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ARRÊT DE LA COUR (neuvième chambre)

22 janvier 2015 (*)

«Renvoi préjudiciel – Directive 77/388/CEE – TVA – Exonérations – Article 13, B, sous b) – Notion de ‘location de biens immeubles exonérée’ – Mise à disposition, à titre onéreux, d’un stade de football – Contrat de mise à disposition réservant certains droits et prérogatives au propriétaire – Prestation, par le propriétaire, de différents services représentant 80 % de l’indemnisation contractuellement prévue»

Dans l’affaire C-55/14,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par la cour d’appel de Mons (Belgique), par décision du 31 janvier 2014, parvenue à la Cour le 5 février 2014, dans la procédure

Régie communale autonome du stade Luc Varenne

contre

État belge,

LA COUR (neuvième chambre),

composée de M. J. Malenovský, faisant fonction de président de la neuvième chambre, M. M. Safjan (rapporteur) et Mme A. Prechal, juges,

avocat général: M. P. Cruz Villalón,

greffier: M. A. Calot Escobar,

vu la procédure écrite,

considérant les observations présentées:

–        pour la régie communale autonome du stade Luc Varenne, par Me W. Panis, avocat,

–        pour le gouvernement belge, par Mme M. Jacobs et M. J.-C. Halleux, en qualité d’agents,

–        pour le gouvernement grec, par M. I. Bakopoulos et Mme V. Stroumpouli, en qualité d’agents,

–        pour le gouvernement néerlandais, par Mmes M. Bulterman et M. Gijzen, en qualité d’agents,

–        pour la Commission européenne, par Mmes C. Soulay et L. Lozano Palacios, en qualité d’agents,

vu la décision prise, l’avocat général entendu, de juger l’affaire sans conclusions,

rend le présent

Arrêt

1        La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 13, B, sous b), de la sixième directive 77/388/CEE du Conseil, du 17 mai 1977, en matière d’harmonisation des législations des États membres relatives aux taxes sur le chiffre d’affaires – Système commun de taxe sur la valeur ajoutée: assiette uniforme (JO L 145, p. 1, ci-après la «sixième directive»).

2        Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant la régie communale autonome du stade Luc Varenne (ci-après la «régie») à l’État belge au sujet de la déductibilité de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) ayant grevé l’acquisition des installations du stade de football Luc Varenne, soit un montant de 1 350 001,79 euros.

 Le cadre juridique

 Le droit de l’Union

3        L’article 2 de la sixième directive, faisant partie du titre II de celle-ci, intitulé «Champ d’application», dispose:

«Sont soumises à la [TVA]:

1.      les livraisons de biens et les prestations de services, effectuées à titre onéreux à l’intérieur du pays par un assujetti agissant en tant que tel;

[...]»

4        L’article 13 de cette directive, intitulé «Exonérations à l’intérieur du pays», prévoit à son point B, intitulé «Autres exonérations»:

«Sans préjudice d’autres dispositions communautaires, les États membres exonèrent, dans les conditions qu’ils fixent en vue d’assurer l’application correcte et simple des exonérations prévues ci-dessous et de prévenir toute fraude, évasion et abus éventuels:

[...]

b)      l’affermage et la location de biens immeubles, à l’exception:

1.      des opérations d’hébergement telles qu’elles sont définies dans la législation des États membres qui sont effectuées dans le cadre du secteur hôtelier ou de secteurs ayant une fonction similaire, y compris les locations de camps de vacances ou de terrains aménagés pour camper;

2.      des locations d’emplacement pour le stationnement des véhicules;

3.      des locations d’outillages et de machines fixés à demeure;

4.      des locations de coffres-forts.

Les États membres ont la faculté de prévoir des exclusions supplémentaires au champ d’application de cette exonération;

[...]»

5        Le contenu de la disposition de la sixième directive mentionnée au point précédent a été repris, de manière pratiquement inchangée, à l’article 135 de la directive 2006/112/CE du Conseil, du 28 novembre 2006, relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée (JO L 347, p. 1), qui constitue la refonte de la sixième directive et de ses modifications successives.

