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CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

Mme ELEANOR Sharpston

présentées le 12 septembre 2013 (1)

Affaire C-174/12

Alfred Hirmann

contre

Immofinanz AG

[demande de décision préjudicielle formée par le Handelsgericht Wien (Autriche)]

«Droit des sociétés – Directive 77/91/CEE – Responsabilité d’une société anonyme – Protection de l’investisseur qui s’est fondé sur des informations inexactes – Compatibilité d’une réglementation nationale prévoyant la résolution de l’opération d’acquisition des actions»





1.        Lorsqu’un investisseur a acheté sur le marché secondaire des actions d’une société anonyme (c’est-à-dire des actions qui ne sont pas émises dans le cadre d’une augmentation de capital de ladite société) et affirme ensuite que les informations figurant dans le prospectus, sur lesquelles il s’est appuyé pour décider de cette acquisition, n’étaient ni complètes ni véridiques, un juge peut-il ordonner à la société de résilier le contrat, l’obligeant ainsi à racheter ses propres actions et à restituer les fonds à l’investisseur, ou est-ce que le droit de l’Union s’oppose à une telle mesure? De plus, cet investisseur a-t-il droit au remboursement du prix qu’il a payé lors de l’achat des actions ou à celui de leur valeur à la date de l’introduction de sa demande?

2.        Le Handelsgericht Wien (tribunal de commerce de Vienne, Autriche), qui a déféré la présente demande de décision préjudicielle, pose ses questions par rapport à la directive 77/91/CEE (2) (ci-après la «deuxième directive sur le droit des sociétés»). Cette directive a cependant été abrogée le 25 octobre 2012 pour être remplacée par un texte nouveau et refondu, la directive 2012/30 (3). Dans les présentes conclusions, je me référerai donc à la deuxième directive sur le droit des sociétés en m’exprimant au passé. Toutefois, lorsque des dispositions de la directive abrogée sont reprises quasiment telles quelles dans sa version refondue (les dispositions équivalentes feront alors l’objet d’une note en bas de page), mes propos auront, je l’espère, quelque utilité tant pour l’avenir que pour le passé.

3.        La juridiction de renvoi constate que l’article 15 de la deuxième directive sur le droit des sociétés (4) limite le droit pour une société anonyme de distribuer son capital à ses actionnaires et que son article 18 (5) interdit à une société de souscrire à ses propres actions. Le juge national demande si ces dispositions font obstacle à ce qu’une société anonyme, civilement responsable à l’égard d’un investisseur en raison d’un manquement à son obligation d’information, puisse se voir ordonner une telle mesure de réparation. La deuxième directive sur le droit des sociétés interdisait-elle une telle mesure de réparation, nécessitant d’entamer le capital souscrit et susceptible d’entraîner l’insolvabilité de la société? Enfin, est-ce que le principe d’égalité des actionnaires interdisait le prononcé d’une telle mesure?

4.        Dans sa décision de renvoi, le juge national demande également à se faire préciser l’éventuelle incidence de la directive 2003/71/CE (6), de la directive 2004/109/CE (7), de la directive 2003/6/CE (8) et de la directive 2009/101/CE (9).

 Le droit de l’Union

5.        Les directives auxquelles la juridiction de renvoi se réfère relèvent en substance de deux catégories: d’une part, celles essentiellement relatives à la gouvernance des entreprises (la deuxième directive sur le droit des sociétés et la directive «garanties») et, d’autre part, celles essentiellement relatives à la protection des intérêts des associés (la directive «prospectus», la directive «obligations de transparence» et la directive «abus de marché») (10). Dans un souci de clarté, je les regrouperai ainsi dans mon exposé sur le droit de l’Union pertinent.

 Les directives sur la gouvernance des entreprises

 La deuxième directive sur le droit des sociétés

6.        Les deuxième et quatrième considérants de la deuxième directive sur le droit des sociétés disposaient respectivement:

«[…] pour assurer une équivalence minimale dans la protection tant des actionnaires que des créanciers de ces sociétés, il importe tout particulièrement de coordonner les dispositions nationales concernant leur constitution, ainsi que le maintien, l’augmentation et la réduction de leur capital;

[…]

[…] il y a lieu d’arrêter des prescriptions communautaires afin de préserver le capital, gage des créanciers, notamment en interdisant d’entamer celui-ci par des distributions indues aux actionnaires et en limitant la possibilité pour une société d’acquérir ses propres actions».

7.        La deuxième directive sur le droit des sociétés était applicable à toutes les sociétés anonymes énumérées en son article 1er, paragraphe 1, incluant, s’agissant de la République d’Autriche, «die Aktiengesellschaft» (11).

8.        L’article 6 (12) de la deuxième directive sur le droit des sociétés imposait aux sociétés anonymes un montant minimum de capital souscrit pour leur constitution ou l’obtention de l’autorisation de commencer leurs activités.

9.        Son article 12 (13) disposait que «les actionnaires ne peuvent pas être exemptés de l’obligation de fournir leur apport».

10.      L’article 15, paragraphe 1, de la deuxième directive sur le droit des sociétés (14) disposait:

«a)      Hors des cas de réduction du capital souscrit, aucune distribution ne peut être faite aux actionnaires lorsque, à la date de clôture du dernier exercice, l’actif net tel qu’il résulte des comptes annuels est, ou deviendrait à la suite d’une telle distribution, inférieur au montant du capital souscrit, augmenté des réserves que la loi ou les statuts ne permettent pas de distribuer.

