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 ARRÊT DE LA COUR (dixième chambre)

1er octobre 2020 ( *1 )

« Renvoi préjudiciel – Fiscalité – Taxe sur la valeur ajoutée (TVA) – Directive 2006/112/CE – Article 98 – Faculté pour les États membres d’appliquer un taux réduit de TVA à certaines livraisons de biens et prestations de services – Annexe III, point 1 –Notions de “denrées alimentaires destinées à la consommation humaine” et de “produits normalement utilisés pour compléter ou remplacer des denrées alimentaires” – Produits aphrodisiaques »

Dans l’affaire C-331/19,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Hoge Raad der Nederlanden (Cour suprême des Pays-Bas), par décision du 19 avril 2019, parvenue à la Cour le 23 avril 2019, dans la procédure

Staatssecretaris van Financiën

contre

X,

LA COUR (dixième chambre),

composée de M. I. Jarukaitis, président de chambre, MM. E. Juhász (rapporteur) et M. Ilešič, juges,

avocat général : M. M. Szpunar,

greffier : M. A. Calot Escobar,

vu la procédure écrite,

considérant les observations présentées :

pour le gouvernement néerlandais, par Mmes M. L. Noort et M. K. Bulterman, en qualité d’agents,

pour la Commission européenne, par M. W. Roels et Mme L. Lozano Palacios, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 27 février 2020,

rend le présent

Arrêt

1

La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’annexe III, point 1, de la directive 2006/112/CE du Conseil, du 28 novembre 2006, relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée (JO 2006, L 347, p. 1, ci-après la « directive TVA »).

2

Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant le Staatssecretaris van Financiën (secrétaire d’État aux Finances, Pays-Bas) à X, au sujet de l’application du taux réduit de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) prévu pour les denrées alimentaires à des produits commercialisés et utilisés comme aphrodisiaques, composés essentiellement d’éléments d’origine végétale ou animale et consommés par voie orale.

Le cadre juridique

Le droit de l’Union

Le règlement (CE) no 178/2002

3

Le règlement (CE) no 178/2002 du Parlement européen et du Conseil, du 28 janvier 2002, établissant les principes généraux et les prescriptions générales de la législation alimentaire, instituant l’Autorité européenne de sécurité des aliments et fixant des procédures relatives à la sécurité des denrées alimentaires (JO 2002, L 31, p. 1), dispose, à son article 1er, intitulé « Objet et champ d’application » :

« 1.   Le présent règlement contient les dispositions de base permettant d’assurer, en ce qui concerne les denrées alimentaires, un niveau élevé de protection de la santé des personnes et des intérêts des consommateurs, compte tenu notamment de la diversité de l’offre alimentaire, y compris les productions traditionnelles, tout en veillant au fonctionnement effectif du marché intérieur. Il établit des principes et des responsabilités communs, le moyen de fournir une base scientifique solide, des dispositions et des procédures organisationnelles efficaces pour étayer la prise de décision dans le domaine de la sécurité des denrées alimentaires et des aliments pour animaux.

2.   Aux fins du paragraphe 1, le présent règlement établit les principes généraux régissant les denrées alimentaires et l’alimentation animale en général, et la sécurité des denrées alimentaires et des aliments pour animaux en particulier, au niveau [de l’Union européenne] et au niveau national.

Il institue l’Autorité européenne de sécurité des aliments [(EFSA)].

Il fixe des procédures relatives à des questions ayant un impact direct ou indirect sur la sécurité des denrées alimentaires et des aliments pour animaux.

[...] »

4

L’article 2 de ce règlement, intitulé « Définition de “denrée alimentaire” », prévoit :

« Aux fins du présent règlement, on entend par “denrée alimentaire” (ou “aliment”), toute substance ou produit, transformé, partiellement transformé ou non transformé, destiné à être ingéré ou raisonnablement susceptible d’être ingéré par l’être humain.

Ce terme recouvre les boissons, les gommes à mâcher et toute substance, y compris l’eau, intégrée intentionnellement dans les denrées alimentaires au cours de leur fabrication, de leur préparation ou de leur traitement. Il inclut l’eau au point de conformité défini à l’article 6 de la directive 98/83/CE [du Conseil, du 3 novembre 1998, relative à la qualité des eaux destinées à la consommation humaine (JO 1998, L 330, p. 32)], sans préjudice des exigences des directives 80/778/CEE [du Conseil, du 15 juillet 1980, relative à la qualité des eaux destinées à la consommation humaine (JO 1980, L 229, p. 11),] et 98/83/CE.

