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 ARRÊT DE LA COUR (sixième chambre)

5 mai 2022 ( *1 )

« Renvoi préjudiciel – Fiscalité – Taxe sur la valeur ajoutée (TVA) – Directive 2006/112/CE – Taux – Dispositions temporaires pour certains services à forte intensité de main-d’œuvre – Annexe IV, point 2 – Rénovation et réparation de logements privés – Application d’un taux réduit de TVA aux services de réparation et d’entretien d’ascenseurs d’immeubles d’habitation »

Dans l’affaire C-218/21,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Supremo Tribunal Administrativo (Cour administrative suprême, Portugal), par décision du 17 février 2021, parvenue à la Cour le 1er avril 2021, dans la procédure

Autoridade Tributária e Aduaneira

contre

DSR – Montagem e Manutenção de Ascensores e Escadas Rolantes SA,

LA COUR (sixième chambre),

composée de Mme I. Ziemele, présidente de chambre, MM. T. von Danwitz et A. Kumin (rapporteur), juges,

avocat général : Mme T. Ćapeta,

greffier : M. A. Calot Escobar,

vu la procédure écrite,

considérant les observations présentées :

pour DSR – Montagem e Manutenção de Ascensores e Escadas Rolantes SA, par Me J. Vilaça da Fonseca, advogado,

pour le gouvernement portugais, initialement par Mme P. Barros da Costa ainsi que par MM. L. Inez Fernandes et R. Campos Laires, puis par Mme P. Barros da Costa et M. R. Campos Laires, en qualité d’agents,

pour la Commission européenne, par Mme M. Afonso et M. V. Uher, en qualité d’agents,

vu la décision prise, l’avocate générale entendue, de juger l’affaire sans conclusions,

rend le présent

Arrêt

1

La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’annexe IV, point 2, de la directive 2006/112/CE du Conseil, du 28 novembre 2006, relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée (JO 2006, L 347, p. 1, ci-après la « directive TVA »).

2

Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant l’Autoridade Tributária e Aduaneira (autorité fiscale et douanière, Portugal) (ci-après l’« administration fiscale ») à DSR – Montagem e Manutenção de Ascensores e Escadas Rolantes SA (ci–après « DSR ») au sujet du taux de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) applicable aux services de réparation et d’entretien d’ascenseurs effectués par cette société.

Le cadre juridique

Le droit de l’Union

3

La directive TVA comprend un titre VIII, intitulé « Taux », lequel contient un chapitre 2, intitulé « Structure et niveaux des taux ». À ce chapitre figurent, notamment, les articles 96 et 98 de cette directive.

4

L’article 96 de ladite directive énonce :

« Les États membres appliquent un taux normal de TVA fixé par chaque État membre à un pourcentage de la base d’imposition qui est le même pour les livraisons de biens et pour les prestations de services. »

5

L’article 98, paragraphes 1 et 2, de la même directive est ainsi libellé :

« 1.   Les États membres peuvent appliquer soit un, soit deux taux réduits.

2.   Les taux réduits s’appliquent uniquement aux livraisons de biens et aux prestations de services des catégories figurant à l’annexe III.

[...] »

6

À la date des faits au principal, le titre VIII de la directive TVA contenait un chapitre 3, intitulé « Dispositions temporaires pour certains services à forte intensité de main-d’œuvre ». À ce chapitre figuraient, notamment, les articles 106 et 107 de cette directive.

7

L’article 106 de ladite directive disposait :

« Les États membres peuvent être autorisés par le Conseil [de l’Union européenne], statuant à l’unanimité sur proposition de la Commission [européenne], à appliquer, jusqu’au 31 décembre 2010 au plus tard, aux services figurant à l’annexe IV les taux réduits prévus à l’article 98.

Les taux réduits peuvent s’appliquer à des services appartenant à deux au maximum des catégories figurant à l’annexe IV.

Dans des cas exceptionnels, un État membre peut être autorisé à appliquer les taux réduits à des services appartenant à trois des catégories susmentionnées. »

8

L’article 107 de la même directive prévoyait :

« Les services visés à l’article 106 doivent remplir les conditions suivantes :

a)

être à forte intensité de main-d’œuvre ;

b)

être en grande partie fournis directement aux consommateurs finaux ;

c)

être principalement locaux et non susceptibles de créer des distorsions de concurrence.