[…]

c)      Le montant d’une distribution faite aux actionnaires ne peut excéder le montant des résultats du dernier exercice clos, augmenté des bénéfices reportés ainsi que des prélèvements effectués sur des réserves disponibles à cet effet et diminué des pertes reportées ainsi que des sommes portées en réserve conformément à la loi ou aux statuts.

d)      Le terme ‘distribution’, tel qu’il figure sous a) et c), englobe notamment le versement des dividendes et celui d’intérêts relatifs aux actions.»

11.      En cas de distribution faite en contravention dudit article 15, l’article 16 de la deuxième directive sur le droit des sociétés disposait que cette distribution «[devait] être restituée par les actionnaires qui l’ont reçue, si la société [prouvait] que ces actionnaires connaissaient l’irrégularité des distributions faites en leur faveur ou ne pouvaient l’ignorer compte tenu des circonstances». L’article 18, paragraphe 1, de la même directive (15) disposait que «[l]es actions d’une société ne peuvent être souscrites par celle-ci» (les autres dispositions dudit article 18 sont sans incidence sur le présent litige).

12.      L’article 19 de la deuxième directive sur le droit des sociétés (16) permettait à une société d’acquérir ses propres actions aux conditions qu’il précisait. Celles-ci comprenaient notamment l’autorisation de l’assemblée générale, qui devait fixer les modalités des acquisitions envisagées (17), le fait que les acquisitions ne pouvaient avoir pour effet que l’actif net devienne inférieur au montant indiqué à l’article 15, paragraphe 1, sous a), de la deuxième directive sur le droit des sociétés (18), et que l’opération ne pouvait porter que sur des actions entièrement libérées (19). Les États membres pouvaient soumettre les acquisitions aux autres conditions énumérées audit article 19, paragraphe 1, i) à v).

13.      L’article 20, paragraphe 1, sous d), de la deuxième directive sur le droit des sociétés (20) permettait aux États membres de ne pas appliquer les conditions prescrites par l’article 19 de cette directive, notamment «aux actions acquises en vertu d’une obligation légale».

14.      Enfin, l’article 42 de la deuxième directive sur le droit des sociétés disposait que, pour l’application de ladite directive, «les législations des États membres garantissent un traitement égal des actionnaires qui se trouvent dans des conditions identiques».

 La directive «garanties»

15.      La directive «garanties» a trait notamment aux circonstances dans lesquelles peut être prononcée la nullité d’une société ainsi qu’aux conséquences qui en découlent.

16.      L’article 12 de la directive «garanties» dispose que la législation des États membres ne peut organiser le régime des nullités des sociétés que si elle est prononcée par une décision judiciaire et ce dans les seuls cas visés au point b), i) à vi).

17.      L’article 13 de cette directive précise les conséquences de la nullité.

 Les directives sur la protection des associés

 La directive «prospectus»

18.      La directive «prospectus» vise l’harmonisation des exigences relatives à l’établissement, à l’approbation et à la diffusion du prospectus à publier en cas d’offre au public de valeurs mobilières ou en vue de l’admission de valeurs mobilières à la négociation sur un marché réglementé situé ou opérant sur le territoire d’un État membre.

19.      Son considérant 10 dispose qu’elle a pour objet de «garantir la protection des investisseurs et l’efficacité des marchés».

20.      Son considérant 19 dispose que «[d]es garanties visant à protéger les intérêts des investisseurs effectifs et potentiels doivent être mises en place dans tous les États membres, pour permettre auxdits investisseurs d’évaluer ces risques en connaissance de cause et de prendre ainsi leurs décisions d’investissement en pleine connaissance de cause».

21.      Son article 5, paragraphe 1, dispose que le prospectus «contient toutes les informations qui […] sont […] nécessaires pour permettre aux investisseurs d’évaluer en connaissance de cause le patrimoine, la situation financière, les résultats et les perspectives de l’émetteur et des garants éventuels, ainsi que les droits attachés à ces valeurs mobilières. Ces informations sont présentées sous une forme facile à analyser et à comprendre».

22.      Son article 6 dispose:

«1.      Les États membres veillent à ce que la responsabilité des informations fournies dans un prospectus incombe au moins à l’émetteur ou à ses organes d’administration, de direction ou de surveillance, à l’offreur, à la personne qui sollicite l’admission à la négociation sur un marché réglementé ou au garant, selon le cas. Le prospectus identifie clairement les personnes responsables par leur nom et fonction, ou, dans le cas des personnes morales, par leur nom et siège statutaire, et fournir une déclaration de leur part certifiant que, à leur connaissance, les données du prospectus sont conformes à la réalité et ne comportent pas d’omissions de nature à en altérer la portée.

2.      Les États membres veillent à ce que leurs dispositions législatives, réglementaires et administratives en matière de responsabilité civile s’appliquent aux personnes responsables des informations fournies dans les prospectus. […]»

23.      Son article 25, paragraphe 1, dispose:

«Sans préjudice de leur droit d’appliquer des sanctions pénales ou de leur régime de responsabilité civile, les États membres veillent à ce que, conformément à leur droit national, les mesures ou les sanctions administratives appropriées puissent être prises à l’encontre des personnes responsables, lorsque les dispositions adoptées en application de la présente directive n’ont pas été respectées. Les États membres veillent à ce que ces mesures soient effectives, proportionnées et dissuasives.»

 La directive «obligations de transparence»

24.      La directive «obligations de transparence» vise à améliorer notamment la protection des investisseurs et l’efficacité des marchés en exigeant des émetteurs de valeurs mobilières d’assurer un degré approprié de transparence par un flux régulier d’informations (21).

