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CONCLUSIONS DE L'AVOCAT GÉNÉRAL
M. L.A. GEELHOED
présentées le 25 mars 2004(1)


Affaire C-269/03



Grand-duché de Luxembourg

et

Administration de l'enregistrement et des domaines
contre
Vermietungsgesellschaft Objekt Kirchberg SARL


[demande de décision préjudicielle formée par la Cour d'appel (Luxembourg)]

«État membre ayant accordé le droit à ses contribuables d'opter pour la taxation des opérations d'affermage et de location de biens immeubles  –  Déduction totale de la taxe payée en amont subordonnée à l'obtention préalable d'un agrément de l'administration fiscale»






I –    Introduction

1.        La présente affaire porte sur l'interprétation de l'article 13, C, de la sixième directive 77/388/CEE du Conseil, du 17 mai 1977, en matière d'harmonisation des législations des États membres relatives aux taxes sur le chiffre d'affaires – Système commun de taxe sur la valeur ajoutée: assiette uniforme  (2) (ci-après la «sixième directive»). Plus particulièrement, la Cour d'appel (Luxembourg) demande s'il est conforme à l'article 13, C, de la sixième directive de subordonner le droit à déduction, qui prend naissance lors de l'exercice du droit d'option prévu à cet article, de l'obtention préalable d'un agrément non rétroactif. En d'autres termes, le juge de renvoi demande à la Cour si la liberté laissée aux États membres de fixer les conditions d'exercice du droit d'option («Les États membres peuvent restreindre la portée du droit d'option; ils déterminent les modalités de son exercice.») est limitée par le principe de la TVA qui consiste dans le droit à déduction.

II –   Le cadre juridique

A –    La législation communautaire

2.        L'article 13, B, sous b), et C, de la sixième directive dispose:

«B. Autres exonérations

Sans préjudice d'autres dispositions communautaires, les États membres exonèrent, dans les conditions qu'ils fixent en vue d'assurer l'application correcte et simple des exonérations prévues ci-dessous et de prévenir toute fraude, évasion et abus éventuels:

[…]

b)l'affermage et la location de biens immeubles, à l'exception:

[…]

C. Options

Les États membres peuvent accorder à leurs assujettis le droit d'opter pour la taxation:

a)de l'affermage et de la location de biens immeubles;

[…]

Les États membres peuvent restreindre la portée du droit d'option; ils déterminent les modalités de son exercice.»

B –    La législation nationale

3.        L'article 1er du règlement grand-ducal, du 7 mars 1980, déterminant les limites et les conditions de l'exercice du droit d'option pour l'application de la taxe sur la valeur ajoutée aux opérations immobilières (ci-après le «règlement grand-ducal»)  (3) permet aux assujettis de

«opter pour l'application de la taxe sur la valeur ajoutée aux opérations immobilières visées ci-après:

[…]

b)quiconque, en vertu d'un contrat écrit et de gré à gré, donne en fermage ou en location à un assujetti des biens immeubles.»

4.        Aux termes de l'article 3 du règlement grand-ducal:

«Le droit d'option ne peut être exercé que pour l'immeuble qui est utilisé entièrement ou, en cas d'usage mixte, pour la partie prépondérante par […] le locataire à l'exercice d'activités qui l'autorisent à déduire la taxe en amont […]»

5.        L'article 5 du règlement grand-ducal dispose:

«Quiconque fait usage du droit d'option doit présenter pour agrément une déclaration d'option écrite à l'administration de l'enregistrement.

[…]

En cas de location, l'application de la taxe est autorisée à partir du premier jour du mois qui suit celui au cours duquel la déclaration d'option a été agréée. La décision administrative devra intervenir dans le mois de la réception de cette déclaration.»

6.        L'article 7, deuxième alinéa, du règlement grand-ducal dispose:

«En cas de construction d'un immeuble, la déduction de la taxe en amont ne peut être opérée par le propriétaire qu'à partir de l'agrément de la déclaration de l'option pour […] la location ultérieure […] de l'immeuble. Toutefois, l'administration peut autoriser le propriétaire à opérer la déduction de la taxe en amont au fur et à mesure de la réception des factures, lorsqu'il est établi avec certitude que la condition prévue à l'article 3 du présent règlement sera remplie et lorsque le propriétaire s'est engagé à présenter une déclaration d'option au moment de l'achèvement de la construction».

III –   En fait

7.        La société à responsabilité limitée Vermietungsgesellschaft Objekt Kirchberg (ci-après «VOK») a déduit, pour les années 1993 et 1994, la taxe en amont relative à un immeuble qu'elle a donné en location, avec facturation de la TVA, à partir de janvier 1993.

