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Affaire C-74/08

PARAT Automotive Cabrio Textiltetőket Gyártó Kft.

contre

Adó- és Pénzügyi Ellenőrzési Hivatal, Hatósági Főosztály, Észak-magyarországi Kihelyezett Hatósági Osztály

(demande de décision préjudicielle, introduite par le Nógrád Megyei Bíróság)

«Sixième directive TVA — Adhésion d'un nouvel État membre — Taxe afférente à l'achat subventionné de biens d'équipement — Droit à déduction — Exclusions prévues par une réglementation nationale au moment de l'entrée en vigueur de la sixième directive — Faculté pour les États membres de maintenir des exclusions»

Sommaire de l'arrêt

1.        Dispositions fiscales — Harmonisation des législations — Taxes sur le chiffre d'affaires — Système commun de taxe sur la valeur ajoutée — Déduction de la taxe payée en amont — Exclusions du droit à déduction — Faculté pour les États membres de maintenir les exclusions existant lors de l'entrée en vigueur de la sixième directive

(Directive du Conseil 77/388, art. 17, § 2 et 6)

2.        Dispositions fiscales — Harmonisation des législations — Taxes sur le chiffre d'affaires — Système commun de taxe sur la valeur ajoutée — Déduction de la taxe payée en amont

(Directive du Conseil 77/388, art. 17, § 2)

1.        L'article 17, paragraphes 2 et 6, de la sixième directive 77/388, en matière d'harmonisation des législations des États membres relatives aux taxes sur le chiffre d'affaires, doit être interprété en ce sens qu'il s'oppose à une réglementation nationale qui, en cas d'acquisition de biens subventionnée par des fonds publics, ne permet de déduire la taxe sur la valeur ajoutée y afférente qu'à concurrence de la partie non subventionnée de cette acquisition.

En effet, une telle réglementation introduit, en ce qui concerne l'achat de biens ou de services financés par une subvention, une limitation qui n'est pas autorisée par l'article 17, paragraphe 2, de la sixième directive. Certes, le principe du droit à déduction est néanmoins tempéré par la disposition dérogatoire figurant à l'article 17, paragraphe 6, second alinéa, de ladite directive. Toutefois, l'article 17, paragraphe 6, second alinéa, de la sixième directive doit être lu à la lumière du premier alinéa de cette disposition, qui confère au Conseil la compétence pour déterminer, sur proposition de la Commission, les dépenses n'ouvrant pas droit à déduction de la taxe, tout en précisant que, en tout état de cause, ne pourront pas faire l'objet d'un tel droit les dépenses n'ayant pas un caractère strictement professionnel, telles que les dépenses de luxe, de divertissement ou de représentation. Partant, et eu égard à l'interprétation stricte dont il doit, en tant que disposition dérogatoire, faire l'objet, l'article 17, paragraphe 6, second alinéa, de la sixième directive ne saurait être considéré comme autorisant un État membre à maintenir une restriction du droit à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée susceptible de s'appliquer de façon générale à n'importe quelle dépense liée à l'acquisition de biens, indépendamment de sa nature ou de son objet. Une telle interprétation s'impose également à la lumière de l'historique de cette disposition, lequel traduit une volonté continue du législateur communautaire de n'autoriser que l'exclusion de certains biens ou services du régime de déduction, et non des exclusions générales de ce régime.

(cf. points 20-21, 27-30, disp. 1)

2.        L'article 17, paragraphe 2, de la sixième directive 77/388, en matière d'harmonisation des législations des États membres relatives aux taxes sur le chiffre d'affaires, confère aux assujettis des droits qu'ils peuvent faire valoir devant le juge national pour s'opposer à une réglementation nationale incompatible avec cette disposition. En outre, dans la mesure où une exclusion du régime des déductions n'a pas été établie en conformité avec les dispositions de la sixième directive, les autorités fiscales nationales ne sauraient opposer à un assujetti une disposition dérogatoire au principe du droit à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée. L'assujetti, ayant été soumis à une telle mesure, doit donc pouvoir recalculer la dette de la taxe qui lui incombe, conformément à l'article 17, paragraphe 2, de la sixième directive, dans la mesure où les biens et les services ont été utilisés pour les besoins d'opérations taxées.