25.      Son article 7 dispose:

«Les États membres veillent à ce que la responsabilité des informations à élaborer et à publier conformément aux articles 4, 5, 6 et 16 incombe au moins à l’émetteur ou à ses organes d’administration, de direction ou de surveillance et à ce que leurs dispositions législatives, réglementaires et administratives en matière de responsabilité s’appliquent aux émetteurs, aux organes visés par le présent article ou aux personnes responsables au sein des émetteurs.»

26.      Ses articles 4 à 6 et 16 demandent respectivement à tout émetteur de publier un rapport financier annuel, un rapport financier semestriel, des déclarations de sa direction ainsi que toute modification des droits attachés aux différentes catégories d’actions ou des valeurs mobilières autres que des actions.

27.      Son article 17, intitulé «Obligations d’information applicables aux émetteurs dont les actions sont admises à la négociation sur un marché réglementé», dispose à son paragraphe 1:

«L’émetteur d’actions admises à la négociation sur un marché réglementé assure l’égalité de traitement de tous les détenteurs d’actions qui se trouvent dans une situation identique.»

28.      Son article 28, paragraphe 1, dispose:

«Sans préjudice de leur droit d’imposer des sanctions pénales, les États membres veillent au moins, conformément à leur droit interne, à ce que des mesures administratives appropriées puissent être prises ou des sanctions civiles et/ou administratives infligées aux personnes responsables, lorsque les dispositions arrêtées en application de la présente directive n’ont pas été respectées. Les États membres veillent à ce que ces mesures soient effectives, proportionnées et dissuasives.»

 La directive «abus de marché»

29.      La directive «abus de marché» vise notamment à promouvoir l’intégrité du marché par l’harmonisation des réglementations des États membres interdisant les opérations d’initiés et les manipulations de marché.

30.      Son article 14, paragraphe 1, dispose:

«Sans préjudice de leur droit d’imposer des sanctions pénales, les États membres veillent à ce que, conformément à leur législation nationale, des mesures administratives appropriées puissent être prises ou des sanctions administratives appliquées à l’encontre des personnes responsables d’une violation des dispositions arrêtées en application de la présente directive. Les États membres garantissent que ces mesures sont effectives, proportionnées et dissuasives.»

 Le droit autrichien

31.      La loi relative aux marchés de capitaux (Kapitalmarktgesetz) dispose à son article 5, relatif aux opérations avec des consommateurs:

«(1)      Si une offre soumise aux formalités de prospectus intervient sans publication préalable d’un prospectus ou des informations visées à l’article 6, les investisseurs, à savoir les consommateurs au sens de l’article 1er, paragraphe 1, deuxième alinéa, de la [loi sur la protection des consommateurs (Konsumentschutzgesetz) (22)], peuvent renoncer à leur offre ou au contrat.

[…]

(4)      Le droit de renonciation prévu au paragraphe 1 s’éteint à l’expiration d’un délai d’une semaine suivant le jour où le prospectus ou les informations visées à l’article 6 ont été publiées. […]

(5)      Les conventions dérogeant aux paragraphes 1 à 4 qui sont conclues au détriment des consommateurs sont nulles.

(6)      Les droits plus étendus conférés aux investisseurs par d’autres dispositions demeurent inchangés.»

32.      L’article 6 de la loi relative aux marchés de capitaux, intitulé «Supplément au prospectus», dispose:

«(1)      Tout fait nouveau significatif ou toute erreur ou inexactitude substantielles concernant les informations contenues dans le prospectus, qui est de nature à influencer l’évaluation des valeurs mobilières ou des investissements et survient ou est constaté entre l’approbation du prospectus et la clôture définitive de l’offre au public ou, le cas échéant, l’admission à la négociation sur un marché réglementé, si cet événement intervient plus tôt, est mentionné dans un supplément au prospectus (modifications ou informations complémentaires). Ce supplément (modifications ou informations complémentaires) doit être publié et déposé sans délai par le demandeur (article 8 a, paragraphe 1) au moins selon les mêmes modalités que celles qui étaient applicables à la publication et au dépôt du prospectus initial. […]

(2)      Les investisseurs qui ont accepté d’acheter des valeurs mobilières ou des investissements ou d’y souscrire après la survenance d’un fait, d’une erreur ou d’une inexactitude visés au paragraphe 1, mais avant la publication du supplément qui s’y rapporte, ont le droit de retirer leur acceptation pendant deux jours ouvrables après la publication du supplément. L’article 5 est applicable par analogie. En revanche, si les investisseurs sont des consommateurs au sens de l’article 1er, paragraphe 1, deuxième alinéa, de la loi sur la protection des consommateurs, le délai visé à l’article 5, paragraphe 4, est également applicable.»

33.      L’article 11 de la loi relative aux marchés de capitaux, intitulé «Responsabilité concernant le prospectus», dispose:

«(1)      Sont responsables du préjudice subi par tout investisseur en se fiant aux informations contenues dans le prospectus ou aux autres informations requises par la présente loi fédérale (article 6), qui sont déterminantes pour l’évaluation des valeurs mobilières ou des investissements:

1°)      l’émetteur, pour les informations erronées ou incomplètes qui ont été transmises par sa faute ou celle de ses préposés, mandataires ou d’autres personnes, qui sont intervenus dans la rédaction du prospectus;

[…]

(6)      Si le comportement fautif n’était pas intentionnel, l’étendue de la responsabilité à l’égard de chacun des investisseurs est limitée au prix que ces derniers ont payé, augmenté des frais et des intérêts dus à compter du paiement du prix d’acquisition.

