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ARRÊT DE LA COUR (première chambre)

14 septembre 2017 ( *1 )

«  Renvoi préjudiciel – Fiscalité – Système commun de taxe sur la valeur ajoutée – Directive 2006/112/CE – Article 26, paragraphe 1, sous b), et articles 168 et 176 – Déduction de la taxe payée en amont – Services de construction ou d’amélioration d’un bien immobilier appartenant à un tiers – Utilisation des services par le tiers et par l’assujetti – Fourniture du service à titre gratuit au tiers – Comptabilisation des coûts générés pour les services effectués comme faisant partie des frais généraux de l’assujetti – Détermination de l’existence d’un lien direct et immédiat avec l’activité économique de l’assujetti  »

Dans l’affaire C-132/16,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Varhoven administrativen sad (Cour administrative suprême, Bulgarie), par décision du 8 décembre 2015, parvenue à la Cour le 1er mars 2016, dans la procédure

Direktor na Direktsia « Obzhalvane i danachno-osiguritelna praktika »Sofia

contre

« Iberdrola Inmobiliaria Real Estate Investments » EOOD,

LA COUR (première chambre),

composée de Mme R. Silva de Lapuerta, président de chambre, MM. E. Regan, A. Arabadjiev, C. G. Fernlund (rapporteur) et S. Rodin, juges,

avocat général : Mme J. Kokott,

greffier : M. R. Schiano, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 1er décembre 2016,

considérant les observations présentées :

pour le Direktor na Direktsia « Obzhalvane i danachno-osiguritelna praktika  » – Sofia, par Mme I. Kirova, en qualité d’agent,

pour « Iberdrola Inmobiliaria Real Estate Investments » EOOD, par Mes T. Todorov et Z. Naumov, advokati,

pour le gouvernement bulgare, par Mmes M. Georgieva et E. Petranova, en qualité d’agents,

pour la Commission européenne, par Mmes L. Lozano Palacios et G. Koleva ainsi que par M. D. Roussanov, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 6 avril 2017,

rend le présent

Arrêt

1

La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 26, paragraphe 1, et des articles 168 et 176 de la directive 2006/112/CE du Conseil, du 28 novembre 2006, relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée (JO 2006, L 347, p. 1).

2

Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant le Direktor na Direktsia « Obzhalvane i danachno-osiguritelna praktika  » – Sofia (directeur de la direction « Recours et pratique en matière de fiscalité et de sécurité sociale » de Sofia, Bulgarie) à  «  Iberdrola Inmobiliaria Real Estate Investments » EOOD (ci-après « Iberdrola ») au sujet de deux avis de redressement adressés à cette dernière et portant sur le droit à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) acquittée en amont.

Le cadre juridique

Le droit de l’Union

3

L’article 26 de la directive 2006/112 prévoit :

« 1.   Sont assimilées à des prestations de services effectuées à titre onéreux les opérations suivantes :

[...]

b)

la prestation de services à titre gratuit effectuée par l’assujetti pour ses besoins privés ou pour ceux de son personnel ou, plus généralement, à des fins étrangères à son entreprise.

2.   Les États membres peuvent déroger aux dispositions du paragraphe 1 à condition que cette dérogation ne conduise pas à des distorsions de concurrence. »

4

L’article 168 de cette directive dispose :

« Dans la mesure où les biens et les services sont utilisés pour les besoins de ses opérations taxées, l’assujetti a le droit, dans l’État membre dans lequel il effectue ces opérations, de déduire du montant de la taxe dont il est redevable les montants suivants :

a)

la TVA due ou acquittée dans cet État membre pour les biens qui lui sont ou lui seront livrés et pour les services qui lui sont ou lui seront fournis par un autre assujetti ;

[...] »

5

L’article 176 de ladite directive énonce :

« Le Conseil, statuant à l’unanimité sur proposition de la Commission, détermine les dépenses n’ouvrant pas droit à déduction de la TVA. En tout état de cause, seront exclues du droit à déduction les dépenses n’ayant pas un caractère strictement professionnel, telles que les dépenses de luxe, de divertissement ou de représentation.

