C-208/15 - Stock ’94

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62015CJ0208

ARRÊT DE LA COUR (cinquième chambre)

8 décembre 2016 ( *1 )

«Renvoi préjudiciel — Taxe sur la valeur ajoutée — Directive 2006/112/CE — Coopération intégrée — Octroi d’un financement et livraisons d’actifs circulants nécessaires à la production agricole — Prestation unique et complexe — Prestations distinctes et indépendantes — Prestation accessoire et prestation principale»

Dans l’affaire C‑208/15,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par la Kúria (Cour suprême, Hongrie), par décision du 26 mars 2015, parvenue à la Cour le 5 mai 2015, dans la procédure

Stock ‘94 Szolgáltató Zrt.

contre

Nemzeti Adó- és Vámhivatal Dél-dunántúli Regionális Adó Főigazgatósága,

LA COUR (cinquième chambre),

composée de M. J. L. da Cruz Vilaça (rapporteur), président de chambre, Mme M. Berger, MM. A. Borg Barthet, E. Levits et F. Biltgen, juges,

avocat général : M. H. Saugmandsgaard Øe,

greffier : M. I. Illéssy, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 7 juillet 2016,

considérant les observations présentées :

pour Stock ‘94 Szolgáltató Zrt., par Mes Z. Várszegi et A. Kis, ügyvédek,

pour le gouvernement hongrois, par MM. M. Z. Fehér, G. Koós et M. Bóra, en qualité d’agents,

pour la Commission européenne, par MM. L. Havas et R. Lyal ainsi que par Mme C. Soulay, en qualité d’agents,

vu la décision prise, l’avocat général entendu, de juger l’affaire sans conclusions,

rend le présent

Arrêt

1

La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 1er, paragraphe 2, l’article 2, paragraphe 1, sous a) et c), l’article 14, paragraphe 1, l’article 24, paragraphe 1, l’article 73, l’article 78, sous b), ainsi que l’article 135, paragraphe 1, sous b), de la directive 2006/112/CE, du Conseil, du 28 novembre 2006, relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée (JO 2006, L 347, p. 1, ci-après la « directive TVA »).

2

Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant Stock ‘94 Szolgáltato Zrt. à la Nemzeti Adó- és Vámhivatal Dél-dunántúli Regionális Adó Főigazgatósága (direction générale des douanes et des finances de la région de Transdanubie méridionale, relevant de l’Administration nationale des impôts et douanes, Hongrie, ci-après la « direction générale »), au sujet du régime de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) applicable à une opération dite de « coopération intégrée ».

Le cadre juridique

Le droit de l’Union

3

L’article 1er, paragraphe 2, de la directive TVA dispose :

« Le principe du système commun de TVA est d’appliquer aux biens et aux services un impôt général sur la consommation exactement proportionnel au prix des biens et des services, quel que soit le nombre des opérations intervenues dans le processus de production et de distribution antérieur au stade d’imposition.

À chaque opération, la TVA, calculée sur le prix du bien ou du service au taux applicable à ce bien ou à ce service, est exigible déduction faite du montant de la taxe qui a grevé directement le coût des divers éléments constitutifs du prix. »

4

En application de l’article 2, paragraphe 1, sous a) et c), de cette directive, sont soumises à la TVA, respectivement, « les livraisons de biens effectuées à titre onéreux sur le territoire d’un État membre par un assujetti agissant en tant que tel » et « les prestations de services, effectuées à titre onéreux sur le territoire d’un État membre par un assujetti agissant en tant que tel ».

5

L’article 14, paragraphe 1, de ladite directive définit la livraison de biens comme « le transfert du pouvoir de disposer d’un bien corporel comme un propriétaire ».

6

Aux termes de l’article 24, paragraphe 1, de la même directive :

« Est considérée comme “prestation de services” toute opération qui ne constitue pas une livraison de biens. »

7

L’article 73 de la directive TVA prévoit :

« Pour les livraisons de biens et les prestations de services autres que celles visées aux articles 74 à 77, la base d’imposition comprend tout ce qui constitue la contrepartie obtenue ou à obtenir par le fournisseur ou le prestataire pour ces opérations de la part de l’acquéreur, du preneur ou d’un tiers, y compris les subventions directement liées au prix de ces opérations ».

