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Affaire C-253/07

Canterbury Hockey Club
et
Canterbury Ladies Hockey Club

contre

The Commissioners for Her Majesty’s Revenue and Customs

(demande de décision préjudicielle, introduite par la High Court of Justice (England & Wales), Chancery Division)

«Sixième directive TVA — Exonérations — Prestations de services liées à la pratique du sport — Prestations de services fournies aux personnes qui pratiquent le sport — Prestations de services fournies à des associations non enregistrées et à des personnes morales — Inclusion — Conditions»

Sommaire de l'arrêt

1.        Dispositions fiscales — Harmonisation des législations — Taxes sur le chiffre d'affaires — Système commun de taxe sur la valeur ajoutée — Exonérations prévues par la sixième directive

(Directive du Conseil 77/388, art. 13, A, § 1, m))

2.        Dispositions fiscales — Harmonisation des législations — Taxes sur le chiffre d'affaires — Système commun de taxe sur la valeur ajoutée — Exonérations prévues par la sixième directive

(Directive du Conseil 77/388, art. 13, A, § 1, m))

1.        L'article 13, A, paragraphe 1, sous m), de la sixième directive 77/388 en matière d'harmonisation des législations des États membres relatives aux taxes sur le chiffre d'affaires doit être interprété en ce sens qu'il couvre également, dans le contexte de personnes qui pratiquent le sport, des prestations de services fournies à des personnes morales et à des associations non enregistrées, pour autant que - ce qu'il appartient à la juridiction de renvoi de vérifier - ces prestations soient étroitement liées à la pratique du sport et indispensables à son accomplissement, qu'elles soient fournies par des organismes sans but lucratif et que les bénéficiaires effectifs desdites prestations soient des personnes qui pratiquent le sport.

En effet, l’article 13, A, paragraphe 1, sous m), de la sixième directive n’entend pas faire bénéficier de l’exonération prévue à cette disposition seulement certains types de sport, mais vise la pratique du sport en général, ce qui inclut également les sports nécessairement pratiqués par des particuliers dans des groupements de personnes ou pratiqués au sein de structures organisationnelles et administratives mises en place par des associations non enregistrées ou des personnes morales, telles que des clubs de sport, à condition que les exigences prévues à l'article 13, A, paragraphes 1, sous m), et 2, sous b), soient remplies. Exiger que les prestations de services en question soient directement dispensées aux personnes physiques qui pratiquent le sport au sein d’une structure organisationnelle mise en place par un club de sport aurait pour conséquence qu’un grand nombre de prestations de services indispensables à la pratique du sport seraient automatiquement et inévitablement exclues du bénéfice de cette exonération, indépendamment de la question de savoir si ces prestations sont directement liées aux personnes qui pratiquent le sport ou aux clubs de sport et qui en est le bénéficiaire effectif. Un tel résultat irait à l’encontre du but poursuivi par l’exonération prévue à ladite disposition qui est de faire effectivement bénéficier de cette exonération les prestations fournies aux particuliers qui pratiquent le sport.

En outre, le principe de neutralité fiscale, dans le respect duquel les exonérations prévues à l'article 13 de la sixième directive doivent être appliquées, serait méconnu si la possibilité d'invoquer le bénéfice de l'exonération prévue à l’article 13, A, paragraphe 1, sous m), de la sixième directive était tributaire de la structure organisationnelle propre à l’activité sportive pratiquée.

Ainsi, afin de garantir une application effective de l’exonération prévue à l’article 13, A, paragraphe 1, sous m), de la sixième directive, cette disposition doit être interprétée en ce sens que des prestations de services fournies dans le cadre, notamment, de sports pratiqués dans des groupements de personnes ou pratiqués au sein de structures organisationnelles mises en place par des clubs de sport sont, en principe, susceptibles de bénéficier de l’exonération visée à ladite disposition. Il s’ensuit que, pour évaluer si des prestations de services sont exonérées, l’identité du destinataire formel d’une prestation de services et la forme juridique sous laquelle celui-ci en bénéficie sont sans pertinence.

(cf. points 27, 29-31, 35, disp. 1)

2.        L'expression «certaines prestations de services ayant un lien étroit avec la pratique du sport», employée à l'article 13, A, paragraphe 1, sous m), de la sixième directive 77/388 en matière d'harmonisation des législations des États membres relatives aux taxes sur le chiffre d'affaires, n'autorise pas les États membres à restreindre l'exonération prévue à cette disposition au regard des destinataires des prestations de services en cause.