Jusqu’à l’entrée en vigueur des dispositions visées au premier alinéa, les États membres peuvent maintenir toutes les exclusions prévues par leur législation nationale [...] soit, pour les États membres ayant adhéré à la Communauté après cette date, à la date de leur adhésion. »

Le droit bulgare

6

L’article 68 du Zakon za danak varhu dobavenata stoynost (loi relative à la taxe sur la valeur ajoutée, DV no 63, du 4 août 2006), dans sa version applicable au litige au principal (ci-après le « ZDDS »), prévoit, à son paragraphe 1 :

« Le crédit d’impôt est le montant de TVA qu’un assujetti enregistré a le droit de déduire de la TVA dont il est redevable en vertu de la présente loi pour :

1)

des biens ou des services qu’il a reçus lors d’une livraison ou prestation imposable ;

[...] »

7

Aux termes de l’article 69, paragraphe 1, du ZDDS :

« Lorsque les biens et les services sont utilisés pour les besoins des livraisons ou des prestations imposables effectuées par l’assujetti enregistré, celui-ci est autorisé à déduire :

1)

la TVA sur les biens ou les services que le fournisseur, lorsque celui-ci est aussi un assujetti enregistré conformément à la présente loi, lui a livrés ou fournis ou doit lui livrer ou fournir ;

[...] »

8

L’article 70 du ZDDS dispose :

« 1.   Même si les conditions de l’article 69 ou de l’article 74 sont remplies, le droit de déduire une TVA acquittée en amont n’existe pas lorsque :

[...]

2)

les biens ou les services sont destinés à des livraisons ou prestations à titre gratuit ou à des activités étrangères à l’activité économique de l’assujetti ;

[...] »

Le litige au principal et les questions préjudicielles

9

La commune de Tsarevo (Bulgarie) a obtenu, en tant que maître d’ouvrage, un permis de construire afin de remettre en état une station de pompage des eaux usées desservant un village de vacances situé sur son territoire.

10

Iberdrola est un investisseur privé qui a acquis plusieurs terrains dans ce village de vacances afin d’ériger des immeubles comprenant environ 300 appartements destinés à un séjour saisonnier. Des permis de construire ont également été délivrés pour des espaces de services publics, des emplacements de parking et des équipements ouverts.

11

Iberdrola a conclu un contrat avec la commune de Tsarevo portant sur la remise en état de la station de pompage au moyen de travaux de construction ou d’amélioration de cette station et a commandé ceux-ci à une société tierce.

12

À l’issue des travaux, les immeubles qu’Iberdrola a projeté de construire dans le village de vacances pourront être raccordés à la station de pompage. Le Varhoven administrativen sad (Cour administrative suprême, Bulgarie) mentionne l’avis d’un expert selon lequel, sans cette remise en état, le raccordement serait impossible, la canalisation existante étant insuffisante.

13

Les dépenses indiquées sur la facture pour la remise en état de la station de pompage ont été inscrites dans les comptes d’Iberdrola comme « charges constatées d’avance », en tant que dépenses d’acquisition d’immobilisations corporelles, et à son compte de résultat comme des stocks pour les années 2009 et 2010. Selon l’expert, il existe un lien entre les prestations indiquées sur la facture et les biens et les services qu’Iberdrola doit livrer après la construction des immeubles autorisée sur ses terrains.

14

L’administration fiscale a considéré qu’Iberdrola ne pouvait pas déduire la TVA acquittée en amont d’un montant de 147635 leva bulgares (BGN) (environ 74284 euros) et lui a adressé un avis de redressement ainsi qu’un avis modificatif.

15

L’Administrativen sad Sofia – grad (tribunal administratif de Sofia, Bulgarie) a toutefois annulé ces avis. Il a considéré que la commune de Tsarevo a bénéficié d’une prestation de services à titre gratuit consistant en la réalisation des travaux de remise en état de la station de pompage. Toutefois, la gratuité de la prestation ne justifiait pas, selon lui, l’application de l’article 70, paragraphe 1, point 2, du ZDDS étant donné que ces travaux seraient utilisés dans le cadre de l’activité économique d’Iberdrola, à savoir le raccordement à la station de pompage des immeubles pour lesquels un permis de construire avait été délivré. Selon ce tribunal, pour que soit reconnu le droit de déduire une TVA acquittée en amont pour la prestation de services, les dépenses engagées à cette fin doivent faire partie des frais généraux de l’assujetti et être un élément constitutif du prix de ces services. Il n’importerait pas que les travaux effectués concernent un bien appartenant à la commune.

16

La juridiction de renvoi mentionne deux arrêts de la Cour rendus dans des affaires ayant également pour origine l’article 70, paragraphe 2, du ZDDS, à savoir l’arrêt du 16 février 2012, Eon Aset Menidjmunt (C-118/11, EU:C:2012:97), et l’arrêt du 22 mars 2012, Klub (C-153/11, EU:C:2012:163). Cette juridiction indique toutefois que ces arrêts ont donné lieu à des interprétations divergentes de la part des juridictions nationales.