8

L’article 78, sous b), de cette directive dispose :

« Sont à comprendre dans la base d’imposition les éléments suivants :

[...]

b)

les frais accessoires, tels que les frais de commission, d’emballage, de transport et d’assurance demandés par le fournisseur à l’acquéreur ou au preneur.[...] »

9

L’article 135, paragraphe 1, sous b), de ladite directive prévoit :

« 1.   Les États membres exonèrent les opérations suivantes :

[...]

b)

l’octroi et la négociation de crédits ainsi que la gestion de crédits effectuée par celui qui les a octroyés ».

Le droit hongrois

10

En vertu de l’article 2, sous a), de l’az általános forgalmi adóról szóló 2007. évi CXXVII. törvény (loi no CXXVII de 2007 relative à la taxe sur la valeur ajoutée, ci-après la « loi relative à la TVA »), sont soumises aux impôts prévus par celle-ci « les livraisons de biens et les prestations de services effectuées à titre onéreux sur le territoire d’un État membre par un assujetti agissant en tant que tel ».

11

À cet égard, l’article 9, paragraphe 1, de la loi relative à la TVA définit la livraison de biens comme « le transfert du pouvoir de disposer d’un bien corporel comme un propriétaire, ou toute autre opération produisant un tel effet juridique au regard de l’acquisition d’un bien corporel ». Il ressort de l’article 13, paragraphe 1, de cette loi que la prestation de services s’entend de « toute opération qui ne constitue pas une livraison de biens au sens de la présente loi ».

12

L’article 65 de la loi relative à la TVA dispose :

« Pour les livraisons de biens et les prestations de services, la base d’imposition est, à moins que la présente loi n’en dispose autrement, constituée de la contrepartie pécuniaire obtenue ou à obtenir par qui de droit de la part de l’acquéreur du bien, du preneur du service ou d’un tiers, en ce compris toute subvention, quelle qu’en soit la forme, qui influence directement le prix de la livraison ou de la prestation. »

13

L’article 70, paragraphe 1, sous b), de cette loi, prévoit que, pour les livraisons de biens et les prestations de services, la base imposable comprend « les frais accessoires que le fournisseur du bien ou le prestataire du service a répercutés sur l’acquéreur du bien ou sur le preneur du service, notamment les frais de commission ou tout autre type d’intermédiation, d’emballage, de transport et d’assurance ».

14

Selon l’article 86, paragraphe 1, sous b), de la loi relative à la TVA, sont exonérés de la TVA « l’octroi et la négociation de crédits, de prêts d’argent et d’autres services constitutifs d’un tel rapport de droit, ainsi que la gestion de crédits effectuée par celui qui les a octroyés ».

Le litige au principal et les questions préjudicielles

15

Stock ‘94 est une société commerciale établie en Hongrie. Elle opère en tant qu’« intégrateur » dans le cadre d’une institution propre au système agricole hongrois dite de « coopération intégrée ». Cette institution est régie par le principe suivant lequel l’intégrateur conclut un contrat avec un agriculteur, à savoir le « sujet intégré », par lequel il lui octroie un prêt que ce dernier utilise pour acheter, auprès de l’intégrateur, des moyens nécessaires à son activité de producteur, tels que les semences, dénommés les « actifs circulants ». Le sujet intégré vend ensuite sa production soit à l’intégrateur, soit sur le marché, par l’intermédiaire de ce dernier.

16

En l’occurrence, Stock ‘94 a conclu avec différents producteurs agricoles des contrats d’intégration en vertu desquels, d’une part, elle s’engageait à soutenir, notamment d’un point de vue technologique, la production des agriculteurs ainsi qu’à financer l’achat des actifs circulants nécessaires à cette fin. D’autre part, ces agriculteurs s’engageaient à cultiver les produits concernés sur certaines superficies et à utiliser les prêts consentis par l’intégrateur uniquement pour l’achat des actifs circulants auprès de celui-ci.

17

Stock ‘94 a facturé la vente des actifs circulants aux agriculteurs en appliquant aux livraisons un taux de TVA de 25 %. En revanche, cette société a exonéré de la TVA les intérêts, facturés sur base trimestrielle, perçus en rapport avec les prêts accordés aux agriculteurs pour l’achat des actifs circulants. Au mois de juin 2011, le montant des intérêts perçus en vertu des contrats de financement des actifs circulants s’élevait à 149846000 forints hongrois (HUF) (environ 483500 euros).

