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Avis juridique important

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61998C0396

Conclusions de l'avocat général Ruiz-Jarabo Colomer présentées le 16 décembre 1999. - Grundstückgemeinschaft Schloßstraße GbR contre Finanzamt Paderborn. - Demande de décision préjudicielle: Bundesfinanzhof - Allemagne. - Taxes sur le chiffre d'affaires - Système commun de taxe sur la valeur ajoutée - Article 17 de la sixième directive 77/388/CEE - Déduction de la taxe payée en amont - Impossibilité d'opérer la déduction en raison d'une modification de la législation nationale qui supprime la possibilité d'opter pour la taxation de la location de biens immeubles. - Affaire C-396/98.

Recueil de jurisprudence 2000 page I-04279


Conclusions de l'avocat général


1 Cette demande de décision préjudicielle, présentée par le Bundesfinanzhof allemand conformément à l'article 177 du traité CE (devenu article 234 CE), traduit les doutes que cette juridiction conçoit relativement à la portée de la jurisprudence que la Cour a consacrée récemment au droit de déduire la taxe sur la valeur ajoutée (ci-après la «TVA») qui a été acquittée sur les dépenses d'investissement.

La question qu'il s'agit de résoudre en l'espèce est celle de savoir si, conformément aux dispositions de la sixième directive 77/388/CEE du Conseil (1) (ci-après la «sixième directive»), un assujetti conserve le droit à déduction lorsqu'une modification légale, intervenue après qu'il eut acquis un bien ou acheté un service dans le but d'exercer une activité économique soumise à la TVA, le prive du droit de renoncer à l'exonération de cette activité et si le fait que la taxe a été liquidée sous réserve d'un contrôle a posteriori a une incidence sur la solution à donner à ce problème.

I - Faits et procédure au principal

2 La société civile Grundstücksgemeinschaft Schloßstraße GbR (ci-après «Schloßstraße») a pour objet de détenir un droit de superficie sur un terrain, d'y construire un immeuble de bureaux et d'habitation et d'exploiter cette propriété foncière à long terme.

3 Schloßstraße a acquis ce droit de superficie en mars 1991 et a alors introduit une demande de permis de bâtir. En raison de problèmes de conformité avec les règles d'urbanisme, ce permis ne lui a été délivré qu'en mai 1993. La juridiction de renvoi signale que, jusqu'au mois de juin 1993 au moins, les associés avaient l'intention de céder le permis de bâtir à un tiers. Faute d'acquéreur, ils ont néanmoins conclu un contrat avec un architecte en vue de procéder à la construction. Les travaux ont commencé en janvier 1994 et se sont terminés en décembre de la même année. Schloßstraße a donné 39,38 % de la surface totale en location à des fins d'habitation, elle en a loué 13,96 % à un bureau d'architecte et 46,49 % à une société anonyme dont l'activité consistait à 90 % en la prestation de services financiers bénéficiant de l'exonération fiscale.

4 Dans les déclarations TVA des exercices 1992 à 1994, Schloßstraße a opté pour la taxation des opérations de location projetées ou exécutées et elle a fait valoir le droit à déduction sur les factures liées à la construction. Ce droit à déduction lui a été accordé dans un premier temps. Toutefois, conformément aux articles 164 et 168 de l'Abgabenordnung (code allemand des impôts, ci-après l'«AO»), les avis d'imposition ont été émis sous réserve de vérification a posteriori.

5 Après avoir opéré une vérification, le Finanzamt Paderborn a décidé de rectifier les avis d'imposition de Schloßstraße pour les exercices 1992 à 1994. Il n'a accepté la déduction de la TVA qu'à concurrence de 13,96 % des montants déclarés, considérant que la seule utilisation taxable de l'immeuble était celle du bureau de l'architecte. Selon l'administration fiscale, il n'était plus possible d'accorder la déduction en ce qui concerne les 46,49 % relatifs à l'utilisation exonérée de l'immeuble par la société anonyme parce que, pour ce type d'opérations, la possibilité de renoncer à l'exonération avait été supprimée à partir du 1er janvier 1994 à la suite de la modification de l'article 9, paragraphe 2, de l'Umsatzsteuergesetz (loi relative à la taxe sur le chiffre d'affaires, ci-après l'«UStG»), introduite par le Mißbrauchsbekämpfungs- und Steuerbereinigungsgesetz (loi relative à la simplification de la législation fiscale et à la lutte contre la fraude, ci-après le «StMBG») du 21 décembre 1993. Par ailleurs, le Finanzamt a estimé que Schloßstraße ne pouvait pas non plus se prévaloir des dispositions transitoires inscrites à l'article 27, paragraphe 2, de l'UStG, tel que modifié par le StMBG, parce que la construction du bâtiment n'avait pas commencé avant le 11 novembre 1993, date limite prévue par cette disposition.

