant une incidence sur le calcul de la TVA dont il est redevable, une amende pécuniaire égale au montant de cette taxe non acquittée dans ledit délai lorsque, par la suite, cet assujetti a régularisé le manquement et s’est acquitté de la totalité de l’impôt dû, assorti des intérêts. Il appartient à la juridiction nationale d’apprécier, compte tenu des articles 242 et 273 de la directive TVA, si, au vu des circonstances du litige au principal, notamment le délai dans lequel l’irrégularité a été rectifiée, la gravité de cette irrégularité et l’éventuelle existence d’une fraude ou d’un contournement de la législation applicable imputable à l’assujetti, le montant de la sanction infligée ne va pas au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre les objectifs consistant à assurer l’exacte perception de la taxe et à éviter la fraude.

 Sur les dépens

44      La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

Par ces motifs, la Cour (huitième chambre) dit pour droit:

Le principe de neutralité fiscale ne s’oppose pas à ce que l’administration fiscale d’un État membre inflige à un assujetti, qui n’a pas rempli dans le délai prévu par la législation nationale son obligation de comptabiliser et de déclarer des éléments ayant une incidence sur le calcul de la taxe sur la valeur ajoutée dont il est redevable, une amende pécuniaire égale au montant de cette taxe non acquittée dans ledit délai lorsque, par la suite, cet assujetti a régularisé le manquement et s’est acquitté de la totalité de l’impôt dû, assorti des intérêts. Il appartient à la juridiction nationale d’apprécier, compte tenu des articles 242 et 273 de la directive 2006/112/CE du Conseil, du 28 novembre 2006, relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée, si, au vu des circonstances du litige au principal, notamment le délai dans lequel l’irrégularité a été rectifiée, la gravité de cette irrégularité et l’éventuelle existence d’une fraude ou d’un contournement de la législation applicable imputable à l’assujetti, le montant de la sanction infligée ne va pas au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre les objectifs consistant à assurer l’exacte perception de la taxe et à éviter la fraude.

Signatures


* Langue de procédure: le bulgare.