C-368/21 - Hauptzollamt Hamburg

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ARRÊT DE LA COUR (neuvième chambre)

8 septembre 2022 (*)

« Renvoi préjudiciel – Union douanière – Code des douanes de l’Union – Règlement (UE) no 952/2013 – Règlement (UE) 2015/2446 – Lieu de naissance de la dette douanière – Taxe sur la valeur ajoutée (TVA) – Directive 2006/112/CE – Article 30 – Article 60 – Article 71, paragraphe 1 – Fait générateur et exigibilité de la TVA à l’importation – Lieu de naissance de la dette fiscale – Constatation de l’inobservation d’une obligation imposée par la législation douanière de l’Union – Détermination du lieu d’importation des biens – Moyen de transport immatriculé dans un pays tiers et introduit dans l’Union européenne contrairement à la réglementation douanière »

Dans l’affaire C‑368/21,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Finanzgericht Hamburg (tribunal des finances de Hambourg, Allemagne), par décision du 2 juin 2021, parvenue à la Cour le 14 juin 2021, dans la procédure

R.T.

contre

Hauptzollamt Hamburg,

LA COUR (neuvième chambre),

composée de M. S. Rodin, président de chambre, M. J.‑C. Bonichot et Mme O. Spineanu‑Matei (rapporteure), juges,

avocat général : M. G. Pitruzzella,

greffier : M. A. Calot Escobar,

vu la procédure écrite,

considérant les observations présentées :

–        pour R.T., par Mes Y. Özkan et U. Schrömbges, Rechtsanwälte,

–        pour la Commission européenne, par Mmes F. Clotuche-Duvieusart et J. Jokubauskaitė, ainsi que par M. R. Pethke, en qualité d’agents,

vu la décision prise, l’avocat général entendu, de juger l’affaire sans conclusions,

rend le présent

Arrêt

1        La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation des articles 30 et 60 de la directive 2006/112/CE du Conseil, du 28 novembre 2006, relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée (JO 2006, L 347, p. 1), telle que modifiée par la directive (UE) 2018/2057 du Conseil, du 20 décembre 2018 (JO 2018, L 329, p. 3) (ci-après la « directive 2006/112 »).

2        Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant R.T. au Hauptzollamt Hamburg (bureau principal des douanes de Hambourg, Allemagne, ci-après le « bureau des douanes ») au sujet de l’imposition de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) à l’importation sur un véhicule introduit sur le territoire de l’Union européenne en infraction à la réglementation douanière.

 Le cadre juridique

 Le droit de l’Union

 La directive 2006/112

3        Aux termes de l’article 2, paragraphe 1, sous d), de la directive 2006/112 sont soumises à la TVA, notamment, les opérations suivantes :

« [...]

d)      les importations de biens. »

4        L’article 30, premier alinéa, de cette directive dispose :

« Est considérée comme “importation de biens” l’introduction dans la Communauté d’un bien qui n’est pas en libre pratique au sens de l’article 24 du traité. »

5        L’article 60 de la même directive, qui relève du chapitre 4 de celle-ci, intitulé « Lieu des importations de biens », figurant sous le titre V, intitulé « Lieu des opérations imposables », énonce :

« L’importation de biens est effectuée dans l’État membre sur le territoire duquel le bien se trouve au moment où il est introduit dans la Communauté. »

6        Sous le chapitre 4, intitulé « Importations de biens », du titre VI, intitulé « Fait générateur et exigibilité de la taxe », l’article 71 de la directive 2006/112 est ainsi libellé :

« 1.      Lorsque des biens relèvent depuis leur introduction dans la Communauté de l’un des régimes ou de l’une des situations visés aux articles 156, 276 et 277, ou d’un régime d’admission temporaire en exonération totale de droits à l’importation ou de transit externe, le fait générateur et l’exigibilité de la taxe n’interviennent qu’au moment où les biens sortent de ces régimes ou situations.

Toutefois, lorsque les biens importés sont soumis à des droits de douane, [...] le fait générateur intervient et la taxe devient exigible au moment où interviennent le fait générateur et l’exigibilité de ces droits.

