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Avis juridique important

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61998J0455

Arrêt de la Cour (première chambre) du 29 juin 2000. - Tullihallitus contre Kaupo Salumets et autres. - Demande de décision préjudicielle: Tampereen käräjäoikeus - Finlande. - Dispositions fiscales - Harmonisation des législations - Taxes sur le chiffre d'affaires - Système commun de taxe sur la valeur ajoutée - Sixième directive - Taxe à l'importation - Champ d'application - Importation en contrebande d'alcool éthylique. - Affaire C-455/98.

Recueil de jurisprudence 2000 page I-04993


Sommaire
Parties
Motifs de l'arrêt
Décisions sur les dépenses
Dispositif

Mots clés


Tarif douanier commun - Droits de douane - Application à l'alcool éthylique importé en contrebande de pays tiers

(Règlement du Conseil n_ 2913/92)

Dispositions fiscales - Harmonisation des législations - Taxes sur le chiffre d'affaires - Système commun de taxe sur la valeur ajoutée - Taxe à l'importation - Application à l'alcool éthylique importé en contrebande de pays tiers

(Directive du Conseil 77/388)

Dispositions fiscales - Harmonisation des législations - Droits d'accise - Directives 92/12 et 92/83 - Application à l'alcool éthylique importé en contrebande de pays tiers

(Directives du Conseil 92/12 et 92/83)

Sommaire


$$Si des importations ou des livraisons illégales de marchandises qui, en raison de leur nature même ou de leurs caractéristiques particulières, ne sont pas susceptibles d'être mises dans le commerce licite ni intégrées au circuit économique, telles que les stupéfiants ou la fausse monnaie, ne sont pas soumises aux taxes ou droits de douane normalement dus en vertu de la réglementation communautaire, le principe de neutralité fiscale s'oppose, en dehors de ces hypothèses où toute concurrence entre un secteur économique licite et un secteur illicite est exclue, à une différenciation généralisée entre les transactions licites et les transactions illicites.

S'agissant d'alcool éthylique importé en contrebande d'un pays tiers, la commercialisation de cette marchandise n'est pas interdite en raison de sa nature même ou de ses caractéristiques particulières. L'alcool éthylique ne saurait non plus être considéré comme un produit exclu du circuit économique, une concurrence pouvant s'établir entre le produit importé en contrebande et celui faisant l'objet d'opérations réalisées dans un circuit légal, dans la mesure où il existe un marché licite de l'alcool qui est justement abordé par les produits de contrebande.

Dès lors, la sixième directive 77/388, les directives 92/12 relative au régime général, à la détention, à la circulation et aux contrôles des produits soumis à accise et 92/83 concernant l'harmonisation des structures des droits d'accises sur l'alcool et les boissons alcooliques, ainsi que le règlement n_ 2913/92 établissant le code des douanes communautaire doivent être interprétés en ce sens que leurs dispositions relatives à l'imposabilité et à la dette fiscale s'appliquent également à l'importation en contrebande sur le territoire douanier communautaire d'alcool éthylique en provenance de pays tiers.

(voir points 19-20, 23-24 et disp.)

Parties


Dans l'affaire C-455/98,

ayant pour objet une demande adressée à la Cour, en application de l'article 177 du traité CE (devenu article 234 CE), par le Tampereen käräjäoikeus (Finlande) et tendant à obtenir, dans le litige pendant devant cette juridiction entre

Tullihallitus

et

Kaupo Salumets e.a.,

une décision à titre préjudiciel sur l'interprétation de la sixième directive 77/388/CEE du Conseil, du 17 mai 1977, en matière d'harmonisation des législations des États membres relatives aux taxes sur le chiffre d'affaires - Système commun de taxe sur la valeur ajoutée: assiette uniforme (JO L 145, p. 1), des directives 92/12/CEE du Conseil, du 25 février 1992, relative au régime général, à la détention, à la circulation et aux contrôles des produits soumis à accise (JO L 76, p. 1), et 92/83/CEE du Conseil, du 19 octobre 1992, concernant l'harmonisation des structures des droits d'accises sur l'alcool et les boissons alcooliques (JO L 316, p. 21), ainsi que du règlement (CEE) n_ 2913/92 du Conseil, du 12 octobre 1992, établissant le code des douanes communautaire (JO L 302, p. 1),

LA COUR

(première chambre),

composée de MM. L. Sevón, président de chambre, P. Jann (rapporteur) et M. Wathelet, juges,

avocat général: M. A. Saggio,

greffier: M. H. A. Rühl, administrateur principal,

considérant les observations écrites présentées:

- pour M. Tallbak, par Me J. Vuorilahti, avocat à Tampere,

- pour MM. Heikkinen et Koivula, par Me T. Vähätalo, avocat à Tampere,

- pour MM. Kortelainen et Lempinen, par Me J. Ojala, avocat à Helsinki,

- pour le gouvernement finlandais, par M. H. Rotkirch et Mme T. Pynnä, valtionasiamiehet, en qualité d'agents,

- pour le gouvernement hellénique, par M. K. Georgiadis, mandataire judiciaire au Conseil juridique de l'État, et Mme E.-M. Mamouna, auditeur au service juridique spécial - section de droit européen du ministère des Affaires étrangères, en qualité d'agents,

- pour le gouvernement italien, par M. le professeur U. Leanza, chef du service du contentieux diplomatique du ministère des Affaires étrangères, en qualité d'agent, assisté de M. I. M. Braguglia, avvocato dello Stato,

- pour la Commission des Communautés européennes, par M. R. Tricot et Mme K. Leivo, membres du service juridique, en qualité d'agents,

vu le rapport d'audience,

ayant entendu les observations orales de M. Tallbak, représenté par Me J. Vuorilahti, de MM. Heikkinen et Koivula, représentés par Me T. Vähätalo, du gouvernement finlandais, représenté par Mme T. Pynnä, du gouvernement hellénique, représenté par M. V. Kyriazopoulos, conseiller juridique adjoint au Conseil juridique de l'État, en qualité d'agent, et de la Commission, représentée par MM. R. Tricot et E. Paasivirta, membre du service juridique, en qualité d'agent, à l'audience du 3 février 2000,

ayant entendu l'avocat général en ses conclusions à l'audience du 23 mars 2000,

rend le présent

Arrêt

Motifs de l'arrêt


1 Par ordonnance du 8 décembre 1998, parvenue à la Cour le 14 décembre suivant, le Tampereen käräjäoikeus a posé, en vertu de l'article 177 du traité CE (devenu article 234 CE), une question préjudicielle relative à l'interprétation de la sixième directive 77/388/CEE du Conseil, du 17 mai 1977, en matière d'harmonisation des législations des États membres relatives aux taxes sur le chiffre d'affaires - Système commun de taxe sur la valeur ajoutée: assiette uniforme (JO L 145, p. 1, ci-après la «sixième directive»), des directives 92/12/CEE du Conseil, du 25 février 1992, relative au régime général, à la détention, à la circulation et aux contrôles des produits soumis à accise (JO L 76, p. 1), et 92/83/CEE du Conseil, du 19 octobre 1992, concernant l'harmonisation des structures des droits d'accises sur l'alcool et les boissons alcooliques (JO L 316, p. 21), ainsi que du règlement (CEE) n_ 2913/92 du Conseil, du 12 octobre 1992, établissant le code des douanes communautaire (JO L 302, p. 1, ci-après le «code des douanes»).

2 Cette question a été soulevée dans le cadre d'une procédure entre le tullihallitus (administration des douanes finlandaise) et M. Salumets et d'autres personnes qui ont été poursuivis pour avoir importé en contrebande en Finlande de l'alcool éthylique en provenance d'un État tiers.

La réglementation communautaire

3 L'article 202 du code des douanes dispose:

«1. Fait naître une dette douanière à l'importation:

a) l'introduction irrégulière dans le territoire douanier de la Communauté d'une marchandise passible de droits à l'importation

...

2. La dette douanière naît au moment de l'introduction irrégulière.

...»

L'article 212 du même code prévoit:

«La dette douanière visée aux articles 201 à 205 et 209 à 211 prend naissance même si elle concerne une marchandise faisant l'objet d'une mesure d'interdiction ou de restriction à l'importation ou à l'exportation, quelle qu'en soit la nature. Toutefois, aucune dette douanière ne prend naissance lors de l'introduction irrégulière dans le territoire douanier de la Communauté de fausse monnaie ainsi que de stupéfiants et de substances psychotropes qui ne font pas partie du circuit économique strictement surveillé par les autorités compétentes en vue d'une utilisation à des fins médicales et scientifiques...»

4 Aux termes de l'article 2 de la sixième directive:

«Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée: ... 2. les importations de biens.»

5 L'article 1er, paragraphe 1, de la directive 92/12 dispose:

«La présente directive fixe le régime des produits soumis à accise et autres impositions indirectes frappant directement ou indirectement la consommation de ces produits, à l'exclusion de la taxe sur la valeur ajoutée et des impositions établies par la Communauté.»

