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CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. NIILO JÄÄSKINEN

présentées le 24 novembre 2011 (1)

Affaire C-39/10

Commission européenne

contre

République d’Estonie

«Manquement d’État — Exception d’irrecevabilité — Parties intervenantes — Libre circulation des travailleurs — Article 45 TFUE — Article 28 de l’accord EEE — Législation fiscale — Impôt sur le revenu — Pensions de retraite — Abattement pour les revenus de faible montant — Discrimination entre contribuables résidents et contribuables non-résidents»





I –    Introduction

1.        La République d’Estonie applique une loi relative à l’impôt sur le revenu ne prévoyant pas la possibilité d’accorder un abattement individuel aux contribuables non-résidents dont le montant total des revenus est si faible qu’ils bénéficieraient d’un tel avantage fiscal s’ils résidaient sur le territoire national.

2.        Par sa requête, la Commission européenne demande à la Cour de constater que, en appliquant une législation de ce type, la République d’Estonie a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 45 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (2) et de l’article 28 de l’accord sur l’Espace économique européen, du 2 mai 1992 (ci-après l’«accord EEE») (3).

3.        La République d’Estonie a contesté les griefs formulés à son encontre, tout en reconnaissant la nécessité de compléter les dispositions de sa législation qui portent sur les droits à déductions afférents au revenu des résidents d’un État membre de l’Union européenne de sorte que le champ d’application desdites dispositions soit étendu aux ressortissants de tous les États parties à l’accord EEE.

4.        Le présent recours en manquement ouvre des perspectives intéressantes à mes yeux en ce qui concerne l’effet de la libre circulation des travailleurs sur la compétence reconnue aux États membres de décider par eux-mêmes du régime fiscal qu’ils appliquent aux personnes retraitées ayant exercé ladite liberté fondamentale.

5.        Néanmoins, des imperfections de rédaction outre des incohérences de raisonnement, qui ont été constatées dans la formulation de la requête et dans les écritures ultérieures de la Commission, me semblent susceptibles d’entraîner l’irrecevabilité de cette action.

II – Le cadre juridique

A –    Le droit de l’Union

1.      L’article 45 TFUE et l’article 28 de l’accord EEE

6.        L’article 45 TFUE dispose:

«1.      La libre circulation des travailleurs est assurée à l’intérieur de l’Union.

2.      Elle implique l’abolition de toute discrimination, fondée sur la nationalité, entre les travailleurs des États membres, en ce qui concerne l’emploi, la rémunération et les autres conditions de travail.

3.      Elle comporte le droit, sous réserve des limitations justifiées par des raisons d’ordre public, de sécurité publique et de santé publique:

a)      de répondre à des emplois effectivement offerts;

b)      de se déplacer à cet effet librement sur le territoire des États membres,

c)      de séjourner dans un des États membres afin d’y exercer un emploi conformément aux dispositions législatives, réglementaires et administratives régissant l’emploi des travailleurs nationaux,

d)      de demeurer, dans des conditions qui feront l’objet de règlements établis par la Commission, sur le territoire d’un État membre, après y avoir occupé un emploi.

4.      Les dispositions du présent article ne sont pas applicables aux emplois dans l’administration publique.»

7.        L’article 28 de l’accord EEE garantit la libre circulation des travailleurs entre les États membres de la Communauté européenne et les États de l’Association européenne de libre-échange (AELE), en des termes identiques en substance aux dispositions de l’article 45 TFUE.

2.      La recommandation 94/79/CE 

8.        La recommandation 94/79/CE (4), qui est invoquée par la République d’Estonie et par des parties intervenantes, porte sur l’imposition de certains revenus obtenus par des non-résidents dans un État membre autre que celui de leur résidence.

9.        L’article 1er, paragraphe 1, de la recommandation 94/79 dispose:

«1.      Les États membres appliquent les dispositions de la présente recommandation aux personnes physiques qui sont résidentes dans un État membre et qui sont imposées au titre de l’impôt sur le revenu dans un autre État membre, sans y être résidentes, sur les revenus suivants:

[…]

–        pensions et autres rémunérations similaires perçues au titre d’un emploi antérieur ainsi que pensions de la sécurité sociale,

–        […]»

10.      L’article 2, paragraphes 1 et 2, premier alinéa, de ladite recommandation prévoit:

«1.      Les États membres ne soumettent pas les revenus visés à l’article 1er, paragraphe 1, dans l’État membre qui les impose, à une imposition supérieure à celle que cet État établirait si le contribuable, son époux et ses enfants étaient résidents dans cet État membre.

2.      L’application des dispositions du paragraphe 1 est subordonnée à la condition que les revenus visés à l’article 1er paragraphe 1 qui sont imposables dans l’État membre où la personne physique n’est pas résidente, constituent au moins 75 % du revenu total imposable de celle-ci au cours de l’année fiscale.»

B –    La législation nationale

11.      La loi estonienne relative à l’impôt sur le revenu datant de 1999, dans la version applicable à la date de l’avis motivé de la Commission, à savoir en 2008, est libellée comme suit (5):

«Article 1er. Objet de l’impôt

(1)      L’impôt sur le revenu est prélevé sur le revenu du contribuable, une fois que les abattements autorisés par la loi ont été effectués.

[…]»

«Article 2. Contribuable

(1)      L’impôt sur le revenu visé à l’article 1er, paragraphe 1, est acquitté par les personnes physiques et les personnes morales non-résidentes qui perçoivent des revenus imposables.

[…]»

«Article 19. Aliments, pensions, bourses, allocations, primes, gains de loterie, indemnités

[…]

(2)      L’impôt sur le revenu est prélevé sur les pensions, les allocations, les bourses, les récompenses culturelles et sportives, scientifiques, les gains de loterie, les allocations perçues au titre de la loi sur les allocations parentales, ainsi que sur les indemnités et les ‘per diem’ liés à des déplacements sportifs. […]»

«Article 23. Abattement à la base

«Pendant une période d’imposition, une personne physique résidente peut déduire de son revenu:

1)      27 000 EEK en 2008;

[…]»

«Article 23[2]. Abattement supplémentaire en cas de pension

Si une personne physique résidente perçoit une pension versée par un État contractant au titre de la loi, une pension par capitalisation obligatoire prévue par la législation de cet État ou une pension découlant d’un accord de sécurité sociale, un abattement supplémentaire correspondant au montant de ces pensions est appliqué au revenu de la personne, dans la limite maximale, toutefois, de 36 000 EEK pendant une période d’imposition.»

«Article 28[3]. Déductions sur le revenu d’un résident d’un État membre de l’Union européenne

Une personne physique résidant dans un autre État de l’Union européenne peut également appliquer les déductions visées au présent chapitre à son revenu imposable en Estonie, pour autant qu’elle perçoit au moins 75 % de son revenu imposable en Estonie pendant une période d’imposition et qu’elle présente une déclaration d’impôt sur le revenu d’une personne physique résidente. On entend par revenu imposable le revenu avant déductions conformément à la législation de l’État concerné.»