2.      Dans les cas où les biens importés ne sont soumis à aucun des droits visés au paragraphe 1, deuxième alinéa, les États membres appliquent les dispositions en vigueur en matière de droits de douane pour ce qui concerne le fait générateur et l’exigibilité de la taxe. »

 Le code des douanes

7        Aux termes de l’article 79, paragraphe 1, sous a), du règlement (UE) no 952/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 9 octobre 2013, établissant le code des douanes de l’Union (JO 2013, L 269, p. 1, ci-après le « code des douanes ») :

« Une dette douanière naît à l’importation, dans la mesure où les marchandises sont passibles de droits à l’importation, par suite de l’inobservation :

a)       soit d’une des obligations définies dans la législation douanière applicable à l’introduction de marchandises non Union dans le territoire douanier de l’Union, à leur soustraction à la surveillance douanière, ou à la circulation, à la transformation, au stockage, au dépôt temporaire, à l’admission temporaire ou à la disposition de ces marchandises dans ce territoire ; 

[...] »

8        L’article 87, intitulé « Lieu de naissance de la dette douanière », de ce règlement dispose :

« 1. La dette douanière prend naissance au lieu où est déposée la déclaration en douane ou la déclaration de réexportation visées aux articles 77, 78 et 81.

Dans tous les autres cas, la dette douanière prend naissance au lieu où se produisent les faits qui sont à l’origine de cette dette.

S’il n’est pas possible de déterminer ce lieu, la dette douanière prend naissance au lieu où les autorités douanières constatent que les marchandises se trouvent dans une situation ayant fait naître une dette douanière.

[...]

4. Si une autorité douanière établit qu’une dette douanière prend naissance, en vertu des articles 79 ou 82, dans un autre État membre et que le montant de droits à l’importation ou à l’exportation correspondant à cette dette est inférieur à 10 000 [euros], la dette douanière en question est considérée comme ayant pris naissance dans l’État membre où la constatation en a été faite. »

 Le droit allemand 

9        L’article 21, paragraphe 2, de l’Umsatzsteuergesetz (loi relative à la taxe sur le chiffre d’affaires), du 21 février 2005 (BGBl. 2005 I, p. 386) dispose :

« Les règles applicables aux droits de douane s’appliquent mutatis mutandis à la taxe sur le chiffre d’affaires à l’importation ; [...] »

 Le litige au principal et les questions préjudicielles

10      Au mois de janvier 2019, R.T., domicilié en Allemagne, a acquis, en Géorgie, un véhicule et l’y a immatriculé. Au mois de mars 2019, R.T. s’est rendu à bord de ce véhicule de la Géorgie vers l’Allemagne, en passant par la Turquie, la Bulgarie, la Serbie, la Hongrie et l’Autriche, sans avoir déclaré ledit véhicule auprès d’un bureau de douane d’importation.

11      En Allemagne, R.T. a utilisé le véhicule, qui a été remarqué, le 28 mars 2019, dans le cadre d’un contrôle par une unité de contrôle du bureau des douanes. Il a également été remarqué, à l’occasion d’une infraction au code de la route, au mois d’octobre 2020.

12      Le 13 mai 2019, le bureau des douanes a imposé à R.T., par un avis de fixation des droits à l’importation, un montant de 4 048,13 euros au titre des droits de douane et un montant de 8 460,59 euros au titre de la TVA à l’importation.

13      Sa réclamation auprès du bureau des douanes ayant été rejetée, R.T. a introduit, le 9 février 2020, un recours en annulation contre cet avis devant le Finanzgericht Hamburg (tribunal des finances de Hambourg, Allemagne). En cours de procédure, il a décidé de ne contester que la décision fixant le montant de la TVA à l’importation.

14      N’ayant pas de doutes sur la compétence des autorités allemandes pour recouvrer la dette douanière, la juridiction de renvoi cherche à savoir si le bureau des douanes a également compétence pour fixer le montant de la TVA à l’importation. Selon cette juridiction, tel est le cas s’il résulte de l’interprétation des articles 30 et 60 de la directive 2006/112 que le lieu de l’importation se situe en Allemagne en dépit du fait que le requérant au principal est entré sur le territoire de l’Union en Bulgarie.

15      S’agissant de l’interprétation des articles 30 et 60 de la directive 2006/112, portant sur la notion et le lieu de l’« importation », la juridiction de renvoi est d’avis que l’inobservation des obligations imposées par la réglementation douanière commise dans un État membre n’a pour effet de faire naître la TVA à l’importation dans cet État membre que si la marchandise concernée a également été importée dans cet État membre, au sens du droit relatif à la TVA.