En outre, il doit y avoir un lien étroit entre la baisse de prix découlant de la réduction du taux et l’augmentation prévisible de la demande et de l’emploi. L’application d’un taux réduit ne doit pas mettre en péril le bon fonctionnement du marché intérieur. »

9

L’annexe IV de la directive TVA contenait la liste des services visés à l’article 106 de cette directive. Le point 2 de cette annexe était libellé comme suit :

« la rénovation et la réparation de logements privés, à l’exclusion des matériaux qui représentent une part importante de la valeur du service fourni ».

10

Le chapitre 3 du titre VIII de la directive TVA ainsi que l’annexe IV de cette directive ont été abrogés par la directive 2009/47/CE du Conseil, du 5 mai 2009, modifiant la directive 2006/112 en ce qui concerne les taux réduits de taxe sur la valeur ajoutée (JO 2009, L 116, p. 18). En revanche, a été inséré, par la directive 2009/47, un point 10 bis à l’annexe III de la directive TVA, cette annexe contenant la liste des livraisons de biens et des prestations de services pouvant faire l’objet des taux réduits de TVA visés à l’article 98 de cette directive. Le contenu de ce point 10 bis est identique à celui du point 2 de l’ancienne annexe IV de la directive TVA.

Le droit portugais

Le code de la TVA

11

L’article 18, paragraphe 1, du Código do Imposto sobre o Valor Acrescentado (code de la taxe sur la valeur ajoutée), dans sa version applicable aux faits au principal (ci-après le « code de la TVA »), prévoyait :

« Les taux de la taxe sont les suivants :

a)

pour les importations, livraisons de biens et prestations de services mentionnées dans la liste I annexée au présent code, le taux est de 5 % ;

[...]

c)

pour les autres importations, livraisons de biens et prestations de services, le taux est de 21 %. »

12

Le point 2.24 de la liste I annexée au code de la TVA disposait :

« Les louages d’ouvrage à des fins d’amélioration, de réfection, de rénovation, de restauration, de réparation et de conservation d’immeubles et de parties autonomes d’immeubles à usage d’habitation, à l’exception des services de nettoyage, d’entretien des espaces verts et des louages d’ouvrage concernant des biens immobiliers qui couvrent la totalité ou une partie des éléments consistant en piscines, saunas, courts de tennis, golfs ou minigolfs et installations similaires.

Le taux réduit ne s’applique pas aux matériaux incorporés, à moins que leur valeur n’excède pas 20 % de la valeur totale du service fourni. »

Le code civil

13

Aux termes de l’article 204 du Código Civil (code civil) :

« 1.   Sont des biens immeubles :

[...]

e) les parties intégrantes des biens immobiliers agricoles et urbains.

[...]

3.   Est partie intégrante tout bien meuble lié matériellement au bien immobilier de manière permanente. »

14

L’article 1207 de ce code dispose :

« Le louage d’ouvrage est le contrat par lequel l’une des parties s’engage auprès de l’autre à réaliser une certaine tâche, moyennant un prix. »

15

En vertu de l’article 1421, paragraphe 2, sous b), dudit code, les ascenseurs sont présumés comme étant des parties communes d’un bâtiment.

Le litige au principal et les questions préjudicielles

16

DSR est une société active dans la fabrication d’ascenseurs, de monte-charges et de trottoirs roulants, et fournit également des services de réparation et d’entretien d’ascenseurs.

17

Pendant l’année 2007, elle a appliqué un taux réduit de TVA aux services de réaménagement et de réparation d’ascenseurs effectués par elle, tout en facturant les matériaux incorporés dans le cadre de ces prestations au taux normal de TVA.

18

À la suite d’un contrôle fiscal au cours de l’année 2011, l’administration fiscale a constaté que DSR avait appliqué à tort le taux réduit de TVA à ces services.

19

Les redressements fiscaux effectués à la suite de ce contrôle fiscal ont fait l’objet d’une contestation en justice introduite par DSR devant le Tribunal Administrativo e Fiscal do Porto (tribunal administratif et fiscal de Porto, Portugal), lequel y a fait droit par un jugement du 16 octobre 2017. À cet égard, cette juridiction a considéré, notamment, que les ascenseurs font partie intégrante des bâtiments dans lesquels ils sont installés et que, dès lors, l’application du taux réduit de TVA en ce qui concerne les services de réparation et d’entretien de tels ascenseurs n’est pas exclue, à condition que ces services soient réalisés dans le cadre d’un contrat de louage d’ouvrage et que ce taux ne soit appliqué qu’à la main-d’œuvre.