6 Schloßstraße a introduit une réclamation, puis un recours, contre cette décision du Finanzamt, mais l'une et l'autre ont été rejetés. Elle a alors introduit un recours en «Revision», dans lequel elle a fait valoir que la restriction du droit d'opter pour la taxation qui a été introduite par la nouvelle réglementation inscrite à l'article 9, paragraphe 2, de l'UStG ne lui est pas applicable parce qu'il y a lieu de considérer que la construction du bâtiment a commencé au moment où elle a introduit sa demande de permis de bâtir ou, du moins, lorsque celui-ci lui a été accordé. D'autre part, elle a déduit de l'arrêt Inzo de la Cour (2) qu'elle peut se prévaloir du principe de la protection de la confiance légitime pour réclamer le droit de déduire la taxe acquittée au cours des exercices 1992 et 1993 (notamment sur les frais d'architecte et de notaire).

7 Dans son ordonnance de renvoi, le Bundesfinanzhof émet des doutes sur les chances de succès du recours en Revision. Il affirme, en premier lieu, que Schloßstraße ne peut pas invoquer les dispositions transitoires de l'article 27, paragraphe 2, de l'UStG parce que la construction du bâtiment n'a pas commencé avant le mois de janvier 1994. Les prestations déjà fournies en 1992 et en 1993 font partie des frais de construction du bâtiment et, en ce sens, elles font partie de celui-ci en tant que «bien d'investissement». Par conséquent, la décision relative à la déduction de la TVA acquittée sur ces prestations ne peut pas être prise sans tenir compte de la date de construction du bâtiment - ni, donc, de la limitation inscrite à l'article 27, paragraphe 2, de l'UStG, tel que modifié par le StMBG -, car elle dépend de la destination effective du bâtiment, c'est-à-dire des opérations de location effectuées en 1994, et du point de savoir si ces opérations sont imposables ou exonérées.

Étant donné que, conformément à la jurisprudence que le Bundesfinanzhof a consacrée à l'UStG, la décision définitive sur le droit à déduction ne peut être prise que lorsque l'utilisation réelle des biens d'investissement est connue - et étant donné qu'elle ne peut pas être prise sur la base de son utilisation alléguée -, le Finanzamt était fondé, conformément à l'article 164, paragraphe 2, de l'AO, à modifier les avis d'imposition qu'il avait émis sous réserve de vérification et à refuser la déduction dans la mesure où les services fournis ont finalement été utilisés pour réaliser des opérations exonérées de la TVA.

En deuxième lieu, le Bundesfinanzhof signale que l'application rétroactive de la nouvelle version de l'article 9, paragraphe 2, de l'UStG à la déduction des prestations fournies en 1992 et en 1993 n'enfreint pas le principe constitutionnel de non-rétroactivité. Au moment où la nouvelle législation est entrée en vigueur, le droit à déduction relativement aux investissements indiqués n'était pas définitif puisque l'utilisation finale des biens d'investissement n'avait pas encore été établie et que cet élément est déterminant pour la décision relative au droit à déduction.

Enfin, la juridiction de renvoi considère que Schloßstraße ne peut pas se prévaloir de la confiance légitime et invoquer la conviction qu'elle avait de pouvoir exercer l'option prévue par l'ancien article 9, paragraphe 2, de l'UStG relativement à la location du bâtiment qu'elle envisageait puisque la construction de celui-ci n'a débuté qu'après l'entrée en vigueur de la nouvelle réglementation.

8 Néanmoins, le Bundesfinanzhof se demande si cette interprétation des dispositions applicables du droit allemand est conforme à la jurisprudence que la Cour a dégagée à propos de l'article 17 de la sixième directive. C'est la raison pour laquelle il a décidé de surseoir à statuer et d'adresser les questions préjudicielles suivantes à la Cour:

«Aux termes de la jurisprudence de la Cour de justice des Communautés européennes (arrêt du 15 janvier 1998 dans l'affaire C-37/95, Ghent Coal Terminal NV, avec renvoi à l'arrêt du 29 février 1996, affaire C-110/94, INZO), le droit à déduction reste acquis lorsque, en raison de circonstances étrangères à sa volonté, l'assujetti n'a jamais fait usage desdits biens et services pour réaliser des opérations taxées.

Le droit à déduction reste-t-il acquis en vertu de ce principe y compris lorsque l'assujetti fait certes usage du bien ou du service pour réaliser certaines opérations (de location), mais qu'une modification législative postérieure à l'acquisition de ce bien ou de ce service le prive du droit de renoncer à l'exonération de ces opérations, et donc de la possibilité de réaliser des opérations taxables?

Dans un tel cas, où une circonstance nouvelle survient a posteriori, le droit à déduction reste-t-il acquis même lorsque l'impôt en question a été liquidé sous réserve d'un contrôle a posteriori, licite en droit national, qui permet une liquidation rapide de l'impôt en fondant celle-ci sur les seules déclarations de l'assujetti, mais autorise en contrepartie l'administration fiscale à rectifier cette liquidation sous tous ses aspects, tant au regard des faits que du droit?»

