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Avis juridique important

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62000C0101

Conclusions de l'avocat général Stix-Hackl présentées le 25 octobre 2001. - Tulliasiamies et Antti Siilin. - Demande de décision préjudicielle: Korkein hallinto-oikeus - Finlande. - Taxation des véhicules d'occasion importés - Article 95, premier alinéa, du traité CE (devenu, après modification, article 90, premier alinéa, CE) - Sixième directive TVA. - Affaire C-101/00.

Recueil de jurisprudence 2002 page I-07487


Conclusions de l'avocat général


I Introduction

1. La présente affaire a trait à l'imposition, dans un État membre, d'un véhicule d'occasion qu'un particulier a acheté dans un autre État membre. Les questions préjudicielles portent sur la taxe sur les véhicules perçue en Finlande et la taxe sur la valeur ajoutée assise sur la taxe sur les véhicules. En l'espèce, lorsqu'il est question d'importation en Finlande, il ne s'agit pas à proprement parler d'«importation» au sens du droit communautaire en vigueur, c'est-à-dire d'importation dans la Communauté. Au contraire, le litige au principal porte uniquement sur le transfert de biens communautaires d'un État membre dans un autre, à savoir la république de Finlande. Toutefois, pour des raisons de simplification, le transfert en Finlande sera ci-après également qualifié d'importation.

II Cadre juridique

A Droit national

2. Le présent litige porte sur deux lois fiscales finlandaises, la loi relative à la taxe sur les véhicules (autoverolaki) et la loi régissant la taxe sur la valeur ajoutée (arvonlisäverolaki).

1. La loi relative à la taxe sur les véhicules (autoverolaki)

3. D'après l'article 1er, paragraphe 1, de la loi relative à la taxe sur les véhicules (1482/1994), une taxe sur les véhicules doit être acquittée, selon les modalités prévues dans ladite loi, avant l'immatriculation ou la mise en service en Finlande de voitures de tourisme (catégorie M1), voitures de livraison (catégorie N1) et autres véhicules dont le poids à vide est inférieur à 1 875 kilogrammes ainsi que des motocyclettes (catégorie L3-L4) et autres véhicules de la catégorie L.

4. L'article 3 réglemente l'imposition de véhicules dont 50 % au moins des pièces ont été changées. Les véhicules importés sont imposés si 25 % des pièces ont été changées.

5. D'après l'article 4, paragraphe 1, l'importateur d'un véhicule ou le producteur si le véhicule est fabriqué en Finlande est assujetti à la taxe sur les véhicules.

6. D'après l'article 5, le redevable de la taxe sur les véhicules est tenu d'acquitter également une taxe sur la valeur ajoutée assise sur la taxe sur les véhicules pour le montant fixé par la loi régissant la taxe sur la valeur ajoutée (arvonlisäverolaki). Pour le prélèvement de la taxe sur les véhicules, l'administration qui perçoit cette dernière fixe le montant à acquitter, conformément aux dispositions pertinentes de la loi.

7. D'après l'article 6, paragraphe 1, la taxe à acquitter équivaut à la valeur en douane du véhicule diminuée de 4 600 FIM. Elle est toutefois toujours égale au minimum à 50 % de la valeur du véhicule.

8. D'après l'article 7, la taxe due sur un véhicule d'occasion importé équivaut à celle qui est perçue sur un véhicule neuf similaire, réduite selon les modalités définies par cet article.

Pour les véhicules pour lesquels la taxe à acquitter a été fixée le 15 janvier 1999 ou ultérieurement, l'article 7 s'applique dans la version de la loi 1160/1998. Selon la version précédemment en vigueur et applicable à la procédure au principal de l'article 7, paragraphe 1, la taxe afférente à un véhicule neuf était réduite de 0,5 % par mois calendaire plein, au-delà des six premiers mois suivant l'immatriculation ou la mise en service. La taxe n'était alors réduite que pendant les 150 premiers mois d'utilisation.

À défaut de véhicule neuf similaire, la taxe est déterminée, d'après l'article 7, paragraphe 2, en se fondant sur la taxe afférente à un véhicule neuf présentant des caractéristiques techniques ou autres proches. Dans le cas où le véhicule est en service depuis une durée plus brève que celle résultant du paragraphe 1, la taxe peut être déterminée en fonction de la durée réelle d'utilisation. Si la taxe applicable d'après la valeur imposable du véhicule importé d'occasion dépasse celle qui est due en application du paragraphe 1, elle est déterminée sur la base de la valeur imposable du véhicule.

9. D'après l'article 10 de la loi, un véhicule importé est considéré comme étant d'occasion s'il a parcouru plus de 10 000 kilomètres, attestés par des indications dignes de foi, et qu'il est immatriculé à l'étranger depuis plus de six mois. La condition relative au nombre de kilomètres parcourus a été abrogée par la loi 1160/1998, du 30 décembre 1998.

10. D'après l'article 11, la base de la valeur imposable du véhicule importé est sa valeur transactionnelle pour le redevable, diminuée des montants mentionnés à l'article 16.

L'article 11 dispose, en outre, comme suit:

«La valeur transactionnelle d'un véhicule importé est:

1. pour le véhicule qui a été importé dans la Communauté comme marchandise non communautaire, en application du code des douanes communautaire, [le règlement (CEE) n° 2913/92 du Conseil, du 12 octobre 1992, établissant le code des douanes communautaire (JO L 302, p. 1)], la valeur en douane déterminée d'après ledit règlement ainsi que d'après le règlement [(CEE) n° 2454/93 de la Commission, du 2 juillet 1993, fixant certaines dispositions d'application du règlement n° 2913/92 (JO L 253, p. 1)] et

2. pour un véhicule importé comme marchandise communautaire, la valeur du véhicule déterminée dans le respect des dispositions pertinentes du paragraphe 1.

La valeur imposable doit inclure tous les frais supportés directement ou indirectement par le redevable, avant impôts, pour le transport vers la Finlande ou vers le premier entrepôt en Finlande ainsi que, le cas échéant, les droits de douane.

La valeur imposable d'un véhicule produit sur le territoire national est le prix usine du véhicule déterminé sur la base des coûts de production si le fabricant est assujetti au paiement de la taxe.

La valeur imposable ne comprend toutefois pas la valeur des réparations ordinaires en vue de la vente ni celle des équipements ajoutés dans ce contexte, dans la limite de 500 FIM. Elle ne comprend pas non plus la taxe d'immatriculation et celle afférente aux plaques d'immatriculation.»

11. D'après l'article 12 de la même loi, la TVA acquittée par le redevable pour le véhicule, en application de la loi relative à la taxe sur la valeur ajoutée n'entre pas dans la valeur imposable qui constitue l'assiette de la taxe sur les véhicules.

12. L'article 37 impose au redevable de souscrire une déclaration aux fins de la taxe sur les véhicules et en fixe le contenu.

13. La loi applicable aux faits de l'affaire au principal est la loi relative à la taxe sur les véhicules (1482/1994) avant sa modification par la loi 1160/1998.