(cf. points 33-36, disp. 2)







ARRÊT DE LA COUR (quatrième chambre)

23 avril 2009 (*)

«Sixième directive TVA – Adhésion d’un nouvel État membre – Taxe afférente à l’achat subventionné de biens d’équipement – Droit à déduction –– Exclusions prévues par une réglementation nationale au moment de l’entrée en vigueur de la sixième directive – Faculté pour les États membres de maintenir des exclusions»

Dans l’affaire C-74/08,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 234 CE, introduite par le Nógrád Megyei Bíróság (Hongrie), par décision du 16 juillet 2007, parvenue à la Cour le 30 janvier 2008, dans la procédure

PARAT Automotive Cabrio Textiltetőket Gyártó Kft.

contre

Adó- és Pénzügyi Ellenőrzési Hivatal, Hatósági Főosztály, Észak-magyarországi Kihelyezett Hatósági Osztály,

LA COUR (quatrième chambre),

composée de M. K. Lenaerts, président de chambre, Mme R. Silva de Lapuerta (rapporteur) et M. J. Malenovský, juges,

avocat général: Mme J. Kokott,

greffier: M. B. Fülöp, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 4 mars 2009,

considérant les observations présentées:

–        pour le gouvernement hongrois, par Mmes R. Somssich, J. Fazekas, K. Borvölgyi et M. M. Fehér, en qualité d’agents,

–        pour la Commission des Communautés européennes, par M. D. Triantafyllou et Mme K. Talabér-Ritz, en qualité d’agents,

vu la décision prise, l’avocat général entendu, de juger l’affaire sans conclusions,

rend le présent

Arrêt

1        La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 17, paragraphes 2 et 6, de la sixième directive 77/388/CEE du Conseil, du 17 mai 1977, en matière d’harmonisation des législations des États membres relatives aux taxes sur le chiffre d’affaires – Système commun de taxe sur la valeur ajoutée: assiette uniforme (JO L 145, p. 1, ci-après la «sixième directive»).

2        Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant l’entreprise PARAT Automotive Cabrio Textiltetőket Gyártó Kft. (ci-après «PARAT») au Adó- és Pénzügyi Ellenőrzési Hivatal, Hatósági Főosztály, Észak-magyarországi Kihelyezett Hatósági Osztály (bureau fiscal local dépendant du bureau fiscal de la région Nord-Hongrie de l’administration des contributions et du contrôle financier, ci-après l’«APEH»), au sujet de la détermination du champ d’application du droit fiscal national concernant le droit à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée (ci-après la «TVA») afférente à l’achat de biens subventionnés.

 Le cadre juridique

 La réglementation communautaire

3        L’article 2 de la première directive 67/227/CEE du Conseil, du 11 avril 1967, en matière d’harmonisation des législations des États membres relatives aux taxes sur le chiffre d’affaires (JO 1967, 71, p. 1301) est libellé comme suit:

«Le principe du système commun de [TVA] est d’appliquer aux biens et aux services un impôt général sur la consommation exactement proportionnel au prix des biens et des services, quel que soit le nombre des transactions intervenues dans le processus de production et de distribution antérieur au stade d’imposition.

À chaque transaction, la [TVA], calculée sur le prix du bien ou du service au taux applicable à ce bien ou à ce service, est exigible déduction faite du montant de la [TVA] qui a grevé directement le coût des divers éléments constitutifs du prix.

[…]»

4        Aux termes de l’article 17, paragraphes 2, 6 et 7, de la sixième directive, telle que modifiée par la directive 95/7/CE du Conseil, du 10 avril 1995 (JO L 102, p. 18):

«2.      Dans la mesure où les biens et les services sont utilisés pour les besoins de ses opérations taxées, l’assujetti est autorisé à déduire de la taxe dont il est redevable:

a)      la [TVA] due ou acquittée à l’intérieur du pays pour les biens qui lui sont ou lui seront livrés et pour les services qui lui sont ou seront rendus par un autre assujetti;

[…]

6.      Au plus tard avant l’expiration d’une période de quatre ans à compter de la date d’entrée en vigueur de la présente directive, le Conseil, statuant à l’unanimité sur proposition de la Commission, déterminera les dépenses n’ouvrant pas droit à déduction de la [TVA]. En tout état de cause, seront exclues du droit à déduction les dépenses n’ayant pas un caractère strictement professionnel, telles que les dépenses de luxe, de divertissement ou de représentation.