En effet, les éventuelles restrictions au bénéfice des exonérations prévues à l'article 13, A, de la sixième directive ne peuvent intervenir que dans le cadre de l'application du paragraphe 2 de cette disposition. Ainsi, dès qu'un État membre accorde une exonération pour une certaine prestation de services ayant un lien étroit avec la pratique du sport ou de l'éducation physique, fournie par des organismes sans but lucratif, il ne peut soumettre celle-ci à d'autres conditions que celles prévues à l'article 13, A, paragraphe 2, de la sixième directive. Cette disposition ne prévoyant pas de restrictions au regard des destinataires des prestations de services en question, les États membres n'ont pas le pouvoir d'exclure un certain groupe de destinataires de ces prestations du bénéfice de l'exonération en cause.

(cf. points 39-40, disp. 2)







ARRÊT DE LA COUR (quatrième chambre)

16 octobre 2008 (*)

«Sixième directive TVA – Exonérations – Prestations de services liées à la pratique du sport – Prestations de services fournies aux personnes qui pratiquent le sport – Prestations de services fournies à des associations non enregistrées et à des personnes morales – Inclusion – Conditions»

Dans l’affaire C-253/07,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 234 CE, introduite par la High Court of Justice (England & Wales), Chancery Division (Royaume-Uni), par décision du 1er février 2007, parvenue à la Cour le 29 mai 2007, dans la procédure

Canterbury Hockey Club,

Canterbury Ladies Hockey Club

contre

The Commissioners for Her Majesty’s Revenue and Customs,

LA COUR (quatrième chambre),

composée de M. K. Lenaerts, président de chambre, MM. T. von Danwitz (rapporteur), E. Juhász, G. Arestis et J. Malenovský, juges,

avocat général: M. D. Ruiz-Jarabo Colomer,

greffier: Mme L. Hewlett, administrateur principal,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 3 juillet 2008,

considérant les observations présentées:

–        pour Canterbury Hockey Club et Canterbury Ladies Hockey Club, par M. M. G. MacDonald, advocate,

–        pour le gouvernement du Royaume-Uni, par Mme T. Harris et M. L. Seeboruth, en qualité d’agents, assistés de M. I. Hutton, barrister,

–        pour le gouvernement hellénique, par MM. K. Georgiadis, I. Bakopoulos et K. Boskovits, en qualité d’agents,

–        pour la Commission des Communautés européennes, par Mme M. Afonso et M. R. Lyal, en qualité d’agents,

vu la décision prise, l’avocat général entendu, de juger l’affaire sans conclusions,

rend le présent

Arrêt

1        La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 13, A, paragraphe 1, sous m), de la sixième directive 77/388/CEE du Conseil, du 17 mai 1977, en matière d’harmonisation des législations des États membres relatives aux taxes sur le chiffre d’affaires – Système commun de taxe sur la valeur ajoutée: assiette uniforme (JO L 145, p. 1, ci-après la «sixième directive»).

2        Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant Canterbury Hockey Club et Canterbury Ladies Hockey Club (ci-après, ensemble, les «Hockey Clubs») aux Commissioners for Her Majesty’s Revenue and Customs (ci-après les «Commissioners») au sujet de l’assujettissement à la taxe sur la valeur ajoutée (ci-après la «TVA») de cotisations perçues par England Hockey Limited (ci-après «England Hockey»), en contrepartie desquelles ce dernier fournit des prestations de services aux Hockey Clubs alors que, selon ces derniers, ces prestations devaient être exonérées de la TVA.

 Le cadre juridique

 La réglementation communautaire

3        L’article 2, point 1, de la sixième directive soumet à la TVA «les livraisons de biens et les prestations de services effectuées à titre onéreux à l’intérieur du pays par un assujetti agissant en tant que tel».