8.        Le 29 juin 1993, VOK a adressé à l'administration de l'enregistrement et des domaines (ci-après l'«administration») une déclaration en vue d'exercer le droit d'opter pour la taxation. L'agrément lui a été accordé le 30 juin 1993 avec effet à compter du 1er juillet 1993, alors que VOK estimait que la TVA devait être déductible à dater du début de la location (à savoir le 1er janvier 1993).

9.        En application de l'article 5 du règlement grand-ducal, l'administration a cependant refusé la déduction de 50 % de la TVA acquittée en amont au motif que le droit à déduction ne pouvait être exercé au plus tôt qu'à partir de la date de l'agrément.

10.      L'administration a ainsi émis des bulletins portant rectification d'office des déclarations de TVA.

11.      A la suite de la réclamation de VOK auprès du directeur de l'administration, celui-ci a adopté une décision en janvier 1998, en vertu de laquelle de nouveaux bulletins rectificatifs ont été émis au mois de février suivant. Le directeur a considéré, d'une part, que le 1er janvier 1993 constituait le début de l'utilisation de l'immeuble.

12.      L'option n'ayant pris effet qu'à partir du 1er juillet 1993, la location n'était pas soumise à la TVA pendant la première moitié de l'année 1993. La TVA en amont ne pouvait dès lors être déduite qu'à hauteur de 50 %, ce qui justifiait la rectification de la déclaration de 1993. Il a considéré, d'autre part, que l'exercice de l'option devait entraîner une deuxième rectification en 1994, à savoir que 9/10èmes de la TVA non déductible en 1993 devaient faire l'objet d'une rectification en faveur de VOK. En définitive, 50 % d'un dixième de la TVA acquittée en amont, soit 5 % de cette taxe, restaient non déductibles et donc à la charge de VOK.

13.      VOK a ensuite assigné l'administration et l'État du grand-duché de Luxembourg devant le Tribunal d'arrondissement (Luxembourg) afin de faire annuler la rectification d'office opérée par l'administration pour les déclarations de 1993 et de 1994. Le Tribunal, par jugement du 7 novembre 2001, a donné gain de cause à VOK.

14.      L'administration et l'État du grand-duché de Luxembourg ont alors interjeté appel auprès de la Cour d'appel.

15.      Par arrêt du 18 juin 2003, la Cour d'appel a décidé de surseoir à statuer et de saisir la Cour de la question préjudicielle suivante:

«L'article 13, C, premier alinéa, sous a), de la sixième directive 77/388/CEE du Conseil du 17 mai 1977 en matière d'harmonisation des législations des États membres relatives aux taxes sur le chiffre d'affaires – Système commun de taxe sur la valeur ajoutée permet-il à un État membre ayant fait usage de la faculté d'accorder à ses assujettis le droit d'opter pour la taxation de l'affermage et de la location de biens immeubles de faire dépendre la déduction intégrale de la TVA en amont de l'obtention préalable d'un agrément non rétroactif de la part de l'administration fiscale?»

16.      Conformément à l'article 20 du le statut CE de la Cour de justice, des observations écrites ont été déposées par l'administration, le gouvernement luxembourgeois, le VOK et la Commission.

IV –   Appréciation

17.      Est-il loisible à un État membre ayant fait usage de la faculté d'accorder à ses contribuables le droit, prévu à l'article 13, C, de la sixième directive, d'opter pour la taxation de l'affermage et de la location de biens immeubles de faire dépendre la taxation de ces opérations de l'obtention préalable d'un agrément de la part de l'administration fiscale?

18.      La réponse à cette question dépend essentiellement de l'interprétation de l'article 13, C, second alinéa, de la sixième directive. La faculté accordée aux États membres de restreindre la portée du droit d'option et d'en déterminer les modalités comporte-elle aussi celle de limiter l'application optionnelle de la TVA aux opérations effectuées après l'octroi de l'agrément?

19.      VOK et la Commission, d'une part, et l'administration et le gouvernement luxembourgeois, d'autre part, ont pris sur cette question des positions qui paraissent à première vue diamétralement opposées.

20.      Les arguments de VOK et de la Commission se fondent sur la jurisprudence de la Cour, selon laquelle le principe du droit à la déduction immédiate et intégrale de la TVA en amont serait l'un des principes fondamentaux du système de la TVA.