Jusqu’à l’entrée en vigueur des règles visées ci-dessus, les États membres peuvent maintenir toutes les exclusions prévues par leur législation nationale au moment de l’entrée en vigueur de la présente directive.

7.      Sous réserve de la consultation prévue à l’article 29, chaque État membre a la faculté, pour des raisons conjoncturelles, d’exclure partiellement ou totalement du régime des déductions les ou certains biens d’investissement ou d’autres biens. Afin de maintenir des conditions de concurrence identiques, les États membres peuvent, au lieu de refuser la déduction, taxer les biens fabriqués par l’assujetti lui-même ou qu’il a achetés à l’intérieur du pays, ou importés, de manière que cette taxation ne dépasse pas le montant de la [TVA] qui grèverait l’acquisition de biens similaires.»

 La réglementation nationale

5        Le chapitre VIII de la loi hongroise n° LXXIV de 1992 relative à la taxe sur la valeur ajoutée (ci-après la «loi sur la TVA») en vigueur le 1er mai 2004 – date de l’adhésion de la République de Hongrie à l’Union européenne – comportait, au moment des faits en cause au principal, à son article 38, paragraphe 1, sous a), concernant la ventilation de la taxe en amont, sous le titre «Déduction de la taxe», la disposition suivante:

«Ventilation de la taxe en amont

L’assujetti est tenu d’indiquer dans ses comptes de manière distincte le montant de la taxe en amont déductible et non déductible […]. L’assujetti qui bénéficie de subventions sur des fonds publics n’entrant pas dans l’assiette de l’impôt […] peut, dans la mesure où la loi annuelle de finances n’en dispose pas autrement,

a)      en cas de subventions obtenues en vue de l’acquisition de certains biens, exercer son droit à déduction uniquement à l’égard de l’acquisition en question et à concurrence d’un montant maximal égal à la part non subventionnée.

[…]»

6        La disposition susvisée a été abrogée avec effet au 1er janvier 2006. Cette mesure n’était cependant pas rétroactive. Ainsi, l’application du calcul au prorata des subventions financées par des fonds publics s’appliquait pour tout achat de biens effectué avant le 31 décembre 2005.

 Le litige au principal et les questions préjudicielles

7        En vertu d’un contrat de subvention conclu le 11 mai 2005 avec la Magyar Fejlesztési Bank (Banque hongroise de développement), agissant au nom du Gazdasági és Közlekedési Minisztérium (ministère de l’Économie et du Transport), PARAT a réalisé un investissement en vue d’élargir ses capacités de production de toits décapotables pour voitures au cours de l’année 2005. Ledit contrat avait octroyé à PARAT une subvention à fonds perdus équivalant à 47 % du montant total des dépenses d’investissement.

8        PARAT a comptabilisé au titre de cet investissement quatre factures délivrées pour l’achat de machines d’un montant total de 43 882 853 HUF en déduisant la totalité de la TVA indiquée sur ces factures, soit 10 971 718 HUF, dans sa déclaration de TVA concernant le mois de septembre 2005.

9        Par la suite, la Nógrád Megyei Igazgatóság Kiutalás Előtti Ellenőrzési Osztálya (division de contrôle de la direction de l’administration fiscale du comitat de Nógrád) a effectué un contrôle de la déclaration susmentionnée qui concluait que PARAT devait diminuer le montant de la TVA déduit relatif à l’achat des machines dans le cadre de l’investissement réalisé, en raison de la subvention à fonds perdus qu’elle avait reçue.