4        L’article 13, A, de la sixième directive, intitulé «Exonérations en faveur de certaines activités d’intérêt général», prévoit notamment:

«1.      Sans préjudice d’autres dispositions communautaires, les États membres exonèrent, dans les conditions qu’ils fixent en vue d’assurer l’application correcte et simple des exonérations prévues ci-dessous et de prévenir toute fraude, évasion et abus éventuels:

[…]

m)      certaines prestations de services ayant un lien étroit avec la pratique du sport ou de l’éducation physique, fournies par des organismes sans but lucratif aux personnes qui pratiquent le sport ou l’éducation physique;

[…]

2.      […]

b)       Les prestations de services et les livraisons de biens sont exclues du bénéfice de l’exonération prévue au paragraphe 1 sous b), g), h), i), l), m) et n) si:

–        elles ne sont pas indispensables à l’accomplissement des opérations exonérées,

–        elles sont essentiellement destinées à procurer à l’organisme des recettes supplémentaires par la réalisation d’opérations effectuées en concurrence directe avec celles d’entreprises commerciales soumises à la [TVA].»

 La réglementation nationale

5        Aux termes de l’annexe 9, groupe 10, point 3, de la loi de 1994 relative à la taxe sur la valeur ajoutée (Value Added Tax Act 1994) est exonérée de la TVA:

«La prestation, par un organisme éligible à un particulier, de services ayant un lien étroit et essentiel avec le sport ou l’éduction physique pratiqués par ce dernier, à l’exception, lorsque cet organisme agit dans le cadre d’un système d’affiliation, de ceux fournis à un particulier qui ne lui est pas affilié.»

 Le litige au principal et les questions préjudicielles

6        Les Hockey Clubs sont des clubs de sport qui sont réservés à leurs membres et qui font jouer plusieurs équipes de hockey. Leurs membres payent une cotisation annuelle en contrepartie des droits attachés à leur adhésion. Ils sont des associations non enregistrées, dépourvues de personnalité juridique.

7        Les Hockey Clubs sont eux-mêmes membres de England Hockey, un organisme à but non lucratif ayant pour but d’encourager et de développer la pratique du hockey en Angleterre. Ils lui payent une cotisation d’affiliation sur laquelle England Hockey applique la TVA.

8        En contrepartie des cotisations qu’il perçoit, England Hockey fournit à ses membres certains services, à savoir un système d’accréditation des clubs, des formations pour entraîneurs, arbitres, moniteurs et jeunes, un réseau de bureaux de promotion du hockey, des possibilités d’accès à des subventions publiques et au mécénat dérivé des loteries, des conseils en matière de marketing et d’obtention de sponsors, des services de gestion et d’assurance des clubs ainsi que l’organisation de compétitions ouvertes aux équipes.

9        Les Commissioners ont signifié à England Hockey que les cotisations qu’il perçoit, en contrepartie desquelles il fournit des prestations de services aux clubs de hockey qui lui sont affiliés, devaient être soumises au taux normal de la TVA. Ces clubs n’étant pas des personnes qui pratiquent le sport, ces prestations de services ne tombaient pas dans le champ d’application de l’exonération.

10      Les Hockey Clubs ont formé un recours contre cette décision devant le VAT and Duties Tribunal, faisant valoir que les prestations de services fournies par England Hockey étaient exonérées de TVA en vertu de l’article 13, A, paragraphe 1, sous m), de la sixième directive.

11      À la suite de ce recours, le VAT and Duties Tribunal a jugé que les prestations de services fournies par England Hockey pouvaient être considérées comme des prestations faites aux joueurs individuels, membres des Hockey Clubs, ces derniers ayant un statut d’association non enregistrée, dépourvue de personnalité juridique. Ceux-ci devaient être considérés comme «transparents» et leurs membres individuels devaient être pris en compte, à travers eux, pour déterminer si England Hockey fournissait des prestations de services ayant un lien étroit avec le sport à des «personnes qui pratiquent le sport», ces prestations de services étant dans ce cas exonérées de TVA.

12      Les Commissioners ont interjeté appel de cette décision devant la High Court of Justice (England & Wales), Chancery Division, soutenant que les Hockey Clubs ne pouvaient être considérés comme «transparents» au regard de la TVA. Les Hockey Clubs ont, pour leur part, formé un appel incident, faisant valoir que la décision du VAT and Duties Tribunal devait être confirmée pour des motifs différents de ceux retenus par celui-ci, à savoir que la condition visée au point 3, groupe 10, de l’annexe 9 de la loi de 1994 relative à la taxe sur la valeur ajoutée, selon laquelle la prestation de services doit être fournie à un «particulier», ne transposait pas convenablement la disposition de l’article 13, A, paragraphe 1, sous m), de la sixième directive.