L'article 3, paragraphe 1, de la même directive prévoit:

«La présente directive est applicable, au niveau communautaire, aux produits suivants tels que définis dans les directives y afférentes:

...

- l'alcool et les boissons alcooliques,

...»

Aux termes de l'article 6, paragraphe 1, de ladite directive:

«L'accise devient exigible lors de la mise à la consommation ou lors de la constatation des manquants qui devront être soumis à accise conformément à l'article 14 paragraphe 3.

Est considérée comme mise à la consommation de produits soumis à accise:

...

c) toute importation, y compris irrégulière, de ces produits lorsque ces produits ne sont pas mis sous un régime suspensif.»

6 L'article 19, paragraphe 1, de la directive 92/83 dispose:

«Les États membres appliquent une accise à l'alcool éthylique conformément à la présente directive.»

L'article 27, paragraphe 1, de la même directive prévoit:

«Les États membres exonèrent les produits couverts par la présente directive de l'accise harmonisée dans les conditions qu'ils fixent en vue d'assurer l'application correcte et directe de ces exonérations et d'éviter toute fraude, évasion ou abus, lorsqu'ils sont:

a) distribués sous la forme d'un alcool qui a été dénaturé totalement conformément aux prescriptions d'un État membre, ces prescriptions ayant été dûment notifiées et autorisées conformément aux paragraphes 3 et 4. Cette exonération est subordonnée à l'application des dispositions de la directive 92/12/CEE aux mouvements commerciaux d'alcool dénaturé totalement;

...»

La réglementation nationale

7 Conformément à l'alkoholilaki (loi sur l'alcool) n_ 1143/1994, seuls les commerçants qui sont en possession d'une licence d'importation ou les titulaires d'une licence d'utilisation, pour leur usage personnel, sont autorisés à importer de l'alcool éthylique sur le territoire finlandais.

8 En vertu de la valmisteverotuslaki (loi sur les accises) n_ 1469/1994, sont passibles d'accises l'alcool et les boissons alcooliques qui sont introduits en Finlande à partir d'un autre État membre ou importés de pays tiers.

9 En outre, selon l'arvonlisäverolaki (loi relative à la taxe à la valeur ajoutée, ci-après la «TVA») n_ 1501/1993, les marchandises importées sur le territoire finlandais et provenant d'un État qui n'est pas membre de la Communauté sont soumises à la TVA.

Le litige au principal et la question préjudicielle

10 Il ressort du dossier que les défendeurs au principal ont été condamnés par la juridiction de renvoi à des peines de prison et à des amendes pour avoir fait entrer en contrebande en Finlande, au cours des années 1996/1997, environ 100 000 litres d'alcool éthylique en provenance d'Estonie. Il est constant qu'une partie de cet alcool ainsi frauduleusement importé était déjà conditionnée en bouteilles alors que l'autre partie a été mise en bouteilles dans ledit État membre, dans une ancienne étable, au mépris des règles d'hygiène.

11 La juridiction de renvoi a disjoint de la procédure pénale la demande du tullihallitus visant la condamnation de M. Salumets et de ses complices, conformément à l'alkoholi- ja alkoholijuomaverosta säädetty laki (loi sur la taxation de l'alcool et des boissons alcoolisées) n_ 1471/1994, au paiement des droits de douane, de la TVA, des accises et de la taxe sur l'alcool qui auraient dû être acquittés par les importateurs lors de l'introduction de la marchandise dans le territoire communautaire et qui s'élèveraient à environ 38 millions de FIM.

12 La juridiction de renvoi, saisie de cette demande, a émis des doutes sur la question de savoir si les dispositions du code des douanes et des directives en matière fiscale mentionnées au point 1 du présent arrêt s'appliquent également à l'alcool éthylique lorsque celui-ci a été introduit en contrebande.

13 En particulier, elle se demande si l'importation frauduleuse en Finlande d'alcool éthylique, qui, en tant que tel, ne serait pas destiné à la consommation humaine et aurait un marché considérablement plus réduit que les autres boissons alcooliques en raison du régime d'autorisation auquel une telle importation est soumise dans cet État membre, ne devrait pas être assimilée aux opérations de livraison illégale de stupéfiants et d'importation de fausse monnaie, lesquelles, selon la jurisprudence de la Cour, ne seraient pas soumises aux droits de douane ni à la TVA.