«Article 29. Revenu imposable du non-résident

[…]

(9)      L’impôt sur le revenu est prélevé sur les pensions et les bourses, les récompenses culturelles, sportives et scientifiques, les allocations, les allocations de chômage, les gains de loterie versés dans les conditions prévues à l’article 19, paragraphes 2 et 3, sur les allocations reçues au titre de la loi sur les allocations parentales, sur les aliments et les pensions alimentaires visés à l’article 19, paragraphe 1, qui sont versés à un non-résident par l’État estonien, les collectivités locales ou un résident. L’impôt sur le revenu est perçu sur les indemnités d’assurances versées dans les conditions prévues aux articles 20 et 21 à un non-résident par la caisse d’assurance maladie estonienne, la caisse d’assurance chômage estonienne ou une société d’assurance résidente, et sur les paiements versés par un fonds de pension enregistré en Estonie.

[…]»

«Article 41. Paiements sur lesquels est retenu un impôt sur le revenu

[…]

(6)      Les indemnités d’assurances, les pensions, les paiements provenant d’un fonds de pension, les bourses, les gains de loterie, les aliments, les pensions alimentaires, les allocations versées au titre de la loi sur les allocations familiales (article 19, paragraphes 1 et 2, article 20, paragraphes 1 à 3, article 20[1], article 21, paragraphe l, et article 29, paragraphe 9) ou d’autres paiements qui sont soumis à l’impôt sur le revenu, versés à des non-résidents ou à une personne physique résidente, à l’exception des paiements précisés au point 12;

[…]»

«Article 42. Déductions sur la retenue d’impôt sur le revenu

[…]

(1[1])      Dans le cas d’une pension versée à une personne physique résidente par l’État estonien conformément à la loi et d’une pension par capitalisation obligatoire prévue par la loi sur les pensions par capitalisation, un abattement supplémentaire (article 23[2]), équivalent au montant de cette pension, est appliqué, avant le calcul de la retenue d’impôt, pour autant, toutefois, que cet abattement ne dépasse pas, par mois civil, un douzième du montant prévu à l’article 23[2].

[…]»

III – La procédure précontentieuse

12.      La Commission a reçu une plainte d’une personne de nationalité estonienne résidant en Finlande au sujet de l’imposition sur le revenu de la pension qui lui est versée par la République d’Estonie. L’intéressée déplorait la non-application, en ce qui la concerne, du seuil de l’abattement à la base prévu pour les résidents ainsi que du seuil de l’abattement supplémentaire prévu pour les résidents qui perçoivent une pension.

13.      Cette personne, après avoir atteint l’âge de la retraite en Estonie, s’est installée en Finlande où elle a travaillé, ce qui lui a permis d’y bénéficier aussi d’une pension de retraite. Ainsi, elle perçoit deux pensions, en provenance l’une de l’Estonie et l’autre de la Finlande, qui sont d’un montant presque égal. La pension provenant d’Estonie donne lieu à la perception d’un impôt sur le revenu, contrairement à celle provenant de Finlande (6).

14.      En effet, eu égard au niveau très faible du revenu total de la personne intéressée, qui ne dépasse pas le seuil de l’abattement à la base prévu pour les personnes résidant en Finlande, elle ne supporte pas d’impôt dans cet État membre. Par conséquent, lors de la détermination de l’impôt sur le revenu dû en Finlande, elle ne peut pas bénéficier d’un crédit d’impôts qui tiendrait compte de l’impôt payé en Estonie au titre de la pension reçue de ce dernier État.

15.      Au vu de ces éléments, la Commission a considéré que, dans ce pays, la charge fiscale supportée par les non-résidents qui se trouvaient dans une situation analogue à celle de la personne ayant déposé une plainte était plus élevée qu’elle ne le serait si ceux-ci percevaient la totalité de leurs revenus au titre de la pension d’un seul et même État membre, que ce soit la République de Finlande ou la République d’Estonie. Elle a estimé que le revenu perçu globalement par un tel contribuable au titre de ses pensions en Estonie et en Finlande ne dépasserait que légèrement le seuil d’exonération des pensionnés résidant en Estonie, si les articles 23 et 23[2] de la loi estonienne relative à l’impôt sur le revenu lui étaient applicables.

16.      Elle a donc adressé, le 4 février 2008, une lettre de mise en demeure à la République d’Estonie, dans laquelle elle l’a invitée à lui faire parvenir ses observations quant à l’éventuelle incompatibilité des dispositions de la législation nationale sur l’imposition des pensions versées aux non-résidents avec l’article 39 CE et avec l’article 28 de l’accord EEE.

17.      Dans une lettre du 9 avril 2008, la République d’Estonie s’est opposée au point de vue de la Commission en faisant valoir que sa législation permettait de soumettre au même régime d’imposition que les résidents ceux des non-résidents qui perçoivent depuis l’Estonie la majorité de leurs revenus, c’est-à-dire au moins 75 % de ceux-ci. Selon elle, dans les autres cas, il reviendrait à l’État dans lequel réside la personne concernée de garantir l’imposition appropriée de celle-ci.

18.      Le 17 octobre 2008, la Commission a adressé à la République d’Estonie un avis motivé, aux termes duquel elle l’a invitée à prendre les mesures requises pour se conformer à ses indications, dans un délai de deux mois à compter de la réception dudit avis.

19.      Par réponse du 18 décembre 2008, la République d’Estonie a marqué son désaccord avec les griefs avancés par la Commission en ce qui concerne l’incompatibilité entre la loi estonienne relative à l’impôt sur le revenu et l’article 39 CE. En revanche, elle a reconnu que celle-ci contenait des lacunes par rapport à l’article 28 de l’accord EEE et elle s’est déclarée prête à étendre le champ d’application de l’article 28[3] de ladite loi également aux ressortissants des États membres de l’Espace économique européen.

20.      Estimant que la situation demeurait insatisfaisante, la Commission a introduit le présent recours.

IV – La procédure devant la Cour

21.      Par sa requête déposée le 22 janvier 2010, la Commission a demandé à la Cour de «constater que la République d’Estonie ne s’est pas conformée aux obligations découlant de l’article 45 [TFUE] et de l’article 28 de l’accord EEE, car sa législation ne prévoit pas d’accorder un abattement individuel aux non-résidents dont le revenu total est si faible qu’ils bénéficieraient d’un abattement s’ils étaient des contribuables résidents».

22.      La République d’Estonie a conclu à l’irrecevabilité du recours ou, à défaut, au rejet de celui-ci, en se fondant sur une interprétation différente des dispositions visées, ainsi qu’à la condamnation de la Commission aux dépens.

23.      Le Royaume d’Espagne, la République portugaise, ainsi que le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord, ont déposé des mémoires en intervention venant au soutien des prétentions de la République d’Estonie.

24.      La République fédérale d’Allemagne et le Royaume de Suède ont été admis à intervenir et à présenter leurs observations au cours de la procédure orale, aux fins de soutenir les conclusions de l’État membre défendeur.

25.      Lors de l’audience qui s’est tenue le 15 septembre 2011, la Commission et la République d’Estonie, ainsi que le Royaume d’Espagne et le Royaume de Suède ont présenté des observations orales.

V –    Analyse du recours en manquement

A –    Sur la recevabilité du recours

26.      La République d’Estonie a sollicité, à titre principal, que la Cour rejette la requête de la Commission comme étant irrecevable.

27.      Deux parties intervenantes, à savoir le Royaume d’Espagne et la République portugaise, ont également invoqué l’irrecevabilité du recours en manquement introduit contre la République d’Estonie.