13      Selon la High Court of Justice (England & Wales), Chancery Division, les prestations de services fournies par England Hockey ne donnent pas directement aux membres des Hockey Clubs les moyens de pratiquer le hockey. Elle a pris acte du fait qu’il n’est pas contesté, entre les parties au principal, que les prestations de services fournies par England Hockey sont étroitement liées au sport.

14      La High Court of Justice (England & Wales), Chancery Division, a estimé qu’il n’était pas fondé de considérer les Hockey Clubs comme «transparents» en matière de TVA et a jugé recevable l’appel interjeté par les Commissioners. Estimant que la solution de l’appel incident formé par les Hockey Clubs dépend d’une interprétation du droit communautaire, cette juridiction a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes:

«1)      Pour l’application de l’exonération prévue à l’article 13, A, paragraphe 1, sous m), de la sixième directive, le terme ‘personnes’, pris dans le contexte de ‘personnes qui pratiquent le sport’, couvre-t-il aussi les personnes morales et les associations non enregistrées ou ne vise-t-il que les particuliers, au sens de personnes physiques ou d’êtres humains?

2)      Si le terme de ‘personnes’, dans le contexte de ‘personnes qui pratiquent le sport’, couvre bien les personnes morales et les associations non enregistrées ainsi que les particuliers, l’expression ‘certaines prestations de services ayant un lien étroit avec la pratique du sport’ autorise-t-elle un État membre à restreindre l’exonération aux seuls particuliers qui pratiquent le sport?»

 Sur les questions préjudicielles

 Sur la première question

15      La sixième directive assigne un champ d’application très large à la TVA englobant toutes les activités économiques de producteur, de commerçant ou de prestataire de services (voir, notamment, arrêt du 15 juin 1989, Stichting Uitvoering Financiële Acties, 348/87, Rec. p. 1737, point 10). L’article 13 de cette directive exonère toutefois certaines activités de la TVA.

16      Les exonérations visées audit article constituent, selon la jurisprudence constante de la Cour, des notions autonomes du droit communautaire ayant pour objet d’éviter des divergences dans l’application du régime de la TVA d’un État membre à l’autre (voir, notamment, arrêts du 18 novembre 2004, Temco Europe, C-284/03, Rec. p. I-11237, point 16; du 26 mai 2005, Kingscrest Associates et Montecello, C-498/03, Rec. p. I-4427, point 22, ainsi que du 14 juin 2007, Horizon College, C-434/05, Rec. p. I-4793, point 15).

17      Les termes employés pour désigner les exonérations visées à l’article 13 de la sixième directive sont d’interprétation stricte, étant donné qu’elles constituent des dérogations au principe général selon lequel la TVA est perçue sur chaque prestation effectuée à titre onéreux. Toutefois, cette règle d’interprétation stricte ne signifie pas que les termes utilisés pour définir les exonérations visées audit article 13 doivent être interprétés d’une manière qui priverait celles-ci de leurs effets (arrêts précités Temco Europe, point 17, et Horizon College, point 16). Ceux-ci doivent être interprétés à la lumière du contexte dans lequel ils s’inscrivent, des finalités et de l’économie de la sixième directive, en tenant particulièrement compte de la ratio legis de l’exonération en question (voir, en ce sens, arrêts Temco Europe, précité, point 18, et du 3 mars 2005, Fonden Marselisborg Lystbådehavn, C-428/02, Rec. p. I-1527, point 28).

18      L’article 13, A, de la sixième directive vise à exonérer de la TVA certaines activités d’intérêt général. Cette exonération concerne non pas toutes les activités d’intérêt général, mais uniquement celles qui y sont énumérées et décrites de manière très détaillée (arrêts du 14 décembre 2006, VDP Dental Laboratory, C-401/05, Rec. p. I-12121, point 24, et Horizon College, précité, point 14).

19      S’agissant de la pratique du sport et de l’éducation physique, en tant qu’activités d’intérêt général, l’exonération prévue à l’article 13, A, paragraphe 1, sous m), de la sixième directive vise à encourager ces types d’activités, mais n’exonère pas de manière générale l’ensemble des prestations de services liées à celles-ci (voir arrêt du 12 janvier 2006, Turn- und Sportunion Waldburg, C-246/04, Rec. p. I-589, point 39).

20      Le bénéfice de l’exonération prévue à l’article 13, A, paragraphe 1, sous m), de la sixième directive est subordonné à certaines conditions, qui découlent de cette même disposition.