18

Lors d’un contrôle fiscal des déclarations de TVA sur cette période, effectué a posteriori par l’autorité fiscale hongroise de premier degré, celle-ci a constaté l’existence, s’agissant des intérêts perçus sur les prêts, d’un différentiel de TVA s’élevant à 37462000 HUF (environ 121000 euros). Par conséquent, elle a enjoint à Stock ‘94 de s’acquitter de cette somme, majorée des intérêts de retard, et lui a également infligé une amende fiscale.

19

La direction générale a confirmé sur le fond la décision de l’autorité de premier degré, en constatant que les prêts destinés à l’achat des actifs circulants étaient des éléments intrinsèques du service de coopération intégrée fourni par Stock ‘94. Par conséquent, elle a estimé que le même taux de TVA devait être appliqué aux livraisons des actifs circulants aussi bien qu’aux prêts. Elle a cependant réduit le montant de la somme à verser à 17588000 HUF (environ 56500 euros).

20

La juridiction de première instance a confirmé la position de la direction générale. À cet égard, elle a constaté que les prêts qui ont été consentis ne pouvaient être utilisés que pour l’achat d’actifs circulants auprès de Stock ‘94, si bien que les crédits et la livraison des actifs circulants dont bénéficiaient les agriculteurs constituaient deux éléments intrinsèques du service complexe de coopération intégrée fourni par cette société. Cette juridiction a jugé, en outre, que de telles prestations avaient le même objectif et que les intérêts des crédits utilisés pour l’achat des actifs circulants étaient de simples frais accessoires de la livraison de ces actifs, celle-ci étant la prestation principale dans le cadre de l’opération complexe en cause. Par conséquent, la contrepartie facturée au titre de la prestation accessoire devait partager le régime fiscal de la livraison des actifs circulants.

21

Saisie d’un recours en cassation formé par Stock ‘94 contre le jugement rendu en première instance, la Kúria (Cour suprême, Hongrie) demande si elle doit considérer, au regard de la TVA, la livraison des actifs circulants et l’octroi d’un prêt comme deux opérations distinctes et indépendantes l’une de l’autre ou comme une opération unique. Dans l’hypothèse où ces deux prestations devraient être regardées comme une opération unique, la juridiction de renvoi se demande dans quelles conditions la coopération intégrée constitue une exception au principe de la généralité de la TVA.

22

C’est dans ces conditions que la Kúria (Cour suprême) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :

« 1)

Faut-il interpréter l’article 1er, paragraphe 2, l’article 2, paragraphe 1, sous a) et c), l’article 14, paragraphe 1, l’article 24, paragraphe 1, l’article 73, l’article 78, sous b), ainsi que l’article 135, paragraphe 1, sous b), de la directive TVA en ce sens qu’une livraison de biens et l’octroi d’un prêt effectués sur le fondement d’un contrat conclu entre un intégrateur et un sujet intégré sont des opérations distinctes et indépendantes (“distinct and independent”) au regard de l’imposition à la TVA ou en ce sens qu’elles forment à cet égard une opération unique (“single”), la base d’imposition étant alors constituée de la contrevaleur du bien et des intérêts du prêt octroyé ?

2)

Si la seconde interprétation suggérée est conforme à la directive TVA, ladite directive peut-elle alors, en ce qui concerne une opération unique (single) comportant à la fois une livraison de biens soumise à la TVA et une prestation de services exonérée de la TVA, être interprétée en ce sens que l’opération en question constitue une exception par rapport au principe de généralité de la TVA ? Et, dans l’affirmative, quels en sont les critères ?

3)

La réponse aux questions précédentes sera-t-elle différente et, dans l’affirmative, dans quelle mesure, si l’intégrateur, sur la base du contrat, peut fournir au sujet intégré, à la demande de celui-ci, des services supplémentaires et/ou peut acheter sa production agricole ? »

Sur les questions préjudicielles

23

Par ses questions, qu’il y a lieu d’examiner ensemble, la juridiction de renvoi demande, en substance, si la directive TVA doit être interprétée en ce sens que l’octroi d’un prêt affecté à l’achat de biens agricoles et la livraison de ces biens, dans le cadre d’une opération de coopération agricole intégrée, sont à considérer comme une opération complexe unique ou comme des opérations distinctes et indépendantes, au sens de cette directive, compte tenu également de la faculté dont dispose l’intégrateur de fournir des services supplémentaires et d’acheter la production agricole des sujets intégrés.

24

Si les deux prestations devaient être considérées comme une opération complexe unique, la juridiction de renvoi demande, ensuite, quels sont les critères permettant d’établir si l’opération de coopération intégrée peut être considérée comme une exception au principe de la généralité de la TVA.

