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ARRÊT DE LA COUR (première chambre)

16 janvier 2014 ( 1 )

„Taxe sur la valeur ajoutée — Opérations des agences de voyages — Octroi de rabais aux voyageurs — Détermination de la base d’imposition des prestations de services fournies dans le cadre d’une activité d’intermédiaire“

Dans l’affaire C-300/12,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Bundesfinanzhof (Allemagne), par décision du 26 avril 2012, parvenue à la Cour le 20 juin 2012, dans la procédure

Finanzamt Düsseldorf-Mitte

contre

Ibero Tours GmbH,

LA COUR (première chambre),

composée de M. A. Tizzano, président de chambre, M. K. Lenaerts, vice-président de la Cour, faisant fonction de juge de la première chambre, MM. A. Borg Barthet (rapporteur), E. Levits et Mme M. Berger, juges,

avocat général: M. M. Wathelet,

greffier: M. K. Malacek, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 5 juin 2013,

considérant les observations présentées:

pour Ibero Tours GmbH, par Me P. Englert, Rechtsanwalt, et M. P. Moser, barrister,

pour le gouvernement allemand, par M. T. Henze et Mme K. Petersen, en qualité d’agents,

pour le gouvernement du Royaume-Uni, par M. L. Christie, en qualité d’agent, assisté de M. R. Hill, barrister,

pour la Commission européenne, par Mme C. Soulay et M. W. Mölls, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 18 juillet 2013,

rend le présent

Arrêt

1

La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de la sixième directive 77/388/CEE du Conseil, du 17 mai 1977, en matière d’harmonisation des législations des États membres relatives aux taxes sur le chiffre d’affaires – Système commun de taxe sur la valeur ajoutée: assiette uniforme (JO L 145, p. 1, ci-après la «sixième directive»).

2

Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant le Finanzamt Dusserdörf-Mitte (ci-après «le Finanzamt») à Ibero Tours GmbH (ci-après «Ibero Tours») au sujet de la détermination du montant de la taxe sur la valeur ajoutée (ci-après la «TVA») due par cette dernière au titre des exercices 2002 à 2005.

Le cadre juridique

Le droit de l’Union

3

Aux termes de l’article 11, A, paragraphe 1, sous a), de la sixième directive:

«[...]

1.   La base d’imposition est constituée:

a)

pour les livraisons de biens et les prestations de services autres que celles visées sous b), c) et d), par tout ce qui constitue la contrepartie obtenue ou à obtenir par le fournisseur ou le prestataire pour ces opérations de la part de l’acheteur, du preneur ou d’un tiers, y compris les subventions directement liées au prix de ces opérations».

4

L’article 11, A, paragraphe 3, de la sixième directive énonce:

«Ne sont pas à comprendre dans la base d’imposition:

a)

les diminutions de prix à titre d’escompte pour paiement anticipé;

b)

les rabais et ristournes de prix consentis à l’acheteur ou au preneur et acquis au moment où s’effectue l’opération;

[...]»

5

L’article 11, C, de la sixième directive, intitulé «Dispositions diverses», dispose à son paragraphe 1, premier alinéa:

«En cas d’annulation, de résiliation, de résolution, de non-paiement total ou partiel ou de réduction de prix après le moment où s’effectue l’opération, la base d’imposition est réduite à due concurrence dans les conditions déterminées par les États membres.»

6

L’article 26 de la sixième directive, intitulé «Régime particulier des agences de voyages», prévoit:

«1.   Les États membres appliquent la [TVA] aux opérations des agences de voyages conformément au présent article, dans la mesure où ces agences agissent en leur propre nom à l’égard du voyageur et lorsqu’elles utilisent, pour la réalisation du voyage, des livraisons et des prestations de services d’autres assujettis. Le présent article n’est pas applicable aux agences de voyages qui agissent uniquement en qualité d’intermédiaire et auxquelles l’article 11 sous A paragraphe 3 sous c) est applicable. Au sens du présent article, sont également considérés comme agences de voyages les organisateurs de circuits touristiques.

