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Avis juridique important

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62001C0422

Conclusions de l'avocat général Léger présentées le 3 avril 2003. - Försäkringsaktiebolaget Skandia (publ) et Ola Ramstedt contre Riksskatteverket. - Demande de décision préjudicielle: Regeringsrätten - Suède. - Assurance complémentaire de retraite par capitalisation - Souscription auprès d'une compagnie établie dans un autre État membre - Différence de traitement fiscal - Compatibilité avec l'article 49 CE. - Affaire C-422/01.

Recueil de jurisprudence 2003 page I-06817


Conclusions de l'avocat général


Le cadre juridique national

La loi suédoise portant sur les règles relatives au régime fiscal des contrats dassurance distingue les assurances vieillesse des assurances de capitaux en leur appliquant un régime fiscal différent.

Elle énumère les diverses conditions quune assurance doit remplir pour pouvoir être considérée comme une assurance vieillesse . Lassurance doit, entre autres, être souscrite auprès dun assureur établi en Suède.

À défaut de remplir ces conditions, lassurance est considérée comme une assurance de capitaux. Il en est ainsi de la souscription dune assurance auprès dun assureur étranger, même si elle remplit toutes les autres conditions applicables à une assurance vieillesse. Une telle assurance est considérée, au regard de la loi suédoise, comme une assurance de capitaux et se voit appliquer les règles en matière dimpôts directs y afférentes.

La loi suédoise prévoit des dispositions particulières en ce qui concerne les assurances complémentaires de retraite qui sont des assurances vieillesse liées à un emploi. En effet, les retraites complémentaires peuvent être garanties soit par la souscription et le paiement par lemployeur dune assurance vieillesse, soit par transfert à une fondation de retraite, soit par la constitution dune réserve spéciale figurant au bilan de lemployeur .

Le litige au principal concerne une retraite complémentaire garantie par la souscription par lemployeur dune assurance vieillesse. Ce dernier sengage, en qualité de preneur dassurance, à payer la totalité des cotisations, le salarié étant lassuré . Les sommes dues en exécution dun contrat dassurance complémentaire de retraite sont versées directement par lassureur établi en Suède à lassuré, le salarié retraité, en tant que retraite complémentaire. Dans le cas dune assurance souscrite auprès dun assureur établi dans un autre État membre, les sommes sont normalement versées par lassureur à lemployeur, qui les reverse au salarié retraité.

Le régime fiscal applicable aux retraites complémentaires garanties par une assurance souscrite auprès dun assureur suédois prévoit que les cotisations payées par lemployeur au titre de lassurance sont immédiatement déductibles de son résultat imposable. La retraite qui est versée ultérieurement est entièrement imposable dans le chef du bénéficiaire assuré, donc du salarié retraité, comme impôt sur le revenu.

En revanche, le régime fiscal applicable aux retraites complémentaires garanties par une assurance souscrite auprès dun assureur établi dans un autre État membre est différent de celui que nous venons de présenter. Tout dabord, une assurance souscrite auprès dun tel assureur en vue de garantir une retraite complémentaire est dénommée assurance de capitaux . Quant aux conséquences sur le plan fiscal, les cotisations payées par lemployeur ne sont pas déductibles de son résultat imposable. Les sommes dues en exécution du contrat sont versées par lassureur étranger à lemployeur suédois, qui les reverse au salarié bénéficiaire de la retraite . Ce nest quune fois lassurance complémentaire versée au salarié que lemployeur peut opérer une déduction, limitée au montant effectivement versé au salarié retraité, et ce à chaque versement. La déductibilité de la charge que représente les engagements de retraite pour lemployeur est ainsi reportée contrairement au cas où la même assurance est souscrite auprès dun assureur établi en Suède . La retraite qui est versée ultérieurement est entièrement imposable dans le chef du bénéficiaire assuré, donc du salarié retraité, comme impôt sur le revenu.

Le régime fiscal applicable à lassurance complémentaire de retraite est ainsi différent, selon que lassureur est établi en Suède ou dans un autre État membre.

Enfin, il convient de signaler que le royaume de Suède a conclu des conventions en vue déviter la double imposition avec tous les États membres, à lexception de la République portugaise. Ces conventions, conclues selon le modèle de lOrganisation de coopération et de développement économiques (OCDE), contiennent une clause prévoyant que limposition des pensions de retraite se fait dans lÉtat de résidence même si les cotisations ont été versées dans un autre État .