Le terme “denrée alimentaire” ne couvre pas :

a)

les aliments pour animaux ;

b)

les animaux vivants à moins qu’ils ne soient préparés en vue de la consommation humaine ;

c)

les plantes avant leur récolte ;

d)

les médicaments au sens des directives 65/65/CEE [du Conseil, du 26 janvier 1965, concernant le rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives, relatives aux spécialités pharmaceutiques (JO 1965, 22, p. 369),] et 92/73/CEE du Conseil[, du 22 septembre 1992, élargissant le champ d’application des directives 65/65/CEE et 75/319/CEE concernant le rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives relatives aux médicaments et fixant des dispositions complémentaires pour les médicaments homéopathiques (JO 1992, L 297, p. 8)] ;

e)

les cosmétiques au sens de la directive 76/768/CEE du Conseil[, du 27 juillet 1976, concernant le rapprochement des législations des États membres relatives aux produits cosmétiques (JO 1976, L 262, p. 169)] ;

f)

le tabac et les produits du tabac au sens de la directive 89/622/CEE du Conseil[, du 13 novembre 1989, concernant le rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres en matière d’étiquetage des produits de tabac (JO 1989, L 359, p. 1)] ;

g)

les stupéfiants et les substances psychotropes au sens de la Convention unique des Nations unies sur les stupéfiants[, conclue à New York le 30 mars 1961, amendée par le protocole de 1972 portant modification de la convention unique de 1961 (Recueil des traités des Nations unies, vol. 520, p. 151),] et de la Convention des Nations unies sur les substances psychotropes[, conclue à Vienne le 21 février 1971 (Recueil des traités des Nations unies, vol. 1019, p. 175)] ;

h)

les résidus et contaminants. »

5

L’article 5 dudit règlement, intitulé « Objectifs généraux », dispose, à son paragraphe 1 :

« La législation alimentaire poursuit un ou plusieurs des objectifs généraux de la protection de la vie et de la santé des personnes, de la protection des intérêts des consommateurs, y compris les pratiques équitables dans le commerce des denrées alimentaires, en tenant compte, le cas échéant, de la protection de la santé et du bien-être des animaux, de la santé des plantes et de l’environnement. »

La directive TVA

6

En vertu de l’article 96 de la directive TVA, les États membres appliquent un taux normal de TVA fixé par chaque État membre qui est le même pour les livraisons de biens et pour les prestations de services.

7

L’article 97 de cette directive dispose que le taux normal ne peut être inférieur à 15 %.

8

L’article 98, paragraphes 1 et 2, de ladite directive prévoit :

« 1.   Les États membres peuvent appliquer soit un, soit deux taux réduits.

2.   Les taux réduits s’appliquent uniquement aux livraisons de biens et aux prestations de services des catégories figurant à l’annexe III.

[...] »

9

L’annexe III de la directive TVA, qui comporte la liste des livraisons de biens et des prestations de services pouvant faire l’objet des taux réduits de TVA visés à l’article 98, contient, à ses points 1 à 4 :

« 1)

Les denrées alimentaires (y compris les boissons, à l’exclusion, toutefois, des boissons alcooliques) destinées à la consommation humaine et animale, les animaux vivants, les graines, les plantes et les ingrédients normalement destinés à être utilisés dans la préparation des denrées alimentaires ; les produits normalement utilisés pour compléter ou remplacer des denrées alimentaires ;

2)

la distribution d’eau ;

3)

les produits pharmaceutiques normalement utilisés pour les soins de santé, la prévention de maladies et le traitement à des fins médicales et vétérinaires, y compris les produits utilisés à des fins de contraception et de protection hygiénique féminine ;

4)

les équipements médicaux, le matériel auxiliaire et les autres appareils normalement destinés à soulager ou traiter des handicaps, à l’usage personnel et exclusif des handicapés, y compris la réparation de ces biens, ainsi que la livraison de sièges d’enfant pour voitures automobiles ;

[...] »

Le droit néerlandais

10

À l’époque des faits au principal, en vertu de l’article 9, paragraphe 2, sous a), de la Wet houdende vervanging van de bestaande omzetbelasting door een omzetbelasting volgens het stelsel van heffing over de toegevoegde waarde (loi portant remplacement de la taxe existante sur le chiffre d’affaires par une taxe sur le chiffre d’affaires selon le système de taxe sur la valeur ajoutée), du 28 juin 1968 (Stb. 1968, no 329), le taux de TVA était de 6 % pour les livraisons de biens figurant au tableau I de cette loi.