II - Observations présentées au cours de la procédure préjudicielle

9 Le gouvernement allemand et la Commission ont présenté des observations écrites dans le délai prévu à cette fin par l'article 20 du statut CE de la Cour.

Au cours de l'audience du 2 décembre 1999, le représentant de Schloßstraße ainsi que l'agent du gouvernement allemand et celui de la Commission ont comparu afin de présenter des observations orales.

III - Analyse des questions préjudicielles

10 Les questions qui ont été adressées à la Cour dans cette affaire, que l'agent de la Commission a qualifiée de «difficile et techniquement compliquée» au cours de l'audience, soulèvent deux problèmes. Il s'agit, d'une part, de déterminer à quel moment l'assujetti acquiert le droit de déduire la TVA qu'il a acquittée sur ses dépenses d'investissement et, d'autre part, de déterminer si les États membres peuvent supprimer, rétroactivement, le droit à déduction déjà acquis en se fondant, le cas échéant, sur le caractère provisoire de l'avis d'imposition émis par l'administration fiscale (3). Avant de me prononcer sur ces deux questions, je considère qu'il est nécessaire de rappeler les dispositions de la sixième directive et du droit allemand qui sont applicables à la location de biens immeubles.

A - Dispositions de la sixième directive et du droit allemand applicables à la location de biens immeubles

11 L'article 13, partie B, de la sixième directive exonère, en principe, la location de biens immeubles de la TVA:

«Sans préjudice d'autres dispositions communautaires, les États membres exonèrent, dans les conditions qu'ils fixent en vue d'assurer l'application correcte et simple des exonérations prévues ci-dessous et de prévenir toute fraude, évasion et abus éventuels:

...

b) l'affermage et la location de biens immeubles...».

12 Néanmoins, l'article 13, partie C, dispose que:

«Les États membres peuvent accorder à leurs assujettis le droit d'opter pour la taxation:

a) de l'affermage et de la location de biens immeubles;

...

Les États membres peuvent restreindre la portée du droit d'option; ils déterminent les modalités de son exercice.»

13 En Allemagne, l'exonération de la TVA des opérations de location de biens immeubles est réglée par l'article 4, point 12, sous a), de l'UStG. Néanmoins, cet État membre a fait usage de la possibilité que la sixième directive lui offre d'accorder à ses assujettis le droit d'opter pour la taxation et il a aménagé l'article 9, paragraphe 1, de cette loi en ce sens.

14 Dans sa version antérieure à la modification apportée par le StMBG du 21 décembre 1993, l'article 9, paragraphe 2, de l'UStG disposait ce qui suit:

«La renonciation à l'exonération au sens du paragraphe 1 n'est admise ... en cas de location ou d'affermage de biens immeubles [article 4, point 12, sous a)] que lorsque l'entrepreneur apporte la preuve que le terrain n'est employé ou destiné ni à des fins d'habitation ni à des activités autres que celles d'une entreprise.»

15 Le StMBG a introduit, avec effet au 1er janvier 1994, une restriction à ce droit d'option en ce qui concerne les opérations de location de biens immeubles. Conformément au nouveau texte de l'article 9, paragraphe 2, de l'UStG:

«La renonciation à l'exonération au sens du paragraphe 1 n'est admise ... en cas de location ou d'affermage de biens immobiliers [article 4, point 12, sous a)] que si le destinataire de la prestation n'emploie ou n'a l'intention d'employer le bien immeuble qu'en vue d'opérations n'excluant pas la déduction de la taxe en amont. Il appartient à l'entrepreneur d'apporter la preuve que ces conditions sont remplies.»

16 Le StMBG a également introduit, dans l'article 27, paragraphe 2, de l'UStG, une disposition transitoire énonçant les règles d'application de la nouvelle version de l'article 9, paragraphe 2. Aux termes de cette disposition:

«L'article 9, paragraphe 2, n'est pas applicable lorsque l'édifice construit sur le terrain:

...

3. est employé ou destiné à d'autres fins que celles indiquées aux points 1 et 2 [(4)] et a été achevé avant le 1er janvier 1998

et lorsque ... dans les cas visés au point 3, la construction du bâtiment a été entamée avant le 11 novembre 1993.»

17 La Cour a confirmé, dans sa jurisprudence, que les États membres disposent d'un large pouvoir d'appréciation dans l'application des dispositions de l'article 13, parties B et C.

18 C'est ainsi que, dans l'arrêt Becker (5), la Cour a déclaré que:

«... en vertu de la faculté ouverte par [l'article 13, partie C], les États membres peuvent donner, aux bénéficiaires des exonérations prévues par la directive, la possibilité de renoncer à l'exonération, soit dans tous les cas, soit dans certaines limites, soit encore sous certaines modalités.»