Les faits et la procédure au principal

Ola Ramstedt est un ressortissant suédois, domicilié en Suède et employé par lentreprise suédoise Skandia. Cette dernière sest engagée envers M. Ramstedt à souscrire au profit de celui-ci une assurance complémentaire de retraite. Ladite assurance serait souscrite auprès de lentreprise danoise Skandia Link Livforsikring A/S, de lentreprise allemande Skandia Lebensversicherung AG ou de lentreprise anglaise Skandia Life Assurance Ltd.

M. Ramstedt et Skandia ont introduit une demande de décision préalable auprès du Skatterättsnämnden (commission de droit fiscal) afin de se faire préciser les conséquences fiscales de la souscription dune assurance complémentaire de retraite auprès dassureurs étrangers. Concrètement, la demande portait sur les conséquences fiscales relatives aux impôts directs pour Skandia (droit à déduction) et pour M. Ramstedt (imposition des sommes perçues).

Par décision du 1er février 2000, le Skatterättsnämnden a fait savoir que Skandia ne pourrait pas bénéficier dun droit à déduction pour les cotisations versées, mais quun droit à déduction de la pension de retraite naissait lors du versement de celle-ci comme pour une pension directe. Par ailleurs, M. Ramstedt serait imposable sur les sommes qui lui seraient versées en exécution du contrat. La décision soulignait quil y avait une différence de traitement entre les assureurs établis en Suède et ceux établis dans un autre État membre, mais quelle nétait pas discriminatoire en vertu de larrêt Bachmann .

M. Ramstedt et Skandia ont introduit un recours contre cette décision préalable devant le Regeringsrätten.

Dans son ordonnance de renvoi, le Regeringsrätten constate que, en vertu de la décision litigieuse, le droit de Skandia de déduire les charges de pension de retraite est différé par rapport au paiement des cotisations, en ce que cette déduction ne porte pas sur les cotisations versées, mais sur les sommes effectivement acquittées à titre de pension de retraite.

La juridiction de renvoi affirme que cette différence de régime fiscal applicable est moins favorable dans certains cas pour lemployeur Skandia lorsque lassurance est souscrite auprès dun assureur établi dans un État membre autre que la Suède. Elle évoque deux hypothèses.

Si le paiement des sommes dues en exécution du contrat dassurance, et donc la déduction, nintervient que longtemps après le paiement des cotisations, alors que le montant des sommes versées nest pas légèrement supérieur à celui des cotisations payées, la souscription dune assurance complémentaire de retraite à létranger peut avoir des conséquences plus défavorables, quant aux impôts directs, que la souscription dune telle assurance auprès dun assureur établi en Suède. Si le paiement des sommes dues en exécution du contrat dassurance et la déduction des cotisations interviennent peu de temps après la souscription et que le montant des sommes versées est sensiblement supérieur à celui des cotisations payées, leffet peut être inverse .

La juridiction de renvoi note, cependant, que les conséquences en matière dimpôts directs pour M. Ramstedt, indépendamment du choix de son employeur dun assureur établi en Suède ou dans un autre État membre, sont neutres. En effet, dans les deux cas, lemployé est imposé sur les sommes quil perçoit comme revenu.

Ladite juridiction souligne, dans son ordonnance de renvoi, léventualité de conséquences moins favorables du fait de lapplication du régime fiscal en matière dassurance de capitaux plutôt que celui en matière dassurance complémentaire de retraite. Ce constat lamène à sinterroger sur lobligation découlant de lIL pour un assureur dêtre établi en Suède pour pouvoir bénéficier du régime fiscal dassurance vieillesse au regard des libertés fondamentales garanties par le traité CE.

La question préjudicielle

Le Regeringsrätten a donc décidé de poser à la Cour la question préjudicielle suivante:

«Les règles communautaires relatives à la libre circulation des personnes, des services et des capitaux, notamment larticle 49 CE, lu ensemble avec larticle 12 CE, doivent-elles être interprétées [en ce] sens quelles interdisent la mise en oeuvre de règles fiscales nationales ayant pour effet quune assurance, souscrite auprès dun assureur établi en Angleterre, en Allemagne ou au Danemark et remplissant toutes les conditions dune assurance complémentaire de retraite suédoise à lexception de celle dêtre souscrite auprès dun assureur établi en Suède soit traitée comme une assurance de capitaux, avec des effets en matière dimpôts directs qui, en fonction des circonstances de lespèce, peuvent être moins favorables que ceux attachés à une assurance complémentaire de retraite?»