16      Cette juridiction considère que, conformément à la jurisprudence de la Cour telle qu’elle est appliquée par les tribunaux des finances allemands, le lieu de l’importation, tel que défini à l’article 60 de la directive 2006/112, doit, en l’occurrence, se trouver en Bulgarie, dès lors que le véhicule y a été utilisé pour la première fois. La TVA à l’importation aurait donc pris naissance, en principe, dans cet État membre, excepté s’il devait être admis que ce véhicule était « destiné à la consommation » en Allemagne, en application des enseignements des arrêts du 2 juin 2016, Eurogate Distribution et DHL Hub Leipzig, C‑226/14 et C‑228/14, EU:C:2016:405, point 65, du 1er juin 2017, Wallenborn Transports, C‑571/15, EU:C:2017:417, point 54, ainsi que du 10 juillet 2019, Federal Express Corporation Deutsche Niederlassung, C‑26/18, EU:C:2019:579, point 44.

17      Cependant, selon la juridiction de renvoi, la jurisprudence mentionnée au point précédent – qui consacre l’idée de la destination à consommation – a été rendue au sujet de biens qui avaient été transportés, alors que, dans l’affaire en cause au principal, il s’agit d’un véhicule utilisé en tant que moyen de transport. À cet égard, plusieurs juridictions allemandes spécialisées auraient compris la jurisprudence susmentionnée en ce sens que les moyens de transport entrent dans le circuit économique de l’Union dans l’État membre sur le territoire duquel ils sont effectivement utilisés pour la première fois.

18      Suivant cette approche, le véhicule du requérant au principal devrait donc, selon la juridiction de renvoi, être considéré comme étant entré dans le circuit économique de l’Union en Bulgarie dès lors que c’est dans cet État membre qu’il a été utilisé pour la première fois. Par conséquent, ce serait en Bulgarie que se situerait le lieu de l’importation de ce véhicule, au sens de l’article 60 de la directive 2006/112.

19      Toutefois, une telle conclusion apparaîtrait être contraire à celle découlant de l’arrêt du 3 mars 2021, Hauptzollamt Münster (Lieu de naissance de la TVA) (C‑7/20, EU:C:2021:161), dans lequel la Cour aurait décidé que, malgré le fait que le véhicule était entré matériellement sur le territoire douanier de l’Union par la Bulgarie, il avait effectivement été utilisé en Allemagne, État membre de résidence du requérant au principal.

20      Dans l’hypothèse où le lieu de l’importation du véhicule en cause se situerait dans un autre État membre que la République fédérale d’Allemagne, la juridiction de renvoi pose une seconde question préjudicielle afin de savoir si la fiction de l’article 87, paragraphe 4, du code des douanes confère compétence aux autorités douanières allemandes pour fixer le montant de la TVA à l’importation.

21      À cet égard, cette juridiction s’interroge sur la question de savoir si l’application mutatis mutandis de cette disposition, imposée à l’article 21, paragraphe 2, de la loi relative à la taxe sur le chiffre d’affaires, contrevient à la directive 2006/112.

22      Dans ces circonstances, le Finanzgericht Hamburg (tribunal des finances de Hambourg) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :

« 1)      Convient-il d’interpréter les articles 30 et 60 de la directive [2006/112] en ce sens que, aux fins de la [TVA], le lieu de l’importation d’un moyen de transport immatriculé dans un État tiers et introduit dans l’Union en infraction à la réglementation douanière, se situe dans l’État membre dans lequel l’infraction douanière a été commise et dans lequel le moyen de transport en cause a été utilisé pour la première fois comme moyen de transport dans l’Union, ou dans l’État membre dans lequel l’auteur de l’inobservation des obligations imposées par la réglementation douanière réside et utilise le véhicule ?

2)      Dans l’hypothèse où le lieu de l’importation se situerait dans un État membre autre que la République fédérale d’Allemagne : le fait qu’une disposition de droit national déclare l’article 87, paragraphe 4, du [code des douanes] applicable mutatis mutandis à la [TVA] à l’importation contrevient-il à la directive 2006/112 et notamment à ses articles 30 et 60 ? »

 Sur les questions préjudicielles

 Sur la première question

23      Par sa première question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si les articles 30 et 60 de la directive 2006/112 doivent être interprétés en ce sens que, aux fins de la TVA, le lieu de l’importation d’un véhicule immatriculé dans un État tiers et introduit dans l’Union en infraction à la réglementation douanière se situe dans l’État membre dans lequel cette infraction a été commise et où ce véhicule a été utilisé pour la première fois dans l’Union ou dans l’État membre dans lequel l’auteur de l’inobservation des obligations imposées par la réglementation douanière réside et utilise effectivement le véhicule.