19 Dans l'arrêt Belgocodex (6), qu'elle a rendu après avoir été saisie de la présente demande préjudicielle et sur lequel je reviendrai ultérieurement, la Cour a déclaré ceci:

«Les États membres jouissent d'une large marge d'appréciation dans le cadre des dispositions de l'article 13, B et C. En effet, il leur revient d'apprécier s'il convient d'instaurer ou non le droit d'option, selon ce qu'ils considèrent opportun en fonction du contexte existant dans leur pays à un moment donné. La liberté d'ouvrir ou non le droit d'option n'est pas restreinte dans le temps ni par le fait qu'une décision contraire a été prise à une période antérieure. Les États membres peuvent donc également, dans le cadre de leurs compétences nationales, révoquer le droit d'option après l'avoir instauré et revenir à la règle de base qui est l'exonération de la taxation pour les opérations d'affermage et de location de biens immobiliers.»

20 Cette jurisprudence nous impose donc une première conclusion en ce qui concerne la présente affaire. Le législateur allemand était fondé à restreindre, comme il l'a fait au moyen du StMBG de 1994, la portée du droit d'opter pour la taxation que sa loi prévoyait en faveur des opérations d'affermage et de location de biens immeubles. L'article 13, parties B et C, laisse aux États membres la faculté de décider, conformément au contexte économique de chaque moment, s'il est opportun d'accorder ce droit d'opter pour la taxation ainsi que la faculté de définir, s'il choisit de concéder ce droit, à quelles conditions ou dans quelles limites il doit être exercé.

21 Cet aspect des choses ayant été tiré au clair, je vais maintenant pouvoir examiner si, conformément au droit communautaire, Schloßstraße avait déjà acquis le droit à déduction au moment de l'entrée en vigueur du StMBG de 1994 et si ce droit pouvait lui être retiré avec effet rétroactif.

B - Naissance du droit à déduire la TVA acquittée sur les dépenses d'investissement

22 Le gouvernement allemand considère que, conformément au système de la sixième directive, le droit de déduire la TVA est soumis à la condition que les services grevés de celle-ci aient été utilisés pour réaliser des opérations imposables. C'est la raison pour laquelle on ne peut répondre à la question de savoir si un tel droit à déduction existe et prendre une décision définitive que lorsque les opérations pour lesquelles les services en question ont été réellement utilisés sont connues.

23 Appliquant cette analyse aux faits qui ont été décrits, il affirme que, conformément à l'article 9, paragraphe 2, de l'UStG, dans la version modifiée en 1994, Schloßstraße n'a jamais eu le droit, fût-il provisoire, de déduire la taxe qu'elle avait acquittée sur les opérations de location à la société de services financiers puisque celle-ci n'utilise pas les locaux pour y réaliser des opérations imposables. Il estime qu'il faut se fonder sur la nouvelle rédaction de cette disposition dans la mesure où l'assujetti n'a pas donné le bien immeuble en location avant l'entrée en vigueur du StMBG, que le droit à déduction doit être déterminé au moment où les opérations sont réalisées, et que, pour ce faire, il faut tenir compte des modifications légales intervenues avant le début de ces opérations.

24 J'estime, pour ma part, que l'analyse du gouvernement allemand n'est pas conforme à la sixième directive telle que la Cour l'a interprétée.

25 Sous le titre «Naissance et étendue du droit à déduction», l'article 17 de la sixième directive dispose ce qui suit:

«1. Le droit à déduction prend naissance au moment où la taxe déductible devient exigible.

2. Dans la mesure où les biens et les services sont utilisés pour les besoins de ses opérations taxées, l'assujetti est autorisé à déduire de la taxe dont il est redevable:

a) la taxe sur la valeur ajoutée due ou acquittée pour les biens qui lui sont ou lui seront livrés et pour les services qui lui sont ou lui seront rendus par un autre assujetti;

...» (7).

26 Aux termes de l'article 10, paragraphe 2, première phrase, de la sixième directive, «Le fait générateur de la taxe intervient et la taxe devient exigible au moment où la livraison du bien ou la prestation de services est effectuée».

27 La Cour a déclaré à plusieurs reprises que le régime des déductions vise à soulager entièrement l'entrepreneur du poids de la TVA due ou acquittée dans le cadre de toutes ses activités économiques. Le système commun de la taxe sur la valeur ajoutée garantit, par conséquent, la parfaite neutralité quant à la charge fiscale de toutes les activités économiques, quels que soient les buts ou les résultats de ces activités, à condition que lesdites activités soient elles-mêmes soumises à la TVA (8).

28 La Cour a également déclaré qu'en l'absence de toute disposition permettant aux États membres de limiter le droit à déduction conféré aux assujettis, ce droit doit s'exercer immédiatement pour la totalité des taxes ayant grevé les opérations effectuées en amont. Dès lors que de telles limitations doivent s'appliquer de manière similaire dans tous les États membres, des dérogations ne sont permises que dans les cas expressément prévus par la directive (9). La Cour a de même indiqué en ce sens que les dispositions de l'article 17, paragraphes 1 et 2, indiquent avec précision les conditions de naissance et l'étendue du droit à déduction. Elles ne laissent aux États membres aucune marge d'appréciation quant à leur mise en oeuvre et confèrent de ce fait aux particuliers des droits dont ils peuvent se prévaloir devant le juge national pour s'opposer à une réglementation nationale incompatible avec elles (10).