14 C'est dans ces circonstances que le Tampereen käräjäoikeus a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour la question préjudicielle suivante:

«Les directives fiscales communautaires 92/12/CEE du Conseil, du 25 février 1992, 92/83/CEE du Conseil, du 19 octobre 1992, et 77/388/CEE du Conseil, du 17 mai 1977, ainsi que le code des douanes communautaire [règlement (CEE) n_ 2913/92, du Conseil, du 12 octobre 1992], doivent-ils être interprétés en ce sens que leurs dispositions relatives à l'imposabilité et à la dette fiscale trouvent application à la contrebande d'alcool éthylique?»

15 Les défendeurs au principal soutiennent que lesdites directives et le code des douanes ne trouvent pas à s'appliquer à l'occasion d'une opération d'importation en contrebande d'alcool éthylique. En effet, celui-ci ne pourrait pas être considéré comme une boisson alcoolique destinée à la consommation en raison de sa forte concentration en alcool. Une telle opération devrait donc être traitée de la même manière que l'importation de stupéfiants, lesquels ne sont pas susceptibles d'être commercialisés et, dès lors, ne sont pas soumis aux droits de douane ni à la TVA. Par ailleurs, la contrebande d'alcool ne constituerait pas une activité économique au sens des dispositions du traité CE et échapperait donc totalement à la réglementation communautaire.

16 À cet égard, les défendeurs au principal se réfèrent aux arrêts de la Cour du 5 février 1981, Horvath (50/80, Rec. p. 385); du 26 octobre 1982, Wolf (221/81, Rec. p. 3681); du 28 février 1984, Einberger (294/82, Rec. p. 1177); du 5 juillet 1988, Mol (269/86, Rec. p. 3627), et Happy Family (289/86, Rec. p. 3655), concernant respectivement des importations illégales de stupéfiants dans la Communauté et la livraison illégale de ces mêmes produits effectuée à titre onéreux à l'intérieur d'un État membre. Ils soutiennent que, dans ces arrêts, la Cour a dit pour droit qu'aucune dette de droits de douane ni de taxe sur le chiffre d'affaires ne prend naissance respectivement lors de l'importation illégale dans la Communauté ou de la livraison illégale de stupéfiants effectuée à titre onéreux à l'intérieur du territoire d'un État membre, lorsque ces produits ne font pas partie du circuit économique strictement surveillé par les autorités compétentes en vue d'être utilisés à des fins médicales et scientifiques. Cette jurisprudence aurait été élargie aux cas d'importation de fausse monnaie par l'arrêt du 6 décembre 1990, Witzemann (C-343/89, Rec. p. I-4477, point 20).

17 Les gouvernements finlandais, hellénique et italien, ainsi que la Commission, invoquent cependant d'autres arrêts dans lesquels la Cour a jugé que la TVA est normalement due lorsque des marchandises frauduleusement commercialisées entrent en concurrence avec des produits faisant l'objet d'opérations réalisées dans le cadre d'un circuit légal. Tel serait le cas en ce qui concerne les parfums de contrefaçon (arrêt du 28 mai 1998, Goodwin et Unstead, C-3/97, Rec. p. I-3257), l'exploitation illégale des jeux de hasard (arrêt du 11 juin 1998, Fischer, C-283/95, Rec. p. I-3369) et l'exportation dans des conditions illégales de systèmes informatiques (arrêt du 2 août 1993, Lange, C-111/92, Rec. p. I-4677). Il résulterait en particulier du point 16 de ce dernier arrêt que le principe de neutralité fiscale s'oppose à une différenciation généralisée entre les transactions licites et les transactions illicites, à l'exception des cas où, en raison des caractéristiques particulières de certaines marchandises, toute concurrence entre un secteur économique licite et un secteur illicite est exclue.

18 Selon lesdits gouvernements et la Commission, les stupéfiants et la fausse monnaie sont des produits qui ne peuvent être introduits dans le circuit économique en raison de leur caractère intrinsèque de marchandises illicites. L'alcool éthylique, cependant, ne présenterait pas un tel caractère, bien que son importation et sa vente soient soumises à autorisation en Finlande. En effet, il pourrait être vendu dans des conditions illicites beaucoup moins cher que les boissons alcooliques licites aux mêmes fins de consommation. Dans ces circonstances, l'alcool importé en contrebande serait entièrement en concurrence avec les produits alcooliques en vente légale, de sorte qu'il donnerait naissance à une dette douanière et fiscale. En effet, dans les arrêts mentionnés au point précédent, la Cour aurait adopté une interprétation très restrictive des exceptions au principe de la neutralité fiscale.