20

L’administration fiscale a formé un recours contre le jugement du 16 octobre 2017 devant le Supremo Tribunal Administrativo (Cour administrative suprême, Portugal), la juridiction de renvoi.

21

À l’appui de son recours, l’administration fiscale fait valoir que, en vertu du point 2.24 de la liste I annexée au code de la TVA, le taux réduit de TVA est appliqué à certains louages d’ouvrage portant sur des biens immeubles à usage d’habitation, à l’exclusion des matériaux qui constituent une part importante du service fourni. Afin de clarifier le contenu de ce point 2.24, la Direcção de Serviços do IVA (direction des services de la TVA, Portugal) a publié des lettres circulaires, liant l’administration fiscale.

22

À cet égard, il ressortirait de la lettre circulaire no 30036, du 4 avril 2001, que l’expression « immeubles à usage d’habitation », figurant audit point 2.24, devrait être interprétée de manière restrictive, la ratio legis de cette disposition ne permettant pas d’envisager que celle-ci s’applique à des services de réparation et d’entretien d’équipements faisant partie intégrante d’immeubles. Ainsi, les services de réparation et d’entretien d’ascenseurs devraient être liquidés au taux normal de TVA, sans que soit pertinente, dans ce contexte, la définition retenue à l’article 1421, paragraphe 2, sous b), du code civil, qui inclut les ascenseurs dans les parties communes d’un bien immobilier.

23

Par ailleurs, l’administration fiscale soutient que son interprétation est conforme au droit de l’Union, dès lors qu’il ressort de la jurisprudence de la Cour, notamment de l’arrêt du 8 mai 2003, Commission/France (C-384/01, EU:C:2003:264), que les États membres ont la possibilité de limiter l’application d’un taux réduit de TVA à des aspects concrets et spécifiques d’une fourniture de biens ou d’une prestation de services, cette possibilité étant cohérente avec le principe selon lequel les exemptions ou les dérogations doivent être interprétées de manière restrictive.

24

La juridiction de renvoi fait observer que l’application d’un taux réduit de TVA relève d’une matière harmonisée et qu’est pertinente, en l’occurrence, l’annexe IV, point 2, de la directive TVA, selon laquelle un taux réduit de TVA peut être appliqué à la rénovation et à la réparation de logements privés, à l’exclusion des matériaux qui représentent une part importante de la valeur du service fourni. Or, cette juridiction émet des doutes quant au point de savoir si les services de réaménagement et de réparation d’ascenseurs en cause relèvent de cette annexe IV, point 2.

25

Selon ladite juridiction, l’acceptation du point de vue plus restrictif de l’administration fiscale impliquerait de rejeter la thèse soutenue dans le jugement du 16 octobre 2017, selon laquelle le taux réduit de TVA est applicable à certains « louages d’ouvrage » portant sur des « immeubles »« à usage d’habitation », ainsi que ces termes figurent au point 2.24 de la liste I annexée au code de la TVA, interprétés, en outre, conformément à d’autres dispositions nationales telles que l’article 204, paragraphe 1, sous e), et paragraphe 3, l’article 1207 ou l’article 1421, paragraphe 2, sous b), du code civil.

26

Dans ces conditions, le Supremo Tribunal Administrativo (Cour administrative suprême) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :

« 1)

Est-il conforme au droit de l’Union [...], et notamment à l’annexe IV de la [directive TVA], d’appliquer le point [2.24] de la liste I annexée au code de la TVA en ce sens que ce point couvre la réparation et l’entretien d’ascenseurs effectués par l’entreprise visée dans les faits résumés ci-dessus avec application d’un taux réduit de TVA ?

2)

Est-il conforme au droit de l’Union [...], et notamment à l’annexe IV de la [directive TVA], d’appliquer cette disposition du code de la TVA en tenant compte également de dispositions existant par ailleurs en droit national – article 1207, article 204, paragraphe 1, sous [e)], et paragraphe 3, et article 1421, paragraphe 2, sous [b)], du code civil (règles définissant les notions de “louage d’ouvrage” et d’“immeuble” et établissant la présomption selon laquelle l’ascenseur constitue une partie commune d’un bien immobilier soumis au régime de copropriété) ? »

Sur les questions préjudicielles

27

Par ses questions, qu’il convient d’examiner ensemble, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’annexe IV, point 2, de la directive TVA doit être interprétée en ce sens que relèvent de la notion de « rénovation et [de] réparation de logements privés », au sens de cette disposition, les services de réparation et de rénovation d’ascenseurs d’immeubles d’habitation.