29 En ce qui concerne, plus concrètement, les dépenses d'investissement consenties en vue de mettre en route une activité économique soumise à la TVA, il convient de considérer, conformément à la jurisprudence de la Cour (11), que ces dépenses constituent déjà une activité économique aux fins de l'application de l'article 4 de la sixième directive et que, par conséquent, l'assujetti a le droit de déduire la TVA qu'il a acquittée sur ces investissements. Toute autre interprétation de l'article 4 de la directive chargerait l'opérateur économique du coût de la TVA dans le cadre de son activité économique sans lui donner la possibilité de la déduire, conformément à l'article 17, et distinguerait arbitrairement entre des dépenses d'investissement effectuées avant et pendant l'exploitation effective de l'entreprise (12).

30 De surcroît, une fois né, le droit à déduire la TVA acquittée sur les dépenses d'investissement reste acquis même si l'activité économique envisagée n'a pas donné lieu à des opérations taxées ou si l'assujetti n'a pas pu utiliser les biens ou les services ayant donné lieu à déduction dans le cadre d'opérations taxables en raison de circonstances étrangères à sa volonté (13). En effet, le principe de la sécurité juridique s'oppose à ce que les droits et obligations des assujettis dépendent de faits, de circonstances ou d'événements qui se sont produits postérieurement à leur constatation par l'administration fiscale (14). Le cas échéant, la livraison d'un bien d'investissement au cours de la période de régularisation peut donner lieu à une régularisation dans les conditions prévues à l'article 20, paragraphe 3, de la sixième directive (15).

31 Par conséquent, il résulte des dispositions de la sixième directive, telles qu'elles ont été interprétées par la Cour, que le droit de déduire la TVA acquittée sur les dépenses d'investissement naît au moment même où s'opère la fourniture de biens ou la prestation de services qui est la cause de ces dépenses. Si l'assujetti démontre qu'il a réellement l'intention d'utiliser les investissements pour mettre en place une activité soumise à la TVA conformément à la sixième directive ou à la réglementation nationale en vigueur à ce moment-là, il acquerra immédiatement le droit à déduction, et cela même si l'activité envisagée ne peut jamais être réalisée.

32 Par ailleurs, l'article 20 de la sixième directive, qui a trait à la régularisation des déductions, ne fait que confirmer, selon moi, le lien qui existe entre l'acquisition des biens d'investissement et la naissance du droit à déduction. Le paragraphe 2 de cet article, qui a trait aux biens d'investissement, énonce une règle générale conformément à laquelle une régularisation est opérée pendant une période de cinq années, dont celle au cours de laquelle le bien a été acquis ou fabriqué, et non pas au moment où les biens d'investissement commencent à être utilisés pour l'exercice d'activités soumises à la taxe (16).

33 Pour revenir à la présente affaire, c'est à la juridiction nationale qu'il appartient de déterminer quelle était l'intention réelle de Schloßstraße au moment où elle a consenti les dépenses d'investissement litigieuses (17). Si son intention réelle était d'utiliser ces investissements pour lancer une activité qui, à l'époque, était soumise à la taxe - ou, plutôt, qui pouvait l'être en vertu du droit d'opter pour la taxation qui a été supprimé ultérieurement -, il y aura lieu de considérer, comme la Commission l'affirme à bon escient, que Schloßstraße a acquis le droit à déduction au moment où les services en question lui ont été fournis, c'est-à-dire avant l'entrée en vigueur de la modification légale. Par conséquent, je vais examiner à présent la suppression rétroactive d'un droit, déjà acquis, d'opter pour la taxation et de déduire la TVA.

C - Possibilité pour les États membres de supprimer rétroactivement le droit, déjà acquis, d'opter pour la taxation et de déduire la TVA

34 Pour étudier cette possibilité, je devrai à nouveau me référer à l'arrêt Belgocodex (18). Dans cette affaire, la partie demanderesse au principal avait acquis un immeuble dans lequel elle avait fait réaliser toute une série de travaux de rénovation. Ultérieurement, elle l'a donné en location à une entreprise qui l'a utilisé pour y exercer son activité économique. Belgocodex a alors déduit la TVA qui lui avait été facturée à l'occasion des travaux de rénovation.

35 Belgocodex a opéré la déduction en se fondant sur la loi du 28 décembre 1992, par laquelle le code belge de la TVA a été modifié et le droit d'opter pour la taxation introduit pour les opérations de location de biens immeubles. Cette loi prévoyait cependant que la forme de l'option, la manière de l'exercer ainsi que les conditions auxquelles le contrat de location devait satisfaire seraient déterminées par la voie d'un arrêté d'application, qui n'a jamais été adopté. Le 6 juillet 1994, une dérogation formelle à la loi de 1992 a été adoptée avec effet rétroactif.