1.      Sur l’exception d’irrecevabilité fondée sur une formulation équivoque du recours

28.      Dans son mémoire en duplique, la République d’Estonie, soutenue de ce chef par le Royaume d’Espagne, a soulevé une exception d’irrecevabilité tirée du manque de clarté des écritures de la Commission. La défenderesse a argué que la requérante n’avait pas indiqué de façon explicite dans quels cas un État devrait appliquer un abattement fiscal aux résidents d’un autre État membre et, ainsi, comment il aurait pu être mis fin au manquement reproché. Elle a fait valoir que dans sa requête, la Commission avait déclaré que le critère d’application pertinent tiendrait au fait que le revenu mondial des non-résidents soit inférieur au seuil de l’abattement prévu par l’État source, tandis que dans sa réplique, celle-ci aurait préconisé de retenir le seuil de l’abattement en vigueur dans l’État de résidence. Le gouvernement estonien a invoqué que la contradiction ainsi relevée dans les griefs avancés par la Commission entachait son recours en manquement d’une équivoque portant sur un élément jugé indispensable pour comprendre l’objet de la demande, déficience qui devrait conduire la Cour à déclarer irrecevable ledit recours.

29.      En revanche, la Commission a affirmé que ses prétentions seraient sans défaut de limpidité ni contradiction, en précisant être d’avis qu’un État membre n’a l’obligation de tenir compte que du niveau minimal de revenus qu’un contribuable doit percevoir pour être considéré comme apte à participer aux dépenses publiques en vertu des dispositions de son propre ordre juridique, et non du niveau retenu dans les autres États membres concernés.

30.      Lors de l’audience, la Commission a par ailleurs objecté que l’évocation d’une cause d’irrecevabilité par la partie défenderesse seulement au stade de son mémoire en duplique, et non antérieurement, ne serait pas conforme aux dispositions du statut de la Cour de justice de l’Union européenne. Toutefois, la République d’Estonie a souligné qu’elle avait déjà fait allusion dans son mémoire en défense à un manque de clarté de la requête quant à l’éventuelle prise en compte du seuil d’abattement de l’État de résidence.

31.      Je rappelle que l’article 38, paragraphe 1, sous c), du règlement de procédure de la Cour, lu en combinaison avec l’article 21 du statut de la Cour, impose, au titre des conditions de recevabilité, que la requête saisissant cette juridiction d’un recours en manquement contienne l’objet du litige et l’exposé sommaire des moyens invoqués par le requérant.

32.      Il est de jurisprudence qu’il incombe à la Commission d’indiquer, dans les conclusions de toute requête déposée au titre de l’article 258 TFUE, les griefs précis sur lesquels la Cour est appelée à se prononcer. Ces conclusions doivent être formulées de manière non équivoque afin d’éviter que la Cour ne statue ultra petita ou bien n’omette de statuer sur un grief (7). Des contradictions (8), de même qu’une affirmation lapidaire (9), qui sont contenues dans l’exposé des moyens soulevés par la Commission à l’appui d’un recours en manquement, ne satisfont pas aux exigences des deux articles susvisés. Si celles-ci ne sont pas remplies, la sanction encourue est l’irrecevabilité des griefs se basant sur des éléments insuffisants et non clairs, dès lors qu’ils ne permettent pas de faire ressortir tous les éléments essentiels du manquement (10).

33.      Ainsi, un recours en manquement qui repose sur une argumentation ambiguë, voire contradictoire, doit être déclaré irrecevable car celle-ci prive tant l’État membre mis en cause que la Cour d’appréhender exactement la portée de la violation du droit de l’Union qui est reprochée. Or, cette prise de connaissance est nécessaire à la fois pour que ledit État puisse faire valoir utilement ses moyens de défense et pour que la Cour puisse vérifier l’existence du manquement allégué (11).

34.      En l’espèce, il m’apparaît, à la lecture de la requête et de ses autres écritures, que la Commission n’a pas formulé de manière claire et précise son grief portant sur le seuil d’abattement à prendre en compte par un État membre dans lequel des revenus sont perçus et qui entend soumettre à un impôt direct des contribuables ne résidant pas sur son territoire. La République d’Estonie a illustré, moyennant divers exemples détaillés dans son mémoire en duplique, le manque de précision intrinsèque de la requête, ainsi que les discordances qui existent concernant ce grief entre celle-ci et le mémoire en réplique de la Commission. L’objection soulevée par cet État est donc bien fondée selon moi.

35.      J’ajoute que même l’objet de son recours n’a pas été cerné de façon précise par la Commission. En effet, c’est seulement au cours des débats tenus à l’audience, alors qu’il s’agit pourtant là d’un point essentiel, que la requérante a défini la portée de son action. En réponse aux questions lui ayant été posées, elle a affirmé que, malgré l’approche globale en apparence retenue dans la requête, l’action en manquement devait être comprise non pas comme portant sur la situation de tous les contribuables qui perçoivent un revenu très faible en Estonie (12) et résident dans un autre État membre, mais comme étant restreinte à la situation des non-résidents qui sont titulaires de pensions de retraite en Estonie. Néanmoins, une confusion s’avère tout à fait possible au vu du libellé extensif de l’acte ayant saisi la Cour (13). D’ailleurs, les observations présentées par la République d’Estonie, ainsi que par les États membres qui sont intervenus à son soutien, ont toutes été basées sur une conception du recours selon laquelle celui-ci ne se limitait pas aux non-résidents retraités, mais s’étendait à tous les contribuables non-résidents en général.

36.      Sachant que la Cour peut examiner d’office si les conditions prévues à l’article 258 TFUE pour l’introduction d’un tel recours sont remplies (14), il me paraît nécessaire qu’elle fasse usage de ce pouvoir pour sanctionner les défaillances de la Commission en la cause. Il convient de ne pas perdre de vue qu’en raison de l’importance attachée par le traité FUE à l’action en manquement dont dispose l’Union contre les États membres, cette procédure a été entourée de garanties qui peuvent d’autant moins être négligées que ladite action a pour conséquence l’obligation faite aux États membres de prendre les mesures que comporte l’exécution de l’arrêt de la Cour (15).

37.      Dans le cadre d’une procédure telle que celle-ci, il est fondamental que l’État membre auquel il est reproché un manquement sache exactement ce qu’il aurait dû faire. Or, les indications ayant ici été données par la Commission à la République d’Estonie n’étaient pas suffisamment limpides pour lui permettre de préparer sa défense sans difficultés. En outre, la Cour ne se trouve pas, dans ce contexte, pleinement en mesure de juger si les moyens invoqués sont ou non bien fondés.

38.      Dès lors que le présent recours en manquement repose sur un énoncé des griefs qui est à la fois incohérent et imprécis, à mon avis, il ne respecte pas les conditions susmentionnées et devrait donc être déclaré irrecevable dans son intégralité pour ce motif.

2.      Sur l’exception d’irrecevabilité fondée sur la recommandation 94/79

39.      Selon la République portugaise, la Commission aurait eu une attitude contradictoire, qui porterait atteinte aux principes de bonne administration, de coopération loyale et de protection de la confiance légitime, en ce qu’elle a introduit un recours en manquement contre la République d’Estonie en faisant abstraction du fait que la teneur de la législation critiquée était conforme à la recommandation 94/79, dans laquelle la requérante avait défini ses propres orientations en la matière, sans qu’un quelconque acte ultérieur ait révoqué cette recommandation ou s’y soit substitué.