28

L’annexe IV, point 2, de la directive TVA, lue conjointement avec l’article 106 de cette directive, autorisait les États membres à appliquer un taux réduit de TVA aux services liés à « la rénovation et [à] la réparation de logements privés, à l’exclusion des matériaux qui représentent une part importante de la valeur du service fourni ».

29

En l’absence de renvoi au droit des États membres et de définition pertinente dans la directive TVA, les termes figurant à l’annexe IV, point 2, de cette directive doivent être interprétés de manière uniforme et indépendamment des qualifications utilisées dans les États membres, conformément à leur sens habituel dans le langage courant, tout en tenant compte du contexte dans lequel ils sont utilisés et des objectifs poursuivis par la réglementation dont ils font partie (voir, en ce sens, arrêts du 9 juillet 2020, AJPF Caraş-Severin et DGRFP Timişoara, C-716/18, EU:C:2020:540, point 30 ainsi que jurisprudence citée, et du 17 décembre 2020, BAKATI PLUS, C-656/19, EU:C:2020:1045, point 42).

30

D’emblée, pour autant que, aux termes de l’annexe IV, point 2, de la directive TVA, le taux réduit de TVA ne s’applique pas aux matériaux qui représentent une part importante de la valeur du service fourni, il suffit de noter que cet aspect n’est pas controversé en l’occurrence, dès lors que DSR a facturé au taux normal l’ensemble des matériaux incorporés, seule la main-d’œuvre ayant été soumise au taux réduit.

31

Cela étant précisé, il ressort du libellé de cette annexe IV, point 2, d’une part, que deux activités distinctes sont couvertes par cette disposition, à savoir la rénovation et la réparation, et, d’autre part, que ces activités doivent se rapporter aux logements privés.

32

S’agissant des termes « rénovation » et « réparation », il convient de relever que ceux-ci visent, respectivement, la remise à neuf d’un objet et la remise en état d’un objet endommagé.

33

Or, de tels services se caractérisent, notamment, par leur caractère occasionnel, de sorte que de simples services d’entretien, fournis de manière régulière et continue, ne sauraient être considérés comme relevant de l’annexe IV, point 2, de la directive TVA.

34

Quant à l’expression « logements privés », il y a lieu de relever que le terme « logement » désigne généralement un bien immeuble, voire meuble, ou une partie de celui-ci, destiné à l’habitation et qui sert donc de résidence à une ou à plusieurs personnes. Par ailleurs, l’adjectif « privé » permet de faire une distinction avec les logements non privés, tels que les logements de fonction ou encore les hôtels.

35

Partant, les services de rénovation et de réparation visés à l’annexe IV, point 2, de la directive TVA doivent porter sur des biens utilisés à des fins d’habitation privée, tandis que les services se rapportant aux biens utilisés à d’autres fins, telles que des fins commerciales, ne sont pas couverts par cette disposition.

36

Dans ce contexte, le gouvernement portugais fait valoir, en substance, que l’expression « logement privé », en ce qu’elle est moins large que des expressions telles que « bâtiment » ou « bien immobilier d’habitation », renvoie de manière individualisée à chacune des fractions autonomes d’un bien immobilier effectivement destinées à l’habitation, sur lesquelles le propriétaire ou le locataire exerce une maîtrise totale, et qu’il convient d’en distinguer les espaces d’accès commun d’un tel bien immobilier. Ainsi, selon cette conception, les services de rénovation et de réparation relatifs aux installations partagées, y compris les ascenseurs, ne relèveraient pas de l’annexe IV, point 2, de la directive TVA.

37

À cet égard, il convient cependant de constater que, dans le cas d’un immeuble d’habitation constitué de plusieurs appartements, les installations partagées sont, en règle générale, importantes, voire indispensables, pour l’utilisation des appartements individuels.

38

Dans ces conditions, il y a lieu de considérer que, s’agissant de tels immeubles d’habitation, les installations partagées sont couvertes par l’expression « logements privés », au sens de l’annexe IV, point 2, de la directive TVA, de sorte que les services de rénovation et de réparation relatifs à ces installations relèvent de cette disposition. À ce titre, les ascenseurs, faisant partie intégrante des bâtiments qui en disposent, sont compris dans lesdites installations.

39

Partant, il convient de conclure du libellé de l’annexe IV, point 2, de la directive TVA que relèvent de cette disposition les services de réparation et de rénovation d’ascenseurs d’immeubles d’habitation, à l’exclusion des services d’entretien de tels ascenseurs.