2.   Les opérations effectuées par l’agence de voyages pour la réalisation du voyage sont considérées comme une prestation de service unique de l’agence de voyages au voyageur. Celle-ci est imposée dans l’État membre dans lequel l’agence de voyages a établi le siège de son activité économique ou un établissement stable à partir duquel elle a fourni la prestation de services. Pour cette prestation de services est considérée comme base d’imposition et comme prix hors taxe, au sens de l’article 22 paragraphe 3 sous b), la marge de l’agence de voyages, c’est-à-dire la différence entre le montant total à payer par le voyageur hors [TVA] et le coût effectif supporté par l’agence de voyages pour les livraisons et prestations de services d’autres assujettis, dans la mesure où ces opérations profitent directement au voyageur.

3.   Si les opérations pour lesquelles l’agence de voyages a recours à d’autres assujettis sont effectuées par ces derniers en dehors de la Communauté, la prestation de services de l’agence est assimilée à une activité d’intermédiaire exonérée en vertu de l’article 15 point 14. Si ces opérations sont effectuées tant à l’intérieur qu’à l’extérieur de la Communauté, seule doit être considérée comme exonérée la partie de la prestation de services de l’agence de voyages qui concerne les opérations effectuées en dehors de la Communauté.

4.   Les montants de la [TVA] qui sont portés en compte à l’agence de voyages par d’autres assujettis pour les opérations visées au paragraphe 2 et qui profitent directement au voyageur ne sont ni déductibles, ni remboursables dans aucun État membre.»

Le droit allemand

7

L’article 17, paragraphe 1, de la loi relative à la taxe sur la valeur ajoutée (Umsatzsteuergesetz, ci-après l’«UStG»), dans sa version en vigueur du 1er janvier 2002 au 16 décembre 2004, disposait:

«En cas de modification de la base de calcul d’une opération imposable au sens de l’article 1er, paragraphe 1, point 1,

1.   l’entrepreneur qui a réalisé cette opération imposable doit rectifier en conséquence le montant d’impôt qui est dû et

2.   l’entrepreneur destinataire doit rectifier en conséquence le montant d’impôt qu’il est en droit de déduire à ce titre;

cela s’applique par analogie dans les cas de l’article 1er, paragraphe 1, point 5 et de l’article 13 ter. Il est possible de renoncer à la rectification de la déduction de l’impôt payé en amont pour autant qu’un entrepreneur tiers verse au centre des impôts le montant de l’impôt correspondant à la diminution de la rémunération; dans ce cas, l’entrepreneur tiers est le débiteur de l’impôt. [...]»

8

L’article 17, paragraphe 1, de l’UStG, dans sa version en vigueur depuis le 16 décembre 2004, dispose:

«En cas de modification de la base de calcul d’une opération imposable au sens de l’article 1er, paragraphe 1, point 1, l’entrepreneur qui a réalisé cette opération imposable doit rectifier le montant d’impôt qui est dû. De même, l’entrepreneur destinataire doit rectifier le montant d’impôt qu’il est en droit de déduire à ce titre. Cela ne s’applique pas dans la mesure où il n’est pas économiquement avantagé par la modification de la base d’imposition. Si, dans un tel cas, un autre entrepreneur est économiquement avantagé par la modification de la base d’imposition, il doit rectifier le montant d’impôt qu’il est en droit de déduire. Les phrases 1 à 4 s’appliquent par analogie dans les cas de l’article 1er, paragraphe 1, point 5 et de l’article 13 ter. Il est possible de renoncer à la rectification de la déduction de l’impôt payé en amont pour autant qu’un entrepreneur tiers verse au centre des impôts le montant de l’impôt correspondant à la diminution de la rémunération; dans ce cas, l’entrepreneur tiers est le débiteur de l’impôt. [...]»