2. La loi régissant la taxe sur la valeur ajoutée (arvonlisäverolaki)

14. La loi principale régissant la taxe sur la valeur ajoutée en Finlande est l'arvonlisäverolaki (1501/1993). Elle a été modifiée par les lois 1483/1994, 1486/1994 et 1767/1995.

15. D'après l'article 1er, paragraphe 1, de la loi applicable, la TVA est prélevée au profit de l'État. Le paragraphe 5 du même article prévoit que la taxe sur la valeur ajoutée assise sur la taxe sur les véhicules est réglementée à part dans la loi relative à la taxe sur les véhicules (1482/1994).

16. D'après l'article 102, paragraphe 1, point 4, de la loi précitée, le redevable a la faculté de déduire cette taxe de la taxe sur les véhicules perçue en vertu de la loi.

17. L'article 102 ter fait dépendre le droit à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée assise sur la taxe sur les véhicules de l'avis d'imposition dont résulte le montant de l'impôt que le redevable doit acquitter.

18. D'après l'article 141, paragraphe 5, les déductions mentionnées au chapitre 10 sont affectées au mois pendant lequel celles-ci sont acquittées en application de l'article 102, paragraphe 1, point 4.

B Le droit communautaire

19. Les dispositions pertinentes du droit communautaire sont l'article 90 CE relatif à l'interdiction d'impositions intérieures discriminatoires ainsi que la sixième directive 77/388/CEE du Conseil, du 17 mai 1977, en matière d'harmonisation des législations des États membres relatives aux taxes sur le chiffre d'affaires Système commun de taxe sur la valeur ajoutée: assiette uniforme (ci après la «sixième directive»).

20. Aux termes de l'article 2 de la sixième directive:

«Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée:

1. les livraisons de biens et les prestations de services, effectuées à titre onéreux à l'intérieur du pays par un assujetti agissant en tant que tel;

2. les importations de biens.»

21. Depuis le 1er janvier 1993, seul le transfert de biens dans la Communauté, et non plus le transfert de biens en provenance d'un autre État membre, est considéré comme une importation. De même, sur tout le territoire de la Communauté, l'achat d'un véhicule d'occasion n'est plus soumis à la TVA du pays de destination.

22. L'article 28 bis de la sixième directive comporte une dérogation pour l'importation de véhicules neufs.

23. L'article 28 bis, paragraphe 1, sous b), dispose que:

«1. Sont également soumises à la taxe sur la valeur ajoutée:

[...]

b) Les acquisitions intracommunautaires de moyens de transport neufs effectuées à titre onéreux à l'intérieur du pays par des assujettis ou des personnes morales non assujetties qui bénéficient de la dérogation prévue au point a) deuxième alinéa, ou par toute autre personne non assujettie.[...]»

24. L'article 28 bis, paragraphe 2, dispose ce qui suit (extraits)

«2. Aux fins du présent titre:

[...]

b) ne sont pas considérés comme moyens de transport neufs: les moyens de transport visés au point a) lorsque les deux conditions suivantes sont simultanément respectées:

la livraison est effectuée plus de trois mois après la date de la première mise en service. Toutefois, cette durée est portée à six mois pour les véhicules terrestres à moteur définis au point a),

le moyen de transport a parcouru plus de 6 000 kilomètres s'il s'agit d'un véhicule terrestre, a navigué plus de 100 heures s'il s'agit d'un bateau, ou a volé plus de 40 heures s'il s'agit d'un aéronef.

Les États membres fixent les conditions dans lesquelles peuvent être établies les données visées ci-avant.»

25. L'article 33 de la sixième directive permet aux États membres de maintenir ou d'introduire certaines taxes n'ayant pas le caractère de taxes sur le chiffre d'affaires, et ne donnant pas lieu à des formalités liées au passage d'une frontière.

III Les faits

26. Un des demandeurs au principal, M. Siilin a acheté, le 2 mars 1998, une voiture de tourisme de type Mercedes Benz 190 2.0 Diesel pour 7 350 DEM dans un garage en Allemagne. Le véhicule a été fabriqué le 1er janvier 1986 et mis en service le 13 novembre 1986. Le véhicule était équipé en supplément d'une transmission automatique et d'un toit ouvrant mécanique. Le 20 avril 1998, M. Siilin a importé ce véhicule en Finlande (kilométrage: 180 000 km) et a effectué une déclaration aux fins de la taxe sur les véhicules.

27. Le bureau des douanes de Helsinki (Helsingin piiritullikamari) a estimé la valeur d'un véhicule neuf similaire à 41 000 DEM auxquels il a ajouté 3 880 DEM pour les options. Il en est résulté une valeur d'environ 136 851 FIM. Ont été déduits de ce montant un abattement forfaitaire de 4 600 FIM ainsi qu'un montant de 85 963 FIM correspondant à l'âge de la voiture. Le montant de la taxe sur les véhicules a été fixé à 46 288 FIM et le montant de la TVA assise sur cette taxe à 10 183 FIM. Selon M. Siilin, le montant de la taxe à payer a été fixé en se fondant sur le prix de vente catalogue, hors taxes, de l'importateur finlandais. M. Siilin a versé la totalité du prix le 21 avril 1998.

28. M. Siilin a saisi l'Uudenmaan lääninoikeus (tribunal administratif compétent) d'un recours dirigé contre l'avis d'imposition du bureau des douanes.

29. S'agissant de la taxe sur la valeur ajoutée, il a demandé l'annulation de l'avis d'imposition. S'agissant de la taxe sur les véhicules, il a demandé à ce que l'affaire soit renvoyée au bureau des douanes compétent. Il a fait valoir à cet égard, en se fondant sur l'arrêt de la Cour dans l'affaire Nunes Tadeu , que le montant de la taxe sur les véhicules ne devait pas être plus élevé que le montant de la taxe résiduelle incorporé dans la valeur d'une voiture analogue à la sienne sur le marché finlandais par son âge, ses caractéristiques et son état.

30. L'Uudenmaan lääninoikeus a constaté que le bureau des douanes a fixé la taxe sur le véhicule de telle sorte que la dépréciation réelle n'a pas été vérifiée et qu'il n'a pas non plus été recherché si la taxe fixée pour le véhicule de M. Siilin dépasse le montant de la taxe résiduelle incorporée dans la valeur d'un véhicule d'occasion similaire immatriculé en Finlande. Il a par conséquent annulé la décision en ce qu'elle concernait la taxe et renvoyé l'affaire au bureau des douanes compétent en vue de procéder à une nouvelle fixation de la taxe.

31. S'agissant de la taxe sur la valeur ajoutée finlandaise, l'Uudenmaan lääninoikeus a estimé ne pas être en présence d'une taxe présentant, de par ses caractéristiques, l'aspect d'une taxe sur la valeur ajoutée au sens de la sixième directive, ni d'une taxe sur le chiffre d'affaires, prohibée par l'article 33. Dans ces conditions, le prélèvement de la taxe sur la valeur ajoutée assise sur la taxe sur les véhicules n'est pas contraire à la sixième directive. Cependant, puisqu'il y a lieu de procéder à une nouvelle fixation de la taxe, il convient également de déterminer à nouveau le montant de la taxe sur la valeur ajoutée assise sur cette taxe.