11

Le point a.1 de ce tableau mentionne :

« 1.

les denrées alimentaires, notamment :

a.

les aliments et boissons normalement destinés à la consommation humaine ;

b.

les produits manifestement destinés à être utilisés pour la préparation des aliments et boissons visés sous a) et qui y sont entièrement ou partiellement contenus ;

c.

les produits destinés à être utilisés pour compléter ou remplacer les aliments et boissons visés sous a), étant entendu que les boissons alcooliques ne sont pas considérées comme des denrées alimentaires ;

[...] »

Le litige au principal et les questions préjudicielles

12

X, entrepreneur assujetti à la TVA, commercialise, dans son magasin de produits érotiques, notamment, des gélules, des gouttes, des poudres et des sprays, présentés comme étant des aphrodisiaques augmentant la libido. Ces produits, qui se composent essentiellement d’éléments d’origine végétale ou animale, sont destinés à la consommation humaine et s’utilisent par voie orale.

13

Entre l’année 2009 et l’année 2013, l’assujetti a appliqué auxdits produits le taux réduit de TVA applicable aux denrées alimentaires.

14

Estimant qu’il ne s’agissait pas de « denrées alimentaires », au sens des dispositions pertinentes de la réglementation en matière de TVA, l’administration fiscale a contesté l’application de ce taux aux mêmes produits et décidé d’émettre des avis de redressement.

15

L’assujetti a contesté une telle décision de l’administration fiscale devant le Rechtbank Den Haag (tribunal de La Haye, Pays-Bas).

16

En appel, le Gerechtshof Den Haag (cour d’appel de La Haye, Pays-Bas) a fait droit au recours de l’assujetti, en jugeant que l’utilisation des produits en cause comme aphrodisiaques ne s’opposait pas à leur taxation au taux réduit applicable aux denrées alimentaires. Cette juridiction a tenu compte du fait que ces produits sont destinés à une consommation par voie orale et sont fabriqués à partir d’ingrédients pouvant être présents dans les denrées alimentaires. Elle a en outre indiqué que la définition de la notion de « denrées alimentaires » était si large qu’elle pouvait recouvrir des produits qui ne sont pas directement associés à des denrées alimentaires, tels que les friandises, les chewing-gums ou les gâteaux.

17

Le secrétaire d’État aux Finances a formé un pourvoi en cassation contre l’arrêt du Gerechtshof Den Haag (cour d’appel de La Haye) devant la juridiction de renvoi, le Hoge Raad der Nederlanden (Cour suprême des Pays-Bas).

18

Estimant que la solution du litige dont il est saisi nécessite l’interprétation des dispositions de la directive TVA, le Hoge Raad der Nederlanden (Cour suprême des Pays-Bas) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :

«1)

Convient-il d’interpréter la notion de denrées alimentaires destinées à la consommation humaine, utilisée à l’annexe III, point 1, de la directive [TVA], en ce sens qu’elle désigne toute substance ou produit, transformé, partiellement transformé ou non transformé, destiné à être ingéré ou raisonnablement susceptible d’être ingéré par l’être humain, conformément à l’article 2 du règlement [no 178/2002] ?

Si cette question appelle une réponse négative, comment convient-il d’interpréter cette notion ?

2)

Si des produits susceptibles d’être mangés ou d’être bus ne peuvent pas être considérés comme des denrées alimentaires destinées à la consommation humaine, au regard de quels critères convient-il d’apprécier s’ils peuvent être considérés comme des produits qui sont normalement utilisés pour compléter ou remplacer des denrées alimentaires ? »

Sur les questions préjudicielles

19

Par ses questions, qu’il convient d’examiner ensemble, la juridiction de renvoi demande, en substance, comment doivent être interprétées les notions de « denrées alimentaires destinées à la consommation humaine » et de « produits normalement utilisés pour compléter ou remplacer des denrées alimentaires », figurant à l’annexe III, point 1, de la directive TVA.

20

En vertu de l’article 96 de la directive TVA, chaque État membre applique un même taux normal de TVA aux livraisons de biens et aux prestations de services.

21

Par dérogation à ce principe, l’article 98, paragraphe 1, de cette directive reconnaît aux États membres la faculté d’appliquer un ou deux taux réduits de TVA. Aux termes de l’article 98, paragraphe 2, premier alinéa, de ladite directive, les taux réduits de TVA peuvent uniquement être appliqués aux livraisons de biens et aux prestations de services des catégories figurant à l’annexe III de la même directive.