9

L’article 25, paragraphes 1 à 4, de l’UStG, dans sa version en vigueur depuis le 1er avril 1999, dispose:

«1.   Les dispositions suivantes sont applicables aux services de voyages d’un entrepreneur, qui ne sont pas destinés à l’entreprise du preneur, dans la mesure où l’entrepreneur agit, ce faisant, en son propre nom à l’égard du preneur et qu’il utilise des services de voyages de tiers. Le service fourni par l’entrepreneur doit être qualifié d’autre service. Si l’entrepreneur fournit à un preneur, dans le cadre d’un voyage, plusieurs services de ce type, alors ceux-ci sont considérés comme un autre service unique. Le lieu de la fourniture d’un autre service est déterminé conformément à l’article 3 bis, paragraphe 1. Les services de voyages de tiers correspondent à des livraisons et autres services de tiers profitant directement aux voyageurs.

2.   L’autre service est exonéré, dans la mesure où les services de voyages de tiers qui y sont relatifs sont exécutés sur le territoire d’un État tiers. [...]

3.   La valeur d’un autre service correspond à la différence entre le montant payé par le preneur en vue de l’obtention du service et le montant que l’entrepreneur paie pour les services de voyages de tiers. [...]

4.   Par dérogation à l’article 15, paragraphe 1, l’entrepreneur n’est pas autorisé à déduire comme TVA collectée en amont les montants de la taxe qui ont été portés à son compte, de manière séparée, pour les services de voyages de tiers. Par ailleurs, l’article 15 n’est pas affecté.»

10

L’article 25, paragraphe 4, de l’UStG, dans sa version en vigueur depuis le 1er janvier 2005, dispose:

«Par dérogation à l’article 15, paragraphe 1, l’entrepreneur n’est pas autorisé à déduire comme TVA collectée en amont les montants de la taxe qui ont été portés à son compte, de manière séparée, pour les services de voyages de tiers, ainsi que les montants de taxe qui sont dus en vertu de l’article 13 ter. Par ailleurs, l’article 15 n’est pas affecté.»

Le litige au principal et les questions préjudicielles

11

Dans le cadre de son activité économique, Ibero Tours fournit des prestations de services en qualité d’intermédiaire sur le territoire allemand qui entrent dans le champ d’application de la sixième directive. Ces prestations de services sont en partie exonérées et en partie taxées.

12

Dans le cadre des opérations taxées, Ibero Tours propose, en tant qu’intermédiaire, des prestations de services de voyage qui sont fournies par les organisateurs de circuits touristiques aux clients et qui relèvent du régime particulier institué à l’article 26 de la sixième directive. Bien qu’Ibero Tours soit une agence de voyages, ce régime particulier ne s’applique pas aux prestations de services en cause au principal, étant donné que cette agence agit uniquement en qualité d’intermédiaire et que, en vertu de l’article 26, paragraphe 1, deuxième phrase, de la sixième directive, le régime particulier prévu audit article n’est pas applicable à une telle agence.

13

Ibero Tours fournit aux organisateurs de circuits touristiques des prestations de services en qualité d’intermédiaire et reçoit, de la part de ceux-ci, les commissions convenues. Elle a cependant accordé des réductions de prix aux clients voyageurs, qu’elle a financées par une partie de ses commissions. Après s’être, tout d’abord, acquittée de la TVA grevant l’intégralité des commissions perçues, elle a demandé au Finanzamt une modification du calcul de cette taxe au titre des exercices 2002 à 2005, de manière à ce que les réductions de prix accordées à ses clients soient déduites de la base d’imposition.

14

Le Finanzamt a accueilli cette demande uniquement dans la mesure où les prestations de services fournies par les organisateurs de circuits touristiques étaient taxées dans le cadre du régime particulier institué à l’article 26 de la sixième directive. En revanche, dans la mesure où ces prestations étaient exonérées en vertu de l’article 26, paragraphe 3, de la sixième directive, le Finanzamt a refusé de procéder à la modification sollicitée par Ibero Tours.

15

Après une réclamation infructueuse, Ibero Tours a formé un recours auquel le Finanzgericht (tribunal des finances) a fait droit. Le Finanzamt a saisi le Bundesfinanzhof d’un pourvoi contre le jugement du Finanzgericht.