10      L’APEH a alors calculé le montant de la TVA déductible, sur la base de la part du financement perçu (47 %), en constatant que, au lieu du montant de 10 971 718 HUF que PARAT avait déduit en tant que TVA sur les biens d’équipement achetés, cette dernière avait droit à une déduction de 5 748 000 HUF. L’APEH a alors fixé le montant de TVA non déductible, après le calcul du prorata restant, à 5 223 718 HUF, ce montant ayant été porté à la charge de PARAT en tant que dette fiscale. En outre, ce montant a été majoré d’une amende et d’une pénalité de retard.

11      Dans sa réclamation dirigée contre cette décision, PARAT a demandé l’annulation de ladite dette fiscale ainsi que de l’amende et de la pénalité de retard. Elle a notamment fait valoir que la réglementation nationale applicable à l’époque des faits au principal constituait une limitation du droit à déduction de la TVA incompatible avec les dispositions de la sixième directive. La réclamation de PARAT a été rejetée par l’APEH.

12      PARAT a alors introduit un recours en annulation contre la décision ordonnant le recouvrement de la dette fiscale, majorée d’une amende et d’une pénalité de retard. Elle a souligné, notamment, que l’article 17, paragraphe 2, de la sixième directive lui permettait de déduire la totalité de la TVA figurant dans les factures correspondant aux biens d’équipement acquis.

13      Dans ces conditions, le Nógrád Megyei Bíróság a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes:

«1)       Lors de l’adhésion de la République de Hongrie à l’Union européenne le 1er mai 2004, le régime établi à l’article 38, paragraphe 1, sous a), de la loi [sur la TVA] était-il compatible avec les dispositions de l’article 17 de la sixième directive [...]?

2)       En cas de réponse négative, la partie demanderesse peut-elle invoquer directement, lors de l’exercice du droit à déduction, l’application de l’article 17 de la sixième directive à l’encontre du régime établi à l’article 38, paragraphe 1, sous a), de la loi [sur la TVA]?»

 Sur les questions préjudicielles

 Sur la première question

14      Par sa première question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si les dispositions énoncées à l’article 17 de la sixième directive s’opposent à ce qu’un État membre exclue le droit à déduction de la TVA pour la partie du prix d’achat d’un bien qui provient d’une subvention financée par des fonds publics.

15      Afin de répondre à cette question, il y a lieu de rappeler à titre liminaire que le droit à déduction de la TVA constitue, en tant que partie intégrante du mécanisme de TVA, un principe fondamental inhérent au système commun de TVA et ne peut en principe être limité (voir arrêts du 21 mars 2000, Gabalfrisa e.a., C-110/98 à C-147/98, Rec. p. I-1577, point 43; du 8 janvier 2002, Metropol et Stadler, C-409/99, Rec. p. I-81, point 42, ainsi que du 26 mai 2005, Kretztechnik, C-465/03, Rec. p. I-4357, point 33).

16      La Cour a également jugé, auxdits points des arrêts précités, que, selon les principes régissant le système commun de TVA, cette taxe s’applique à chaque transaction de production ou de distribution, déduction faite de la TVA qui a grevé directement les opérations effectuées en amont. Le droit à déduction s’exerce immédiatement pour la totalité des taxes ayant grevé les opérations effectuées en amont. Il en résulte que toute limitation du droit à déduction de la TVA a une incidence sur le niveau de la charge fiscale et doit s’appliquer de manière similaire dans tous les États membres.

17      Il importe de relever, en outre, que l’article 17, paragraphe 2, de la sixième directive énonce, en termes explicites et précis, le principe de la déduction par l’assujetti des montants qui lui sont facturés au titre de la TVA pour les biens qui lui sont livrés ou les services qui lui sont rendus, dans la mesure où ces biens ou ces services sont utilisés pour les besoins de ses opérations taxées (voir arrêts Metropol et Stadler, précité, point 43; du 11 décembre 2008, Danfoss et AstraZeneca, C-371/07, non encore publié au Recueil, point 27, ainsi que du 22 décembre 2008, Magoora, C-414/07, non encore publié au Recueil, point 29).

18      Dans ces conditions, des dérogations ne sont permises que dans les cas expressément prévus par la sixième directive (voir arrêts du 19 septembre 2000, Ampafrance et Sanofi, C-177/99 et C-181/99, Rec. p. I-7013, point 34, ainsi que arrêts précités Danfoss et AstraZeneca, point 26, et Magoora, point 28).