36 Se fondant sur cette dérogation, l'administration fiscale belge a refusé la déduction que Belgocodex avait opérée dans sa déclaration. Cette société a alors engagé un recours devant le Tribunal de première instance de Nivelles, qui a demandé à la Cour si un État membre qui a fait usage de la possibilité prévue à l'article 13, partie C, de la sixième directive et a ainsi accordé à ses assujettis le droit d'opter pour la taxation de certaines locations immobilières était fondé à supprimer ce droit d'option au moyen d'une loi postérieure et à réintroduire ainsi l'exemption dans toute son ampleur.

37 Devant la Cour, Belgocodex a fait valoir que les principes de la confiance légitime et de la sécurité juridique s'opposent à l'abolition rétroactive de la législation nationale en cause et qu'avec l'adoption de la loi belge du 28 décembre 1992, elle avait légitimement pu compter sur l'ouverture du droit d'option, que l'arrêté royal d'application du code belge de la TVA ait été adopté ou non.

38 Dans son arrêt, la Cour a rappelé que les principes de la confiance légitime et de la sécurité juridique font partie de l'ordre juridique communautaire et doivent être respectés par les États membres dans l'exercice des pouvoirs que leur confèrent les directives communautaires. Toutefois, elle a ajouté que, dans les circonstances spécifiques de l'espèce, ce n'était pas à elle mais à la juridiction nationale qu'il appartenait de juger si une violation de ces principes avait été commise par l'abolition rétroactive d'une loi dont l'arrêté d'exécution n'a jamais été adopté.

39 Les «circonstances spécifiques de l'espèce» évoquées par la Cour dans l'affaire Belgocodex résultaient du fait qu'un doute subsistait sur la question de savoir si, conformément aux règles applicables du droit belge, la loi de 1992 avait réellement offert la possibilité d'opter pour la taxation puisque les règles d'application n'avaient pas été adoptées. Il s'agissait donc d'une question à laquelle c'était au juge de renvoi qu'il appartenait de répondre.

40 La Commission prétend que la présente affaire ne comporte pas de telles circonstances spécifiques. Se fondant sur l'arrêt Ghent Coal Terminal (19), elle affirme que le droit à déduction ne peut pas être retiré à Schloßstraße pour des motifs étrangers à sa volonté. Pour elle, la restriction du droit d'option introduite à l'occasion de l'adoption d'une loi à laquelle une norme transitoire confère un effet rétroactif doit être considérée, aux fins de l'espèce, comme un motif étranger à la volonté de l'assujetti. Elle estime en conséquence que Schloßstraße doit conserver le bénéfice des taxes qu'elle avait déjà déduites avant l'entrée en vigueur de la réforme législative.

41 Je souscris à l'analyse de la Commission. Il résulte, en effet, de l'ordonnance de renvoi que, pour les exercices 1992 et 1993, Schloßstraße avait satisfait à toutes les exigences auxquelles la réglementation allemande applicable à ce moment-là subordonnait le droit des assujettis d'opter pour la taxation. Lorsque la nouvelle réglementation est entrée en vigueur plus tard, celle-ci l'a empêchée de traduire dans les faits l'intention qu'elle avait d'utiliser ses biens d'investissement pour mettre en route des activités économiques soumises à la TVA. Cette modification légale constitue donc, à mon avis, une «circonstance étrangère à la volonté» de l'assujetti qui, conformément à l'arrêt Ghent Coal Terminal, ne permet pas de le priver du droit à déduction qu'il avait déjà acquis.

42 J'ajouterai que si, comme je l'ai déjà indiqué, l'article 13, parties B et C, de la sixième directive laisse aux États membres un large pouvoir discrétionnaire leur permettant de régler le droit d'option et même de le supprimer, ils ne peuvent pas l'utiliser pour enfreindre l'article 17, paragraphe 1, de cette directive en révoquant un droit à déduction déjà acquis.

43 Une telle révocation est une violation de la confiance légitime que l'assujetti place dans l'application correcte des dispositions de la directive. Il faut rappeler à cet égard que le principe de la confiance légitime, qui est un principe général de droit communautaire, de rang supérieur, visant à la protection des particuliers (20), s'impose à toute autorité nationale chargée d'appliquer le droit communautaire (21).

D - Incidence du caractère provisoire des avis d'imposition

44 Selon moi, le fait que le droit national permet à l'administration fiscale de corriger, aussi bien en ce qui concerne leurs aspects factuels que leurs aspects juridiques, les avis d'imposition qu'elle adresse aux assujettis sous réserve de vérification ultérieure (22) ne change rien à l'analyse que je viens d'exposer.

45 Le gouvernement allemand prétend que, même s'il fallait considérer qu'appliquer une modification légale au droit à déduction que l'assujetti a déjà acquis à l'occasion de services qui lui ont été fournis avant cette modification est une application rétroactive illicite, les principes de la confiance légitime et de la sécurité juridique n'ont pas été enfreints en l'espèce puisque la réserve de vérification ultérieure des avis d'imposition provisoires prévue par l'AO privait Schloßstraße de la possibilité de se prévaloir d'une confiance légitime qu'elle aurait eue dans le caractère définitif de son droit à déduction.