Analyse

Par sa question, le juge de renvoi interroge la Cour sur le point de savoir si les règles du traité sur la libre circulation des personnes et des capitaux, sur la libre prestation des services ainsi que sur la non-discrimination sopposent à une législation nationale, comme celle en lespèce, qui prévoit un régime fiscal moins favorable pour une assurance complémentaire de retraite souscrite auprès dun assureur établi dans un État membre autre que la Suède, par rapport à une même assurance souscrite auprès dun assureur établi en Suède.

Nous estimons, comme la Commission des Communautés européennes, que la question préjudicielle peut être limitée à linterprétation de larticle 49 CE.

Selon une jurisprudence bien établie, la conclusion dune assurance vieillesse, en vue de la perception ultérieure de pensions de retraite, relève des dispositions sur la libre prestation des services au sens des articles 49 CE et suivants . De mme, selon une jurisprudence constante, larticle 12 CE na vocation à sappliquer que dans des situations régies par le droit communautaire pour lesquelles le traité ne prévoit pas de règles spécifiques de non-discrimination . En lespèce, larticle 49 CE fait référence à ce principe de non-discrimination précisément dans le cadre de la libre prestation des services.

En conséquence, nous examinerons si larticle 49 CE doit être interprété en ce sens quil soppose à lapplication dune législation nationale, comme celle en lespèce, qui prévoit des règles fiscales moins favorables lorsquune assurance complémentaire de retraite est souscrite auprès dun assureur établi dans un autre État membre, que lorsquelle est souscrite auprès dun assureur établi dans lÉtat membre concerné.

La restriction à la libre prestation des services

Selon une jurisprudence constante de la Cour, «si, en létat actuel du droit communautaire, la matière des impôts directs ne relève pas en tant que telle du domaine de la compétence de la Communauté, il nen reste pas moins que les États membres doivent exercer leurs compétences retenues dans le respect du droit communautaire» . Il sensuit que les États membres, dans lexercice de leur compétence retenue, ne doivent pas contrevenir aux libertés fondamentales garanties par le traité, telles que la libre prestation des services .

Or, selon la Cour, «[d]ans loptique dun marché unique, et pour permettre de réaliser les objectifs de celui-ci, larticle 59 du traité soppose à lapplication de toute réglementation nationale ayant pour effet de rendre la prestation de services entre États membres plus difficile que celle purement interne à un État membre» .

1. Il y a lieu de relever ensuite que, en vertu dune jurisprudence constante, une discrimination consiste dans lapplication de règles différentes à des situations comparables ou bien dans lapplication de la même règle à des situations différentes . Or, la législation en cause dans le litige au principal prévoit lapplication de règles fiscales différentes pour une même situation, à savoir la souscription dune assurance complémentaire de retraite identique, selon quelle est souscrite auprès dune compagnie dassurance établie ou non en Suède.

La Commission distingue les conséquences de la législation suédoise quant à la situation fiscale de Skandia et celle concernant M. Ramstedt. Selon elle, M. Ramstedt est imposé sur les prestations qui lui sont versées de la même manière, que lassurance soit souscrite auprès dun assureur établi en Suède ou dans un autre État membre. En revanche, en ce qui concerne Skandia, les cotisations versées ne sont pas déductibles au moment de leur versement. La déduction nest possible que lorsque les prestations correspondantes sont versées à M. Ramstedt sous forme de pension et non pour les cotisations versées. Alors que, si Skandia souscrivait lassurance complémentaire de retraite pour M. Ramstedt auprès dun assureur établi en Suède, elle pourrait déduire les cotisations dès leur versement.

Comme la Commission, nous pensons quune législation telle que celle en cause dans le litige au principal comporte un ensemble déléments susceptibles de dissuader, voire dempêcher, lemployeur de souscrire une assurance complémentaire de retraite auprès dun assureur non établi en Suède .

Nos développements porteront uniquement sur lanalyse de larticle 49 CE au regard du régime fiscal applicable, conformément à la législation suédoise, à lemployeur Skandia.