19      Quant à une réglementation nationale telle que celle en cause dans l’affaire au principal, intitulée «Déduction de la taxe», il convient d’observer qu’elle contient une limitation générale du droit à déduction de la TVA qui est applicable à toute acquisition d’un bien bénéficiant d’une subvention financée par des fonds publics.

20      Une telle réglementation introduit, en ce qui concerne l’achat de biens ou de services financés par une subvention, une limitation du droit à déduction qui n’est pas autorisée par l’article 17, paragraphe 2, de la sixième directive (voir, en ce sens, arrêts du 6 octobre 2005, Commission/Espagne, C-204/03, Rec. p. I-8389, points 26 et 27, ainsi que Commission/France, C-243/03, Rec. p. I-8411, point 32).

21      Le principe du droit à déduction de la TVA est néanmoins tempéré par la disposition dérogatoire figurant au second alinéa de l’article 17, paragraphe 6, de la sixième directive. En vertu de cette disposition, les États membres sont autorisés à maintenir leur législation existante, en matière d’exclusion du droit à déduction de la TVA, à la date d’entrée en vigueur de ladite directive, jusqu’à ce que le Conseil détermine les dépenses n’ouvrant pas ledit droit (voir arrêts précités Metropol et Stadler, point 44, ainsi que Danfoss et AstraZeneca, point 28).

22      L’article 17, paragraphe 6, second alinéa, de la sixième directive contient une clause de «standstill» prévoyant le maintien des exclusions nationales du droit à déduction de la TVA qui étaient applicables avant l’entrée en vigueur de la sixième directive pour l’État membre concerné. Cette disposition vise à permettre aux États membres, en attendant l’établissement par le Conseil du régime communautaire des exclusions du droit à déduction de la TVA, de maintenir toute règle de droit national portant exclusion de ce droit à déduction effectivement appliquée par leurs autorités publiques au moment de l’entrée en vigueur de la sixième directive (voir arrêts précités Metropol et Stadler, point 48; Danfoss et AstraZeneca, points 30 et 31, ainsi que Magoora, point 35).

23      Toutefois, s’agissant d’un régime prévoyant une dérogation au principe du droit à déduction de la TVA, qui est institué de manière générale au paragraphe 2 de l’article 17 de la sixième directive et qui vise à garantir la neutralité de cette taxe, il doit être d’interprétation stricte (voir arrêts précités Metropol et Stadler, point 59, ainsi que Magoora, point 28).

24      En ce qui concerne une situation telle que celle dans l’affaire au principal et l’applicabilité du régime dérogatoire susvisé, il y a lieu d’observer d’abord que la sixième directive est entrée en vigueur en Hongrie à la date de l’adhésion de cet État membre à l’Union européenne, à savoir le 1er mai 2004. Dès lors, cette date est pertinente aux fins de l’application de l’article 17, paragraphe 6, de ladite directive en ce qui concerne cet État membre (voir, en ce sens, arrêt Magoora, précité, point 27).

25      Afin d’apprécier une réglementation nationale telle que celle dans l’affaire au principal au regard dudit régime dérogatoire communautaire, il importe de constater que, ainsi qu’il ressort du point 19 du présent arrêt, elle constitue une mesure de nature générale restreignant le droit à déduction intégrale de la TVA acquittée en amont relatif à toute acquisition de biens financée par une subvention provenant de fonds publics.

26      Or, ladite réglementation comporte une limitation du droit à déduction qui excède ce qui est autorisé par l’article 17, paragraphe 6, de la sixième directive.

27      En effet, l’article 17, paragraphe 6, second alinéa, de la sixième directive doit être lu à la lumière du premier alinéa de cette même disposition, qui confère au Conseil la compétence pour déterminer, sur proposition de la Commission, les dépenses n’ouvrant pas droit à déduction de la TVA, tout en précisant que, en tout état de cause, ne pourront pas faire l’objet d’un tel droit les dépenses n’ayant pas un caractère strictement professionnel, telles que les dépenses de luxe, de divertissement ou de représentation.