24      Conformément à l’article 2, paragraphe 1, sous d), de la directive 2006/112, sont soumises à la TVA les importations de biens. En vertu de l’article 30, premier alinéa, de cette directive, est considérée comme constituant une importation de biens l’introduction dans l’Union d’un bien qui n’est pas en libre pratique. En ce qui concerne le lieu de l’importation, l’article 60 de ladite directive dispose que celle-ci est réalisée dans l’État membre sur le territoire duquel le bien se trouve à la date à laquelle il est introduit dans l’Union.

25      Lorsque les biens importés sont soumis à des droits de douane, l’article 71, paragraphe 1, second alinéa, de la directive 2006/112 autorise les États membres à lier le fait générateur et l’exigibilité de la TVA à l’importation à ceux des droits de douane. En effet, la TVA à l’importation et les droits de douane présentent des traits essentiels comparables en ce qu’ils prennent naissance du fait de l’importation dans l’Union et de l’introduction consécutive des marchandises dans le circuit économique des États membres (voir, en ce sens, arrêt du 7 avril 2022, Kauno teritorinė muitinė, C‑489/20, EU:C:2022:277, point 47 et jurisprudence citée).

26      Ainsi, une dette de TVA peut s’ajouter à la dette douanière si le comportement illicite qui a engendré cette dernière permettait de présumer que les marchandises concernées sont entrées dans le circuit économique de l’Union et ont pu faire l’objet de consommation, déclenchant ainsi le fait générateur de la TVA (arrêt du 7 avril 2022, Kauno teritorinė muitinė, C‑489/20, EU:C:2022:277, point 48 et jurisprudence citée).

27      Cependant, cette présomption peut être renversée s’il est établi que, en dépit des manquements à la réglementation douanière, qui entraînent la naissance d’une dette douanière à l’importation dans l’État membre où ces manquements ont été commis, un bien a été introduit dans le circuit économique de l’Union sur le territoire d’un autre État membre, dans lequel ce bien était destiné à la consommation. Dans ce cas, le fait générateur de la TVA à l’importation survient dans cet autre État membre [arrêt du 3 mars 2021, Hauptzollamt Münster (Lieu de naissance de la TVA), C‑7/20, EU:C:2021:161, point 31 ainsi que jurisprudence citée].

28      Ainsi, dans une affaire concernant des biens qui avaient fait l’objet de manquements à la réglementation douanière sur le territoire allemand, où ils avaient seulement été transbordés d’un avion à l’autre avant d’être acheminés en Grèce, la Cour a considéré que c’est dans cet État membre que les biens en cause étaient entrés dans le circuit économique de l’Union et que la TVA à l’importation y afférente avait pris naissance, dès lors que cet État membre constituait leur destination finale ainsi que le lieu où ils avaient été consommés (voir, en ce sens, arrêt du 10 juillet 2019, Federal Express Corporation Deutsche Niederlassung, C‑26/18, EU:C:2019:579, point 53).

29      La Cour a également jugé qu’un véhicule particulier, introduit en infraction à la réglementation douanière, devait être considéré comme étant entré dans le circuit économique dans l’État membre de résidence de l’assujetti, dès lors que ce véhicule avait été utilisé effectivement dans cet État membre, même si, lors de son trajet d’un pays tiers vers cet État membre, ce véhicule était matériellement entré sur le territoire douanier de l’Union par un autre État membre. Par conséquent, c’est dans ce premier État membre que la TVA à l’importation avait pris naissance [voir, en ce sens, arrêt du 3 mars 2021, Hauptzollamt Münster (Lieu de naissance de la TVA), C‑7/20, EU:C:2021:161, points 34 et 35].

30      En l’occurrence, il ressort de la demande de décision préjudicielle, sous réserve de vérification par la juridiction de renvoi, que R.T., lors de son trajet de la Géorgie vers l’Allemagne effectué au mois de mars 2019, a conduit sa voiture via la Bulgarie en passant ensuite par la Serbie, la Hongrie et l’Autriche. R.T. aurait sa résidence en Allemagne où il a utilisé ce véhicule à partir du mois de mars 2019 et, à tout le moins, jusqu’au mois d’octobre 2020.