Le régime fiscal applicable à lemployeur qui souscrit une assurance complémentaire de retraite auprès dun assureur établi dans un État membre autre que la Suède est moins favorable que celui applicable lorsque lassureur est établi en Suède. Afin déchapper à cette fiscalité moins favorable, lemployeur ne peut que souscrire la même assurance auprès dun assureur établi en Suède. Par là même, nous voyons que la législation suédoise aboutit à imposer une condition détablissement sur son territoire pour la fourniture dune assurance vieillesse.

Une telle exigence représente une discrimination indirecte contraire à la libre prestation des services, ce que tous les intervenants à laffaire reconnaissent directement ou indirectement. De ce fait, la question fondamentale en lespèce est celle dune éventuelle justification de cette discrimination.

Les justifications avancées

Le gouvernement suédois et le Riksskatteverket (administration des contributions) envisagent quatre motifs justificatifs face à lexigence détablissement en Suède prévue par la législation en cause. Les justifications avancées, pour affirmer que ladite législation nest pas contraire au droit communautaire, sont la cohérence fiscale, lefficacité des contrôles fiscaux, la protection de lintégrité de lassiette fiscale et la neutralité concurrentielle .

À notre avis, aucune de ces justifications nest fondée.

La cohérence fiscale

Les gouvernements suédois et danois ainsi que le Riksskatteverket se fondent sur largument de la cohérence du système fiscal pour justifier la législation nationale en cause. Selon eux, la solution de la Cour dans laffaire Bachmann, précitée, est transposable en lespèce même si la situation factuelle nest pas complètement identique.

Dans laffaire Bachmann, précitée, la Cour a été confrontée à la législation fiscale belge qui prévoyait que les primes dassurance vie ne pouvaient pas être déduites du revenu imposable lorsquelles étaient versées à létranger. La Cour a considéré quun tel régime était compatible avec le droit communautaire parce quil existait un lien direct entre la déductibilité des cotisations et limposition des pensions. En effet, dans le système belge, la perte de recettes due à la déduction des cotisations dassurance était compensée par limposition des pensions, des annuités et des rentes en capital versées par les assureurs. À linverse, ces montants étaient exonérés lorsque les cotisations nétaient pas déductibles.

Dans le système national en cause dans laffaire Bachmann, précitée, le désavantage fiscal était compensé par un avantage fiscal ultérieur.

Contrairement aux gouvernements suédois et danois, nous pensons que cette solution nest pas transposable en lespèce. Comme le remarquent justement Skandia , la Commission et lAutorité de surveillance AELE, lespèce se distingue de celle qui a donné lieu à larrêt Bachmann, précité. Dans la présente affaire, le système fiscal suédois ne prévoit pas davantage fiscal pour compenser le désavantage fiscal subi par lemployeur Skandia, du fait de lapplication des règles fiscales suédoises relatives à lassurance de capitaux qui ne lui permettent pas de déduire les cotisations versées au titre de cette assurance.

En effet, la législation nationale prévoit que Skandia, à la suite de la souscription de lassurance en cause auprès dun assureur établi dans un État membre autre que la Suède, doit attendre jusquau moment du versement des pensions pour bénéficier du droit à déduction. La législation suédoise ne prévoit aucun avantage fiscal pour contrebalancer ce désavantage subi par Skandia.

En labsence dun avantage fiscal qui permette de contrebalancer le désavantage fiscal subi par Skandia, il nest pas possible, selon nous, de retenir largument de la cohérence du système fiscal pour justifier la législation suédoise au regard du droit communautaire.

Lefficacité des contrôles fiscaux

Selon les gouvernements suédois et danois, lexigence de létablissement en Suède se justifie par la nécessité dexercer de manière satisfaisante un contrôle fiscal efficace. Ladministration fiscale suédoise doit être en mesure dobtenir les informations nécessaires à ce type de contrôle. Les instruments communautaires prévus pour assurer un tel contrôle et, notamment, la directive 77/799/CEE du Conseil, du 19 décembre 1977, concernant lassistance mutuelle des autorités compétentes des États membres dans le domaine des impôts directs , ne seraient pas suffisants. De même, il ne serait pas possible de garantir un contrôle fiscal efficace en se fondant sur le volontariat .

Nous soulignons que, selon une jurisprudence constante de la Cour, la justification fondée sur lefficacité des contrôles fiscaux ne peut être retenue contre une discrimination à la libre prestation des services lorsque la directive 77/799 peut être invoquée par un État membre afin dobtenir, de la part des autorités compétentes dun autre État membre, toutes les informations susceptibles de lui permettre létablissement correct de limpôt sur le revenu .