40.      De même, le Royaume d’Espagne soutient que la Commission aurait violé le principe de la confiance légitime dès lors qu’elle aurait fait naître dans le chef des États membres une attente tenant à ce que le respect par eux des critères énoncés dans la recommandation 94/79 induirait qu’il ne puisse pas leur être reproché de manquement. Il ajoute qu’en changeant d’avis sans en expliquer la raison et sans avoir adopté une nouvelle recommandation, l’institution aurait aussi enfreint le principe de sécurité juridique, qui protège les États membres, sachant que l’éventuelle reconnaissance d’un manquement par la Cour est susceptible d’entraîner la responsabilité de l’État mis en cause.

41.      Ces deux parties intervenantes soutiennent que la sanction d’un tel agissement de la Commission devrait consister dans l’irrecevabilité ou le rejet du recours que celle-ci a introduit.

42.      En réponse, la Commission objecte que le Royaume d’Espagne et la République portugaise ont excipé de moyens d’irrecevabilité n’ayant pas été invoqués en tant que tels par l’État membre défendeur. S’appuyant sur l’article 40, quatrième alinéa, du protocole sur le statut de la Cour et l’article 93, paragraphe 4, du règlement de procédure, ainsi que sur la jurisprudence (16), elle affirme que ces parties intervenantes ne peuvent pas soulever une exception d’irrecevabilité nouvelle et que la Cour ne serait donc pas tenue d’examiner lesdits moyens.

43.      Il convient de rappeler que l’article 40, deuxième alinéa, du protocole sur le statut de la Cour énonce que le droit d’intervenir à un litige soumis à cette juridiction appartient à toute personne justifiant d’un intérêt à la solution dudit litige. En vertu du quatrième alinéa de cet article, «[l]es conclusions de la requête en intervention ne peuvent avoir d’autre objet que le soutien des conclusions de l’une des parties». De surcroît, l’article 93, paragraphe 4, du règlement de procédure impose que «[l]’intervenant accepte le litige dans l’état où il se trouve lors de son intervention».

44.      Il est de jurisprudence que si ces dispositions ne s’opposent pas à ce qu’un intervenant fasse état d’arguments différents de ceux de la partie qu’il soutient, c’est néanmoins à la condition que, d’une part, ils ne modifient pas le cadre du litige et, d’autre part, l’intervention vise toujours au soutien des conclusions présentées par cette partie (17). En outre, il est constant qu’une partie intervenante n’a pas la qualité requise pour soulever une exception d’irrecevabilité non formulée dans les conclusions de la partie défenderesse (18).

45.      En l’espèce, il est vrai que le Royaume d’Espagne et la République portugaise ont soulevé une exception d’irrecevabilité tendant à appuyer les prétentions de la partie défenderesse, qui a elle-même soutenu que la requête était irrecevable.

46.      Toutefois, la République d’Estonie s’est prévalue de l’irrecevabilité du recours en manquement en se fondant sur un motif autre que celui qui est avancé par ces deux intervenants. Il m’apparaît donc que, alors qu’ils n’ont pas la qualité requise pour ce faire, le Royaume d’Espagne et la République portugaise ont soulevé une exception d’irrecevabilité dont le fondement est différent de celle relevée par la partie qu’ils soutiennent et dont l’examen aurait pour effet de modifier l’objet du litige tel qu’il a été défini dans la requête et dans les mémoires tant de la Commission que de la partie défenderesse.

47.      Or, il me semble envisageable qu’un État membre auquel un manquement est reproché ne souhaite pas soulever une exception d’irrecevabilité fondée sur des moyens qu’il voudrait sciemment ne pas évoquer. Les États membres autorisés à intervenir dans la procédure le concernant ne sauraient, en introduisant des arguments complémentaires dans le cadre du litige, avoir la faculté de contraindre l’État défendeur à prendre position sur des points qu’il n’avait pas l’intention de débattre.

48.      Ce n’est que s’agissant d’une fin de non-recevoir ayant un caractère d’ordre public que la Cour apprécie d’office la recevabilité de la requête, en vertu de l’article 92, paragraphe 2, du règlement de procédure (19). Ainsi, la Cour ne procède à l’examen du bien-fondé d’une exception d’irrecevabilité soulevée par une partie intervenante, et non par la partie défenderesse, que si cette exception intéresse l’ordre public (20).

49.      Tel ne me paraît pas être le cas de l’exception d’irrecevabilité que les gouvernements portugais et espagnol ont ici mise en exergue, même si ce dernier a soutenu que la violation de principes généraux du droit de l’Union constitue une question d’ordre public que la Cour pourrait (21) et même devrait (22) apprécier d’office. À mon avis, l’ordre public ne serait en jeu que si le non-respect de tels principes portait atteinte à une règle à caractère procédural, et non de fond, considérée comme étant une garantie fondamentale à protéger par la Cour.

50.      Au vu de ces éléments, j’estime que l’exception d’irrecevabilité invoquée par des parties intervenantes doit être écartée, contrairement à celle soulevée par la partie défenderesse, qui devrait conduire la Cour à déclarer irrecevable le présent recours en manquement à cause de son manque de clarté.

51.      Toutefois, je formulerai des propositions à titre subsidiaire, afin de couvrir l’hypothèse où la Cour estimerait, pour sa part, qu’il y a lieu de statuer sur l’existence d’un manquement.

B –    Sur le fond

52.      Au cas où la Cour considérerait que le recours introduit dans la présente affaire est recevable, le manquement pouvant être reproché à la République d’Estonie devrait, à mon avis, concerner uniquement la taxation des revenus de personnes retraitées ayant exercé leur liberté de circuler dans l’Union en tant que travailleurs et percevant des pensions en provenance de deux États membres. Une telle limitation de la portée du recours résulte du fait que, lors de l’audience, la Commission a indiqué qu’en dépit du libellé extensif de ses propres écritures, leur objet devait être compris comme étant focalisé sur cette problématique. Il s’ensuit que la requête devrait, selon moi, être rejetée comme étant non motivée pour le surplus, à savoir en ce qu’elle porte sur des contribuables autres que ceux relevant de ladite catégorie de personnes.

1.      Sur la violation de l’article 45 TFUE

a)      La défense fondée sur la recommandation 94/79

53.      Selon la République d’Estonie, en introduisant un recours en manquement à son encontre, la Commission n’aurait pas respecté la teneur de sa recommandation 94/79. La défenderesse fait valoir que l’institution y aurait indiqué que l’égalité de traitement des résidents et des non-résidents s’imposerait uniquement lorsque le non-résident perçoit, durant l’année fiscale en cause, au moins 75 % de ses revenus imposables dans l’État source, comme cela a été prévu sur le territoire estonien en l’occurrence.

54.      Au vu des dispositions nationales en cause lues en combinaison notamment avec l’article 2 de la recommandation 94/79 (23), il me semble clair que la République d’Estonie s’est véritablement inspirée des règles contenues dans cet acte. Toutefois, suffit-il que le législateur d’un État membre ait reproduit le critère indiqué dans une recommandation pour qu’il soit exonéré de tout risque de poursuites au titre d’un recours en manquement? Je ne le pense pas.

55.      La Commission rétorque qu’un acte tel que la recommandation 94/79 ne produit pas d’effets contraignants et qu’il ne peut pas avoir pour objet de compléter les règles de droit primaire sur la libre circulation des personnes.