32. Aussi bien le tulliasiamies (représentant de la direction générale des douanes) que M. Siilin ont demandé au Korkein hallinto-oikeus (Cour administrative suprême finlandaise) d'autoriser un pourvoi contre la décision de l'Uudenmaan lääninoikeus. Alors que le pourvoi du tulliasiamies vise la décision de l'Uudenmaan lääninoikeus, à la fois en ce qui concerne la taxe sur les véhicules et la taxe sur la valeur ajoutée assise sur cette taxe, le pourvoi de M. Siilin se limite à la fixation de la TVA assise sur la taxe sur les véhicules.

IV Les questions préjudicielles

33. Le Korkein hallinto-oikeus a décidé le 15 mars 2000 d'adresser une demande de décision préjudicielle à la Cour et de lui poser les questions suivantes:

La taxe sur les véhicules

«1) D'après l'article 11 de la loi finlandaise relative à la taxe sur les véhicules, la valeur transactionnelle pour le redevable définit, aux fins de la détermination de la taxe précitée, la valeur imposable d'un véhicule importé d'occasion comme marchandise communautaire. La valeur transactionnelle utilisée est la valeur en douane telle que définie par les dispositions pertinentes du code des douanes et de son règlement d'application.

L'article 95 du traité CE (devenu article 90 CE) peut-il être interprété en ce sens qu'une législation nationale portant détermination de la valeur imposable sur la base de la taxe sur les véhicules n'est pas discriminatoire dès lors qu'il est spécialement tenu compte du fait que la valeur imposable est définie différemment selon le stade (ou niveau) de commercialisation auquel intervient l'importateur du véhicule, c'est-à-dire selon que l'importateur est grossiste, détaillant ou consommateur?

2) D'après l'article 7, paragraphe 1, de la loi relative à la taxe sur les véhicules, la base de la taxe à percevoir sur un véhicule importé à l'état d'occasion est constituée par la taxe sur un véhicule neuf similaire, telle que réduite selon les modalités de la loi. D'après la loi 1482/1994, la taxe à percevoir sur un véhicule importé d'occasion était la taxe afférente à un véhicule neuf similaire, diminuée de 0,5 % par mois calendaire plein, à l'échéance des six premiers mois écoulés depuis l'immatriculation ou la mise en service, dans la limite des 150 premiers mois d'utilisation. D'après la récente loi 1160/1998, la taxe à percevoir sur un véhicule importé d'occasion est la taxe afférente à un véhicule neuf similaire, diminuée de 0,6 % par mois calendaire plein, pour les cent premiers mois d'utilisation, puis de 0,9 % pour les cent mois suivants, et de 0,4 % au-delà, ces pourcentages étant calculés sur la valeur résiduelle du véhicule à chaque fin de mois précédente. Comptent comme mois d'utilisation les mois calendaires pleins écoulés depuis la première mise en service ou immatriculation.

L'article 95 du traité CE (devenu article 90 CE) peut-il être interprété en ce sens qu'une législation nationale n'est pas discriminatoire dès lors qu'il est spécialement tenu compte des points suivants:

le point de départ est la taxe afférente à une voiture neuve similaire;

d'après la législation en vigueur précédemment, la taxe n'était réduite qu'après une période de six mois;

tant d'après la législation nouvelle que d'après celle qui l'a précédée, la taxe est réduite de manière linéaire, selon les modalités décrites ci-dessus?

3) Outre les bases de calcul définies dans la législation fiscale nationale, convient-il d'examiner toujours les particularités individuelles du véhicule afin de s'assurer que la perception de la taxe sur les véhicules ne donne pas lieu dans certains cas à une discrimination contraire à l'article 95 du traité CE (devenu article 90 CE)?

La taxe sur la valeur ajoutée assise sur la taxe sur les véhicules

4) La sixième directive peut-elle être interprétée en ce sens que la taxe dénommée taxe sur la valeur ajoutée assise sur la taxe sur les véhicules au sens de l'article 5, paragraphe 1, de la loi relative à la taxe sur les véhicules et de l'article 1er, paragraphe 5, de la loi régissant la taxe sur la valeur ajoutée, est bien une taxe sur la valeur ajoutée au sens de la directive compte tenu de la circonstance que, d'après la législation nationale, cette taxe est perçue exclusivement sur la base de la taxe sur les véhicules?

5) Si la réponse à la quatrième question est négative, une taxe telle que la présente peut-elle cependant être considérée comme un impôt ou une taxe dont la perception est autorisée en vertu de l'article 33 de la directive?

6) Si ces dispositions fiscales nationales ne sont pas considérées comme contraires à la sixième directive, l'article 95 du traité CE (devenu article 90 CE) peut-il être interprété en ce sens que ces dispositions ne sont pas discriminatoires au sens de cet article?

V Les questions concernant la taxe sur les véhicules

34. Les trois premières questions posées concernent différents aspects des dispositions de la loi relative à la taxe sur les véhicules applicables au litige au principal. Elles doivent par conséquent être traitées ensemble.

A Les observations des parties

35. Selon M. Siilin, il est discriminatoire et, par conséquent, contraire à l'article 90 CE de prélever une taxe sur les véhicules importés. M. Siilin fait valoir que, pour déterminer l'assiette de la taxe à percevoir sur un véhicule importé, il convient de se référer au prix hors taxe d'un véhicule neuf. Dans la plupart des cas, le montant de la taxe à payer est plus élevé que le montant de la taxe résiduelle à acquitter pour un véhicule d'occasion analogue, immatriculé en Finlande.

36. L'application du régime fiscal finlandais a pour conséquence qu'un véhicule d'occasion importé par une personne privée est frappé d'une imposition qui est au moins le double de celle applicable à une voiture d'occasion qui a été importée, en son temps, comme voiture neuve, par un importateur officiel.

37. D'après l'article 7, paragraphe 1, de la loi relative à la taxe sur les véhicules, la taxe due sur un véhicule d'occasion importé équivaut à la taxe perçue sur un véhicule neuf similaire, mais elle est réduite selon les modalités prévues par la loi relative à la taxe sur les véhicules. Dans le cas de l'importation d'un véhicule d'occasion par une personne privée, la taxe afférente à un véhicule neuf similaire correspond à la taxe perçue sur un véhicule dont la base d'imposition inclut tant la marge du vendeur que les autres frais qui y sont liés. À la différence de cela, un importateur officiel qui importe un véhicule neuf en Finlande acquitte une taxe sur le prix d'achat, c'est-à-dire sans que ni sa marge ni les autres coûts n'y aient été inclus. Par conséquent, les taxes sur les véhicules neufs qui sont importés en Finlande par un importateur officiel sont inférieures à celles qui sont acquittées par une personne privée dans le cas de l'importation d'un véhicule neuf ou d'un véhicule d'occasion.