6        L’article 17, paragraphe 2, sous a), de la sixième directive (devenu l’article 168 de la directive 2006/112) se lit comme suit:

«Dans la mesure où les biens et les services sont utilisés pour les besoins de ses opérations taxées, l’assujetti est autorisé à déduire de la taxe dont il est redevable:

a)      la [TVA] due ou acquittée à l’intérieur du pays pour les biens qui lui sont ou lui seront livrés et pour les services qui lui sont ou lui seront rendus par un autre assujetti».

 Le droit belge

7        L’article 19, paragraphe 1, du code de la taxe sur la valeur ajoutée, dans sa version applicable aux faits au principal (ci-après le «code de la TVA»), énonce:

«Est assimilée à une prestation de services effectuée à titre onéreux, l’utilisation d’un bien affecté à l’entreprise pour les besoins privés de l’assujetti ou pour ceux de son personnel ou, plus généralement, à des fins étrangères à l’activité économique de l’assujetti, lorsque ce bien a ouvert droit à une déduction complète ou partielle de la taxe.»

8        L’article 44, paragraphe 3, 2°, du code de la TVA prévoit l’exonération de la TVA des opérations suivantes:

«l’affermage, la location et la cession de bail de biens immeubles par nature, de même que l’utilisation de tels biens dans les conditions de l’article 19, paragraphe 1, à l’exception:

a)      des prestations de services suivantes:

–        la mise à disposition d’emplacements pour véhicules;

–        la mise à disposition d’emplacements pour l’entreposage de biens;

–        la fourniture de logements meublés dans les hôtels, motels et établissements où sont hébergés des hôtes payants;

–        la mise à disposition d’emplacements pour le camping;

b)      des locations – financements d’immeubles consenties par une entreprise pratiquant la location – financement d’immeubles ou la location qualifiée de leasing immobilier, lorsque cette entreprise construit, fait construire ou acquiert, avec application de la taxe, le bâtiment sur lequel porte le contrat et que le preneur prend ce bien en location pour l’utiliser dans l’exercice d’une activité d’assujetti; le Roi définit les conditions auxquelles doit satisfaire le contrat de location-financement d’immeubles, notamment en ce qui concerne la durée du contrat, la nature et la destination des biens qui en font l’objet ainsi que les droits et les obligations du preneur;

c)      des locations de coffres-forts.»

9        L’article 45, paragraphe 1, 1°, du code de la TVA dispose:

«Tout assujetti peut déduire de la taxe dont il est redevable, les taxes ayant grevé les biens et les services qui lui ont été fournis, les biens qu’il a importés et les acquisitions intracommunautaires de biens qu’il a effectuées, dans la mesure où il les utilise pour effectuer:

1°      des opérations taxées [...]»

10      L’article 1er de l’arrêté royal nº 3, du 10 décembre 1969, relatif aux déductions pour l’application de la taxe sur la valeur ajoutée, énonce:

«1.      Sous réserve de l’application de l’article 45, paragraphes 1 bis, 2 et 3, du code de la [TVA], l’assujetti opère, dans les conditions prévues par les articles 2 et 4 du présent arrêté, la déduction des taxes grevant les biens et les services qu’il destine à la réalisation d’opérations visées par l’article 45, paragraphe 1, I° à 5°, du code.

Lorsque l’assujetti effectue, dans l’exercice de son activité économique, d’autres opérations qui ne permettent pas la déduction, il se conforme, pour la détermination des déductions, aux dispositions des articles 46 et 48 du code et 12 à 21 du présent arrêté.

2.      Ne sont en aucun cas déductibles les taxes grevant les biens et les services qu’un assujetti destine à un usage privé ou à des fins autres que celles qui relèvent de son activité économique.

Lorsqu’un bien ou un service est destiné à être affecté partiellement à de telles fins, la déduction est exclue dans la mesure de cette affectation. Cette mesure est déterminée par l’assujetti sous le contrôle de l’administration.»