21      En premier lieu, les prestations de services ayant un lien étroit avec la pratique du sport ou de l’éducation physique doivent être fournies par un organisme visé à l’article 13, A, paragraphe 1, sous m), de la sixième directive. Ainsi, pour que les prestations de services en cause soient susceptibles d’être exonérées au titre de cette disposition, il est indispensable que ces prestations soient fournies par un organisme sans but lucratif. Comme il ressort de la décision de renvoi, une telle condition est susceptible d’être satisfaite dans le litige au principal.

22      En deuxième lieu, les prestations de services effectuées par de tels organismes sont susceptibles d’être exonérées, en tant qu’opérations d’intérêt général, à condition qu’elles aient un lien étroit avec la pratique du sport ou de l’éducation physique et qu’elles soient fournies aux personnes qui pratiquent le sport ou l’éducation physique. Par ailleurs, il résulte de l’article 13, A, paragraphe 2, sous b), premier tiret, de la sixième directive que les prestations de services visées au paragraphe 1, sous m), dudit article 13, A, ne peuvent être exonérées que si elles sont indispensables à l’accomplissement de l’opération exonérée, à savoir la pratique du sport ou de l’éducation physique.

23      Ainsi, l’exonération d’une opération se détermine, notamment, en fonction de la nature de la prestation de services fournie et du rapport de celle-ci avec la pratique du sport ou de l’éducation physique.

24      Dans ce contexte, il y a lieu d’examiner si l’argument, avancé par les gouvernements du Royaume-Uni et grec et tiré du libellé de l’article 13, A, paragraphe 1, sous m), de la sixième directive, selon lequel seules les personnes physiques sont dans la capacité de pratiquer le sport et que, par conséquent, seules des prestations de services fournies directement à de telles personnes peuvent être exonérées, est de nature à influer sur la réponse à donner à la première question préjudicielle.

25      La Commission des Communautés européennes considère, à cet égard, que ladite disposition doit être interprétée non pas de manière littérale, mais, afin de garantir une application effective de l’exonération qu’elle prévoit, en fonction de la prestation de services en cause et qu’il faut, dès lors, prendre en considération non seulement le destinataire formel ou légal de cette prestation, mais aussi son destinataire concret ou bénéficiaire effectif.

26      À cet égard, s’il est vrai que le terme «personnes», pris en soi, est suffisamment large pour inclure non seulement des personnes physiques, mais également les associations non enregistrées ou des personnes morales, selon un usage linguistique habituel, seules les personnes physiques pratiquent le sport même si celui-ci est pratiqué dans des groupements de personnes.

27      Toutefois, l’article 13, A, paragraphe 1, sous m), de la sixième directive n’entend pas faire bénéficier de l’exonération prévue à cette disposition seulement certains types de sport, mais vise la pratique du sport en général, ce qui inclut également les sports nécessairement pratiqués par des particuliers dans des groupements de personnes ou pratiqués au sein de structures organisationnelles et administratives mises en place par des associations non enregistrées ou des personnes morales, telles que des clubs de sport, à condition que les exigences décrites aux points 21 et 22 du présent arrêt soient remplies.

28      La pratique du sport au sein d’une telle structure implique généralement, pour des raisons pratiques, organisationnelles et administratives, que le particulier n’organise pas lui-même les services qui sont indispensables à la pratique du sport, mais que le club de sport dont il fait partie organise et mette en place ces services, comme, par exemple, la mise à disposition d’un terrain ou d’un arbitre nécessaires à la pratique de tout sport d’équipe. Dans de telles situations, c’est, d’une part, entre le club de sport et le prestataire de services et, d’autre part, entre le club de sport et ses membres que les services sont fournis et que les liens juridiques sont noués.

29      Ainsi, si les termes «prestations de services […] fournies […] aux personnes qui pratiquent le sport» de l’article 13, A, paragraphe 1, sous m), de la sixième directive étaient interprétés en ce sens qu’ils exigent que les prestations de services en question soient directement dispensées aux personnes physiques qui pratiquent le sport au sein d’une structure organisationnelle mise en place par un club de sport, l’exonération prévue à cette disposition dépendrait de l’existence d’un rapport juridique entre le prestataire de services et les personnes pratiquant le sport au sein d’une telle structure. Une telle interprétation aurait pour conséquence qu’un grand nombre de prestations de services indispensables à la pratique du sport seraient automatiquement et inévitablement exclues du bénéfice de cette exonération, indépendamment de la question de savoir si ces prestations sont directement liées aux personnes qui pratiquent le sport ou aux clubs de sport et qui en est le bénéficiaire effectif. Un tel résultat irait, comme l’a fait valoir à juste titre la Commission, à l’encontre du but poursuivi par l’exonération prévue à ladite disposition qui est de faire effectivement bénéficier de cette exonération les prestations fournies aux particuliers qui pratiquent le sport.