46 La possibilité, pour les administrations fiscales, d'effectuer des vérifications et de modifier, au besoin, les avis d'imposition provisoires qu'elles adressent aux assujettis existe dans la majorité des États membres et représente un instrument d'une utilité incontestable dans la gestion des impôts, en général, et des recettes de la TVA, en particulier (23).

47 C'est ainsi que, si l'administration fiscale constate, à la faveur d'une vérification, qu'un assujetti a tenté de frauder le Trésor public en déclarant comme acquisition de biens en faveur de son entreprise l'achat d'objets destinés en réalité à son usage privé, et cela afin de pouvoir déduire la TVA qu'il a acquittée à l'occasion de cette opération, l'administration fiscale pourra fixer d'office le montant de l'impôt et révoquer la déduction déjà admise.

48 Il en va de même en ce qui concerne la procédure de régularisation instituée par l'article 20 de la sixième directive. Ce système impose à l'assujetti de régulariser les montants qu'il a déduits relativement aux biens d'investissement qu'il a acquis lorsque certaines circonstances se produisent dans un délai déterminé. Dans la présente affaire, par exemple, si Schloßstraße avait modifié son projet d'utilisation de l'immeuble, en augmentant, par exemple, la partie de celui-ci qui était destinée à des fins d'habitation, l'administration fiscale aurait pu réduire le montant déductible de la TVA acquittée en amont en appliquant la règle du prorata.

49 Le dossier ne permet cependant pas d'établir que Schloßstraße aurait commis une fraude ou modifié l'utilisation qu'elle entendait donner à l'immeuble au moment où elle a exercé son droit d'option pour la taxation et son droit à déduction. Par conséquent, la seule raison sur laquelle la révocation des droits d'option et de déduction déjà acquis pourrait être fondée en l'espèce serait la réforme légale ultérieure qui a supprimé le droit d'opter en faveur de la taxation pour les activités économiques exercées par Schloßstraße.

50 Or, comme je l'ai déjà indiqué, le droit à déduction qui est au centre du litige est directement déduit de l'article 17, paragraphes 1 et 2, de la sixième directive. Par conséquent, Schloßstraße pouvait puiser dans le droit communautaire une confiance légitime lui donnant la conviction que son droit à déduction serait respecté. Dans ces conditions, je considère que l'administration fiscale ne peut pas utiliser la procédure de vérification des avis d'imposition provisoires pour supprimer, rétroactivement, ce droit déjà acquis parce qu'une telle suppression porterait atteinte à la confiance légitime que l'assujetti puisait dans le droit communautaire.

IV - Conclusion

51 Eu égard aux considérations qui précèdent, je propose à la Cour de répondre de la manière suivante aux questions du Bundesfinanzhof:

«L'article 17, paragraphe 1, de la sixième directive 77/388/CEE du Conseil, du 17 mai 1977, en matière d'harmonisation des législations des États membres relatives aux taxes sur le chiffre d'affaires - Système commun de taxe sur la valeur ajoutée: assiette uniforme, doit être interprété en ce sens qu'il s'oppose à ce qu'un État membre qui décide de supprimer le droit d'option en faveur de la taxation pour certaines activités économiques révoque, avec effet rétroactif, le droit de déduire la TVA acquittée sur les dépenses d'investissement consenties avant l'entrée en vigueur de cette dérogation dans le but de réaliser ces activités économiques. Il en va de même lorsque la déduction a été initialement accordée à l'assujetti sous réserve d'une vérification ultérieure.»

(1) - Directive du 17 mai 1977, en matière d'harmonisation des législations des États membres relatives aux taxes sur le chiffre d'affaires - Système commun de taxe sur la valeur ajoutée: assiette uniforme (JO L 145, p. 1).

(2) - Arrêt du 29 février 1996 (C-110/94, Rec. p. I-857).

(3) - Le point, discuté par les parties et évoqué par Schloßstraße au cours de l'audience, de savoir à quel moment il y a lieu de considérer que la construction du bâtiment a démarré aux fins de l'application de l'UStG est, comme le Bundesfinanzhof le laisse entendre dans son ordonnance de renvoi, une question de droit national qu'il n'y a pas lieu d'examiner dans le cadre de la présente procédure préjudicielle.

(4) - Les points 1 et 2 visent les bâtiments utilisés à des fins d'habitation ou autres ne se rapportant pas à l'activité d'une entreprise.

(5) - Arrêt du 19 janvier 1982 (8/81, Rec. p. 53, point 38).

(6) - Arrêt du 3 décembre 1998 (C-381/97, Rec. p. I-8153, point 17).