17

Selon certaines juridictions, outre le fait que les travaux ont été réalisés à titre gratuit, la circonstance que l’ouvrage appartienne au patrimoine de la commune et ne constitue donc pas un actif de l’entreprise empêche de déduire la TVA acquittée en amont. Selon d’autres juridictions, en revanche, l’inscription des frais engagés pour les travaux dans les frais généraux de l’entreprise et l’utilisation de la station de pompage dans le cadre de l’activité économique de l’entreprise ouvrent un droit à déduction.

18

Par ailleurs, la juridiction de renvoi indique que selon la disposition nationale en cause au principal, la circonstance qu’une prestation de services soit fournie à titre gratuit suffit à elle seule pour refuser de reconnaître le droit de déduire la TVA acquittée en amont, et par conséquent indépendamment du fait de savoir si les services en cause sont utilisés dans le cadre de l’activité économique du destinataire de ces services ou à des fins étrangères à son entreprise. Cette juridiction souligne néanmoins la différence par rapport à l’article 26, paragraphe 1, sous b), de la directive 2006/112, qui subordonne le refus du droit à déduction à la double condition que la prestation de services ait lieu à titre gratuit et qu’elle soit utilisée à des fins étrangères à l’activité de l’entreprise.

19

C’est dans ces conditions que le Varhoven administrativen sad (Cour administrative suprême) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :

« 1)

L’article 26, paragraphe 1, sous b), l’article 168, sous a), et l’article 176 de la directive 2006/112 [...] s’opposent-ils à une disposition de droit national, telle que l’article 70, paragraphe 1, point 2, du ZDDS, qui restreint le droit de déduire la TVA acquittée en amont pour une prestation de services de construction ou d’amélioration d’un bien immobilier dont un tiers est propriétaire, qui sont utilisés tant par le destinataire de la prestation que par le tiers, pour la seule raison que le tiers obtient à titre gratuit le résultat de ces services, sans tenir compte du fait que les services seront utilisés dans le cadre de l’activité économique du destinataire assujetti ?

2)

L’article 26, paragraphe 1, sous b), l’article 168, sous a), et l’article 176 de la directive 2006/112 [...] s’opposent-ils à une pratique fiscale consistant à refuser de reconnaître le droit de déduire une TVA acquittée en amont pour la prestation de services, alors que les dépenses correspondant à ces services sont comptabilisées dans les frais généraux de l’assujetti, au motif qu’elles ont été engagées pour construire ou améliorer un bien immobilier dont une autre personne est propriétaire, sans tenir compte du fait que ce bien immobilier sera également utilisé par le destinataire de la prestation des services de construction dans le cadre de son activité économique ? »

Sur les questions préjudicielles

20

Il y a lieu, à titre liminaire, de relever que le litige au principal et les questions posées par la juridiction de renvoi sont relatifs à la portée du droit à déduction prévu par la directive 2006/112 et plus particulièrement à l’article 168, sous a), de celle-ci.

21

Pour autant que les questions posées portent sur l’article 176 de la directive 2006/112, il convient de rappeler que la Cour a déjà examiné cet article dans le cadre d’affaires relatives à l’article 70 du ZDDS (arrêts du 16 février 2012, Eon Aset Menidjmunt, C-118/11, EU:C:2012:97, points 71 à 74, et du 18 juillet 2013, AES-3C Maritza East 1, C-124/12, EU:C:2013:488, points 45 à 54). Il importe de souligner que, quand bien même l’article 70 du ZDDS prévoirait une exclusion du droit à déduction existant à la date d’adhésion de la République de Bulgarie à l’Union européenne, cet article 176 ne permet de maintenir de telles exclusions que pour autant qu’elles ne prévoient pas des exclusions générales du régime de déduction instauré par la directive 2006/112 et notamment par l’article 168 de celle-ci (voir, en ce sens, arrêt du 23 avril 2009, PARAT Automotive Cabrio, C-74/08, EU:C:2009:261, point 29 et jurisprudence citée).

22

S’agissant de l’article 26 de la directive 2006/112, cette disposition porte sur le caractère imposable de certaines transactions. Or, dans l’affaire au principal, le litige porte non pas sur le caractère éventuellement taxable de la livraison effectuée par l’assujetti au tiers et sur l’obligation correspondante de payer la TVA qui s’y rapporterait, mais sur le droit de déduire la TVA acquittée en amont qui a grevé les dépenses engagées par l’assujetti aux fins d’effectuer cette prestation.

23

Il n’y a donc pas lieu d’examiner la présente affaire sous l’angle de cet article 26.