38. M. Siilin soutient que, dans ces conditions, les réductions mensuelles prévues par la loi n'ont que très peu de conséquences sur le montant de la taxe résiduelle encore incluse dans la valeur d'un véhicule similaire. Les bases d'imposition d'un véhicule d'occasion et d'un véhicule neuf similaire importé par un importateur officiel sont différentes. Les réductions forfaitaires n'éliminent pas, selon lui, la discrimination.

39. M. Siilin déduit de l'arrêt dans l'affaire Nunes Tadeu que, pour le calcul du montant de la taxe résiduelle incorporé dans la valeur d'un véhicule d'occasion, il y a lieu de prendre en considération la taxe perçue sur un véhicule analogue lors de sa première immatriculation. Il convient de réduire ce montant proportionnellement à la dépréciation réelle du véhicule.

40. S'agissant de la question de savoir si la réduction de la taxe peut être linéaire, M. Siilin attire l'attention sur l'arrêt dans l'affaire Commission/Grèce dont il résulte qu'une telle réduction est illégale.

41. Enfin, M. Siilin fait valoir qu'il résulte de l'arrêt Outokumpu qu'une discrimination fiscale, à savoir qu'un produit importé est frappé d'une taxe plus élevée que le produit d'origine nationale, pratiquée, ne serait-ce que dans certains cas, est contraire au droit communautaire.

42. Le gouvernement finlandais part de l'idée que la taxe sur les véhicules n'est pas contraire à l'article 90 CE. Cette disposition n'interdit pas en effet aux États membres d'imposer différemment des marchandises, si la taxe en cause est calculée sur la base de critères objectifs, sans discrimination. Pour analyser si le régime fiscal des véhicules importés a un caractère discriminatoire, il convient de comparer les taxes frappant des véhicules importés d'autres États membres avec les taxes perçues sur des véhicules se trouvant déjà dans le pays en cause. Si, à l'intérieur d'un État membre, un véhicule d'occasion n'est pas soumis à une taxe à l'occasion du changement de propriétaire, il faut comparer la première imposition frappant un véhicule provenant d'un autre État membre avec le montant de la taxe résiduelle incorporé dans la valeur d'un véhicule se trouvant déjà sur le territoire national.

43. Selon le gouvernement finlandais, pour déterminer les produits similaires sur lesquels fonder une comparaison, il convient de prendre en considération le contexte économique ainsi que les caractéristiques essentielles du véhicule telles que sa marque, son modèle et son âge. Cette manière de procéder permet de prendre comme base de comparaison pour apprécier l'effet discriminatoire d'une taxe frappant l'importation de véhicules d'occasion le montant de la taxe résiduelle incorporée dans la valeur d'un véhicule se trouvant déjà dans l'État membre en cause, y ayant été introduit au même stade de commercialisation et présentant les mêmes caractéristiques. Il n'y a discrimination que dans l'hypothèse où la taxe frappant les véhicules d'occasion excède le montant de la taxe résiduelle incorporé dans la valeur d'un véhicule similaire qui se trouve dans ledit État membre et qui a été taxé comme véhicule neuf au même stade de la commercialisation.

44. La taxe sur les véhicules est par conséquent fixée en appliquant des critères objectifs et elle n'est pas contraire à l'article 90 CE, puisque la valeur prise comme base d'imposition peut varier, en fonction des circonstances économiques liées à l'acquisition du véhicule.

45. S'agissant de la règle applicable en Finlande, selon laquelle la taxe est déterminée en se fondant sur la taxe perçue sur un véhicule neuf similaire et en lui appliquant une réduction linéaire, il y a lieu de constater qu'une telle règle n'est pas contraire au droit communautaire. Une réduction en fonction de l'âge du véhicule correspond à la dépréciation réelle. S'ajoute à cela le fait que la dépréciation réelle d'un véhicule est, elle aussi, linéaire.

46. S'agissant de la question de savoir s'il est nécessaire de tenir compte des caractéristiques individuelles d'un véhicule, le gouvernement finlandais expose que le droit communautaire n'exige pas que chaque véhicule fasse l'objet d'une appréciation individuelle.

47. De l'avis de la Commission, les dispositions de la loi relative à la taxe sur les véhicules, selon lesquelles il y a lieu de déterminer la taxe en cause, en fonction de la valeur d'un véhicule neuf similaire ne sont pas en elles-mêmes déjà contraires à l'article 90 CE, si le véhicule neuf correspond en tous points au véhicule d'occasion importé et si le montant de la taxe ainsi obtenue n'excède pas celui de la taxe résiduelle incorporé dans la valeur d'un véhicule d'occasion déjà immatriculé dans l'État membre en cause.

48. La Commission est par ailleurs d'avis que la base d'imposition est surestimée. En raison du renouvellement rapide des gammes de modèles, il est difficile, selon elle, de trouver ultérieurement, à la date de la taxation, un véhicule identique de la même catégorie. En effet, si un tel véhicule n'est plus en vente à la date de la taxation, la Commission considère que le véhicule de référence ne peut être qu'un véhicule du même modèle ayant été en vente antérieurement. L'inflation peut être prise en compte au moyen d'une rectification de la valeur du véhicule de référence.

49. Selon la Commission, d'autres aspects de la réglementation finlandaise en vigueur pourraient constituer une infraction à l'article 90 CE. Il s'agit notamment de la prise en considération de différents stades de commercialisation, ce qui a pour conséquence que le montant de la taxe frappant un véhicule d'occasion diffère du montant de la taxe résiduelle incorporé dans la valeur d'un véhicule d'occasion se trouvant déjà sur le marché national, c'est-à-dire sur le marché finlandais, et donc ayant déjà été taxé sur ce marché.

50. La Commission indique que l'article 90 CE s'oppose, par ailleurs, à une réglementation selon laquelle il est procédé à une diminution mensuelle linéaire de la valeur du véhicule de 0,5 % par mois, sans tenir compte de la dépréciation réelle de la valeur du véhicule. La Commission est d'avis qu'il n'est pas possible de tenir compte de manière générale de cette dépréciation réelle, puisqu'elle dépend de très nombreux facteurs, tels que le pays, le type et le modèle de véhicule. Le gouvernement finlandais a certes présenté une étude sur la dépréciation datant de 1998, mais la Commission n'en dispose pas pour autant d'informations qui lui permettraient d'établir quel a été réellement le montant de la dépréciation en 1998. Dans l'affaire Commission/Grèce, la Cour a déclaré que la dépréciation annuelle est habituellement supérieure à 5 % et que cette dépréciation est notamment plus importante au cours des premières années.

51. La Commission indique en outre qu'une réglementation fiscale qui ne tient pas compte des spécificités individuelles est contraire à l'article 90 CE, lorsque ce défaut de prise en compte a pour conséquence que le montant de la taxe frappant un véhicule d'occasion importé diffère du montant de la taxe résiduelle incorporé dans la valeur d'un véhicule d'occasion similaire déjà immatriculé sur le marché de l'État membre en cause.

52. Enfin, la taxe sur les véhicules est discriminatoire au motif qu'elle désavantage les commerçants des autres États membres.