(7)      Sous peine de forclusion, les droits que la présente loi fédérale confère aux investisseurs doivent être invoqués en justice dans un délai de dix ans suivant la clôture de l’offre soumise aux formalités de prospectus.

(8)      Les droits à réparation fondés sur la violation d’autres dispositions légales ou sur la violation de contrats demeurent inchangés.»

34.      L’article 52, intitulé «Pas de restitution des apports», de la loi sur les sociétés par actions (Aktiengesetz) dispose:

«Les apports ne sauraient être restitués aux actionnaires; pendant la durée de vie de la société, ils ont seulement le droit de percevoir les bénéfices de l’exercice pour autant que ceux-ci ne soient pas exclus de toute distribution par la loi ou par les statuts. N’est pas considéré comme une restitution des apports le paiement du prix d’acquisition en cas d’acquisition licite de ses propres actions (articles 65 et 66).»

 Les faits et la procédure au principal ainsi que les questions préjudicielles déférées

35.      Le 7 janvier 2005, M. Hirmann a acheté 1 375,02406 (23) actions de Immofinanz AG (ci-après «Immofinanz»), une société anonyme («Aktiengesellschaft»), pour la somme de 10 013,75 euros, opération réalisée par un intermédiaire. L’acquisition a eu lieu sur le marché secondaire et non dans le cadre d’une augmentation de capital d’Immofinanz. Le prix a été payé par M. Hirmann à Aviso Zeta AG (ci-après «Aviso Zeta») et les actions ont, en contrepartie, été enregistrées dans un compte-titres ouvert au nom de M. Hirmann.

36.      Le 15 août 2011, M. Hirmann a attaqué Immofinanz sur la base des dispositions combinées des articles 6, paragraphe 2, 5, paragraphe 4, et 11 de la loi relative aux marchés de capitaux, sur les principes de nullité pour cause d’erreur ainsi que d’indemnisation. Il demande la résolution de l’acquisition des actions. Il s’ensuivrait le remboursement du prix d’acquisition initial en échange de la restitution des actions à Immofinanz.

37.      M. Hirmann reproche à Immofinanz différentes malversations, notamment d’avoir manipulé les cours et d’avoir pris des mesures illégales destinées à soutenir le cours des actions. Il affirme que le prospectus disponible à l’époque, qui l’a conduit à acheter les actions, était trompeur. Contrairement aux indications fournies dans ce prospectus, le produit des émissions aurait servi à acheter des actions d’Immofinanz dans un but de manipulation des cours et de spéculation. Cette utilisation abusive des fonds aurait entraîné une augmentation sensible des risques qui ne serait pas mentionnée dans le prospectus. De manière générale, les indications figurant dans le prospectus ne seraient ni complètes ni exactes, de même qu’elles n’étaient ni compréhensibles ni faciles à analyser.

38.      Immofinanz conteste ces allégations de fait. Elle affirme également que le droit de l’Union s’oppose à ce que les apports des actionnaires soient restitués pendant la durée de vie de la société. Tenir ainsi une société anonyme pour responsable envers ses actionnaires – quelle que soit la base légale – est contraire à l’interdiction de restitution des apports posée en droit de l’Union.

39.      C’est dans ce contexte que, avant de se prononcer au fond, le Handelsgericht Wien a décidé de surseoir à statuer et de déférer les questions préjudicielles suivantes à la Cour:

«1)      Une règle nationale prévoyant la responsabilité d’une société anonyme à l’égard d’un acquéreur d’actions, en tant qu’émettrice, sur le fondement d’une violation des obligations d’information imposées par le droit des marchés de capitaux au titre des dispositions suivantes contenues dans:

–        les articles 6 et 25 de la directive [‘prospectus’];

–        les articles 7, 17 et 28 de la directive [‘obligations de transparence’];

–        l’article 14 de la directive [‘abus de marché’];

est-elle compatible avec les articles 12, 15, 16, 19 et 42 de la [deuxième directive sur le droit des sociétés], dans sa version actuelle?

2)      Les dispositions des articles 12, 15, 16 et, en particulier, des articles 18, 19 et 42 de la [deuxième directive sur le droit des sociétés], dans sa version actuelle, doivent-elles être interprétées en ce sens qu’elles s’opposent à une réglementation nationale qui impose à une société anonyme, en vertu de la responsabilité visée à la première question, de rembourser à l’acquéreur le prix d’acquisition et de reprendre les actions acquises?

3)      Les dispositions des articles 12, 15, 16, 18, 19 et 42 de la [deuxième directive sur le droit des sociétés], dans sa version actuelle, doivent-elles être interprétées en ce sens que la responsabilité de la société anonyme visée à la première question:

–        peut s’étendre aux capitaux engagés de la société anonyme (capital souscrit augmenté des réserves au sens de l’article 15, paragraphe 1, sous a), de la directive susmentionnée), et

–        peut également exister lorsqu’elle est susceptible d’entraîner l’insolvabilité de la société anonyme?

4)      Les dispositions des articles 12 et 13 de la directive [‘garanties’],doivent-elles être interprétées en ce sens qu’elles s’opposent à une réglementation nationale qui prévoit une annulation rétroactive de l’acquisition de la participation, de sorte que l’on doit considérer, en cas d’annulation du contrat d’achat d’actions, que celle-ci produit des effets ex nunc (voir arrêt du 15 avril 2010, E. Friz, C-215/08, Rec. p. I-2947)?