31      Eu égard aux enseignements de l’arrêt du 3 mars 2021, Hauptzollamt Münster (Lieu de naissance de la TVA) (C‑7/20, EU:C:2021:161), rapportés au point 28 du présent arrêt, il convient de considérer que ce véhicule, nonobstant sa première utilisation et son entrée physique sur le territoire de l’Union en Bulgarie à des fins de transit, a été effectivement utilisé dans l’État membre de sa destination, en l’occurrence en Allemagne. Par conséquent, dans la mesure où le véhicule est entré dans le circuit économique de l’Union dans ce dernier État membre, l’importation de celui-ci, au titre des articles 30 et 60 de la directive 2006/112, a eu lieu dans le même État membre.

32      Cette conclusion n’est pas infirmée par la circonstance, énoncée par la juridiction de renvoi que la première utilisation du véhicule sur le territoire de l’Union en tant que moyen de transport équivaudrait à sa « consommation », fait déclencheur de la TVA, au sens de l’arrêt du 10 juillet 2019, Federal Express Corporation Deutsche Niederlassung (C‑26/18, EU:C:2019:579, point 44), ou constituerait, au moins, une étape dans cette consommation, ce qui impliquerait que, en l’occurrence, le véhicule était entré dans le circuit économique de l’Union en Bulgarie.

33      En effet, ainsi qu’il découle de l’arrêt du 10 juillet 2019, Federal Express Corporation Deutsche Niederlassung (C‑26/18, EU:C:2019:579, point 48), nonobstant son entrée matérielle dans un État membre, un bien peut être considéré comme ayant été introduit dans le circuit économique de l’Union sur le territoire d’un autre État membre lorsque c’est dans cet État membre que ce bien était « destiné à la consommation ». Dans ces conditions, la Cour a constaté que les biens en cause étaient entrés dans le circuit économique de l’Union dans l’État membre de leur destination finale et que, en conséquence, la TVA à l’importation afférente à ces biens avait pris naissance dans cet État membre (voir, en ce sens, arrêt du 10 juillet 2019, Federal Express Corporation Deutsche Niederlassung, C‑26/18, EU:C:2019:579, point 53).

34      Ainsi, un véhicule immatriculé dans un pays tiers qui, comme la juridiction de renvoi l’observe également, ne peut être « consommé », mais qui a été utilisé par l’assujetti pour transiter de ce pays à l’État membre de sa résidence, où le véhicule a effectivement et durablement été utilisé, peut être considéré comme étant entré dans le circuit économique de l’Union dans cet État membre. En effet, bien qu’il n’ait pas été transporté lui-même dans ledit État membre et qu’il ait été utilisé en tant que moyen de transport dans l’État membre de son entrée physique sur le territoire de l’Union, ce bien n’a été utilisé dans ce dernier État membre que pour le déplacer dans l’État membre de sa destination finale aux fins de son utilisation effective et durable dans ce dernier. À cet égard, il convient d’observer que le lieu de résidence de l’utilisateur peut servir d’indice pour une telle utilisation.

35      Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il y a lieu de répondre à la première question que les articles 30 et 60 de la directive 2006/112 doivent être interprétés en ce sens que, aux fins de la TVA, le lieu de l’importation d’un véhicule immatriculé dans un État tiers et introduit dans l’Union en infraction à la réglementation douanière se situe dans l’État membre dans lequel l’auteur de l’inobservation des obligations imposées par la réglementation douanière réside et utilise effectivement le véhicule.

 Sur la seconde question

36      Eu égard à la réponse apportée à la première question, il n’y a pas lieu de répondre à la seconde question.

 Sur les dépens

37      La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

Par ces motifs, la Cour (neuvième chambre) dit pour droit :

Les articles 30 et 60 de la directive 2006/112/CE du Conseil, du 28 novembre 2006, relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée, telle que modifiée par la directive (UE) 2018/2057 du Conseil, du 20 décembre 2018

doivent être interprétés en ce sens que :

aux fins de la taxe sur la valeur ajoutée, le lieu de l’importation d’un véhicule immatriculé dans un État tiers et introduit dans l’Union européenne en infraction à la réglementation douanière se situe dans l’État membre dans lequel l’auteur de l’inobservation des obligations imposées par la réglementation douanière réside et utilise effectivement le véhicule.


Signatures


*      Langue de procédure : l’allemand.