16

La juridiction de renvoi se demande, en premier lieu, s’il est possible d’appliquer les principes définis par la Cour dans l’arrêt du 24 octobre 1996, Elida Gibbs (C-317/94, Rec. p. I-5339), lorsqu’un intermédiaire, dans le cadre d’une prestation de services, accorde une réduction de prix sur la prestation principale dans laquelle il intervient.

17

Si le principe de neutralité plaide en faveur de la mise en œuvre dans la présente affaire des solutions retenues dans cet arrêt, des doutes seraient néanmoins permis étant donné que la Cour envisage, dans ledit arrêt, une «chaîne de distribution» dans laquelle des «marchandises semblables» sont livrées à plusieurs reprises et sous les mêmes conditions fiscales. Par conséquent, la juridiction de renvoi se demande si ces notions sont pertinentes, dans l’affaire au principal, puisque les opérations de l’opérateur principal et de l’intermédiaire sont de nature différente et font chacune l’objet d’un traitement fiscal qui leur est propre.

18

En deuxième lieu, s’il est considéré que les prestations de services effectuées dans le cadre d’une activité d’intermédiaire peuvent faire partie d’une chaîne de distribution à laquelle seraient applicables les principes dégagés par la Cour dans l’arrêt Elida Gibbs, précité, la question demeure, selon le Bundesfinanzhof, de savoir si cela vaut également lorsque les prestations de services principales relèvent de l’article 26 de la sixième directive. En effet, la juridiction de renvoi estime que, dans une telle hypothèse, il est douteux qu’une application des principes définis par la Cour dans ledit arrêt conduise à une taxation correcte.

19

En outre, elle relève que la Cour, dans son arrêt du 15 octobre 2002, Commission/Allemagne (C-427/98, Rec. p. I-8315), a jugé que les États membres étaient en droit de ne pas appliquer les principes résultant de l’arrêt Elida Gibbs, précité, lorsque la prestation principale est exonérée. La juridiction de renvoi considère à cet égard que l’arrêt Commission/Allemagne, précité, doit être compris en ce sens que les principes définis par la Cour dans l’arrêt Elida Gibbs, précité, ne doivent pas être appliqués lorsque la dernière prestation de services de la chaîne de distribution est exonérée. Si les prestations de services principales relèvent du régime particulier institué à l’article 26 de la sixième directive, le paragraphe 3 de cet article les assimile à une activité d’intermédiaire exonérée lorsque les opérations pour lesquelles le prestataire de ces services fait appel à d’autres assujettis sont effectuées par ces derniers en dehors de l’Union européenne. Si ces opérations sont effectuées aussi bien au sein de l’Union qu’en dehors, la prestation de services n’est alors que partiellement exonérée.

20

Il s’ensuit qu’il serait possible d’avoir des doutes sur la question de savoir comment l’agence de voyages et l’administration fiscale compétente à son égard sont censés déterminer dans quelle mesure la prestation de services principale de voyage est exonérée et dans quelle mesure elle n’autorise donc pas l’application des principes définis par la Cour dans l’arrêt Elida Gibbs, précité.

21

En troisième lieu, la juridiction de renvoi considère la situation dans laquelle un État membre a transposé dûment l’article 11, C, paragraphe 1, de la sixième directive, mais souhaite néanmoins exclure la réduction de la TVA due par l’intermédiaire dans le cas de prestations de services principales exonérées. Elle doute que cette exclusion soit couverte par la transposition correcte de ladite disposition et s’interroge sur la nécessité d’une réglementation de l’État membre concerné dans laquelle cette réduction serait spécifiquement prévue. À son avis, les points 65 et 66 de l’arrêt Commission/Allemagne, précité, plaident en faveur de cette dernière appréciation dans la mesure où il y est question des «possibilités» des États membres. Elle estime que cette conclusion ne s’impose toutefois pas forcément lorsqu’il s’agit de limiter les conséquences résultant d’une interprétation donnée par la Cour.