5)      Les dispositions des articles 12, 15, 16, 18, 19 et 42 de la [deuxième directive sur le droit des sociétés], dans sa version actuelle, et des articles 12 et 13 de la directive [‘garanties’] doivent-elles être interprétées en ce sens que la responsabilité est limitée à la valeur des actions – si la société est cotée en Bourse, au cours des actions – au moment de la levée de l’option, de sorte que l’actionnaire récupère, dans certains cas, une somme inférieure au prix initialement payé pour ses actions?»

40.      Des observations écrites ont été soumises par M. Hirmann, Immofinanz, Aviso Zeta, la République d’Autriche, la République portugaise ainsi que par la Commission européenne. M. Hirmann, Immofinanz, la République portugaise et la Commission ont également présenté des observations lors de l’audience du 17 avril 2013.

 Les questions préliminaires

41.      Avant d’examiner les cinq questions préjudicielles déférées par la juridiction de renvoi, il importe d’éclaircir quelques points.

42.      En premier lieu, je constate que, si elles procèdent à une harmonisation sur des points essentiels, les directives sur la protection des associés laissent à bien des égards une large marge d’appréciation aux États membres.

43.      C’est ainsi (par exemple) que l’article 6, paragraphe 2, de la directive «prospectus» demande aux États membres de veiller à ce que «leurs dispositions législatives, réglementaires et administratives en matière de responsabilité civile s’appliquent aux personnes responsables des informations fournies dans les prospectus». Ces dispositions sont complétées par celles de son article 25, paragraphe 1, qui dispose que les États membres «veillent à ce que, conformément à leur droit national, les mesures ou les sanctions administratives appropriées puissent être prises à l’encontre des personnes responsables» (c’est moi qui souligne), cela «sans préjudice […] de leur régime de responsabilité civile».

44.      Dans la même veine, l’article 28, paragraphe 1, de la directive «obligations de transparence» et l’article 14, paragraphe 1, de la directive «abus de marché» renferment des dispositions en substance équivalentes. Tout d’abord, le droit des États membres d’imposer des sanctions pénales est expressément préservé. Ensuite, les États membres sont tenus («veillent au moins»), conformément à leur droit interne, à ce que des mesures administratives appropriées puissent être/soient prises ou des sanctions pénales et/ou administratives infligées (24). Enfin, les États membres «veillent à ce que ces mesures soient effectives, proportionnées et dissuasives».

45.      Il s’ensuit que, à moins qu’une mesure de réparation de la méconnaissance de l’une des obligations relevant du champ d’application de ces directives ne soit expressément interdite (soit par l’un de ces textes, soit par une autre mesure de droit de l’Union), les États membres sont libres de prévoir les mesures qui leur semblent appropriées.

46.      En deuxième lieu, si la juridiction de renvoi n’a pas encore procédé à des constatations sur la question de savoir si, et dans l’affirmative dans quelle mesure, Immofinanz a communiqué des informations fallacieuses à M. Hirmann l’ayant conduit à procéder à une acquisition d’actions à laquelle il ne se serait peut-être pas livré en d’autres circonstances, certains faits sont incontestés. M. Hirmann a acheté un certain nombre d’actions, à une date précise, pour un prix déterminé. Ces actions ont été achetées sur le marché secondaire, par les soins d’un intermédiaire (Aviso Zeta). Le prix des actions a été intégralement payé. Cependant, cette acquisition ne s’inscrivait pas dans le cadre d’une augmentation du capital souscrit d’Immofinanz. C’était une opération d’achat d’actions parfaitement ordinaire, comme il s’en réalise quotidiennement sur les marchés boursiers.

47.      En troisième lieu, il importe non seulement de distinguer, d’une part, les sanctions civiles et administratives et, d’autre part, les sanctions pénales, mais également de s’interroger sur le but réellement poursuivi par le litige au principal ayant donné lieu à la présente demande de décision préjudicielle. Par ce litige, M. Hirmann entend être réintégré dans la situation dans laquelle il se serait trouvé s’il n’avait pas procédé à l’achat des actions: défaire l’opération et récupérer ses fonds, majorés des intérêts entre la date d’achat (7 janvier 2005) et le jour du prononcé du jugement par la juridiction de renvoi. A priori, il est permis de s’interroger sur la question de savoir si une telle demande peut réellement être qualifiée de demande de «sanction» – il s’agit plutôt d’une demande en restitution ou d’une demande d’engagement de la responsabilité civile de la société en raison de ses manquements. Toutefois, dans la mesure où le fait que cette demande soit accueillie ou non dépend de la question de savoir s’il y avait une obligation de fournir des informations justes à un actionnaire potentiel et s’il y a eu manquement à celle-ci, il peut éventuellement être soutenu que la sanction civile à ce manquement (s’il est établi), prévue ici par la réglementation nationale, est que la société est tenue de défaire l’opération et de restituer effectivement le prix payé. En l’absence d’une telle obligation, il n’y aurait pas de sanction au manquement (encore moins une sanction qui soit «effective, proportionnée et dissuasive»).