21.     À cet égard, elles renvoient notamment aux arrêts Molenheide e.a., Schlossstrasse et Breitsohl  (4) .

22.      VOK déduit de cette jurisprudence que le système de contrôle et d'agrément préalables prévu par le règlement grand-ducal ne serait pas nécessaire pour lutter contre les abus et la fraude fiscale, étant donné qu'un contrôle a posteriori pourrait être aussi voire plus efficace qu'un tel contrôle a priori. Il s'ensuivrait que cette procédure serait contraire au principe de proportionnalité tel qu'il a été rappelé, en particulier, aux points 45 et 46 de l'arrêt Molenheide e.a., précité.

23.      Plus particulièrement, VOK estime que, l'article 13, C, de la sixième directive ne permettrait pas aux États membres d'introduire un système d'agrément tel que celui en cause dans l'affaire au principal.

24.      Les États membres sont certes autorisés par l'article 13, C, précité, à déterminer les conditions de fond du droit d'option en matière de location, mais dès que ces conditions-ci sont remplies, comme c'est le cas en l'espèce, les principes de base de la TVA, tels que les principes de déductibilité en amont et de proportionnalité, sont applicables.

25.      VOK dès lors, est d'avis que l'article 13, C, premier alinéa, sous a), ne permet pas aux États membres ayant fait usage de la faculté d'accorder à leurs contribuables le droit d'opter pour la taxation de l'affermage et de la location de biens immeubles de faire dépendre la déduction intégrale de la TVA en amont de l'obtention préalable d'un agrément non rétroactif de la part de l'administration fiscale.

26.      La Commission aboutit au même résultat que VOK. Elle soutient notamment que le droit visé par l'article 13, C, de la sixième directive n'est pas absolu mais doit respecter la lettre et l'esprit de la sixième directive. La Commission renvoie à cet égard, aux arrêts Becker et Armbrecht. (5)

27.      Elle en déduit qu'un agrément préalable, qui permet aux autorités nationales de vérifier si les conditions fixées par l'État pour autoriser l'exercice de l'option sont réunies apparaît à première vue légitime et ne se heurte à aucun principe de la sixième directive.

28.      Par contre, la règle qui précise que, lorsque l'administration a constaté que le droit d'option pouvait valablement être exercé, le début de l'activité taxable ne peut pas toutefois correspondre au début effectif de l'activité lui semble clairement être une disposition disproportionnée. En effet, dans les cas où, comme en l'espèce, la déclaration est adressée à l'administration après la date de début de l'activité taxable, la non-rétroactivité de l'agrément a pour conséquence de priver l'assujetti d'une partie de ses droits à déduction.

29.      Le refus d'appliquer le régime normal de la taxation depuis le début effectif de l'activité taxable en privant l'agrément d'effet rétroactif serait donc une mesure qui n'a aucune justification. Elle crée une situation dans laquelle la taxe en amont continue de peser sur l'assujetti, ce qui devrait être évité.

30.      Cette non-rétroactivité ne trouverait, de surcroît, aucune justification, parce que, dans l'hypothèse où l'État membre la supprimerait, tant les contrôles de l'État membre – par le biais de l'agrément – qu'une éventuelle régularisation – sur la base de l'article 20 de la sixième directive – en cas de refus de l'agrément ou de modification des conditions de l'option demeureraient possibles.

31.      L'administration et le gouvernement luxembourgeois soutiennent que la procédure d'agrément, telle que celle prévue dans le règlement grand-ducal, est conforme à l'article 13, C, de la sixième directive. Cette disposition conférerait aux États membres la faculté de prévoir pour leurs assujettis le droit d'opter pour la taxation et de soumettre ce droit à certaines modalités d'application, en leur accordant une large marge d'appréciation.

32.      Pour étayer leur thèse, ils renvoient aux arrêts Becker, précité, et Belgocodex  (6) .

33.      La procédure d'agrément serait une modalité d'application qui n'irait pas au-delà de ce qu'autorise l'article 13, C, de la sixième directive. Elle permettrait à l'administration de vérifier que les bailleurs assujettis qui optent pour la taxation remplissent les conditions de fond, à savoir, en l'espèce, que le locataire est lui-même un assujetti qui peut déduire la TVA acquittée en amont.