24

Il convient, par conséquent, de considérer que par ses questions, qu’il y a lieu d’examiner ensemble, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 168, sous a), de la directive 2006/112 doit être interprété en ce sens qu’un assujetti a le droit de déduire la TVA acquittée en amont pour une prestation de services consistant à construire ou à améliorer un bien immobilier dont un tiers est propriétaire, lorsque ce dernier bénéficie à titre gratuit du résultat de ces services et que ceux-ci sont utilisés tant par cet assujetti que par ce tiers dans le cadre de leurs activités économiques.

25

S’agissant du point de savoir si le droit à déduction prévu à l’article 168, sous a), de la directive 2006/112 s’oppose à une disposition, telle que l’article 70 du ZDDS, il convient de rappeler que ce droit fait partie intégrante du mécanisme de la TVA et ne peut, en principe, être limité. Il s’exerce immédiatement pour la totalité des taxes ayant grevé les opérations effectuées en amont (voir en ce sens, notamment, arrêts du 29 octobre 2009, SKF, C-29/08, EU:C:2009:665, point 55, et du 18 juillet 2013, AES-3C Maritza East 1, C-124/12, EU:C:2013:488, point 25).

26

Le régime des déductions vise, en effet, à soulager entièrement l’entrepreneur du poids de la TVA due ou acquittée dans le cadre de toutes ses activités économiques. Le système commun de la TVA garantit ainsi la neutralité quant à la charge fiscale de toutes les activités économiques, quels que soient les buts ou les résultats de celles-ci, à condition que lesdites activités soient, en principe, elles-mêmes soumises à la TVA (voir, notamment, arrêts du 29 octobre 2009, SKF, C-29/08, EU:C:2009:665, point 56, et du 18 juillet 2013, AES-3C Maritza East 1, C-124/12, EU:C:2013:488, point 26).

27

Il résulte de l’article 168 de la directive 2006/112 que, dans la mesure où l’assujetti, agissant en tant que tel au moment où il acquiert un bien ou un service, utilise ce bien ou ce service pour les besoins de ses opérations taxées, celui-ci est autorisé à déduire la TVA due ou acquittée pour ledit bien ou ledit service (voir, en ce sens, arrêt du 22 octobre 2015, Sveda, C-126/14, EU:C:2015:712, point 18).

28

Selon une jurisprudence constante, l’existence d’un lien direct et immédiat entre une opération particulière en amont et une ou plusieurs opérations en aval ouvrant droit à déduction est, en principe, nécessaire pour qu’un droit à déduction de la TVA en amont soit reconnu à l’assujetti et pour déterminer l’étendue d’un tel droit. Le droit à déduction de la TVA grevant l’acquisition de biens ou de services en amont présuppose que les dépenses effectuées pour acquérir ceux-ci fassent partie des éléments constitutifs du prix des opérations taxées en aval ouvrant droit à déduction (arrêts du 29 octobre 2009, SKF, C-29/08, EU:C:2009:665, point 57, et du 18 juillet 2013, AES-3C Maritza East 1, C-124/12, EU:C:2013:488, point 27).

29

Un droit à déduction est cependant également admis en faveur de l’assujetti, même en l’absence de lien direct et immédiat entre une opération particulière en amont et une ou plusieurs opérations en aval ouvrant droit à déduction, lorsque les coûts des services en cause font partie des frais généraux de ce dernier et sont, en tant que tels, des éléments constitutifs du prix des biens ou des services qu’il fournit. De tels coûts entretiennent, en effet, un lien direct et immédiat avec l’ensemble de l’activité économique de l’assujetti (voir, notamment, arrêts du 29 octobre 2009, SKF, C-29/08, EU:C:2009:665, point 58, et du 18 juillet 2013, AES-3C Maritza East 1, C-124/12, EU:C:2013:488, point 28).

30

En revanche, lorsque des biens ou des services acquis par un assujetti ont un lien avec des opérations exonérées ou ne relèvent pas du champ d’application de la TVA, il ne saurait y avoir ni perception de taxe en aval ni déduction de celle-ci en amont (voir en ce sens, notamment, arrêt du 29 octobre 2009, SKF, C-29/08, EU:C:2009:665, point 59).

31

Il ressort de la jurisprudence de la Cour que, dans le cadre de l’application du critère du lien direct incombant aux administrations fiscales et aux juridictions nationales, il appartient à celles-ci de prendre en considération toutes les circonstances dans lesquelles se sont déroulées les opérations concernées et de tenir compte des seules opérations qui sont objectivement liées à l’activité imposable de l’assujetti. L’existence d’un tel lien doit ainsi être appréciée au regard du contenu objectif de l’opération en question (voir, en ce sens, arrêt du 22 octobre 2015, Sveda, C-126/14, EU:C:2015:712, point 29).