30      Il découlerait, en outre, de cette interprétation que l’exonération prévue pour les opérations effectuées par des établissements ou des organismes mentionnés à l’article 13, A, paragraphe 1, sous m), ne bénéficierait pas à certaines personnes qui pratiquent un sport uniquement en raison de la circonstance qu’elles le pratiquent au sein d’une structure gérée par un club. Or, ladite interprétation ne serait pas conforme au principe de neutralité fiscale inhérent au système commun de TVA et dans le respect duquel les exonérations prévues à l’article 13 de la sixième directive doivent être appliquées (voir, en ce sens, arrêt du 11 juin 1998, Fischer, C-283/95, Rec. p. I-3369, point 27). En effet, ce principe s’oppose notamment à ce que des opérateurs économiques qui effectuent les mêmes opérations soient traités différemment en matière de perception de la TVA (voir, en ce sens, arrêt du 7 septembre 1999, Gregg, C-216/97, Rec. p. I-4947, point 20). Il en résulte que ledit principe serait méconnu si la possibilité d’invoquer le bénéfice de l’exonération prévue à l’article 13, A, paragraphe 1, sous m), de la sixième directive était tributaire de la structure organisationnelle propre à l’activité sportive pratiquée.

31      Afin de garantir une application effective de l’exonération prévue à l’article 13, A, paragraphe 1, sous m), de la sixième directive, cette disposition doit être interprétée en ce sens que des prestations de services fournies dans le cadre, notamment, de sports pratiqués dans des groupements de personnes ou pratiqués au sein de structures organisationnelles mises en place par des clubs de sport sont, en principe, susceptibles de bénéficier de l’exonération visée à ladite disposition. Il s’ensuit que, pour évaluer si des prestations de services sont exonérées, l’identité du destinataire formel d’une prestation de services et la forme juridique sous laquelle celui-ci en bénéficie sont sans pertinence.

32      Toutefois, pour pouvoir bénéficier de ladite exonération, les prestations de services doivent, conformément à l’article 13, A, paragraphes 1, sous m), et 2, sous b), premier tiret, de la sixième directive, être fournies par un organisme sans but lucratif, elles doivent être étroitement liées à la pratique du sport et indispensables à son accomplissement, les bénéficiaires effectifs de ces prestations étant les personnes qui pratiquent le sport. En revanche, les prestations de services ne remplissant pas ces critères, notamment celles liées aux clubs de sport et à leur fonctionnement, comme par exemple des conseils en matière de marketing et d’obtention de sponsors, ne peuvent bénéficier de cette exonération.

33      En dernier lieu, il importe de relever que, en vertu de l’article 13, A, paragraphe 2, sous b), second tiret, de la sixième directive, les prestations de services sont exclues du bénéfice de l’exonération prévue au paragraphe 1, sous m), dudit article 13, A, si elles sont essentiellement destinées à procurer à l’organisme des recettes supplémentaires par la réalisation d’opérations effectuées en concurrence directe avec celles d’entreprises commerciales soumises à la TVA.

34      Dans le litige au principal, il appartient à la juridiction de renvoi, en prenant en considération toutes les circonstances dans lesquelles se déroule l’opération en question pour en rechercher les éléments caractéristiques (voir arrêts du 2 mai 1996, Faaborg-Gelting Linien, C-231/94, Rec. p. I-2395, point 12, et du 18 janvier 2001, Stockholm Lindöpark, C-150/99, Rec. p. I-493, point 26), de déterminer si les prestations de services fournies par England Hockey aux Hockey Clubs sont étroitement liées à la pratique du sport et indispensables à son accomplissement, si les bénéficiaires effectifs de ces prestations sont des personnes qui pratiquent le sport ainsi que si lesdites prestations sont destinées ou non, pour l’essentiel, à procurer à England Hockey des recettes supplémentaires par la réalisation d’opérations effectuées en concurrence directe avec celles d’entreprises commerciales soumises à la TVA.