B Analyse juridique

53. Les trois premières questions posées concernent différents aspects des dispositions de la loi finlandaise relative à la taxe sur les véhicules dans sa version applicable au litige au principal. Les aspects abordés dans ces questions relèvent tous du champ d'application de l'article 90 CE qui, selon une jurisprudence constante de la Cour , inclut, outre le taux d'imposition, également les modalités de la perception et l'assiette de la taxe.

54. La réglementation finlandaise mentionnée par les parties concernées en ce qui concerne le traitement fiscal des réparations et la question de savoir si ces dispositions sont discriminatoires ne fait pas l'objet des questions préjudicielles et, par conséquent, de la présente procédure.

55. Lors de l'appréciation des mesures prises par les États membres au regard de l'article 90 CE, il convient de tenir compte du fait que l'article 90 CE interdit d'asseoir une imposition sur une valeur supérieure à la valeur réelle du bien imposable . Lors de la taxation de véhicules d'occasion, il convient par conséquent de prendre en compte la dépréciation réelle des véhicules .

56. En outre, lors de l'appréciation d'une règle fiscale telle que celle en cause dans la procédure au principal, il y a lieu, en application de la jurisprudence constante , de tenir compte du fait que la taxe en cause ne doit pas excéder le montant de la taxe résiduelle incorporé dans la valeur du bien imposé. Dans le cas d'un véhicule d'occasion, ce montant correspond au montant résiduel de la taxe qui a été perçue lors de l'immatriculation du véhicule en cause comme véhicule neuf et qui est encore incorporée dans sa valeur en tant que véhicule d'occasion. Ce montant résiduel est directement proportionnel à la dépréciation en ce sens qu'il diminue selon les mêmes proportions que la valeur de la voiture.

57. L'article 90 CE sert à garantir la neutralité de la taxation entre produits se trouvant déjà sur le marché national et produits importés. Cet article ne doit toutefois pas être entendu en ce sens qu'il a pour objectif d'aboutir à une équivalence des prix de vente au consommateur final. Il vise au contraire à garantir la neutralité des règles des États membres en matière fiscale, dans la mesure où il s'oppose à un régime ayant pour but d'éliminer des avantages concurrentiels pour les produits importés.

58. Nous examinerons ci-après les différents aspects de la législation finlandaise applicable.

1. Le stade de commercialisation auquel se situe l'acheteur

59. Le problème du stade de commercialisation abordé dans la première question vise pour l'essentiel la question de savoir si l'article 90 CE autorise une prise en compte des différents stades de commercialisation des produits assujettis à la taxe. Cette question pose un problème juridique en ce sens que la base imposable peut être différente selon le stade de commercialisation. Or, cette situation a pour conséquence des taxes d'un montant différent, motif pour lequel le fait de prendre en considération le stade de commercialisation pourrait en fin de compte constituer une discrimination.

60. a) Il y a lieu de partir de la constatation que le droit finlandais renvoie au code des douanes communautaire, en ce qui concerne la valeur d'un véhicule d'occasion aux différents stades de commercialisation. La valeur fiscale différente résulte par conséquent de l'application de la réglementation communautaire en matière de valeur en douane telle qu'elle figure dans le code des douanes et dans les règlements qui ont été pris pour son application.

61. S'agissant des doutes de la Commission sur la question de savoir s'il est en tout état de cause compatible avec le marché intérieur d'appliquer à ce marché des règles qui valent pour les pays tiers, il convient de renvoyer à l'arrêt Dounias , dans lequel la Cour a jugé que le simple renvoi au code des douanes communautaire pour la détermination de la valeur imposable n'est pas en soi contraire au traité CE.

62. b) La question qui se pose en outre est celle de savoir si le stade de commercialisation où se trouve le produit ne relève pas des caractéristiques du produit et si par conséquent il faut nécessairement prendre en considération le stade de commercialisation.

63. Ce qui est décisif pour l'appréciation d'un régime fiscal au regard de l'article 90 CE, c'est en effet la question de savoir si les produits nationaux et étrangers qu'il y a lieu de comparer sont des marchandises similaires . La similitude se détermine en fonction des caractéristiques du produit, en l'espèce, du véhicule d'occasion, et des besoins des consommateurs . Bien que ces deux aspects incluent un grand nombre d'éléments sur lesquels il conviendra de revenir, ils ont un point commun: il s'agit d'aspects ayant tous trait au véhicule lui-même. Cela n'est cependant pas vrai du stade de commercialisation dans lequel se trouve également le véhicule d'occasion.

64. c) Selon la jurisprudence de la Cour, il serait illégal qu'une réglementation fiscale nationale soit aménagée de telle manière que la taxe sur le chiffre d'affaires ne soit pas prise en compte de la même manière pour déterminer la base d'imposition pour les véhicules d'occasion nationaux que pour les véhicules d'occasion importés , tout comme il serait illégal de ne pas inclure certains coûts concernant les véhicules d'occasion nationaux ou de ne pas prévoir de possibilités de déduction pour les véhicules d'occasion importés, au contraire de ce qui est le cas pour les véhicules d'occasion nationaux .

65. Même s'il est par conséquent exact, comme le soutient la Commission, que la prise en compte du stade de commercialisation a pour conséquence de tendre à augmenter la valeur du véhicule d'occasion, elle ne constituerait pas en soi une discrimination. La discrimination réside plutôt dans le fait que la prise en compte des stades de commercialisation a en principe pour conséquence, comme cela résulte des calculs qui ont été présentés dans le dossier, que le montant de la taxe frappant un véhicule d'occasion est proportionnellement plus élevé par rapport à la valeur de ce véhicule que le montant de la taxe qui est incorporé dans la valeur d'un véhicule neuf.

66. En effet, selon la jurisprudence constante de la Cour, un système de taxation est déjà contraire à l'article 90 CE s'il n'exclut pas en tout cas ou «en toute hypothèse que les produits importés soient taxés plus lourdement que les produits nationaux» . Il serait par conséquent illégal de taxer plus lourdement des véhicules d'occasion importés que des véhicules d'occasion se trouvant sur le marché national, même si une telle taxation n'intervient que dans certains cas de figure. Conformément à la loi finlandaise, tel serait par exemple le cas s'il était appliqué une base d'imposition plus élevée pour un véhicule d'occasion importé que pour un véhicule d'occasion national similaire.

67. En l'espèce, des bases d'imposition différentes sont applicables selon les différents stades de commercialisation, un véhicule importé à un stade de commercialisation auquel il est considéré comme ayant plus de valeur est par conséquent plus taxé qu'un véhicule d'occasion importé à un stade où il est considéré comme ayant une valeur moindre ou se trouvant déjà sur le territoire national. Puisque parmi les véhicules d'occasion moins imposés figurent, en toute hypothèse, également des véhicules d'occasion nationaux et, parmi les véhicules d'occasion imposés à un taux plus élevé, également des véhicules d'occasion importés, il n'y a pas à cet égard de discrimination.