Nous rappelons également que les conventions conclues en vue déviter la double imposition prévoient une entraide et une assistance concernant léchange dinformations entre les autorités fiscales des États parties. Enfin, rien nempêche les autorités fiscales suédoises dexiger, en lespèce, de Skandia, de M. Ramstedt ou de lassureur lui-même les preuves quelles jugent nécessaires pour apprécier sil y a lieu ou non daccorder la déduction demandée .

Ainsi, à notre avis, il est possible de garantir lefficacité des contrôles fiscaux par des moyens moins restrictifs que la législation suédoise en lespèce. Cette justification nest pas fondée.

La nécessité de préserver lassiette fiscale

Selon les gouvernements suédois et danois, la législation suédoise viserait à éviter le risque de disparition de la matière imposable. En effet, comme le constatent ces gouvernements, il sagit de la situation dans laquelle le royaume de Suède accepterait la déduction des cotisations versées au titre de lassurance et quensuite lemployé quitterait la Suède pour aller sinstaller dans un autre État, évitant ainsi la taxation de ses prestations dassurance en tant que revenus. La nécessité de préserver lassiette fiscale a été reconnue, selon lesdits gouvernements, par la Cour dans larrêt Safir, précité, comme raison impérieuse dintérêt général.

À notre avis, il nest pas possible de lire et dinterpréter larrêt Safir, précité, en ce sens.

En effet, larrêt Danner, précité, énonce que, «la Cour a jugé, au point 34 de larrêt Safir, précité, que, dans le cas despèce, la nécessité de combler le vide fiscal qui résulterait de la non-taxation de lépargne sous forme dassurances vie en capital investie dans des compagnies établies dans un autre État membre autre que celui où se trouve la résidence de lépargnant nétait pas de nature à justifier la mesure nationale en cause qui restreignait la libre prestation des services» . La Cour a dit que la nécessité de prévenir une réduction des recettes fiscales ne figure pas parmi les raisons énoncées à larticle 46 CE et quelle ne peut être considérée comme une raison impérieuse dintérêt général pouvant être invoquée pour justifier une inégalité de traitement .

Cette justification ne nous semble donc pas fondée.

La neutralité concurrentielle

La dernière justification avancée par le gouvernement suédois est, selon nous, peu claire et difficilement compréhensible. Ce dernier affirme que la législation nationale exigeant un établissement en Suède est nécessaire pour garantir la neutralité concurrentielle . En effet, le gouvernement suédois explique que lemployeur peut déduire de trois manières les charges de pensions de retraite quil supporte avant le paiement effectif des pensions dues à lemployé: par la constitution dune réserve au bilan associée à une assurance crédit, par transfert à une fondation de retraite ou par la souscription dune assurance vieillesse. La législation suédoise serait nécessaire pour garantir la neutralité concurrentielle, en particulier lorsque la retraite est garantie par la constitution dune réserve au bilan associée à une assurance crédit ou par transfert à une fondation de retraite.

Nous avons du mal à suivre le raisonnement du gouvernement suédois quant à la justification de sa législation fondée sur la neutralité concurrentielle. Cependant, en tout état de cause, nous pensons, dune part, que cet argument nest pas pertinent, car, comme il a été précédemment établi, il sagit dans le litige au principal dune assurance complémentaire de retraite garantie par la souscription par lemployeur dune assurance vieillesse. Donc, nous ne sommes pas dans lun des deux autres cas de figure, de garantie de lassurance en cause, avancés par le gouvernement suédois.

Dautre part, à notre avis et comme lont souligné la Commission et lAutorité de surveillance AELE, cest justement par le respect des règles du traité sur les libertés fondamentales, comme larticle 49 CE, que le respect des règles de concurrence est garanti. Une telle justification ne saurait en aucun cas être retenue.

Conclusion

Nous concluons, par conséquent, à ce que la Cour dise pour droit:

«Larticle 49 CE doit être interprété en ce sens quil soppose à lapplication dune législation nationale, comme celle en lespèce, qui prévoit des règles fiscales moins favorables lorsquune assurance complémentaire de retraite est souscrite auprès dun assureur établi dans un autre État membre que lorsquelle est souscrite auprès dun assureur établi dans lÉtat membre concerné.»