 Le litige au principal et la question préjudicielle

11      La régie exploite le stade de football Luc Varenne, pour l’acquisition duquel elle a dû payer la somme de 6 428 579,97 euros, à laquelle s’est ajoutée la TVA d’un montant de 1 350 001,79 euros.

12      Le 25 août 2003, la régie a conclu avec Royal Football Club de Tournai ASBL (ci-après le «RFCT») une convention selon laquelle le RFCT utilise, contre rémunération, les installations du stade de football Luc Varenne.

13      La régie a déduit la totalité de la TVA grevant l’acquisition desdites installations.

14      À la suite de deux contrôles effectués au siège de la régie au cours des années 2004 et 2006, l’administration fiscale belge a estimé que la régie effectuait plusieurs types d’opérations au regard de la TVA, à savoir:

–        des opérations soumises à la TVA et ouvrant le droit de déduire la TVA acquittée en amont;

–        des opérations hors du champ d’application de la TVA n’ouvrant pas droit à déduction de la TVA acquittée en amont, comme la mise à disposition du RFCT, gratuite et sans contrepartie, de certaines installations du stade de football Luc Varenne, et

–        des opérations exonérées de TVA et, par conséquent, n’ouvrant pas droit à déduction de la TVA acquittée en amont.

15      L’administration fiscale belge a ainsi estimé que la mise à disposition de certaines installations dudit stade au profit du RFCT selon les termes de la convention conclue avec la régie devait être regardée comme une location immobilière et, par suite, devait être exonérée de TVA en application de l’article 44, paragraphe 3, 2°, du code de la TVA.

16      Dans le procès-verbal établi le 22 décembre 2006, l’administration fiscale belge a relevé qu’une analyse des activités de la régie selon la méthode de l’affectation réelle démontrait qu’elle ne pouvait déduire la TVA acquittée en amont qu’à hauteur de 36 % selon la technique du prorata de déduction de TVA visée à l’article 46, paragraphe 2, du code de la TVA.

17      Le 10 janvier 2007, l’administration fiscale belge a émis une contrainte à la charge de la régie afin que celle-ci paie la TVA pour la partie qu’elle aurait déduite à tort, soit une somme de 864 001,15 euros, une amende d’un montant de 86 400 euros, des intérêts de retard ainsi que des intérêts moratoires.

18      La régie a contesté cette contrainte devant le tribunal de première instance de Mons qui, par un jugement du 12 mai 2011, a estimé que la mise à disposition, par la régie, de certaines installations du stade de football Luc Varenne au profit du RFCT devait être qualifiée de location de biens immeubles et que l’administration avait à juste titre refusé la déduction de la taxe payée en amont. La régie a interjeté appel de ce jugement devant la cour d’appel de Mons.

19      Considérant que la solution du litige dont elle est saisie dépend de l’interprétation de certaines dispositions de la sixième directive, la cour d’appel de Mons a décidé de sursoir à statuer et de poser à la Cour la question préjudicielle suivante:

«La mise à disposition des installations d’une infrastructure sportive utilisée à des fins exclusivement footballistiques, comprise comme la faculté d’utilisation et d’exploitation ponctuelle de la surface de jeu du stade de football (le terrain), ainsi que les vestiaires pour les joueurs et arbitres à concurrence d’un maximum de 18 journées par saison sportive (une saison sportive prenant cours le 1er juillet de chaque année civile et pour se terminer le 30 juin de l’année suivante) est-elle une location de biens immobiliers exonérée au sens de l’article 13, B, sous b), de la sixième directive [article 135, paragraphe 1, sous l), de la directive 2006/112], dans la mesure où le concédant du droit d’utilisation et d’exploitation:

–        dispose de la pleine et entière faculté de conférer des droits identiques à d’autres personnes physiques ou morales de son choix en dehors des 18 journées précitées;

–        dispose du droit d’accéder à tout moment auxdites installations, sans accord préalable du concessionnaire du droit d’utilisation et d’exploitation, afin notamment de s’assurer de leur correcte utilisation et de se prémunir de tout dommage, à la seule condition de ne pas perturber la bonne tenue des compétitions sportives;