68. Cette conséquence fait en effet apparaître clairement qu'un régime fiscal qui prévoit de taxer différemment les différents stades de commercialisation n'exclut pas, en toute hypothèse, que les produits importés puissent être assujettis, dans certains cas, à une taxe plus importante.

2. Critères d'appréciation

69. La deuxième question concerne certains aspects des critères d'appréciation des véhicules d'occasion. Il convient de limiter la réponse aux circonstances qui, selon les dispositions du droit national applicable, sont pertinentes pour la décision dans l'affaire au principal.

a) Référence: véhicule neuf similaire

70. Une réglementation nationale qui prévoit qu'il y a lieu, pour déterminer la valeur imposable, de partir de la valeur d'un véhicule neuf est licite sous certaines conditions: ainsi ne peut-on envisager, comme véhicule de référence, qu'un véhicule similaire.

71. Il convient de déterminer s'il s'agit du véhicule le plus similaire que l'on puisse trouver en comparant les caractéristiques essentielles du véhicule de référence. Parmi ces caractéristiques figurent, en toute hypothèse, le modèle, le type et certaines caractéristiques, telles que l'âge, le kilométrage, l'équipement, l'état et le mode de propulsion.

b) Diminution de la valeur uniquement à l'expiration d'un délai de six mois

72. Il y a lieu d'abord de constater que, pour la présente affaire, ce sont les règles juridiques antérieures, c'est-à-dire celles qui étaient applicables avant le 15 janvier 1999, qui sont pertinentes.

73. En partant du principe que c'est la dépréciation réelle qui est pertinente, il semble douteux que la diminution de la valeur d'un véhicule neuf en vue de déterminer la valeur d'un véhicule d'occasion, uniquement à l'expiration d'un délai de six mois après sa mise en service ou son immatriculation corresponde aux conditions figurant à l'article 90 CE.

74. Du reste, un tel retard dans l'application de la diminution de valeur ne correspond pas aux résultats figurant dans l'étude citée par le gouvernement finlandais.

75. Il ne résulte certes expressément de la jurisprudence de la Cour que des indications quant à la dépréciation annuelle, cependant, on peut déduire du fait que d'après les données disponibles la dépréciation, principalement dans les premières années, est nettement supérieure à 5 % par an , qu'il en résulte bien une dépréciation d'au moins 2,5 % au cours des premiers six mois. Si la dépréciation réelle au cours de la période précitée devait être encore supérieure à ce chiffre, le caractère inadapté d'un délai dans l'application de la dépréciation apparaîtrait encore plus clairement.

c) Dépréciation linéaire

76. Puisque c'est la loi relative à la taxe sur les véhicules en vigueur avant le 15 janvier 1999 qui est applicable à la présente affaire, c'est également la diminution linéaire de 0,5 % par mois qu'elle prévoit qui s'applique.

77. Comme cela résulte déjà de la jurisprudence, la dépréciation effective de véhicules d'occasion «n'est pas linéaire» . Par conséquent, une règle applicable de manière aussi rigide est forcément contraire au principe, selon lequel il convient de prendre en considération la dépréciation réelle.

3. Appréciation dans l'abstrait ou au cas par cas

78. Il y a lieu d'entendre la troisième question posée en ce sens que la juridiction de renvoi vise à savoir s'il convient d'examiner les caractéristiques individuelles d'un véhicule ou si une appréciation sur la base de critères abstraits est suffisante, c'est-à-dire compatible avec l'article 90 CE.

79. Sur la question de savoir s'il convient d'évaluer les caractéristiques d'un véhicule, au cas par cas ou de manière abstraite, il a été constaté dans l'arrêt de la Cour dans l'affaire Gomes Valente que l'article 90 CE ne s'oppose pas à un calcul sur la base de critères généraux et abstraits. Cela vaut, par exemple, pour des barèmes forfaitaires, dans lesquels la valeur est déterminée selon des critères tels que l'ancienneté, le kilométrage, l'état général, le mode de propulsion, la marque ou le modèle du véhicule. Il est également licite de se référer à des prix moyens .

80. La condition pour une telle détermination abstraite de la valeur reste cependant qu'elle ne doit pas être discriminatoire . Le montant de la taxe qui résulte de ce calcul ne doit par conséquent pas dépasser le montant de la taxe résiduelle incorporé dans la valeur d'un véhicule d'occasion déjà immatriculé sur le territoire national.

81. La transparence ou la disponibilité invoquées par les parties, notamment s'agissant desdits barèmes, et la question de savoir si, à l'époque pertinente, la pratique applicable sur ce point correspondait bien aux conditions fixées par le droit communautaire ne font pas l'objet de la présente procédure puisqu'il n'y a pas été fait référence dans les questions. Nous rappelons simplement à cet égard l'arrêt Gomes Valente, selon lequel les critères sur la base desquels est calculé le barème doivent être portés à la connaissance du public .

4. Conclusion

82. Il y a lieu, par conséquent, de répondre aux trois premières questions posées que l'article 90 CE doit être interprété en ce sens qu'il ne s'oppose pas à une réglementation nationale, selon laquelle, pour déterminer la valeur imposable d'un véhicule d'occasion aux fins de la taxe sur les véhicules, il convient de:

se référer à la valeur en douane,

fixer la valeur imposable de telle manière que l'ensemble des caractéristiques essentielles d'un véhicule d'occasion est pris en compte au moins de manière abstraite,

sauf si une telle prise en compte a pour conséquence une valeur imposable excédant le montant de la taxe résiduelle incorporée dans la valeur d'un véhicule d'occasion se trouvant sur le marché national en cause et ayant déjà acquitté ladite taxe et qu'il n'est en outre pas tenu compte de la dépréciation réelle du véhicule.

Il y a lieu d'interpréter en outre l'article 90 CE en ce sens qu'il s'oppose à une réglementation nationale, selon laquelle la valeur imposable d'un véhicule d'occasion aux fins de la taxe sur les véhicules est déterminée en fonction du stade de commercialisation, la valeur imposable n'étant diminuée qu'à l'expiration d'un délai de six mois et ladite détermination s'effectuant de la manière linéaire qui a été appliquée dans l'affaire au principal.

VI Les questions relatives à la taxe sur la valeur ajoutée

83. Les quatrième à sixième questions portent sur l'appréciation de la taxe sur la valeur ajoutée perçue sur la taxe sur les véhicules, c'est-à-dire sa qualification comme taxe sur la valeur ajoutée au sens de la sixième directive ainsi que sa compatibilité avec l'article 33 de ladite directive et avec l'article 90 CE .

A Arguments présentés par les parties

84. S'agissant de la taxe sur la valeur ajoutée assise sur la taxe sur les véhicules, M. Siilin fait valoir qu'il s'agit là d'une taxe sur la valeur ajoutée au sens de la sixième directive et qu'elle est contraire à ladite directive. Selon lui, le fait qu'elle peut être déduite, en application de l'article 102, paragraphe 1, point 4, de la loi finlandaise régissant la taxe sur la valeur ajoutée, et qu'il s'agit d'un impôt général plaide en faveur de sa qualification comme taxe sur la valeur ajoutée. Eu égard à la réponse qu'il convient de donner à la quatrième question, il n'est pas nécessaire, selon lui, de répondre aux cinquième et sixième questions.