34.      Le système luxembourgeois n'enfreindrait pas les principes fondamentaux de la TVA, comme le principe de la déductibilité de la taxe payée en amont, puisque l'assujetti a la possibilité de présenter sa déclaration d'option à l'avance et d'obtenir dans ce cas l'agrément à temps pour pouvoir déduire intégralement et immédiatement la TVA acquittée en amont. Ce ne serait que dans l'hypothèse où la déclaration est présentée après le début de la location de l'immeuble, six mois plus tard, dans le cas de la procédure au principal, que le bailleur ne pourrait déduire immédiatement et intégralement la TVA acquittée en amont. Il devrait attendre de recevoir l'agrément de l'administration et ne pourrait demander qu'ensuite la rectification de la situation.

35.      Il s'ensuit que les limites à la possibilité de déduire immédiatement et intégralement la TVA en amont ne seraient que la conséquence indirecte du droit d'option, tel que celui-ci est prévu par l'article 13, C, de la sixième directive et des modalités qui l'accompagnent. La procédure d'agrément adoptée par le grand-duché de Luxembourg n'aurait ni pour objet ni pour effet de porter atteinte au droit à la déduction de la TVA prévu par la sixième directive.

36.      L'administration et le gouvernement luxembourgeois concluent que cette procédure se justifie par le fait qu'il est important pour le bailleur de savoir le plus tôt possible qu'il peut déduire intégralement la TVA acquittée en amont. Cela permettrait d'éviter des détresses financières a posteriori. Cette procédure servirait également les objectifs qui sont d'assurer la perception exacte de la taxe et d'éviter les fraudes et abus.

37.      Il ressort du dossier que le gouvernement luxembourgeois a voulu faire usage de la faculté que l'article 13, C, de la sixième directive prévoit, c'est-à-dire de renoncer à l'exonération prévue à l'article 13, B, de ladite directive pour l'affermage et la location d'immeubles.

38.      Selon le texte du règlement grand-ducal, le gouvernement luxembourgeois a soumis le droit d'option pour les assujettis à certaines limites et conditions.

39.      L'article 3 dudit règlement énonce la restriction principale à la faculté d'opter pour la taxation: le droit d'option ne peut être exercé que pour l'immeuble qui est utilisé entièrement ou, en cas d'usage mixte, pour la partie prépondérante par le locataire pour l'exercice d'activités qui l'autorisent à déduire la taxe en amont.

40.      Il existe un lien indissociable entre les conditions limitatives de l'article 7 et la procédure d'agrément préalable prévue à l'article 5 du règlement grand-ducal en ce sens que l'administration luxembourgeoise doit être en mesure de vérifier au préalable si les opérations économiques pour lesquelles l'application de la TVA est demandée répondent aux conditions définies à l'article 7 dudit règlement.

41.      Dans leurs observations écrites, tant l'administration et le gouvernement luxembourgeois que la Commission ont mis en exergue cette relation existant entre, d'une part, la limitation du droit d'option et, d'autre part, la nécessité de vérifier si les conditions d'exercice du droit d'option sont réunies.

42.      Ils en ont conclu que la procédure d'agrément étant la conséquence logique de la compétence des États membres de restreindre la portée du droit d'option, elle ne serait pas en tant que telle disproportionnée.

43.      Cette conclusion nous paraît entièrement justifiée à la lumière du système de l'article 13, B et C, de la sixième directive où la faculté d'accorder un droit d'option, prévue à l'article 13, C, constitue une exception aux exceptions plus larges de l'article 13, B.

44.      Les divergences d'opinion entre, d'une part, les autorités luxembourgeoises et, d'autre part, VOK et la Commission se concentrent notamment sur l'article 5, dernier alinéa, du règlement grand-ducal du 7 mars 1980. L'application de cette disposition pourrait avoir pour conséquence de priver l'assujetti d'une partie de ses droits à déduction, prévus à l'article 17 de la sixième directive. Une telle conséquence pourrait survenir notamment, dans les cas où, comme en l'espèce, la déclaration d'option est adressée à l'administration après la date du début de l'opération taxable.

45.      La Commission et VOK ont souligné, en se référant à la jurisprudence abondante de la Cour, l'importance du droit à déduction, comme l'un des principes du système de la TVA, auquel les États membres ne sauraient porter atteinte que dans des cas de nécessité impérieuse. Une telle situation de nécessité impérieuse ne se présenterait pas en l'espèce. Il s'ensuivrait que la clause de non-rétroactivité de l'article 5, dernier alinéa, du règlement grand-ducal devrait être qualifiée d'atteinte disproportionnée au principe du droit à déduction et jugée dès lors contraire au droit communautaire.

46.      Bien que nous partagions les considérations de la Commission sur l'importance du droit à déduction, clef de voûte du système de la TVA, nous ne pouvons pas nous rallier à la conclusion que la Commission en tire en l'espèce.