22

Dans ces conditions, le Bundesfinanzhof a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes:

«1)

En application des principes définis par la Cour [...] dans l’arrêt [...] Elida Gibbs[, précité], le fait qu’un intermédiaire (dans l’affaire au principal, une agence de voyages) rembourse au preneur (en l’espèce, le client voyageur) de l’opération principale dans laquelle cet intermédiaire intervient (en l’espèce, la prestation de l’organisateur de circuits touristiques au client) une partie du prix de celle-ci entraîne-t-il également une réduction de la base imposable dans le cadre d’une chaîne de distribution?

2)

En cas de réponse affirmative à la première question, les principes définis par la Cour [dans ledit] arrêt [...] doivent-ils être également appliqués lorsque seule l’opération principale de l’organisateur de circuits touristiques est soumise au régime particulier institué à l’article 26 de la sixième directive [...], et non la prestation d’intermédiaire de l’agence de voyages?

3)

Dans l’hypothèse où la Cour répondrait également par l’affirmative à la deuxième question, en cas d’exonération fiscale de la prestation principale, un État membre ayant dûment transposé l’article 11, C, paragraphe 1, de la sixième directive [...] est-il fondé à refuser une réduction de la base d’imposition uniquement lorsqu’il a créé des conditions supplémentaires pour refuser cette réduction dans l’exercice du pouvoir qui lui est conféré par cette disposition?»

Sur les questions préjudicielles

Sur la première question

23

Par sa première question, la juridiction de renvoi cherche à savoir, en substance, si les principes définis par la Cour dans l’arrêt Elida Gibbs, précité, concernant la détermination de la base d’imposition de la TVA sont applicables lorsqu’une agence de voyages, agissant en qualité d’intermédiaire, accorde au consommateur final, de sa propre initiative et à ses propres frais, une réduction de prix sur la prestation principale fournie par l’organisateur de circuits touristiques.

24

Afin de répondre à cette question, il y a lieu de rappeler que, selon l’article 11, A, paragraphe 1, sous a), de la sixième directive, la base d’imposition est constituée, pour les livraisons de biens et les prestations de services, par tout ce qui constitue la contrepartie obtenue ou à obtenir par le fournisseur ou le prestataire pour ces opérations de la part de l’acheteur, du preneur ou d’un tiers, y compris les subventions directement liées au prix de ces opérations.

25

Certes, l’article 26 de la sixième directive vise à éviter les difficultés pratiques posées par le fait que les activités des agences de voyages et des organisateurs de circuits touristiques se composent de multiples prestations et se réalisent dans plusieurs lieux. Toutefois la réalisation de cet objectif ne nécessite aucunement qu’il soit dérogé à la règle générale énoncée à l’article 11, A, paragraphe 1, sous a), de la sixième directive, qui, aux fins de la détermination de la base d’imposition, se réfère à la notion de «contrepartie obtenue ou à obtenir [...] par le prestataire [...] de la part [...] du preneur ou d’un tiers» (voir arrêt du 19 juin 2003, First Choice Holidays, C-149/01, Rec. p. I-6289, point 26).

26

Or, dans l’affaire au principal, d’une part, la contrepartie obtenue par l’organisateur des circuits touristiques pour ses prestations est le prix total du voyage sans réductions. Ce fait n’est pas remis en cause par la circonstance qu’Ibero Tours ne verse à l’organisateur du voyage qu’un montant réduit constitué du prix du voyage minoré de la commission qui lui est due, cette réduction n’étant que le résultat de la compensation de sommes dues à des titres différents.

27

D’autre part, étant donné qu’Ibero Tours n’accorde pas de remise pour les prestations de services fournies dans le cadre de son activité d’intermédiaire à l’organisateur de circuits touristiques et que ce dernier n’est pas concerné par l’existence ou le montant de la remise accordée par Ibero Tours aux consommateurs finals, le fait que celle-ci finance cette remise par une partie de sa commission ou par d’autres fonds n’a de conséquences ni sur le prix des prestations de services fournies par ledit organisateur ni sur le prix de celles fournies par Ibero Tours dans le cadre de son activité d’intermédiaire au même organisateur.