–        conserve en outre un droit de contrôle permanent de l’accès aux installations, y compris pendant leur période d’utilisation par le RFCT;

–        réclame une indemnisation forfaitaire de 1 750 euros par jour d’utilisation de la surface de jeu, des vestiaires, de l’utilisation de la buvette, du service de conciergerie, de surveillance et de contrôle de l’ensemble des installations, étant entendu que le montant réclamé représente conventionnellement le droit d’accéder au terrain de football jusqu’à concurrence de 20 % et, à hauteur de 80 %, la contrepartie de différents services de maintenance, de nettoyage, d’entretien (tonte, ensemençage, etc.) et de mise aux normes de la surface de jeu et prestations de services accessoires, fournis par le concédant du droit d’utilisation et d’exploitation [...]?»

 Sur la question préjudicielle

20      Par sa question, la juridiction de renvoi cherche à savoir, en substance, si l’article 13, B, sous b), de la sixième directive doit être interprété en ce sens que la mise à disposition, à titre onéreux, d’un stade de football en vertu d’un contrat réservant certains droits et prérogatives au propriétaire et prévoyant la prestation, par ce dernier, de différents services, notamment des services de maintenance, de nettoyage, d’entretien et de mise aux normes, représentant 80 % de l’indemnisation contractuellement prévue, constitue une «location de biens immeubles» au sens de cette disposition.

21      Selon une jurisprudence constante, la caractéristique fondamentale de la notion de «location de biens immeubles», au sens de l’article 13, B, sous b), de la sixième directive, est de conférer au cocontractant, pour une durée convenue et contre rémunération, le droit d’occuper un immeuble comme s’il en était le propriétaire et d’exclure toute autre personne du bénéfice d’un tel droit. Pour apprécier si une convention donnée répond à cette définition, il y a lieu de prendre en considération toutes les caractéristiques de l’opération ainsi que les circonstances dans lesquelles elle se déroule. À cet égard, l’élément décisif est la nature objective de l’opération en cause, indépendamment de la qualification que les parties ont donnée à celle-ci (arrêt MacDonald Resorts, C-270/09, EU:C:2010:780, point 46 et jurisprudence citée).

22      Il convient de rappeler également que, pour qu’il y ait location d’un bien immeuble au sens de l’article 13, B, sous b), de la sixième directive, il faut que toutes les conditions caractérisant cette opération soient remplies, à savoir que le propriétaire d’un bien immeuble ait cédé au locataire, contre un loyer et pour une durée convenue, le droit d’occuper son bien et d’en exclure d’autres personnes (arrêt Medicom et Maison Patrice Alard, C-210/11 et C-211/11, EU:C:2013:479, point 26 ainsi que jurisprudence citée).

23      L’article 13, B, sous b), de la sixième directive constitue une dérogation au principe général selon lequel la TVA est perçue sur chaque prestation de services effectuée à titre onéreux par un assujetti et ses termes sont donc d’interprétation stricte. En l’absence de l’une des conditions énoncées au point précédent, cette disposition ne saurait être appliquée par analogie au motif que c’est à une location au sens de ladite disposition que s’apparente le plus l’utilisation du bien immeuble en cause (voir, en ce sens, arrêt Medicom et Maison Patrice Alard, EU:C:2013:479, point 27).

24      En principe, il appartient aux juridictions nationales, seules compétentes pour apprécier les faits, de déterminer, eu égard aux circonstances propres à chaque cas d’espèce, les caractéristiques essentielles de l’opération en question afin de procéder à sa qualification au regard de la sixième directive (voir notamment, en ce sens, arrêt Medicom et Maison Patrice Alard, EU:C:2013:479, point 33 ainsi que jurisprudence citée).

25      S’agissant, plus particulièrement, de la qualification de l’utilisation d’installations sportives, la Cour a déjà relevé que les prestations liées à la pratique du sport et de l’éducation physique doivent dans la mesure du possible être considérées dans leur ensemble (arrêt Stockholm Lindöpark, C-150/99, EU:C:2001:34, point 26).