(7) - Texte original de l'article 17 de la sixième directive. Le paragraphe 2 a été modifié ultérieurement par l'article 1er, point 22, de la directive 91/680/CEE du Conseil, du 16 décembre 1991, complétant le système commun de la taxe sur la valeur ajoutée et modifiant, en vue de l'abolition des frontières fiscales, la directive 77/388 (JO L 376, p. 1), et par l'article 1er, point 10, de la directive 95/7/CE du Conseil, du 10 avril 1995, modifiant la directive 77/388 et portant nouvelles mesures de simplification en matière de taxe sur la valeur ajoutée - champ d'application de certaines exonérations et modalités pratiques de leur mise en oeuvre (JO L 102, p. 18).

(8) - Voir, en particulier, les arrêts du 14 février 1985, Rompelman (268/83, Rec. p. 655, point 19); du 21 septembre 1988, Commission/France (50/87, Rec. p. 4797, point 15), et du 15 janvier 1998, Ghent Coal Terminal (C-37/95, Rec. p. I-1, point 15).

(9) - Voir, en particulier, l'arrêt Commission/France, déjà cité à la note 8, points 16 et 17; les arrêts du 11 juillet 1991, Lennartz (C-97/90, Rec. p. I-3795, point 27), et du 6 juillet 1995, BP Soupergaz (C-62/93, Rec. p. I-1883, point 18), ainsi que l'arrêt Ghent Coal Terminal, déjà cité à la note 8, point 16.

(10) - Arrêt BP Soupergaz, déjà cité à la note 9, point 35.

(11) - Pour un exposé plus détaillé de cette jurisprudence, voir les conclusions que j'ai présentées le même jour dans l'affaire Breitsohl (C-400/98, affaire encore pendante devant la Cour, points 18 à 27).

(12) - Arrêt Rompelman, déjà cité à la note 8, points 22 et 23.

(13) - Arrêt Ghent Coal Terminal, déjà cité à la note 8, points 19 et 20.

(14) - Arrêt Inzo, déjà cité à la note 2, point 21.

(15) - Arrêt Ghent Coal Terminal, déjà cité à la note 8, point 23.

(16) - Pour ce qui est des investissements sous forme de biens immeubles, la durée de la période qui sert de base au calcul des régularisations pourra s'étendre jusqu'à vingt ans (article 20, paragraphe 2, dernière phrase, dans la version de la directive 95/7, déjà citée à la note 7). S'il est vrai que ce même paragraphe 2 dispose que: «Par dérogation au premier alinéa, les États membres peuvent, lors de la régularisation, se baser sur une période de cinq années entières compter du début de l'utilisation du bien» (mis en italique par moi), cette faculté accordée aux États membres représente néanmoins une exception à la règle générale évoquée plus haut. D'autre part, l'article 17, qui règle le droit à déduction, ne comporte aucune réserve de ce type en faveur des États membres.

(17) - La juridiction de renvoi signale que, jusqu'en juin 1993 au moins, les associés avaient l'intention de céder le permis de bâtir à un tiers. Néanmoins, c'est à elle qu'il appartient d'établir si ce fait, à propos duquel elle ne fournit pas d'informations suffisantes dans son ordonnance de renvoi, a une incidence quelconque sur la régularité de la déduction provisoire admise par le Finanzamt.

(18) - Déjà cité à la note 6.

(19) - Déjà cité à la note 8.

(20) - Arrêt du 19 mai 1992, Mulder e.a./Conseil et Commission (C-104/89 et C-37/90, Rec. p. I-3061, point 15).

(21) - Arrêt du 27 septembre 1979, Eridania et Società italiana per l'industria degli zucccheri (230/78, Rec. p. 2749, point 31). Il est évident, en revanche, que la modification légale introduite par le StMBG s'appliquera sans restriction aux biens et services fournis à Schloßstraße à partir de la date de son entrée en vigueur, c'est-à-dire à partir du 1er janvier 1994. En effet, comme la Cour l'a déclaré, «le champ d'application [du principe de la confiance légitime] ne saurait, par contre, être étendu jusqu'à empêcher, de façon générale, une réglementation nouvelle de s'appliquer aux effets futurs de situations nées sous l'empire de la réglementation antérieure en l'absence d'obligations assumées à l'égard de l'autorité publique» (arrêt du 16 mai 1979, Tomadini, 84/78, Rec. p. 1801, point 21).

(22) - C'est, en effet, ce que prévoit l'article 164 de l'AO, aux termes duquel:

«1. Les taxes peuvent, en attendant une vérification définitive, être liquidées, en général ou dans des cas particuliers, sous réserve de vérification, sans que cette liquidation ait besoin d'être motivée. ...

2. La liquidation peut être annulée ou modifiée tant que la réserve reste applicable ...

4. La réserve de vérification devient caduque après l'expiration du délai de liquidation ...»

(23) - En effet, la gestion de la TVA se fonde, normalement, sur le système de l'autoliquidation, les assujettis devant eux-mêmes déterminer leur dette fiscale et en assurer le règlement au Trésor.