85. De l'avis du gouvernement finlandais, la valeur ajoutée assise sur la taxe sur les véhicules n'est, en dépit de sa dénomination, ni une taxe sur la valeur ajoutée au sens de la sixième directive ni une taxe sur le chiffre d'affaires interdite par l'article 33 de la sixième directive.

86. Le gouvernement finlandais fait valoir que la taxe sur la valeur ajoutée assise sur la taxe sur les véhicules est perçue en plus de la taxe sur la valeur ajoutée et indépendamment de celle-ci. En outre, elle doit également être acquittée dans des cas ne constituant pas des acquisitions soumises à la taxe sur la valeur ajoutée, c'est-à-dire lorsqu'un consommateur achète un véhicule d'occasion dans un autre État membre.

87. En outre, le gouvernement finlandais attire l'attention sur la jurisprudence de la Cour relative à l'article 33 de la sixième directive, dont résultent les caractéristiques essentielles d'une taxe sur la valeur ajoutée. À la différence de ce qui est le cas pour une taxe sur la valeur ajoutée, le fait générateur de la taxe en cause ici est exclusivement le paiement de la taxe sur les véhicules. En outre, la taxe en cause n'est pas perçue sur les ventes de biens, ni sur les importations ou sur les acquisitions intracommunautaires. Enfin, elle n'est perçue qu'une seule fois.

88. S'agissant de la cinquième question, le gouvernement finlandais soutient que la taxe visée à l'article 5 de la loi relative à la taxe sur les véhicules ne présente pas les caractéristiques essentielles d'une taxe sur la valeur ajoutée et n'entrave pas le fonctionnement du régime de TVA applicable dans la Communauté. Elle constitue au contraire un impôt autorisé par l'article 33 de la sixième directive.

89. S'agissant de la sixième question, le gouvernement finlandais est d'avis que la taxe visée à l'article 5 de la loi relative à la taxe sur les véhicules frappe de la même manière tous les véhicules. De par ses caractéristiques, cette taxe n'est par conséquent pas contraire à l'article 90 CE.

90. Au cours de la procédure orale, le gouvernement finlandais a expressément rejeté le point de vue de la Commission, selon lequel il était possible de déduire la taxe en cause de la taxe sur les véhicules. Il en a conclu que ladite taxe était neutre.

91. Pour la Commission, la taxe assise sur la taxe sur les véhicules constitue une taxe sur la valeur ajoutée au sens de la sixième directive. Puisqu'elle est perçue sur la base d'autres faits générateurs que ceux qui sont prévus dans cette directive, la Commission estime qu'elle est incompatible avec son article 2.

92. En outre, ladite taxe ne remplit pas les conditions prévues aux articles 7 et 10 de la sixième directive en ce qui concerne l'importation de biens et le fait générateur.

93. Il ne s'agit pas non plus d'une taxe sur les acquisitions intracommunautaires au sens de l'article 28 bis de la sixième directive.

94. Quant bien même la Cour parviendrait à la conclusion qu'il ne s'agit tout de même pas en l'espèce d'une taxe sur la valeur ajoutée au sens de la sixième directive, la taxe en cause n'est pas contraire à l'article 33 de la sixième directive puisqu'elle n'est pas de nature générale.

95. En outre, la Commission fait valoir que la taxe en cause dans la présente affaire est contraire aux articles 23 CE et 25 CE et doit, par conséquent, être qualifiée de taxe d'effet équivalent. En effet, dans la pratique, elle fait obstacle à l'importation en Finlande de voitures neuves ou d'occasion par des personnes qui ne sont pas redevables de la TVA.

96. Si la Cour devait toutefois parvenir à la conclusion que la taxe en cause dans la présente affaire ne constitue ni une taxe sur le chiffre d'affaires ni une taxe d'effet équivalent, la Commission fait observer qu'elle est, en toute hypothèse, contraire à l'article 90 CE puisqu'elle ne s'applique pas aux voitures d'occasion nationales, mais aux voitures d'occasion importées d'un autre État membre. En effet, un consommateur final qui a acheté une voiture d'occasion dans un autre État membre ne bénéficie pas du droit à déduction. Les véhicules d'occasion nationaux ne sont, quant à eux, pas assujettis à la taxe sur les véhicules et, par conséquent, pas non plus à la taxe sur la valeur ajoutée assise sur cette taxe.

B Analyse

97. Il convient d'examiner ci-après la taxe assise sur la taxe sur les véhicules au regard des différents aspects du droit communautaire abordés par la juridiction de renvoi.

1. Qualification de la taxe en cause comme taxe sur la valeur ajoutée au sens de la sixième directive

98. Premièrement, la qualification de la taxe assise sur la taxe sur les véhicules ne saurait dépendre de la dénomination d'une telle taxe dans les différents États membres. La question de savoir dans quelle loi la disposition en cause a été intégrée il s'agit dans la présente affaire des dispositions relatives à la taxe sur la valeur ajoutée de la loi 1501/1993 est tout aussi peu pertinente.

99. Il est, par contre, déterminant pour cette qualification de savoir si la taxe en cause en l'espèce présente les caractéristiques développées par la jurisprudence de la Cour.

100. a) Relève de cette catégorie, d'une part, la déductibilité de la taxe qui a déjà été payée lors de la transaction précédente. La réglementation finlandaise prévoit certes une possibilité de déduction, cependant, le système n'a pas pour effet de taxer la valeur ajoutée comme cela est nécessaire pour qu'une taxe ait le caractère d'une taxe sur la valeur ajoutée mais la valeur totale.

101. b) On peut en outre se demander si la taxe assise sur la taxe sur les véhicules «s'applique de manière générale aux transactions ayant pour objet des biens ou des services» .

102. La taxe applicable en l'espèce est générale en ce sens qu'elle s'applique aussi bien aux acquisitions effectuées par un entrepreneur assujetti à la taxe sur le chiffre d'affaires qu'aux acquisitions effectuées par un consommateur final. La taxe sur la valeur ajoutée assise sur la taxe sur les véhicules ne doit pas être appliquée à tous les types de produits, mais seulement à certains véhicules. Par conséquent, il s'agit d'une taxe perçue uniquement sur certains produits, laquelle selon la jurisprudence de la Cour ne doit pas être considérée comme une taxe de caractère général.

103. Selon la jurisprudence de la Cour, une telle taxe ne doit pas non plus être qualifiée d'impôt général puisqu'elle n'a pas pour objet d'appréhender «l'ensemble des opérations économiques» . Une telle constatation s'applique également à la taxation en cause en l'espèce, en ce sens qu'elle n'est rattachée qu'à la perception de la taxe lors de l'immatriculation d'un véhicule. Il ne s'agit par conséquent pas d'une taxe déterminée en fonction du montant dû par l'assujetti, à savoir en fonction de la taxe due sur les véhicules .

104. S'ajoute à cela le fait que la taxe assise sur la taxe sur les véhicules n'est due ni en raison de la fourniture de biens ou de prestations ni du fait d'une importation au sens de l'article 2 de la sixième directive.