28

Les principes dégagés dans l’arrêt Elida Gibbs, précité, n’affectent pas la détermination de la base d’imposition dans une situation telle que celle en cause au principal.

29

Il doit être rappelé à cet égard que la Cour a jugé dans ledit arrêt que lorsqu’un fabricant d’un produit qui, n’étant pas contractuellement lié au consommateur final, mais étant le premier maillon d’une chaîne d’opérations qui aboutit à ce dernier, accorde une réduction de prix audit consommateur final au moyen de bons de réduction encaissés par les détaillants et remboursés par le fabricant à ces derniers, la base d’imposition aux fins de la TVA doit être diminuée de ladite réduction (arrêt Elida Gibbs, précité, points 31, 34 et 35). Dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt Elida Gibbs, précité, la contrepartie reçue par l’assujetti, qui se trouvait à la tête d’une chaine d’opérations, se voyait, en effet, effectivement réduite par la réduction accordée par ce même assujetti directement au consommateur final.

30

Toutefois, dans les circonstances en cause au principal, l’organisateur de circuits touristiques ne se trouve pas à la tête d’une chaîne d’opérations, étant donné qu’il fournit ses services directement au consommateur final, Ibero Tours n’intervenant qu’en tant qu’intermédiaire de cette opération unique. En revanche, Ibero Tours fournit un service, à savoir celui d’intermédiation, qui est totalement distinct de celui fourni par l’organisateur de circuits touristiques.

31

Au demeurant, l’organisateur de circuits touristiques, dans l’affaire au principal, n’accorde aucune remise puisque Ibero Tours est en tout état de cause tenu de lui verser le prix convenu, indépendamment d’une remise éventuelle que cette dernière accorde au voyageur.

32

Dans ces conditions, le financement par une agence de voyages, dans la situation d’Ibero Tours, d’une partie du prix de voyage, qui se traduit à l’égard du consommateur final du voyage en une réduction de prix de celui-ci, n’affecte ni la contrepartie reçue par l’organisateur de circuits touristiques pour la vente dudit voyage ni la contrepartie reçue par Ibero Tours pour son service d’intermédiation. Partant, conformément à l’article 11, A, paragraphe 1, sous a), de la sixième directive, une telle réduction de prix n’entraîne une réduction de la base d’imposition ni pour l’opération principale ni pour l’opération de prestation de services fournie par l’agence de voyages.

33

Il résulte de ce qui précède qu’il convient de répondre à la première question que les dispositions de la sixième directive doivent être interprétées en ce sens que les principes définis par la Cour dans l’arrêt Elida Gibbs, précité, concernant la détermination de la base d’imposition de la TVA ne s’appliquent pas lorsqu’une agence de voyages, agissant en qualité d’intermédiaire, accorde au consommateur final, de sa propre initiative et à ses propres frais, une réduction de prix sur la prestation principale fournie par l’organisateur de circuits touristiques.

Sur les deuxième et troisième questions

34

La première question appelant une réponse négative, il n’y a pas lieu de répondre aux deuxième et troisième questions.

Sur les dépens

35

La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

Par ces motifs, la Cour (première chambre) dit pour droit:

Les dispositions de la sixième directive 77/388/CEE du Conseil, du 17 mai 1977, en matière d’harmonisation des législations des États membres relatives aux taxes sur le chiffre d’affaires – Système commun de taxe sur la valeur ajoutée: assiette uniforme, doivent être interprétées en ce sens que les principes définis par la Cour de justice de l’Union européenne dans l’arrêt du 24 octobre 1996, Elida Gibbs (C-317/94), concernant la détermination de la base d’imposition de la taxe sur la valeur ajoutée ne s’appliquent pas lorsqu’une agence de voyages, agissant en qualité d’intermédiaire, accorde au consommateur final, de sa propre initiative et à ses propres frais, une réduction de prix sur la prestation principale fournie par l’organisateur de circuits touristiques.

Signatures


( 1 )   Langue de procédure: l’allemand.