56.      Je rappelle que, conformément à l’article 249, cinquième alinéa, CE, les actes non décisoires, tels que la recommandation 94/79, «ne lient pas» leurs destinataires.

57.      Toutefois, comme le souligne la République d’Estonie, il ressort de la jurisprudence que même si les recommandations ne sont pas en mesure de créer des droits que les particuliers peuvent invoquer devant les juges des États membres, elles ne sont cependant pas dépourvues de tout effet juridique à l’égard de l’interprétation d’une législation nationale qui, à l’instar de celle ici mise en cause, a été adoptée en lien avec le droit de l’Union, puisque lesdits juges sont tenus de les prendre en considération en vue de la solution des litiges qui leur sont soumis à ce sujet (24).

58.      De surcroît, les recommandations peuvent avoir des effets juridiques indirects s’il est considéré que l’institution qui en est l’auteur s’est liée elle-même d’une telle façon qu’elle a engendré une attente légitime pouvant être invoquée à l’occasion d’un contentieux. En l’espèce, la Commission affirme qu’en adoptant les dispositions contenues dans la recommandation 94/79, elle n’a pas entendu s’interdire d’introduire ultérieurement des recours en manquement dans le domaine couvert par celle-ci. En effet, il ressort clairement des troisième et quatrième considérants de ladite recommandation que l’avis qui est donné dans cet acte par la Commission n’affecte pas la poursuite par elle d’une politique active en matière de procédures d’infraction afin de garantir que les principes fondamentaux du traité FUE soient respectés.

59.      À mon avis, la circonstance que des points de repère aient été donnés par la Commission dans la recommandation 94/79 n’a pas d’incidence sur le bien-fondé du présent recours. Le fait qu’un acte d’une telle nature existe ne saurait créer, dans le chef de l’État membre concerné ou des autres États membres, un espoir sérieux tenant à ce que les critères énoncés dans ladite recommandation constitueraient, s’ils sont reproduits dans le droit national, un gage d’exonération de toute poursuite, ainsi que la République d’Estonie et plusieurs parties intervenantes le laissent entendre.

60.      Il est de jurisprudence constante que la procédure visée à l’article 258 TFUE repose sur la constatation objective du non-respect par un État membre des obligations que lui imposent le traité ou un acte de droit dérivé. Il est sans pertinence de connaître les raisons ayant pu conduire l’État membre auquel le manquement allégué est imputable à agir ainsi (25). Partant, ni le principe de protection de la confiance légitime, qui a pour corollaire le principe de sécurité juridique, ni le principe de coopération loyale ne sauraient, dans un cas tel que celui de l’espèce, être invoqués par un État membre pour faire obstacle à la constatation objective que celui-ci a méconnu des obligations résultant du droit de l’Union, car l’admission de telles justifications irait à l’encontre de l’objectif poursuivi par la procédure de recours en manquement (26).

61.      J’observe que le fait qu’une mesure nationale puisse éventuellement être conforme, ou du moins ne pas être contraire, à une disposition du droit dérivé n’a pas pour effet de faire échapper cette mesure aux dispositions du traité FUE, et ce même si ladite disposition a des effets contraignants (27), donc a fortiori si elle n’a pas un tel caractère. En l’occurrence, le constat que la législation estonienne est calquée sur la teneur de la recommandation 94/79 me paraît sans incidence sur l’appréciation du bien-fondé ou non du recours en manquement au regard de l’article 45 TFUE, car la Commission n’a pas le pouvoir, moyennant l’adoption d’une recommandation, de modifier la portée des obligations découlant du traité.

b)      La défense fondée sur la jurisprudence de la Cour

62.      À titre liminaire, j’indique que je considère que dans le cadre de la présente affaire, la Commission ne sollicite pas que la Cour opère un revirement de sa jurisprudence en la matière, telle qu’elle résulte notamment de l’arrêt Schumacker (28). Il s’agit plutôt de s’interroger sur l’application à une situation nouvelle des principes définis auparavant.

63.      La Cour a dit pour droit itérativement que des dispositions nationales qui empêchent ou dissuadent un travailleur ressortissant d’un État membre de quitter son État d’origine pour exercer son droit à la libre circulation constituent, dès lors, des entraves à cette liberté définie à l’article 45 TFUE, même si elles s’appliquent indépendamment de la nationalité des travailleurs concernés (29).

64.      En matière d’impôts directs, il ne peut exister une entrave résultant d’une discrimination qui serait exercée à l’encontre de contribuables non-résidents que si la situation de ces derniers est objectivement comparable à celle des contribuables résidents aux fins de l’application de la mesure fiscale concernée (30).

65.      Or, en règle générale, ces deux catégories de personnes se trouvent dans des situations différentes. En effet, la Cour a jugé que la situation d’un résident est spécifique, dans la mesure où le plus souvent l’essentiel de ses ressources est centralisé dans l’État membre où à la fois il réside et perçoit ses revenus, ce dont il résulte que cet État dispose généralement de toutes les informations nécessaires pour apprécier la capacité contributive globale de l’intéressé, compte tenu de sa situation individuelle et familiale. Au contraire, un non-résident centralise habituellement la part prépondérante de ses intérêts, tant financiers que personnels, dans un État membre autre que celui qui entend percevoir un impôt sur ses revenus, à savoir l’État où il s’est installé. Faute de comparabilité, il n’y a pas de discrimination possible dans un tel contexte et l’article 45 TFUE ne s’oppose pas, en principe, à ce que les contribuables résidents bénéficient d’un traitement fiscal plus favorable que celui dévolu aux non-résidents (31).

66.      En revanche, les situations en question peuvent être comparées, et partant un risque de discrimination existe, dans le cas particulier où le non-résident ne perçoit pas de revenu significatif dans l’État de sa résidence et tire la quasi-totalité de ses ressources imposables d’une activité ayant été exercée dans l’État source. Dans ce cas de figure, l’État où un tel contribuable réside n’est pas en mesure de lui accorder les avantages résultant de la prise en compte de sa situation personnelle et familiale, pas davantage que l’État dans lequel a été accompli le travail dont découle la pension de retraite (32).

67.      J’observe que dans les arrêts précités Wallentin et Turpeinen, l’État de résidence n’avait pas pu prendre en compte les conséquences découlant de la situation individuelle du contribuable car, dans la première affaire, les revenus en question n’étaient par nature pas imposables et, dans la seconde affaire, ledit État n’avait pas la compétence fiscale requise en application d’une convention bilatérale. La Cour a conclu que dans un tel cas, l’État source était tenu de ne pas appliquer son propre système fiscal, c’est-à-dire une taxation à la source forfaitaire et sans abattements, à l’égard des non-résidents d’une façon qui serait susceptible de conduire à une imposition plus lourde pour eux que pour les résidents.

68.      Le présent recours en manquement se différencie de ces précédents jurisprudentiels en ce qu’en l’espèce, la répartition des revenus imposables de la personne concernée s’effectue presque à 50/50, ce dont il résulte qu’il n’existe pas une quasi-totalité des revenus dans l’un ou l’autre des États membres en cause. Il est vrai que dans l’arrêt Wallentin, précité, la situation du contribuable était économiquement proche de celle de la personne ayant ici déposé une plainte auprès de la Commission, puisqu’il percevait des revenus d’un montant similaire dans deux États membres, mais elle était formellement différente, car l’intéressé n’avait de revenu imposable que dans l’État source dès lors que les aides financières qu’il recevait dans l’État de résidence échappaient par nature à toute taxation.