105. En outre, il n'y a pas lieu non plus d'acquitter ladite taxe à chaque stade du processus de production et de distribution comme cela est nécessaire pour qu'une taxe ait le caractère d'une taxe sur la valeur ajoutée. Au contraire, en application du paragraphe 5 de la loi relative à la taxe sur les véhicules, la taxe visée est uniquement perçue lors de la perception de la taxe sur les véhicules.

106. c) Il y a lieu d'analyser enfin la question de savoir si la taxe perçue sur la taxe sur les véhicules est proportionnelle à la valeur du produit, c'est-à-dire au prix du véhicule . On peut à cet égard, d'une part, donner raison au gouvernement finlandais, en ce sens que ce n'est pas la valeur du produit mais la taxe sur les véhicules qui constitue la base d'imposition, mais il est exact, d'autre part, que la taxe sur les véhicules est calculée, quant à elle, sur la base de la valeur du produit. Par conséquent, la taxe assise sur la taxe sur les véhicules est fondée, au moins indirectement, sur la valeur de la marchandise.

107. La taxe assise sur la taxe sur les véhicules ne présente par conséquent pas l'ensemble des caractères essentiels d'une taxe sur la valeur ajoutée.

2. Qualification au regard de l'article 33 de la sixième directive

108. Il ressort de l'article 33 de la sixième directive que le droit communautaire admet, sous certaines conditions, «l'existence de régimes de taxation en concurrence avec la TVA» . «Les États membres peuvent, en conséquence, instituer des impôts n'ayant pas le caractère de taxes sur le chiffre d'affaires» ou, en d'autres termes, «des impôts, droits et taxes n'ayant pas les caractéristiques essentielles de la TVA» .

109. Puisque la taxe assise sur la taxe sur les véhicules ne présente pas l'ensemble des caractères essentiels d'une taxe sur la valeur ajoutée, elle n'est pas contraire aux dispositions de la sixième directive.

3. Qualification au regard de l'article 90 CE

110. S'agissant de la compatibilité de la taxe sur la valeur ajoutée assise sur la taxe sur les véhicules avec l'article 90 CE, il convient de remarquer que cette taxe s'applique aux véhicules qui sont immatriculés en Finlande. Comme tel a déjà été le cas pour la taxe sur les véhicules, une différence de traitement entre les véhicules d'occasion apparaît à cet égard entre les véhicules qui ont été importés d'un autre État membre vers la Finlande pour y être immatriculés et ceux qui se trouvaient déjà sur le territoire finlandais. Puisque la taxe sur les véhicules, y compris la taxe assise sur cette dernière, a déjà été perçue sur les véhicules en cause lorsqu'ils étaient à l'état neuf, ils ne sont pas soumis une nouvelle fois à ces deux taxes lorsqu'ils sont achetés comme véhicules d'occasion en Finlande.

111. Puisque ladite taxe dénommée «taxe sur la valeur ajoutée» est perçue sur la taxe sur les véhicules, il y a lieu, pour l'essentiel, de lui appliquer le même traitement qu'à cette dernière. Par conséquent, dans la mesure où le montant perçu sur la taxe sur les véhicules lors de l'immatriculation d'un véhicule d'occasion importé dépasse le montant de la taxe résiduelle incorporé dans la valeur d'une voiture d'occasion nationale, cette taxe est discriminatoire et contraire à l'article 90 CE.

112. La taxe assise sur la taxe sur les véhicules a en effet ainsi pour conséquence qu'est éliminé l'avantage concurrentiel dont bénéficie un véhicule d'occasion importé d'un autre État membre par rapport à un véhicule se trouvant sur le territoire national.

4. Conclusion

113. Il y a lieu, par conséquent, de répondre aux quatrième et cinquième questions qu'il convient d'interpréter la sixième directive en ce sens qu'une taxe dénommée «taxe sur la valeur ajoutée» telle que celle en cause dans l'affaire au principal ne saurait être considérée comme une taxe sur la valeur ajoutée au sens de cette directive, mais comme un impôt ou une taxe autorisée par l'article 33 de cette même directive.

114. Il y a lieu de répondre à la sixième question qu'il convient d'interpréter l'article 90 CE en ce sens que la taxe dénommée «taxe sur la valeur ajoutée» est discriminatoire au sens de cet article dans la mesure où elle excède le montant de la taxe résiduelle incorporé dans la valeur d'un véhicule d'occasion qui se trouve déjà sur le territoire national en cause et pour lequel ladite taxe a déjà été acquittée.

VII Conclusions

115. Eu égard aux considérations qui précèdent, il est proposé à la Cour de répondre aux questions posées comme suit:

«1) Il y a lieu de répondre aux trois premières questions posées que l'article 90 CE doit être interprété en ce sens qu'il ne s'oppose pas à une réglementation nationale, selon laquelle pour déterminer la valeur imposable d'un véhicule d'occasion aux fins de la taxe sur les véhicules, il convient de:

se référer à la valeur en douane,

fixer la valeur imposable de telle manière que l'ensemble des caractéristiques principales d'un véhicule d'occasion est pris en compte au moins de manière abstraite,

sauf si une telle prise en compte a pour conséquence une valeur imposable excédant le montant de la taxe résiduelle incorporée dans la valeur d'un véhicule d'occasion se trouvant sur le marché national de l'État membre en cause et ayant déjà acquitté ladite taxe et qu'il n'est en outre pas tenu compte de la dépréciation réelle du véhicule.

Il y a lieu enfin d'interpréter l'article 90 CE en ce sens qu'il s'oppose à une réglementation nationale, selon laquelle la valeur imposable d'un véhicule d'occasion aux fins de la taxe sur les véhicules est déterminée en fonction du stade de commercialisation, la valeur imposable n'étant diminuée qu'à l'expiration d'un délai de six mois et ladite détermination s'effectuant de la manière linéaire qui a été appliquée dans l'affaire au principal.

2) Il y a lieu de répondre aux quatrième et cinquième questions qu'il convient d'interpréter la sixième directive 77/388/CEE du Conseil, du 17 mai 1977, en matière d'harmonisation des législations des États membres relatives aux taxes sur le chiffre d'affaires Système commun de taxe sur la valeur ajoutée: assiette uniforme, en ce sens qu'une taxe dénommée taxe sur la valeur ajoutée telle que celle en cause dans l'affaire au principal ne saurait être considérée comme une taxe sur la valeur ajoutée au sens de la sixième directive, mais comme un impôt ou une taxe autorisée par l'article 33 de cette même directive.

Il y a lieu de répondre à la sixième question qu'il convient d'interpréter l'article 90 CE en ce sens qu'une taxe dénommée taxe sur la valeur ajoutée comme celle de l'affaire au principal est discriminatoire au sens de cet article dans la mesure où elle excède le montant de la taxe résiduelle incorporé dans la valeur d'un véhicule d'occasion qui se trouve déjà dans l'État membre en cause et pour lequel ladite taxe a déjà été acquittée.»