22

Plus particulièrement, l’annexe III, point 1, de la directive TVA permet aux États membres d’appliquer un taux réduit de TVA, notamment, aux « denrées alimentaires (y compris les boissons, à l’exclusion, toutefois, des boissons alcooliques) destinées à la consommation humaine et animale » ainsi qu’aux « produits normalement utilisés pour compléter ou remplacer des denrées alimentaires ».

23

La directive TVA ne contient pas de définition de la notion de « denrées alimentaires destinées à la consommation humaine », ni de celle de « produits normalement utilisés pour compléter ou remplacer des denrées alimentaires » et le règlement d’exécution (UE) no 282/2011 du Conseil, du 15 mars 2011, portant mesures d’exécution de la directive 2006/112 (JO 2011, L 77, p. 1), ne prévoit, non plus, aucune définition de ces notions. En outre, ni la directive TVA ni le règlement d’exécution no 282/2011 ne comportent de renvoi au droit des États membres à cet égard.

24

Dans ces conditions, les notions de « denrées alimentaires destinées à la consommation humaine » et de « produits normalement utilisés pour compléter ou remplacer des denrées alimentaires », figurant à l’annexe III, point 1, de la directive TVA, doivent être interprétées conformément au sens habituel des termes qui les composent dans le langage courant, tout en tenant compte du contexte dans lequel ces termes sont utilisés et des objectifs poursuivis par la réglementation dont lesdits termes font partie (voir, en ce sens, arrêt du 29 juillet 2019, Spiegel Online, C-516/17, EU:C:2019:625, point 65).

25

S’agissant, en premier lieu, du sens habituel dans le langage courant des termes constituant les mêmes notions, d’une part, il y a lieu de relever que, ainsi que M. l’avocat général l’a en substance souligné aux points 18, 19 et 27 de ses conclusions, constituent en principe des « denrées alimentaires destinées à la consommation humaine » tous les produits contenant des nutriments constitutifs, énergétiques et régulateurs de l’organisme humain, nécessaires au maintien, au fonctionnement et au développement de cet organisme, consommés afin d’apporter ces nutriments à celui-ci.

26

Cette fonction nutritionnelle étant déterminante pour qu’un produit puisse être qualifié de « denrée alimentaire destinée à la consommation humaine », selon le sens habituel dans le language courant de ces termes, il est sans pertinence que ce produit ait ou non des effets bénéfiques pour la santé, que son ingestion implique ou non un certain plaisir pour le consommateur et que son utilisation s’inscrive dans un certain contexte sociétal. Dès lors, la circonstance que la consommation dudit produit déploie des effets positifs sur la libido de la personne qui l’ingère est indifférente à cet égard.

27

D’autre part, s’agissant du sens habituel dans le langage courant des termes « produits normalement utilisés pour compléter ou remplacer des denrées alimentaires », il y a lieu de relever que ces termes recouvrent les produits dont la consommation apporte également des nutriments constitutifs, énergétiques et régulateurs à l’organisme humain, nécessaires au maintien, au fonctionnement et au développement de cet organisme.

28

Force est de constater qu’une telle fonction nutritionnelle ne saurait faire défaut dans cette catégorie de produits dès lors que ces produits ont pour vocation de compléter ou de remplacer les denrées alimentaires.

29

Étant donné que ces deux catégories de produits ont la même fonction nutritionnelle, il n’y a, par conséquent, pas de raison de leur appliquer des régimes de TVA différents.

30

S’agissant, en deuxième lieu, du contexte dans lequel les notions de « denrées alimentaires destinées à la consommation humaine » et de « produits normalement utilisés pour compléter ou remplacer des denrées alimentaires », figurant à l’annexe III, point 1, de la directive TVA, s’inscrivent, il convient de relever que, ainsi qu’il ressort des points 20 à 22 du présent arrêt, ces deux notions désignent des produits dont la livraison est soumise à un taux réduit de TVA, ce qui constitue une dérogation au principe de l’application du taux normal de TVA. Elles doivent, dès lors, faire l’objet d’une interprétation stricte (voir, en ce sens, arrêt du 19 décembre 2019, Segler-Vereinigung Cuxhaven, C-715/18, EU:C:2019:1138, point 25).