26      Ainsi, à l’égard de la location d’un terrain de golf, la Cour a précisé que, en raison du fait que l’activité de gestion d’un golf implique non seulement une mise à disposition passive d’un terrain, mais également, notamment, un grand nombre d’activités commerciales, telles qu’une supervision, une gestion et une maintenance constante de la part du prestataire ainsi qu’une mise à disposition d’autres installations, la location du terrain de golf ne saurait constituer, à défaut de circonstances tout à fait particulières, la prestation prépondérante (arrêt Stockholm Lindöpark, EU:C:2001:34, point 26).

27      Certes, les circonstances au principal sont distinctes de celles caractérisant l’opération en cause dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt Stockholm Lindöpark (EU:C:2001:34), étant donné que, premièrement, il s’agit, dans l’affaire au principal, d’une utilisation «collective» des installations par un club, et non d’un accès individuel des joueurs, deuxièmement, cette utilisation est répétitive et prolongée et, en principe, exclusive pendant les journées convenues, et, troisièmement, les fonctions et les prérogatives de la régie en tant que bailleur semblent, en partie, tributaires des besoins inhérents à l’exploitation, à des fins locatives, d’installations sportives susceptibles d’accueillir un large éventail de formations et d’individus.

28      Il y a lieu, toutefois, de considérer que la décision de renvoi ne fait pas apparaître, sous réserve de l’appréciation des faits revenant à la juridiction de renvoi, de circonstances tout à fait particulières permettant de conclure que l’utilisation du terrain de football constitue la prestation prépondérante de la transaction, caractérisant celle-ci de location d’un bien immeuble au sens de l’article 13, B, sous b), de la sixième directive.

29      Dans les circonstances de l’affaire au principal, il semble s’agir de la prestation, par la régie, d’un service plus complexe de fourniture d’accès aux installations sportives, celle-ci s’occupant de la supervision, de la gestion, de la maintenance et du nettoyage desdites installations.

30      S’agissant, premièrement, de la supervision, à savoir les droits d’accès aux installations sportives et de contrôle de cet accès conférés à la régie, il est vrai qu’ils ne sauraient, à eux seuls, exclure la qualification de l’opération en cause au principal en tant que location au sens de l’article 13, B, sous b), de la sixième directive. De tels droits peuvent se justifier afin de garantir que l’utilisation desdites installations par les locataires ne soit pas perturbée par des tiers. En effet, la Cour a déjà précisé que la présence de limitations au droit d’occuper les lieux loués n’empêche pas cette occupation d’être exclusive à l’égard de toute autre personne non visée par la loi ou le contrat comme pouvant faire valoir un droit sur le bien, objet du contrat de location (arrêt Temco Europe, C-284/03, EU:C:2004:730, point 25).

31      Dans les circonstances en cause au principal, les droits d’accès aux installations sportives et de contrôle de cet accès semblent néanmoins donner lieu, moyennant un service de conciergerie, à une présence permanente de représentants de la régie dans lesdites installations, ce qui pourrait constituer un indice permettant de considérer que le rôle de la régie est plus actif que celui qui résulterait d’une location de biens immeubles au sens de l’article 13, B, sous b), de la sixième directive.

32      S’agissant, deuxièmement, des différents services de gestion, de maintenance et de nettoyage, il appert qu’ils sont, pour la plupart, effectivement nécessaires pour assurer que les installations en question soient propres à l’utilisation à laquelle elles sont destinées, à savoir des manifestations sportives et, plus concrètement, des matchs de football conformément à la réglementation sportive applicable.

33      Il y a donc lieu de considérer que les installations requises à cet effet sont, moyennant les services d’entretien et de mise aux normes proposés, mises à la disposition du RFCT dans un état permettant leur utilisation aux fins convenues et que la fourniture d’accès auxdites installations à cette fin précise constitue la prestation caractéristique de l’opération en cause au principal (voir notamment, par analogie, arrêts Part Service, C-425/06, EU:C:2008:108, points 51 et 52; Field Fisher Waterhouse, C-392/11, EU:C:2012:597, point 23, ainsi que RR Donnelley Global Turnkey Solutions Poland, C-155/12, EU:C:2013:434, point 22).