69.      À mon avis, l’élément le plus atypique des circonstances de la présente instance tient à ce que celle-ci est relative à la situation d’une personne inactive ayant cumulé des droits à la retraite dans divers États membres, sans que l’une ou l’autre pension soit clairement plus importante, et non à celle d’un actif ayant exercé un emploi dans deux États membres pendant l’année fiscale en cause, comme c’était le cas dans la plupart des affaires soumises jusqu’à présent à l’examen de la Cour.

70.      Les conventions internationales adoptées en matière d’imposition des revenus apportent des enseignements intéressants aux fins de lever les obstacles qui freinent les mouvements transfrontaliers des personnes, et en particulier des salariés, auxquels les retraités peuvent être assimilés. Or, il m’apparaît que dans le droit fiscal international, les revenus liés aux pensions de retraite sont traités comme une catégorie séparée des autres formes de revenus.

71.      Un exemple illustratif peut être tiré de l’article 18 du modèle de convention fiscale de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) (33) qui est relatif aux «pensions» (34) et prévoit à cet égard des règles modèles rédigées en ces termes: «[s]ous réserve des dispositions du paragraphe 2 de l’article 19 [portant sur les fonctions publiques], les pensions et autres rémunérations similaires, payées à un résident d’un État contractant au titre d’un emploi antérieur, ne sont imposables que dans cet État». Les rédacteurs de ladite convention se sont inspirés de la même conception générale de la politique fiscale que celle figurant dans l’arrêt Schumacker, précité. Concernant les contribuables retraités, cette position repose selon moi sur deux raisons: d’une part, l’État de résidence est celui qui possède le mieux toutes les informations utiles concernant la situation personnelle de l’intéressé, et, d’autre part, les retraités sont souvent des personnes qui engendrent des charges supplémentaires pour le pays dans lequel elles résident (35).

72.      À l’instar de l’orientation prise dans cette convention internationale, j’estime que la situation des retraités diffère de celle des travailleurs actifs, dont le sort peut évoluer en fonction de leur lieu de travail et dont les revenus sont généralement plus élevés, et qu’il convient donc d’appliquer des règles particulières aux revenus tirés des pensions. La jurisprudence antérieure de la Cour concerne principalement la situation d’actifs qui ont exercé dans divers États membres durant l’année fiscale considérée, tandis que la présente affaire porte sur un inactif qui a cumulé, au long de sa carrière et donc sur plusieurs années, des droits à pension de retraite dans deux États membres. En l’espèce, je considère qu’il n’est pas question d’envisager la comparabilité des situations des résidents et des non-résidents par rapport à une année fiscale donnée, comme c’était le cas dans les affaires concernant des actifs. La situation en cause se prolonge dans le temps, actuellement et dans les années à venir, sachant que la personne concernée ne travaille plus et ne circule plus.

73.      Selon moi, l’analyse de la comparabilité de telles situations doit non pas être effectuée de façon abstraite, mais tenir compte de l’objectif recherché par les dispositions nationales concernées. C’est ledit objectif qui permet de déterminer si la différence de traitement ayant un caractère transfrontalier se rapporte à des situations qui sont ou non objectivement comparables (36).

74.      Comme la Commission le relève, la législation estonienne cherche à dispenser les contribuables dont les revenus sont trop faibles de l’obligation de participer au financement des dépenses publiques.

75.      En pratique, dans le cas des personnes retraitées, cela résulte de l’application combinée de l’abattement de base, prévu par l’article 23 de la loi estonienne relative à l’impôt sur le revenu, et de l’abattement supplémentaire en cas de pension, prévu par l’article 23[2] de cette même loi. Toutes les personnes ayant de faibles revenus profitent du premier abattement, mais seuls les contribuables retraités peuvent bénéficier du second. À l’évidence, l’exonération résultant de l’application dudit abattement supplémentaire est justifiée par le fait que les retraités, compte tenu de leur âge ou de leur état de santé, se trouvent en général hors du marché du travail et, par conséquent, ne sont pas en mesure d’augmenter leurs revenus.

76.      Force est de constater que la capacité d’un contribuable retraité de contribuer au financement des dépenses publiques de la République d’Estonie n’augmente pas du seul fait de son déplacement dans un autre État membre. Pour cette raison, je partage l’avis de la Commission selon lequel les contribuables retraités non-résidents qui ont un revenu modeste se trouvent dans une situation comparable à celle des personnes vivant en Estonie, malgré la différence tenant au lieu de leur résidence.

77.      La question principale qui se pose ici est de savoir s’il y a une restriction dans l’hypothèse où un revenu qui ne devrait être imposable ni selon la législation de l’État membre source, ni selon celle de l’État membre de résidence, se trouve taxé seulement parce que le contribuable a exercé sa liberté de circulation d’une façon telle qu’il en résulte la perception de deux pensions ayant quasiment la même valeur. Il est, en effet, possible que la situation d’un contribuable risque d’être détériorée s’il fait le choix de ne pas retourner dans l’État membre dont il est originaire après avoir cessé de travailler dans un autre État membre. Or, je pense que de telles circonstances sont susceptibles d’être assez fréquentes concernant des ressortissants des États membres ayant adhéré à l’Union en 2004 ou en 2007.

78.      La Commission fait preuve de bon sens quand elle soutient que la République d’Estonie devrait faire un calcul hypothétique pour déterminer quel serait le résultat, en ce qui concerne la possibilité pour le contribuable retraité non-résident de profiter de l’abattement, si ses revenus finlandais étaient ajoutés à ses revenus estoniens.

79.      Une entrave à la libre circulation des travailleurs n’est pas créée par le fait en soi de taxer une pension, même si la pension estonienne en cause ne serait pas taxée de la même façon en Finlande, vu son faible montant. Cependant, l’entrave existe du fait des conséquences fiscales de la combinaison des deux pensions, qui ont quasiment la même valeur, parce que la République d’Estonie soumet une pension à l’impôt d’une façon plus importante qu’elle ne l’aurait fait si le contribuable concerné avait résidé sur le territoire national ou si ladite pension avait représenté au moins 75 % des revenus mondiaux du contribuable. Partant, la législation estonienne pénalise les personnes qui ont fait usage de leur liberté de circulation dans divers États membres pour travailler successivement dans divers États membres sans revenir vivre en Estonie.

80.      Je ne pense pas que l’État membre dans lequel un individu reçoit une pension soit obligé d’examiner systématiquement quels sont les revenus mondiaux de l’intéressé, mais j’estime que s’il s’agit d’un citoyen de l’Union ayant fait usage de sa liberté de circulation conformément à l’article 45 TFUE et bénéficiant d’un droit à pension dans ledit État membre pour y avoir travaillé tout en y résidant, il doit être considéré comme étant dans une situation comparable à celle des contribuables qui résident encore dans cet État au jour de l’imposition et donc bénéficier d’un traitement égal.

81.      Une entrave de ce type n’a aucune justification, selon moi, quand l’État membre de résidence prend déjà en compte le revenu total de l’intéressé. En effet, dans ce cas de figure, il n’existe pas des circonstances qui permettraient qu’une personne ayant des revenus en provenance de deux États membres puisse abuser du système fiscal, et notamment de la double possibilité d’abattement, pour échapper à une quelconque imposition de son revenu.