47.      Comme la Cour l'a confirmé à plusieurs reprises  (7) , les États membres jouissent d'une large marge d'appréciation dans le cadre de la disposition de l'article 13, C.

48.      En principe, il est loisible aux États membres de limiter rationae materiae et temporis le droit d'option pour les assujettis, comme cela a été le cas en l'occurrence. La limitation matérielle est prévue à l'article 7 du règlement grand-ducal, tandis que la limitation temporelle se trouve à l'article 5 dudit règlement.

49.      Du point de vue de la sécurité juridique, le règlement grand-ducal nous paraît irréprochable: les assujettis peuvent s'informer à l'avance sur les types de transactions pour lesquels le droit d'option a été ouvert, sur le moment à partir duquel la taxe sera appliquée et, enfin, sur les formalités qu'ils doivent remplir à cette fin.

50.      Examinée à la lumière du principe de déduction, une réglementation comme celle de l'espèce nous paraît également incontestable. Tout assujetti qui satisfait aux modalités claires du règlement grand-ducal et remplit en temps voulu les formalités peut être assuré de pouvoir déduire les taxes payées en amont. Pour autant que la procédure d'agrément soit respectée, ce règlement n'enfreint donc en rien le principe de déduction.

51.      Une disposition telle que l'article 5, dernier alinéa, du règlement grand-ducal n'a pas d'autre objectif que de définir le moment où le droit d'option exercé et agréé devient effectif. Comme le gouvernement luxembourgeois l'a observé à juste titre, cette disposition n'a ni pour but ni pour effet de restreindre le droit à déduction. Dans les cas où les assujettis accomplissent des opérations qui entrent dans le champ d'application de la taxe mais n'effectuent pas en temps voulu la déclaration d'option pour la taxe et ne disposent donc pas de l'agrément prévu par la réglementation nationale, l'application de cette disposition a une incidence sur le droit à déduction, mais cette incidence ne doit pas être attribuée aux dispositions nationales mais bien au comportement des assujettis.

52.      Dans ces conditions, une réglementation nationale comme celle en cause ne subordonne pas le droit à déduction à un agrément préalable non rétroactif. Dans la mesure où le respect de la procédure d'agrément permet aux assujettis concernés d'obtenir une déduction immédiate et intégrale de la taxe en amont, cette procédure ne peut pas être qualifiée de disproportionnée. Elle reste dans les limites de ce qui est nécessaire pour atteindre les objectifs qui sont d'assurer l'exacte perception de la taxe et d'éviter les fraudes et les abus. En plus, cette procédure répond aux exigences du principe de sécurité juridique.

V –   Conclusion

53.      Eu égard aux considérations exposées ci-dessus, nous proposons à la Cour de répondre comme suit à la question déférée par la juridiction nationale:

«L'article 13, C, premier alinéa, sous a), de la sixième directive 77/388/CEE du Conseil, du 17 mai 1977, en matière d'harmonisation des législations des États membres relatives aux taxes sur le chiffre d'affaires – Système commun de taxe sur la valeur ajoutée: assiette uniforme, ne s'oppose pas à ce qu'un État membre ayant fait usage de la faculté d'accorder à ses assujettis le droit d'opter pour la taxation de l'affermage et de la location de biens immeubles subordonne l'application de la taxe à un agrément préalable de l'option lorsque la procédure d'agrément vise uniquement à vérifier que les conditions légales sont remplies et qu'elle est destinée notamment à prévenir les cas de fraude ou d'abus. Une telle procédure d'agrément n'enfreint pas le principe du droit à déduction lorsque son respect garantit à l'assujetti une déduction immédiate et intégrale de la taxe en amont.»


1 – Langue originale: le néerlandais.


2 – JO L 145, p. 1.


3 – .Mémorial 1980 A, p. 242.


4 – Arrêts du 18 décembre 1997 (C-286/94, C-340/95, C-401/95 et C-47/96, Rec. p. I-7281, point 47), et du 8 juin 2000 (C-396/98, Rec. p. I-4279, point 36 et C-400/98, Rec. p. I-4321, point 34).


5 – Arrêts du 19 janvier 1982 (8/81, Rec. p. 53, point 38, et du 4 octobre 1995 C-291/92, Rec. p. I-2775).


6 – Arrêt du 3 décembre 1998 (C-381/97, Rec. p. I-8153, point 17).


7 – Entre autres dans les arrêts Becker (précité à la note 5, point 38) et Belgocodex (précité à la note 6, point 17).