34      À cet égard, la valeur économique des différents services prestés, ceux-ci représentant, selon la décision de renvoi, 80 % de l’indemnisation contractuellement prévue, constitue également un indice pour qualifier la transaction en cause au principal dans son ensemble de prestation de services plutôt que de location d’un bien immeuble au sens de l’article 13, B, sous b), de la sixième directive.

35      Cela étant, il appartient à la juridiction de renvoi d’apprécier si tous les services proposés par la régie sont effectivement nécessaires aux fins de fournir l’accès aux installations sportives pour les fins contractuellement prévues, à savoir exclusivement footballistiques.

36      S’agissant, enfin, de la durée de la jouissance du bien concerné, qui constitue un élément essentiel d’un contrat de location, il convient de rappeler, d’une part, que la Cour a déjà eu l’occasion de constater que, s’agissant d’un terrain de golf, celle-ci peut être limitée (arrêt Stockholm Lindöpark, EU:C:2001:34, point 27).

37      D’autre part, il ressort de la jurisprudence que ladite jouissance ne doit pas, en principe, avoir un caractère seulement occasionnel et temporaire (voir, en ce sens, arrêt Leichenich, C-532/11, EU:C:2012:720, point 24).

38      Dans les circonstances en cause au principal, la durée de la jouissance spécifiée dans le contrat de mise à disposition porte sur un maximum de 18 journées footballistiques, une telle durée n’étant pas a priori négligeable. La juridiction de renvoi devra néanmoins apprécier si, au vu de l’ensemble des circonstances, il ne convient pas plutôt de qualifier la jouissance convenue comme étant occasionnelle et temporaire, ce qui constituerait un indice supplémentaire conduisant à considérer qu’il y a lieu de qualifier la transaction en cause au principal dans son ensemble de prestation de services plutôt que de location d’un bien immeuble. À cet égard, il importe notamment de vérifier si, comme le fait valoir le gouvernement belge, les installations du stade de football Luc Varenne sont, au-delà de la lettre du contrat, effectivement mises à la disposition du RFCT de façon moins ponctuelle ou si, comme le soutient la régie, la jouissance effective se limite aux seuls matchs de football.

39      Au vu de ce qui précède, il y a lieu de répondre à la question posée que l’article 13, B, sous b), de la sixième directive doit être interprété en ce sens que la mise à disposition, à titre onéreux, d’un stade de football en vertu d’un contrat réservant certains droits et prérogatives au propriétaire et prévoyant la prestation, par ce dernier, de différents services, notamment des services de maintenance, de nettoyage, d’entretien et de mise aux normes, représentant 80 % de l’indemnisation contractuellement prévue, ne constitue pas, en principe, une «location de biens immeubles» au sens de cette disposition. Il appartient à la juridiction de renvoi de l’apprécier.

 Sur les dépens

40      La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

Par ces motifs, la Cour (neuvième chambre) dit pour droit:

L’article 13, B, sous b), de la sixième directive 77/388/CEE du Conseil, du 17 mai 1977, en matière d’harmonisation des législations des États membres relatives aux taxes sur le chiffre d’affaires – Système commun de taxe sur la valeur ajoutée: assiette uniforme, doit être interprété en ce sens que la mise à disposition, à titre onéreux, d’un stade de football en vertu d’un contrat réservant certains droits et prérogatives au propriétaire et prévoyant la prestation, par ce dernier, de différents services, notamment des services de maintenance, de nettoyage, d’entretien et de mise aux normes, représentant 80 % de l’indemnisation contractuellement prévue, ne constitue pas, en principe, une «location de biens immeubles» au sens de cette disposition. Il appartient à la juridiction de renvoi de l’apprécier.

Signatures


* Langue de procédure: le français.