25

Or, ainsi que l’a fait valoir la Commission dans ses observations écrites, il convient d’interpréter cette dernière question comme visant à établir quelle prestation, du prêt ou de la livraison de biens, détermine le régime applicable à l’opération de coopération intégrée. En effet, dès lors que les prestations accessoires partagent le traitement de la principale en matière de TVA (arrêt du 2 décembre 2010, Everything Everywhere, C‑276/09, EU:C:2010:730, point 24), dans l’hypothèse où l’octroi d’un prêt constituerait la prestation principale, l’entière opération devrait être exonérée de la TVA en application de l’article 135, paragraphe 1, sous b), de la directive TVA.

26

À cet égard, il convient de rappeler que, aux fins de la TVA, chaque prestation doit normalement être considérée comme distincte et indépendante, ainsi qu’il découle de l’article 1er, paragraphe 2, deuxième alinéa, de la directive TVA (arrêt du 16 avril 2015, Wojskowa Agencja Mieszkaniowa w Warszawie, C‑42/14, EU:C:2015:229, point 30 et jurisprudence citée).

27

Néanmoins, dans certaines circonstances, plusieurs prestations formellement distinctes, qui pourraient être fournies séparément et, ainsi, donner lieu, séparément, à taxation ou à exonération, doivent être considérées comme une opération unique lorsqu’elles ne sont pas indépendantes. Il s’agit d’une opération unique, notamment, lorsque deux ou plusieurs éléments ou actes fournis par l’assujetti sont si étroitement liés qu’ils forment, objectivement, une seule prestation économique indissociable dont la décomposition revêtirait un caractère artificiel. Tel est également le cas lorsqu’une ou plusieurs prestations constituent une prestation principale et que la ou les autres prestations constituent une ou plusieurs prestations accessoires partageant ainsi le sort fiscal de la prestation principale. Une prestation doit notamment être considérée comme accessoire à une prestation principale lorsqu’elle constitue pour la clientèle non pas une fin en soi, mais le moyen de bénéficier dans les meilleures conditions du service principal du prestataire (arrêt du 16 avril 2015, Wojskowa Agencja Mieszkaniowa w Warszawie, C‑42/14, EU:C:2015:229, point 31 et jurisprudence citée).

28

Afin de déterminer si les prestations fournies constituent plusieurs prestations indépendantes ou une prestation unique aux fins de la TVA, il importe de rechercher les éléments caractéristiques de l’opération concernée (arrêts du 17 janvier 2013, BGŻ Leasing, C‑224/11, EU:C:2013:15, point 32, et du 16 avril 2015, Wojskowa Agencja Mieszkaniowa w Warszawie, C‑42/14, EU:C:2015:229, point 32).

29

À cet égard, il convient de relever, d’une part, que, pour déterminer si une opération qui comporte plusieurs prestations constitue une opération unique aux fins de la TVA, la Cour tient compte de l’objectif économique de cette opération (voir, en ce sens, arrêts du 19 novembre 2009, Don Bosco Onroerend Goed, C‑461/08, EU:C:2009:722, point 39 ; du 28 octobre 2010, Axa UK, C‑175/09, EU:C:2010:646, point 23, et du 27 septembre 2012, Field Fisher Waterhouse, C‑392/11, EU:C:2012:597, point 23). Dans son analyse, la Cour prend également en compte l’intérêt des destinataires des prestations (voir, en ce sens, arrêt du 16 avril 2015, Wojskowa Agencja Mieszkaniowa w Warszawie, C‑42/14, EU:C:2015:229, point 35).

30

D’autre part, il importe de rappeler que, dans le cadre de la coopération instituée en vertu de l’article 267 TFUE, il appartient aux juridictions nationales de déterminer si l’assujetti fournit une prestation unique dans une espèce particulière et de porter toutes appréciations de fait définitives à cet égard. Toutefois, il incombe à la Cour de fournir auxdites juridictions tous les éléments d’interprétation relevant du droit de l’Union qui peuvent être utiles au jugement de l’affaire dont elles sont saisies (arrêt du 17 janvier 2013, BGŻ Leasing, C‑224/11, EU:C:2013:15, point 33 et jurisprudence citée).

31

En l’occurrence, en premier lieu, il ressort de la décision de renvoi que l’opération de coopération intégrée en cause au principal est régie par le principe selon lequel l’intégrateur octroie un prêt à un sujet intégré, que celui-ci ne peut utiliser que pour acheter des actifs circulants auprès de l’intégrateur.