31

Il convient de relever, par ailleurs, que la définition de la notion de « denrée alimentaire » figurant à l’article 2 du règlement no 178/2002, n’est pas pertinente aux fins de la définition de ces notions car ce règlement, qui a pour objectif, ainsi que cela ressort de l’article 1er de celui-ci, la protection de la santé, est relatif à toutes les substances contribuant à la sécurité alimentaire. Ainsi, ledit règlement vise, par la notion particulièrement large de « denrées alimentaires », toute substance destinée à être ingérée ou raisonnablement susceptible d’être ingérée par l’être humain, y compris les boissons alcooliques et l’eau. Dès lors, cette notion a une portée qui excède celle de la notion de « denrées alimentaires destinées à la consommation humaine » ou de la notion de « produits normalement utilisés pour compléter ou remplacer des denrées alimentaires », figurant à l’annexe III, point 1, de la directive TVA.

32

En outre, ni la notion de « denrées alimentaires » ni celle de « produits normalement utilisés pour compléter ou remplacer des denrées alimentaires », figurant au point 1 de cette annexe, ne sauraient recouvrir des médicaments, dès lors que l’annexe III de la directive TVA mentionne de manière distincte, à son point 3, les « produits pharmaceutiques ».

33

S’agissant, en troisième lieu, de l’objectif poursuivi par l’annexe III de la directive TVA, la Cour a jugé que, en établissant l’annexe III de cette directive, le législateur de l’Union a souhaité que les biens essentiels ainsi que les biens et les services correspondant à des objectifs sociaux ou culturels, pour autant qu’ils ne présentent pas ou peu de risques de distorsion de la concurrence, puissent faire l’objet d’un taux réduit de TVA (arrêt du 4 juin 2015, Commission/Royaume-Uni, C-161/14, non publié, EU:C:2015:355, point 25 et jurisprudence citée).

34

La Cour a ajouté que la finalité de cette annexe est de rendre moins onéreux et, par conséquent, plus accessibles pour le consommateur final, qui supporte en définitive le coût de la TVA, certains biens considérés comme étant particulièrement nécessaires (voir, en ce sens, arrêt du 9 mars 2017, Oxycure Belgium, C-573/15, EU:C:2017:189, point 22 et jurisprudence citée).

35

Dans ces conditions, tout produit destiné à la consommation humaine qui apporte à l’organisme humain des nutriments nécessaires au maintien, au fonctionnement et au développement de cet organisme relève de la catégorie figurant à l’annexe III, point 1, de la directive TVA, même si la consommation de ce produit vise également à produire d’autres effets.

36

En revanche, un produit qui ne contient pas de nutriments ou en contient dans une quantité tout à fait négligeable et dont la consommation sert uniquement à produire d’autres effets que ceux nécessaires au maintien, au fonctionnement ou au développement de l’organisme humain ne saurait relever de cette catégorie.

37

S’il semble ressortir des informations dont dispose la Cour que tel est le cas en ce qui concerne les produits aphrodisiaques en cause dans le litige au principal, il appartient à la juridiction de renvoi de le vérifier.

38

Au demeurant, cette interprétation est corroborée par l’objectif poursuivi par l’annexe III de la directive TVA de soumettre à un taux réduit de TVA les biens essentiels afin de les rendre plus accessibles pour le consommateur final.

39

Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il convient de répondre aux questions posées que les notions de « denrées alimentaires destinées à la consommation humaine » et de « produits normalement utilisés pour compléter ou remplacer des denrées alimentaires », figurant à l’annexe III, point 1, de la directive TVA, doivent être interprétées en ce sens qu’elles visent tous les produits contenant des nutriments constitutifs, énergétiques et régulateurs de l’organisme humain, nécessaires au maintien, au fonctionnement et au développement de cet organisme, consommés afin d’apporter ces nutriments à celui-ci.

Sur les dépens

40

La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

 

Par ces motifs, la Cour (dixième chambre) dit pour droit :

 

Les notions de « denrées alimentaires destinées à la consommation humaine » et de « produits normalement utilisés pour compléter ou remplacer des denrées alimentaires », figurant à l’annexe III, point 1, de la directive 2006/112/CE du Conseil, du 28 novembre 2006, relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée, doivent être interprétées en ce sens qu’elles visent tous les produits contenant des nutriments constitutifs, énergétiques et régulateurs de l’organisme humain, nécessaires au maintien, au fonctionnement et au développement de cet organisme, consommés afin d’apporter ces nutriments à celui-ci.

 

Signatures


( *1 ) Langue de procédure : le néerlandais.