35      Dès lors, il y a lieu de répondre à la première question posée que l’article 13, A, paragraphe 1, sous m), de la sixième directive doit être interprété en ce sens qu’il couvre également, dans le contexte de personnes qui pratiquent le sport, des prestations de services fournies à des personnes morales et à des associations non enregistrées, pour autant que – ce qu’il appartient à la juridiction de renvoi de vérifier – ces prestations soient étroitement liées à la pratique du sport et indispensables à son accomplissement, qu’elles soient fournies par des organismes sans but lucratif et que les bénéficiaires effectifs desdites prestations soient des personnes qui pratiquent le sport.

 Sur la seconde question

36      Par sa seconde question, la juridiction de renvoi demande si les États membres sont autorisés à restreindre le régime d’exonération prévu à l’article 13, A, paragraphe 1, sous m), de la sixième directive aux prestations de services fournies aux seuls particuliers qui pratiquent le sport.

37      Selon le gouvernement du Royaume-Uni, les États membres sont libres de limiter la portée de l’exonération par référence aux prestations de services qui sont fournies à des particuliers, étant donné que l’article 13, A, paragraphe 1, sous m), de la sixième directive exige uniquement l’exonération de «certaines prestations de services ayant un lien étroit avec la pratique du sport».

38      À cet égard, il y a lieu de constater que les différentes catégories d’activités qui doivent être exonérées de la TVA, celles qui peuvent l’être par les États membres et celles qui ne peuvent pas l’être, ainsi que les conditions auxquelles les activités susceptibles d’être exonérées peuvent être soumises par les États membres sont précisément définies par le contenu de l’article 13, A, de la sixième directive (arrêt du 3 avril 2003, Hoffmann, C-144/00, Rec. p. I-2921, point 38).

39      Les éventuelles restrictions au bénéfice des exonérations prévues à l’article 13, A, de la sixième directive ne peuvent intervenir que dans le cadre de l’application du paragraphe 2 de cette disposition (voir arrêt Hoffmann, précité, point 39). Ainsi, dès qu’un État membre accorde une exonération pour une certaine prestation de services ayant un lien étroit avec la pratique du sport ou de l’éducation physique, fournie par des organismes sans but lucratif, il ne peut soumettre celle-ci à d’autres conditions que celles prévues à l’article 13, A, paragraphe 2, de la sixième directive (voir arrêt du 7 mai 1998, Commission/Espagne, C-124/96, Rec. p. I-2501, point 18). Cette disposition ne prévoyant pas de restrictions au regard des destinataires des prestations de services en question, les États membres n’ont pas le pouvoir d’exclure un certain groupe de destinataires de ces prestations du bénéfice de l’exonération en cause.

40      Dès lors, il y a lieu de répondre à la seconde question posée que l’expression «certaines prestations de services ayant un lien étroit avec la pratique du sport», employée à l’article 13, A, paragraphe 1, sous m), de la sixième directive, n’autorise pas les États membres à restreindre l’exonération prévue à cette disposition au regard des destinataires des prestations de services en cause.

 Sur les dépens

41      La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

Par ces motifs, la Cour (quatrième chambre) dit pour droit:

1)      L’article 13, A, paragraphe 1, sous m), de la sixième directive 77/388/CEE du Conseil, du 17 mai 1977, en matière d’harmonisation des législations des États membres relatives aux taxes sur le chiffre d’affaires – Système commun de taxe sur la valeur ajoutée: assiette uniforme, doit être interprété en ce sens qu’il couvre également, dans le contexte de personnes qui pratiquent le sport, des prestations de services fournies à des personnes morales et à des associations non enregistrées, pour autant que – ce qu’il appartient à la juridiction de renvoi de vérifier – ces prestations soient étroitement liées à la pratique du sport et indispensables à son accomplissement, qu’elles soient fournies par des organismes sans but lucratif et que les bénéficiaires effectifs desdites prestations soient des personnes qui pratiquent le sport.

2)      L’expression «certaines prestations de services ayant un lien étroit avec la pratique du sport», employée à l’article 13, A, paragraphe 1, sous m), de la sixième directive 77/388, n’autorise pas les États membres à restreindre l’exonération prévue à cette disposition au regard des destinataires des prestations de services en cause.

Signatures


* Langue de procédure: l’anglais.