82.      J’observe qu’en pratique, la personne plaignante dispose, semble-t-il, de ressources proches des minima sociaux. Il me paraît objectivement incompréhensible qu’un individu ayant un revenu aussi modeste se trouve soumis en Estonie à une imposition standard, c’est-à-dire sans pouvoir bénéficier des abattements prévus par la législation nationale.

83.      Ainsi, je propose, à titre subsidiaire, à la Cour de dire que le manquement reproché à la République d’Estonie est juridiquement constitué sur le fondement de l’article 45 TFUE.

2.      Sur la violation de l’article 28 de l’accord EEE

84.      L’article 28 de l’accord EEE prévoit que les États doivent veiller au respect de la libre circulation des travailleurs au sein de l’Espace économique européen, à savoir entre les 27 États membres de l’Union et les trois des quatre États membres de l’AELE qui ont adhéré audit accord.

85.      La Commission fait grief à la République d’Estonie de n’avoir pas respecté les engagements pris au titre dudit article de l’accord EEE pour les mêmes raisons qu’en ce qui concerne la violation alléguée de l’article 45 TFUE.

86.      Dans son mémoire en défense, la République d’Estonie indique qu’elle maintient le point de vue qu’elle a exprimé dans sa réponse à l’avis motivé de la Commission, à savoir que sa loi relative à l’impôt sur le revenu n’est pas contraire à l’article 28 de l’accord EEE. Elle estime à cet égard que la différence de traitement exercée à l’égard des non-résidents qui a été relevée par la Commission est à la fois pertinente et justifiée par rapport à cette disposition, de la même manière que par rapport à l’article 45 TFUE.

87.      Néanmoins, il est constant que la République d’Estonie a admis l’existence d’un manquement en ce qui concerne les obligations résultant de l’article 28 de l’accord EEE, contrairement à celles résultant de l’article 45 TFUE. En effet, ledit État membre a acquiescé à la nécessité de compléter l’article 28[3] de sa loi relative à l’impôt sur le revenu, afin d’étendre le champ d’application de ce texte également aux ressortissants de tous les États parties à l’accord EEE. Toutefois, la République d’Estonie n’y a pas procédé avant l’expiration du délai de deux mois imparti dans l’avis motivé.

88.      Il s’ensuit que, même si la République d’Estonie a persisté à contester l’infraction reprochée s’agissant du contenu des obligations qui découlent de l’article 28 de l’accord EEE, elle a reconnu, ne serait-ce que partiellement, l’existence d’un manquement commis à ce titre, en affirmant qu’elle veillerait à y mettre fin en modifiant la loi en cause. Elle a ainsi admis le bien-fondé du recours de la Commission, dans cette mesure.

89.      Au demeurant, dès lors que les dispositions de l’article 28 de l’accord EEE revêtent la même portée juridique que celle des dispositions, identiques en substance, de l’article 45 TFUE, les considérations ci-dessus développées concernant la violation de ce dernier texte sont transposables mutatis mutandis audit article 28, conformément à l’article 6 de l’accord EEE et à la nécessité d’une interprétation uniforme reconnue tant par la Cour de justice que par la Cour AELE (37).

VI – Sur les dépens

90.      En vertu de l’article 69, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

91.      La République d’Estonie a demandé la condamnation de la Commission aux dépens. Il y aura lieu de statuer en ce sens si, comme je le propose à titre principal, le recours en manquement est déclaré irrecevable.

92.      La Commission ayant conclu à la condamnation de la République d’Estonie aux dépens, il y aura lieu de faire droit à cette demande si le recours en manquement est accueilli et si, comme je le propose à titre subsidiaire, ledit État membre succombe en l’essentiel de ses moyens.

93.      Conformément à l’article 69, paragraphe 4, premier alinéa, du règlement de procédure, les États membres qui ont demandé l’autorisation d’intervenir au présent litige supporteront leurs propres dépens.

VII – Conclusion

94.      À la lumière des considérations qui précèdent, je propose à la Cour de statuer comme suit:

«1)      La Cour déclare irrecevable le recours en manquement introduit par la Commission européenne aux fins de faire constater qu’en appliquant la loi nationale relative à l’impôt sur le revenu, la République d’Estonie aurait manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 45 TFUE et de l’article 28 de l’accord sur l’Espace économique européen, du 2 mai 1992.

2)      La Commission européenne est condamnée aux dépens.

3)      La République fédérale d’Allemagne, le Royaume d’Espagne, la République portugaise, le Royaume de Suède et le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord supporteront leurs propres dépens.»

95.      À titre subsidiaire, pour le cas où la Cour ne suivrait pas cette proposition, je lui suggère de se prononcer de la façon suivante:

«1)      La Cour constate que la République d’Estonie a manqué aux obligations lui incombant en vertu de l’article 45 TFUE et de l’article 28 de l’accord sur l’Espace économique européen, du 2 mai 1992, en maintenant en vigueur sa loi relative à l’impôt sur le revenu dont il résulte que les retraités non-résidents ayant travaillé et résidé tant en Estonie que dans un autre État membre ne bénéficient d’un abattement pour faibles revenus que s’ils perçoivent au moins 75 % de leur revenu imposable en Estonie, alors que cet avantage fiscal leur serait accordé s’ils résidaient sur le territoire national. La Cour rejette le recours en manquement de la Commission pour le surplus en ce qu’il concerne d’autres catégories de contribuables non-résidents.

2)      La République d’Estonie est condamnée aux dépens.

3)      La République fédérale d’Allemagne, le Royaume d’Espagne, la République portugaise, le Royaume de Suède et le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord supporteront leurs propres dépens.»


1 —      Langue originale: le français.


2 —      En l’espèce, la date de l’avis motivé que la Commission a adressé à la République d’Estonie, qui définit le moment auquel doit être appréciée l’existence éventuelle du manquement, remonte au 17 octobre 2008 et est donc antérieure à l’entrée en vigueur du traité de Lisbonne, survenue le 1er décembre 2009. Néanmoins, il est constant que les circonstances susceptibles d’avoir donné lieu au manquement allégué ont continué au-delà de l’avis motivé et persistaient au jour du dépôt de la requête, introduite le 22 janvier 2010. En outre, dans cet acte ayant saisi la Cour, la Commission a visé non plus les dispositions du traité CE, mais celles du traité FUE. Il sera donc fait référence à ces dernières.


3 —      JO 1994, L 1, p. 3.


4 —      Recommandation de la Commission du 21 décembre 1993 relative à l’imposition de certains revenus obtenus par des non-résidents dans un État membre autre que celui de leur résidence (JO 1994, L 39, p. 22).


5 —      Tulumaksuseadus (RT I 1999, 101, 903; RT I 2008, 34, 208).


6 —      La République d’Estonie et la République de Finlande ont signé à Helsinki, le 23 mars 1993, une convention tendant à éviter la double imposition et à prévenir l’évasion fiscale en matière d’impôt sur le revenu et sur la fortune (RT II 1993, 37, 113), dont l’article 18 est applicable.


7 —      Voir, notamment, arrêts du 12 novembre 2009, Commission/Espagne (C-154/08, points 60 et 63 et jurisprudence citée), ainsi que du 14 janvier 2010, Commission/République tchèque (C-343/08, Rec. p. I-275, point 26 et jurisprudence citée).