48.      Enfin, des questions relatives à la chronologie des faits doivent être gardées à l’esprit.

49.      M. Hirmann a acheté ses actions le 7 janvier 2005. Si et dans la mesure où il a procédé effectivement à cette acquisition en se fondant sur des informations erronées fournies par Immofinanz, telle est alors la date à laquelle est intervenu le manquement à l’obligation. À cette date-là, les délais pour transposer la deuxième directive sur le droit des sociétés (1er janvier 1994) (25) et la directive «abus de marché» (12 décembre 2004) étaient dépassés. Toutefois, la date pertinente pour apprécier la réparation à laquelle il peut avoir droit est non pas cette date-là, mais celle du 15 août 2011, date à laquelle il a saisi le juge national pour demander la résolution de l’opération d’achat d’actions. À cette date, les délais pour transposer la directive «prospectus» (1er juillet 2005), la directive «obligations de transparence» (20 janvier 2007) et la directive «garanties» (une codification – la dernière date limite de transposition figurant à l’annexe I, partie B, est fixée au 1er janvier 2007) étaient également expirés.

50.      C’est dans ce contexte que je vais examiner les questions déférées par la juridiction de renvoi.

 Appréciation

 Les trois premières questions

51.      Les trois premières questions déférées par le juge national portent sur différentes facettes de la question de savoir si la deuxième directive sur le droit des sociétés s’oppose à la résolution d’une opération d’achat d’actions lorsque la société a manqué à ses obligations d’information des investisseurs potentiels. Je vais donc les examiner ensemble. En substance, la juridiction de renvoi demande si les articles 12, 15, 16, 18, 19 et/ou 42 de la deuxième directive sur le droit des sociétés s’opposaient à ce qu’une réglementation nationale transposant les directives sur la protection des associés prévoyait que, si une société anonyme manquait à ses obligations, elle était responsable envers l’investisseur, en qualité d’émetteur, et tenue de restituer le prix d’achat et d’amortir les actions. Le juge national demande en outre s’il est contraire à la deuxième directive sur le droit des sociétés qu’une société anonyme soit obligée de satisfaire à une telle obligation, même si cela l’oblige à puiser dans ses actifs nets (capital souscrit plus réserves) et/ou risque de provoquer son insolvabilité.

52.      La préoccupation sous-jacente de la juridiction nationale semble surtout être que, d’une certaine manière, les mesures adoptées par la République d’Autriche pour transposer d’autres mesures de droit de l’Union – notamment les directives sur la protection des associés – peuvent ne pas correspondre à ce que le législateur de l’Union avait à l’esprit et que (par inadvertance) la République d’Autriche ait ainsi créé une situation où le mode de réparation de la méconnaissance de droits conférés par une ou plusieurs de ces directives ne soit pas compatible avec la deuxième directive sur le droit des sociétés. Afin d’assister au mieux la juridiction nationale, je vais adopter une approche quelque peu iconoclaste dans l’analyse des trois premières questions préjudicielles déférées. J’examinerai d’abord ce que ces trois directives disent (et surtout ce qu’elles ne disent pas) sur la manière dont elles doivent être mises en œuvre, en attirant l’attention sur la marge d’appréciation que le législateur de l’Union a laissé aux États membres. J’ausculterai ensuite la deuxième directive sur le droit des sociétés et ses (nombreuses) dispositions relevées par la juridiction de renvoi en m’interrogeant sur la question de savoir si, néanmoins, elles n’interdisent pas une réglementation nationale telle celle en cause dans le litige au principal.

 Les directives sur la protection des associés

 La directive «prospectus»

53.      L’article 6, paragraphe 1, de la directive «prospectus» demande aux États membres de veiller à ce que la responsabilité des informations fournies dans un prospectus incombe au moins à l’émetteur notamment. Dès lors, loin d’être interdite, une réglementation nationale prévoyant la responsabilité d’une société anonyme, en qualité d’émetteur, à l’égard d’un investisseur en cas de manquement à l’obligation d’information, satisfait à cette disposition. Il est vrai que cet article 6, paragraphe 1, permet, «selon le cas», de tenir d’autres entités pour responsables en matière de manquement aux obligations d’information. Toutefois, aucun élément rapporté à la Cour ne permet de penser que, en l’espèce, aucune entité autre qu’Immofinanz, en qualité d’émetteur, ne fut responsable des informations figurant dans son prospectus. Dans des circonstances où l’émetteur est responsable des informations communiquées, ledit article 6 demande clairement que la responsabilité de l’émetteur soit engagée si ces informations sont fausses ou de nature à induire en erreur.

54.      L’article 6, paragraphe 1, de la directive «prospectus» ne précise pas les «mesures administratives» qui doivent être prises ni les «sanctions administratives» qui doivent être imposées si une telle responsabilité est constatée. Ledit article 6, paragraphe 2, dispose (en des termes impératifs) que les États membres «veillent à ce que leurs dispositions législatives, réglementaires et administratives en matière de responsabilité civile s’appliquent aux personnes responsables des informations fournies dans les prospectus», mais ne précise pas plus quelles mesures civiles de réparation doivent être prévues. L’article 25 de la directive «prospectus» se borne à confirmer que les mesures ou les sanctions administratives que les États membres doivent prendre le soient «[s]ans préjudice […] de leur régime de responsabilité civile» (ni d’ailleurs de leur droit d’appliquer des sanctions pénales).

55.      Par conséquent, sous l’empire de la directive «prospectus», les États membres disposent d’une large marge d’appréciation, sous réserve de respecter les principes généraux du droit de l’Union, ainsi que toute disposition pertinente de sa réglementation, quant à la nature des mesures de réparation de leurs régimes de responsabilité civile.