40

S’agissant du contexte dans lequel s’inscrit l’annexe IV, point 2, de la directive TVA, cette disposition, en ce qu’elle permet d’appliquer un taux réduit de TVA, constitue une dérogation au principe de l’application du taux normal et est donc d’interprétation stricte [voir, en ce sens, arrêt du 1er octobre 2020, Staatssecretaris van Financiën (Taux réduit de TVA pour aphrodisiaques), C-331/19, EU:C:2020:786, point 30 et jurisprudence citée].

41

Or, l’interprétation exposée au point 39 du présent arrêt, dans la mesure où elle se fonde sur l’importance des installations partagées pour l’utilisation des appartements individuels d’un immeuble d’habitation, est conforme à cette exigence.

42

Il y a lieu, cependant, d’ajouter que, les services de rénovation et de réparation effectués dans les bâtiments utilisés à des fins autres que d’habitation devant rester soumis à l’application du taux normal de TVA, il convient de procéder à une répartition au prorata dans le cas de services de rénovation et de réparation relatifs aux installations partagées de bâtiments à usage mixte, lesquels incluent des fractions destinées à l’habitation privée et des fractions destinées à d’autres fins, telles que des fins commerciales.

43

L’interprétation retenue au point 39 du présent arrêt concorde également avec l’objectif poursuivi par l’annexe IV de la directive TVA, dès lors qu’il ressort de l’intitulé du titre VIII, chapitre 3, de cette directive que le législateur de l’Union a envisagé un allègement de la TVA ciblé sur des services à forte intensité de main-d’œuvre, ce qui est le cas des services de réparation et de rénovation d’ascenseurs.

44

Cela étant, ainsi que le gouvernement portugais le fait valoir, la Cour a jugé que les États membres ont la possibilité de procéder à une application sélective du taux réduit de TVA, sous réserve, d’une part, de n’isoler, aux fins de l’application du taux réduit, que des aspects concrets et spécifiques de la catégorie de prestations en cause et, d’autre part, de respecter le principe de neutralité fiscale (voir, en ce sens, arrêt du 5 septembre 2019, Regards Photographiques, C-145/18, EU:C:2019:668, points 42 et 43 ainsi que jurisprudence citée).

45

En l’occurrence, s’il incombe, en définitive, à la juridiction de renvoi d’interpréter le droit national et, partant, d’examiner si le législateur portugais a transposé de manière sélective l’annexe IV, point 2, de la directive TVA, en ce qu’il aurait exclu du champ d’application du taux réduit de TVA des services relatifs aux ascenseurs d’immeubles d’habitation, rien dans le texte de la disposition nationale mettant en œuvre ce point 2, à savoir le point 2.24 de la liste I annexée au code de la TVA, ne semble indiquer que ce législateur aurait procédé ainsi, la position de l’administration fiscale reposant au contraire sur l’interprétation restrictive préconisée par des instructions internes.

46

Or, les dispositions d’une directive devant être mises en œuvre avec une force contraignante incontestable, ainsi qu’avec la spécificité, la précision et la clarté requises, un État membre ne saurait invoquer de simples pratiques administratives, par nature modifiables au gré de l’administration et dépourvues d’une publicité adéquate, pour démontrer une transposition sélective d’une disposition de la directive TVA autorisant l’application d’un taux réduit de TVA pour une catégorie de services (voir, en ce sens, arrêt du 4 juin 2009, SALIX Grundstücks-Vermietungsgesellschaft, C-102/08, EU:C:2009:345, points 42 et 43 ainsi que jurisprudence citée).

47

Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il y a lieu de répondre aux questions posées que l’annexe IV, point 2, de la directive TVA doit être interprétée en ce sens que relèvent de la notion de « rénovation et [de] réparation de logements privés », au sens de cette disposition, les services de réparation et de rénovation d’ascenseurs d’immeubles d’habitation, à l’exclusion des services d’entretien de tels ascenseurs.

Sur les dépens

48

La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

 

Par ces motifs, la Cour (sixième chambre) dit pour droit :

 

L’annexe IV, point 2, de la directive 2006/112/CE du Conseil, du 28 novembre 2006, relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée, doit être interprétée en ce sens que relèvent de la notion de « rénovation et [de] réparation de logements privés », au sens de cette disposition, les services de réparation et de rénovation d’ascenseurs d’immeubles d’habitation, à l’exclusion des services d’entretien de tels ascenseurs.

 

Signatures


( *1 ) Langue de procédure : le portugais.