8 —      Voir, notamment, arrêts du 15 juin 2006, Commission/France (C-255/04, Rec. p. I-5251, point 24); du 28 juin 2007, Commission/Espagne (C-235/04, Rec. p. I-5415, point 47), et du 11 septembre 2008, Commission/Grèce (C-305/06, point 46).


9 —      Arrêt du 16 juillet 2009, Commission/Pologne (C-165/08, Rec. p. I-6843, points 42 à 47).


10 —      Voir, notamment, arrêt du 12 octobre 2004, Commission/Royaume-Uni (C-431/02, points 25 à 29 et jurisprudence citée).


11 —      Voir, notamment, arrêts du 1er février 2007, Commission/Royaume-Uni (C-199/04, Rec. p. I-1221, points 21, 25 et 26 et jurisprudence citée), ainsi que du 12 février 2009, Commission/Pologne (C-475/07, point 44 et jurisprudence citée).


12 —      Je relève que la notion de «revenu» au sens de l’article 19, paragraphe 2, de la loi nationale relative à l’impôt sur le revenu est conçue de façon large par la République d’Estonie.


13 —      En ce sens, voir le dispositif de la requête, qui reprend en substance la partie finale de l’avis motivé, étant aussi observé que l’article 23[2] de la loi en cause, qui est relatif à l’abattement supplémentaire en cas de pension, n’est pas le seul visé par les motifs du recours en manquement.


14 —      Voir, notamment, arrêt Commission/Royaume-Uni (C-199/04, précité, point 20 et jurisprudence citée).


15 —      Arrêt du 10 mars 1970, Commission/Italie (7-69, Rec. p. 111).


16 —      Elle vise à ce titre l’arrêt du 15 juin 1993, Matra/Commission (C-225/91, Rec. p. I-3203).


17 —      Voir, notamment, arrêts du 8 juillet 1999, Chemie Linz/Commission (C-245/92 P, Rec. p. I-4643, point 32); du 8 janvier 2002, France/Monsanto et Commission (C-248/99 P, Rec. p. I-1, point 56), ainsi que du 24 mai 2011, Commission/Grèce (C-61/08, Rec. p. I-4399, points 33 et suiv.). Jurisprudence aussi suivie par le Tribunal, notamment dans l’arrêt du 13 avril 2005, Verein für Konsumenteninformation/Commission (T-2/03, Rec. p. II-1121, point 52).


18 —      Voir arrêt du 1er juillet 2008, Chronopost et La Poste/UFEX e.a. (C-341/06 P et C-342/06 P, Rec. p. I-4777, point 67, ainsi que jurisprudence citée).


19 —      Voir, en ce sens, arrêt Matra/Commission, précité (point 13 et jurisprudence citée).


20 —      Point 65 des conclusions de l’avocat général Sharpston dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt Chronopost et La Poste/UFEX e.a., précité.


21 —      Dans son mémoire en intervention, le Royaume d’Espagne a cité à cet égard l’arrêt du 29 avril 2010, Commission/Allemagne (C-160/08, Rec. p. I-3713, point 40), qui indique seulement que la Cour «est en droit de vérifier d’office le respect de garanties procédurales conférées par l’ordre juridique de l’Union» (mots soulignés par mes soins).


22 —      Lors de l’audience, le Royaume d’Espagne a invoqué à ce titre «l’affaire Italie/Commission, C-170/99», qui m’apparaît être en réalité l’arrêt du 30 janvier 2002, Italie/Commission (C-107/99, Rec. p. I-1091, points 29 et 30), dans lequel la Cour a vérifié d’office si le recours n’était pas entaché de tardiveté.


23 —      Voir également sixième et septième considérants de cette recommandation, ainsi que points 14 et 15 de l’exposé de ses motifs.


24 —      Voir, notamment, arrêts du 24 avril 2008, Arcor (C-55/06, Rec. p. I-2931, point 94 et jurisprudence citée), ainsi que du 18 mars 2010, Alassini e.a. (C-317/08 à C-320/08, Rec. p. I-2213, point 40 et jurisprudence citée).


25 —      Voir, notamment, arrêts du 1er octobre 1998, Commission/Espagne (C-71/97, Rec. p. I-5991, points 14 et 15); du 1er février 2001, Commission/France (C-333/99, Rec. p. I-1025, points 32 et 36), ainsi que du 13 décembre 2007, Commission/Luxembourg (C-244/07, point 10).


26 —      Voir, notamment, arrêt du 6 octobre 2009, Commission/Espagne (C-562/07, Rec. p. I-9553, points 18 et suiv. ainsi que jurisprudence citée).


27 —      Arrêt du 16 mai 2006, Watts (C-372/04, Rec. p. I-4325, point 47 et jurisprudence citée).


28 —      Arrêt du 14 février 1995, Schumacker (C-279/93, Rec. p. I-225).


29 —      Voir, notamment, arrêts du 16 mai 2000, Zurstrassen (C-87/99, Rec. p. I-3337, point 18), ainsi que du 9 novembre 2006, Turpeinen (C-520/04, Rec. p. I-10685, point 15 et jurisprudence citée).


30 —      Voir, notamment, arrêts du 6 octobre 2009, Commission/Espagne (C-562/07, précité, point 59) et du 18 mars 2010, Gielen (C-440/08, Rec. p. I-2323, points 44 et suiv.).


31 —      Voir arrêts du 1er juillet 2004, Wallentin (C-169/03, Rec. p. I-6443, points 15 et suiv. et jurisprudence citée); Turpeinen, précité (point 27 et jurisprudence citée), ainsi que du 25 janvier 2007, Meindl (C-329/05, Rec. p. I-1107, point 23 et jurisprudence citée).


32 —      Voir arrêts précités Zurstrassen (points 22 et 23 et jurisprudence citée); Wallentin (point 17 et jurisprudence citée), et Turpeinen (point 28 et jurisprudence citée), ainsi que arrêt du 16 octobre 2008, Renneberg (C-527/06, Rec. p. I-7735, point 61 et jurisprudence citée).


33 —      Modèle de convention fiscale concernant le revenu et la fortune, version abrégée, OCDE, 8e éd., juillet 2010 (http://dx.doi.org/10.1787/mtc_cond-2010-fr).


34 —      J’observe que les auteurs de la recommandation 94/79 ont indiqué s’être inspirés des dispositions de cette convention, tout au moins en ce qui concerne les définitions utilisées pour les catégories de revenus relevant de cet acte (point 12, alinéa 3, de l’exposé des motifs). Sur l’inspiration pouvant aussi y être trouvée par les États membres, voir arrêt du 7 septembre 2006, N (C-470/04, Rec. p. I-7409).


35 —      À rapprocher des commentaires portant sur l’article 18 du modèle de convention fiscale de l’OCDE, op. cit., p. 296, point 1.


36 —      Arrêt du 7 septembre 2004, Manninen (C-319/02, Rec. p. I-7477, points 32 et 33).


37 —      Voir arrêts du 26 octobre 2006, Commission/Portugal (C-345/05, Rec. p. I-10633, points 39 et suiv.); du 18 janvier 2007, Commission/Suède (C-104/06, Rec. p. I-671, points 31 et suiv.), et du 20 janvier 2011, Commission/Grèce (C-155/09, Rec. p. I-65, points 61 et suiv.), ainsi que, par analogie, arrêt du 6 octobre 2009, Commission/Espagne (C-562/07, précité, point 67).