28      Par conséquent, et eu égard à l’interprétation stricte dont il doit, en tant que disposition dérogatoire, faire l’objet, l’article 17, paragraphe 6, second alinéa, de la sixième directive ne saurait être considéré comme autorisant un État membre à maintenir une restriction du droit à déduction de la TVA susceptible de s’appliquer de façon générale à n’importe quelle dépense liée à l’acquisition de biens, indépendamment de sa nature ou de son objet.

29      Une telle interprétation s’impose également à la lumière de l’historique de cette disposition, lequel traduit une volonté continue du législateur communautaire de n’autoriser que l’exclusion de certains biens ou services du régime de déduction, et non des exclusions générales de ce régime (voir, en ce sens, arrêts du 5 octobre 1999, Royscot e.a., C-305/97, Rec. p. I-6671, point 22, ainsi que du 14 juillet 2005, Charles et Charles-Tijmens, C-434/03, Rec. p. I-7037, points 32 et 35).

30      Il convient, dès lors, de répondre à la première question que l’article 17, paragraphes 2 et 6, de la sixième directive doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à une réglementation nationale qui, en cas d’acquisition de biens subventionnée par des fonds publics, ne permet de déduire la TVA y afférente qu’à concurrence de la partie non subventionnée de cette acquisition.

 Sur la seconde question

31      Par sa seconde question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si un assujetti peut invoquer l’application de l’article 17 de la sixième directive à l’encontre d’une réglementation nationale qui limite le droit à déduction de la TVA d’une manière non compatible avec les paragraphes 2 et 6 dudit article 17.

32      Afin de répondre à cette question, il y a lieu de rappeler que la Cour, dans son arrêt du 6 juillet 1995, BP Soupergaz (C-62/93, Rec. p. I-1883, point 35), a relevé que l’article 17, paragraphe 2, de la sixième directive indique avec précision les conditions de naissance et l’étendue dudit droit, et ne laisse aux États membres aucune marge d’appréciation quant à sa mise en œuvre.

33      La Cour a, dès lors, jugé, aux points 35 et 36 dudit arrêt, que l’article 17, paragraphe 2, de la sixième directive confère aux particuliers des droits qu’ils peuvent faire valoir devant le juge national pour s’opposer à une réglementation nationale incompatible avec ladite disposition.

34      La Cour a également souligné que, dans la mesure où une exclusion du régime des déductions n’a pas été établie en conformité avec les dispositions de la sixième directive, les autorités fiscales nationales ne sauraient opposer à un assujetti une disposition dérogatoire au principe du droit à déduction de la TVA (voir arrêt du 14 septembre 2006, Stradasfalti, C-228/05, Rec. p. I-8391, point 66).

35      L’assujetti, ayant été soumis à une telle mesure, doit donc pouvoir recalculer la dette de TVA qui lui incombe, conformément à l’article 17, paragraphe 2, de la sixième directive, dans la mesure où les biens et les services ont été utilisés pour les besoins d’opérations taxées (voir arrêt Stradasfalti, précité, point 68).

36      Par conséquent, il convient de répondre à la seconde question que l’article 17, paragraphe 2, de la sixième directive confère aux assujettis des droits qu’ils peuvent faire valoir devant le juge national pour s’opposer à une réglementation nationale incompatible avec cette disposition.

 Sur les dépens

37      La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

Par ces motifs, la Cour (quatrième chambre) dit pour droit:

1)      L’article 17, paragraphes 2 et 6, de la sixième directive 77/388/CEE du Conseil, du 17 mai 1977, en matière d’harmonisation des législations des États membres relatives aux taxes sur le chiffre d’affaires – Système commun de taxe sur la valeur ajoutée: assiette uniforme, doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à une réglementation nationale qui, en cas d’acquisition de biens subventionnée par des fonds publics, ne permet de déduire la taxe sur la valeur ajoutée y afférente qu’à concurrence de la partie non subventionnée de cette acquisition.

2)      L’article 17, paragraphe 2, de la sixième directive 77/388 confère aux assujettis des droits qu’ils peuvent faire valoir devant le juge national pour s’opposer à une réglementation nationale incompatible avec cette disposition.

Signatures


* Langue de procédure: le hongrois.