32

Afin de répondre à la question de savoir si, dans des circonstances telles que celles en cause au principal, Iberdrola a le droit de déduire la TVA acquittée en amont pour faire remettre en état la station de pompage des eaux usées, il convient donc de déterminer s’il existe un lien direct et immédiat entre, d’une part, ce service de remise en état, et, d’autre part, une opération taxée effectuée en aval par Iberdrola ou l’activité économique de cette société.

33

Il ressort de la décision de renvoi que sans la remise en état de cette station de pompage, le raccordement à celle-ci des immeubles qu’Iberdrola projetait de construire aurait été impossible, de telle sorte que cette remise en état était indispensable pour réaliser ce projet et que, par conséquent, à défaut d’une telle remise en état, Iberdrola n’aurait pas pu exercer son activité économique.

34

De telles circonstances sont susceptibles de démontrer l’existence d’un lien direct et immédiat entre le service de remise en état de la station de pompage des eaux usées appartenant à la commune de Tsarevo et une opération taxée effectuée en aval par Iberdrola, dès lors qu’il apparaît que ce service a été fourni afin de permettre à cette dernière de réaliser le projet immobilier en cause au principal.

35

Le fait que la commune de Tsarevo profite aussi dudit service ne saurait justifier que le droit à déduction correspondant à celui-ci soit refusé à Iberdrola si l’existence d’un tel lien direct et immédiat est établie, ce qu’il appartient à la juridiction de renvoi de vérifier.

36

À cet égard, il conviendra de tenir compte de la circonstance que le service de remise en état en cause au principal effectué en amont est un élément constitutif du prix d’une opération taxée effectuée en aval par Iberdrola.

37

Cela étant, il incombe également à la juridiction de renvoi d’examiner si ce service s’est limité à ce qui était nécessaire pour assurer le raccordement des immeubles construits par Iberdrola à la station de pompage des eaux usées en cause au principal ou si celui-ci a excédé ce qui était nécessaire à cette fin.

38

Dans le premier cas, il y aurait lieu de reconnaître un droit à déduction de la TVA acquittée en amont ayant grevé l’ensemble des frais encourus pour la remise en état de cette station de pompage, ces frais pouvant être considérés comme entretenant un lien direct et immédiat avec l’activité économique de l’assujetti.

39

En revanche, dans le cas où les travaux de remise en état de ladite station de pompage dépasseraient les besoins générés par les seuls immeubles construits par Iberdrola, l’existence d’un lien direct et immédiat entre ledit service et l’opération taxée effectuée en aval par Iberdrola, consistant à construire lesdits immeubles, serait en partie rompu et un droit à déduction ne devrait alors être reconnu à Iberdrola que pour la TVA acquittée en amont ayant grevé la partie des frais encourus pour la remise en état de la station de pompage des eaux usées en cause au principal qui est objectivement nécessaire pour permettre à Iberdrola d’effectuer ses opérations taxées.

40

Dans ces conditions, il y a lieu de répondre aux questions posées que l’article 168, sous a), de la directive 2006/112 doit être interprété en ce sens qu’un assujetti a le droit de déduire la TVA acquittée en amont pour une prestation de services consistant à construire ou à améliorer un bien immobilier dont un tiers est propriétaire, lorsque ce dernier bénéficie à titre gratuit du résultat de ces services et que ceux-ci sont utilisés tant par cet assujetti que par ce tiers dans le cadre de leurs activités économiques, dans la mesure où lesdits services n’excèdent pas ce qui est nécessaire pour permettre audit assujetti d’effectuer des opérations taxées en aval et où leur coût est inclus dans le prix de ces opérations.

Sur les dépens

41

La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

 

Par ces motifs, la Cour (première chambre) dit pour droit :

 

L’article 168, sous a), de la directive 2006/112/CE du Conseil, du 28 novembre 2006, relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée, doit être interprété en ce sens qu’un assujetti a le droit de déduire la taxe sur la valeur ajoutée acquittée en amont pour une prestation de services consistant à construire ou à améliorer un bien immobilier dont un tiers est propriétaire, lorsque ce dernier bénéficie à titre gratuit du résultat de ces services et que ceux-ci sont utilisés tant par cet assujetti que par ce tiers dans le cadre de leurs activités économiques, dans la mesure où lesdits services n’excèdent pas ce qui est nécessaire pour permettre audit assujetti d’effectuer des opérations taxées en aval et où leur coût est inclus dans le prix de ces opérations.

 

Signatures


( *1 ) Langue de procédure : le bulgare.