19 À titre liminaire, il convient de constater que les arrêts précités Horvath, Wolf, Einberger, Mol, Happy Family et Witzemann, rendus dans des affaires relatives aux stupéfiants et à la fausse monnaie, visent des marchandises qui, en raison de leur nature même et de leurs caractéristiques particulières, ne sont pas susceptibles d'être mises dans le commerce licite ni d'être intégrées au circuit économique. Il ressort en outre d'une jurisprudence constante que le principe de neutralité fiscale s'oppose à une différenciation généralisée entre les transactions licites et les transactions illicites. Il en résulte que la qualification d'un comportement comme répréhensible n'entraîne pas, à elle seule, une exception à l'imposition, mais qu'une telle exception ne joue que dans des situations spécifiques dans lesquelles, en raison des caractéristiques particulières de certaines marchandises ou de certaines prestations, toute concurrence entre un secteur économique licite et un secteur illicite est exclue (voir arrêts précités Lange, point 19; Fischer, point 28; Goodwin et Unstead, point 9, ainsi que l'arrêt du 29 juin 1999, Coffeeshop «Siberië», C-158/98, Rec. p. I-3971, points 14 et 21).

20 Or, tel n'est pas le cas de l'alcool éthylique qui est en cause dans l'affaire au principal. Ainsi que l'ont fait valoir les gouvernements ayant déposé des observations écrites et la Commission, il ne s'agit pas d'une marchandise dont la commercialisation est interdite en raison de sa nature même ou de ses caractéristiques particulières.

21 Les conditions dans lesquelles l'importation a eu lieu dans cette affaire ne sauraient modifier cette appréciation. En effet, un produit intrinsèquement licite comme l'alcool éthylique ne saurait être assimilé à un stupéfiant pour des motifs liés à sa provenance, à sa qualité ou à sa pureté.

22 De même, est sans influence la circonstance que l'alcool éthylique à l'état pur soit soumis dans l'État membre concerné à un régime spécial d'autorisation en ce qui concerne tant la production et la commercialisation que l'importation et l'exportation de ce produit (voir, en ce sens, arrêt Lange, précité, point 17).

23 Par ailleurs, ainsi que l'a également relevé la Commission, la concurrence entre l'alcool importé en contrebande et celui faisant l'objet d'opérations réalisées dans un circuit légal n'est pas exclue dans la mesure où il existe un marché licite de l'alcool qui est justement abordé par les produits de contrebande. Il en résulte que l'alcool éthylique ne saurait être considéré comme un produit exclu du circuit économique. Il est donc soumis aux taxes et droits de douane normalement dus en vertu de la réglementation communautaire.

24 Il résulte de l'ensemble de ce qui précède qu'il y a lieu de répondre à la question posée que la sixième directive, les directives 92/12 et 92/83, ainsi que le code des douanes, doivent être interprétés en ce sens que leurs dispositions relatives à l'imposabilité et à la dette fiscale s'appliquent également à l'importation en contrebande sur le territoire douanier communautaire d'alcool éthylique en provenance de pays tiers.

Décisions sur les dépenses


Sur les dépens

25 Les frais exposés par les gouvernements finlandais, hellénique et italien, ainsi que par la Commission, qui ont soumis des observations à la Cour, ne peuvent faire l'objet d'un remboursement. La procédure revêtant, à l'égard des parties au principal, le caractère d'un incident soulevé devant la juridiction nationale, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens.

Dispositif


Par ces motifs,

LA COUR

(première chambre),

statuant sur la question à elle soumise par le Tampereen käräjäoikeus, par ordonnance du 8 décembre 1998, dit pour droit:

La sixième directive 77/388/CEE du Conseil, du 17 mai 1977, en matière d'harmonisation des législations des États membres relatives aux taxes sur le chiffre d'affaires - Système commun de taxe sur la valeur ajoutée: assiette uniforme, les directives 92/12/CEE du Conseil, du 25 février 1992, relative au régime général, à la détention, à la circulation et aux contrôles des produits soumis à accise, et 92/83/CEE du Conseil, du 19 octobre 1992, concernant l'harmonisation des structures des droits d'accises sur l'alcool et les boissons alcooliques, ainsi que le règlement (CEE) n_ 2913/92 du Conseil, du 12 octobre 1992, établissant le code des douanes communautaire, doivent être interprétés en ce sens que leurs dispositions relatives à l'imposabilité et à la dette fiscale s'appliquent également à l'importation en contrebande sur le territoire douanier communautaire d'alcool éthylique en provenance de pays tiers.