32

Dans ces conditions, l’octroi de tels prêts ne constitue pas une prestation ayant un intérêt autonome dans la perspective des sujets intégrés (voir, en ce sens, arrêt du 2 décembre 2010, Everything Everywhere, C‑276/09, EU:C:2010:730, point 27), dans la mesure où ces ressources financières ne peuvent être librement utilisées.

33

En deuxième lieu, ainsi que Stock ‘94 l’admet elle-même dans ses observations, ne disposant pas d’une autorisation pour agir en qualité d’établissement de crédit, elle ne pouvait accorder de prêts aux sujets intégrés sans que ces prêts soient destinés à l’achat de ses actifs circulants.

34

En troisième lieu, il ressort de la décision de renvoi que la livraison des actifs circulants et le prêt poursuivent le même objectif économique, à savoir, en substance, la mise en place d’un soutien financier et logistique aux agriculteurs, leur permettant d’exercer une activité de production agricole. À cet égard, il importe de rappeler que, selon les conditions générales régissant la coopération intégrée en cause au principal, telles que résumées dans la décision de renvoi, Stock ‘94 s’est engagée à soutenir l’activité de production des sujets intégrés et à financer les achats des actifs circulants nécessaires à cette fin.

35

Dans ces conditions, la livraison de ces actifs circulants constitue, pour les sujets intégrés, la prestation principale relevant de la coopération intégrée, dans la mesure où les agriculteurs seront en mesure de poursuivre leur activité agricole grâce à ces actifs. Ainsi, l’obtention d’un prêt pour l’acquisition de ces actifs constitue, pour ces agriculteurs, non pas une fin en soi, mais uniquement un moyen permettant à ces derniers d’acquérir les actifs circulants nécessaires à leur production agricole.

36

Il appartient à la juridiction de renvoi de vérifier si l’opération de coopération intégrée en cause au principal présente effectivement l’objectif économique évoqué au point 34 du présent arrêt, ainsi que d’établir si la livraison des actifs circulants revêt une telle importance fondamentale pour les sujets intégrés.

37

Si tel devait être le cas, la livraison des actifs circulants et l’octroi d’un prêt destiné à l’achat de ces actifs sont à considérer comme constituant une opération complexe unique aux fins de la TVA, la prestation principale étant la livraison de ces actifs.

38

Enfin, en quatrième lieu, compte tenu de ce qui est exposé aux points 31 à 37 du présent arrêt, la circonstance que Stock ‘94 puisse, de manière facultative, offrir des services supplémentaires aux sujets intégrés ainsi qu’acheter leur production agricole est sans incidence sur la solution exposée au point 37 de cet arrêt.

39

Eu égard à l’ensemble de ces considérations, il convient de répondre aux questions préjudicielles que la directive TVA doit être interprétée en ce sens que :

une opération de coopération agricole intégrée prévoyant qu’un opérateur économique livre des biens à un agriculteur et lui octroie un prêt destiné à l’achat de ces biens, constitue une opération unique aux fins de cette directive, dans laquelle la livraison des biens est la prestation principale. La base d’imposition de ladite opération unique est constituée tant par le prix desdits biens que par les intérêts payés sur les prêts octroyés aux agriculteurs ;

le fait qu’un intégrateur puisse fournir aux agriculteurs des services supplémentaires ou puisse acheter leur production agricole est sans incidence sur la qualification de l’opération en cause d’opération unique, aux fins de la directive TVA.

Sur les dépens

40

La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

 

Par ces motifs, la Cour (cinquième chambre) dit pour droit :

 

La directive 2006/112/CE du Conseil, du 28 novembre 2006, relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée, doit être interprétée en ce sens que :

 

une opération de coopération agricole intégrée prévoyant qu’un opérateur économique livre des biens à un agriculteur et lui octroie un prêt destiné à l’achat de ces biens, constitue une opération unique aux fins de cette directive, dans laquelle la livraison des biens est la prestation principale. La base d’imposition de ladite opération unique est constituée tant par le prix desdits biens que par les intérêts payés sur les prêts octroyés aux agriculteurs ;

 

le fait qu’un intégrateur puisse fournir aux agriculteurs des services supplémentaires ou puisse acheter leur production agricole est sans incidence sur la qualification de l’opération en cause d’opération unique, aux fins de la directive 2006/112.

 

Signatures


( *1 ) Langue de procédure : le hongrois.