56.      En l’espèce, la réglementation nationale applicable au litige au principal prévoit la restitution du prix à l’acquéreur et celle des actions à la société. Le choix d’une telle mesure de réparation incombe à l’État membre. Elle ne se recoupe pas manifestement avec des sanctions pénales ou des mesures ou sanctions administratives qui peuvent également être prévues et n’en limite pas les effets. Assurément, elle n’est pas interdite par la directive «prospectus». Elle est manifestement proportionnée au préjudice subi par l’investisseur. Elle n’est pas manifestement disproportionnée au manquement à l’obligation d’information. Elle est susceptible de dissuader les émetteurs d’induire les investisseurs en erreur et de leur faire acheter des actions en ne satisfaisant pas à leurs obligations en matière d’information, aussi est-elle susceptible d’être à la fois dissuasive et efficace. Il me semble donc qu’elle est à la fois conforme aux principes généraux du droit de l’Union et susceptible de permettre la réalisation des objectifs poursuivis par la directive «prospectus».

 La directive «obligations de transparence»

57.      L’article 7 de la directive «obligations de transparence» dispose que les États membres veillent à ce que la responsabilité des informations à élaborer et à publier conformément à cette directive incombe au moins à l’émetteur ou à ses organes d’administration, de direction ou de surveillance. Une réglementation nationale qui rend une société, en qualité d’émetteur, responsable des manquements aux obligations prescrites par ladite directive me paraît traduire parfaitement les exigences de cette disposition. De même, une telle réglementation ne paraît pas contraire au principe d’égalité de traitement inscrit à l’article 17 de la même directive.

58.      La directive «obligations de transparence» ne précise pas les sanctions civiles qui devraient être prononcées lorsque la responsabilité d’un émetteur est engagée. Son article 28, paragraphe 1, demande simplement aux États membres de veiller «au moins, conformément à leur droit interne, à ce que des mesures administratives appropriées puissent être prises ou des sanctions civiles et/ou administratives infligées aux personnes responsables» (sans préjudice de leur droit d’imposer des sanctions pénales), ajoutant que «[l]es États membres veillent à ce que ces mesures soient effectives, proportionnées et dissuasives».

59.      Tout comme pour la directive «prospectus», le législateur de l’Union laisse ici une large marge d’appréciation aux États membres. Une mesure de réparation qui impose à une société de restituer le prix d’achat et de réacquérir ses actions me paraît s’inscrire parfaitement dans le cadre de cette marge d’appréciation et (comme exposé ci-dessus) ne saurait être contestée à la lumière des principes généraux du droit de l’Union. De même, pour autant que je puisse en juger, elle ne se substitue pas aux sanctions pénales ou aux mesures ou sanctions administratives qui peuvent également être prévues et ne les affaiblit pas non plus.

 La directive «abus de marché»

60.      L’article 14 de la directive «abus de marché» demande aux États membres de veiller à ce que des «mesures administratives appropriées» puissent être prises ou des «sanctions administratives» appliquées à l’encontre des «personnes responsables» d’une violation des dispositions arrêtées en application de ladite directive, «[s]ans préjudice de leur droit d’imposer des sanctions pénales». Tout comme la directive «prospectus» et la directive «obligations de transparence», la directive «abus de marché» ne précise pas quelle mesure civile de réparation doit être prévue lorsque la responsabilité d’un émetteur est engagée. Là encore, les États membres disposent donc d’une large marge d’appréciation en la matière, dans les limites permises par les principes généraux du droit de l’Union et de toute autre réglementation pertinente du droit de l’Union. Dans la mesure où une société anonyme méconnaît cette directive, une réglementation nationale qui la rend responsable d’un tel manquement est conforme à la lettre et aux objectifs de l’article 14 de la directive «abus de marché».

61.      La mesure de réparation prévue par la loi autrichienne, dans le cadre de son régime de responsabilité civile et pour autant que la responsabilité est constatée, me paraît s’inscrire parfaitement dans le cadre de la marge d’appréciation conférée aux États membres. De même (pour les raisons déjà exposées), elle me paraît cohérente avec les principes généraux du droit de l’Union. Enfin, pour autant que je puisse en juger, elle ne se substitue pas aux sanctions pénales ou aux mesures ou sanctions administratives qui peuvent également être prévues et ne les affaiblit pas non plus.

62.      J’en conclus donc que ni la directive «prospectus», ni la directive «obligations de transparence» et ni la directive «abus de marché» ne s’opposent à une réglementation nationale prévoyant que, si une société anonyme manque à ses obligations découlant de ces directives, elle est tenue de racheter ses actions et de restituer le prix d’achat à l’investisseur.

 La deuxième directive sur le droit des sociétés

63.      Même si les directives sur la protection des associés n’interdisent pas une telle réglementation nationale (et même si, de fait, celle-ci paraît conforme à leur lettre et à la promotion de leurs objectifs), se peut-il néanmoins – comme le soutient Immofinanz – que cette réglementation se heurte à la deuxième directive sur le droit des sociétés?

64.      Immofinanz et Aviso Zeta affirment qu’une telle réglementation nationale était interdite par la deuxième directive sur le droit des sociétés, car elle est contraire à la fois au principe de l’intangibilité du capital, à l’interdiction pour une société d’acquérir ses propres actions et au principe d’égalité de traitement. Immofinanz et Aviso Zeta soutiennent notamment que la deuxième directive sur le droit des sociétés fait obstacle à ce qu’une telle obligation ne vienne grever l’actif net d’une société ou ait une portée telle qu’elle risque d’entraîner son insolvabilité.

65.      M. Hirmann, le gouvernement portugais et la Commission concluent que la réglementation nationale en cause n’était pas interdite par la deuxième directive sur le droit des sociétés, même si pour s’acquitter de cette obligation, une société anonyme est contrainte de puiser dans ses actifs nets ou qu’elle entraîne son insolvabilité.

66.      Le gouvernement autrichien se borne à attirer l’attention de la Cour sur deux arrêts de l’Oberster Gerichtshof (Cour suprême, Autriche) des 30 mars 2011 (26) et 15 mars 2012 (27), dont il approuve les conclusions. Dans ces arrêts, l’Oberster Gerichtshof a jugé que les dispositions de la deuxième directive sur le droit des sociétés ne faisaient pas obstacle à la résolution d’un contrat d’achat d’actions et à la restitution des sommes payées.

67.      Je suis d’avis que la réglementation nationale en cause n’est pas interdite par la deuxième directive sur le droit des sociétés.

68.      La juridiction de renvoi a invoqué plusieurs dispositions de la deuxième directive sur le droit des sociétés. Afin de structurer mon analyse, je les approcherai de la manière suivante. Premièrement, je commencerai par examiner si un paiement en faveur de M. Hirmann en application de la réglementation nationale peut constituer une distribution interdite par l’article 15 de la deuxième directive sur le droit des sociétés qui doit être récupérée en application de l’article 16 de celle-ci. Deuxièmement, j’examinerai ensuite la règle interdisant à une société d’acquérir ses propres actions et les exceptions à celle-ci (articles 18 à 20 de cette directive). Troisièmement, je poursuivrai en examinant l’obligation d’égalité de traitement des actionnaires (article 42 de ladite directive). Quatrièmement, je compléterai cette analyse par l’étude de la dernière disposition à laquelle la juridiction de renvoi fait référence (article 12 de la même directive). Cinquièmement, enfin, je me pencherai brièvement sur la question de savoir si, pour satisfaire à une telle obligation, le fait qu’une société anonyme peut être contrainte de puiser dans ses actifs nets ou risque de devenir insolvable est susceptible d’avoir une incidence sur mes conclusions.

 Les règles relatives aux distributions (articles 15 et 16 de la deuxième directive sur le droit des sociétés)

69.      L’article 15 de la deuxième directive sur le droit des sociétés interdisait toute distribution faite aux actionnaires lorsque, à la date de clôture du dernier exercice, l’actif net tel qu’il résulte des comptes annuels était, ou deviendrait à la suite d’une telle distribution, inférieur au montant du capital souscrit. (L’article 6 de ladite directive prévoyait un capital souscrit minimal pour la constitution de la société ou pour l’obtention de l’autorisation de commencer ses activités). Cependant, le terme «distribution» visait-il également le cas où une société avait une obligation légale de restituer le prix d’achat à un investisseur lorsqu’elle avait manqué à ses obligations d’information?

70.      Le terme «distribution» figurant à l’article 15 de la deuxième directive sur le droit des sociétés n’était pas défini par celle-ci, bien que cet article 15, paragraphe 1, sous d), disposait qu’il «englobe notamment le versement des dividendes et celui d’intérêts relatifs aux actions». Il me semble que ce terme doit être interprété comme excluant tout paiement visant à compenser un investisseur ayant subi un préjudice en raison d’un manquement par la société à l’une de ses obligations.

71.      Une telle interprétation n’est pas contraire aux objectifs dudit article 15 qui, comme il l’était exposé aux deuxième et quatrième considérants de la deuxième directive sur le droit des sociétés, étaient d’assurer une équivalence minimale dans la protection tant des actionnaires que des créanciers de ces sociétés, par exemple en interdisant aux sociétés anonymes d’entamer leur capital social et «notamment en interdisant d’entamer celui-ci par des distributions indues aux actionnaires». L’intention était de prévenir des distributions inappropriées du capital souscrit aux actionnaires en leur qualité d’actionnaires auxquelles ils n’ont pas droit. Par opposition, un paiement fait à un investisseur, induit en erreur par le prospectus de la société pour acquérir des actions, n’intervient pas en sa qualité d’actionnaire (pour des raisons que je vais développer) et constitue le paiement d’une indemnisation à laquelle il a droit.

72.      Un tel paiement n’est pas initié par la société elle-même, mais intervient pour se conformer à une obligation légale. L’obligation de payer naît de la relation de la société avec des investisseurs potentiels, qui se fient au prospectus pour décider de réaliser un investissement, et non de ses relations avec des actionnaires actuels. Par conséquent, si à l’issue du litige au principal un paiement est ordonné en faveur de M. Hirmann, il interviendrait parce que celui-ci a la qualité de tiers créancier de la société et non celle d’actionnaire.

73.      À mon avis, un tel paiement ne constitue pas une «distribution» de capital au sens de l’article 15, paragraphe 1, de la deuxième directive sur le droit des sociétés même si le tiers créancier est également un actionnaire de la société en question. Quelques exemples permettent d’éclaircir ce point de vue.

74.      Supposons, par exemple, que le bailleur des locaux servant de siège à la société soit un actionnaire de celle-ci et qu’elle soit en retard du paiement des loyers. Le bailleur intenterait une action en paiement des loyers. Son droit au paiement des loyers ne tient pas à sa qualité d’actionnaire et les loyers qui lui sont versés par la société (que ce soit après mise en demeure ou sur décision de justice) ne constituent pas une distribution de capital au sens dudit article 15.

75.      De même, si un salarié de la société ayant acheté ou reçu des actions de celle-ci est victime d’un accident du travail en raison d’un manquement par la société à son obligation de diligence envers lui, son droit à indemnisation en réparation du préjudice subi est étranger à sa qualité d’actionnaire. Dans un tel cas, le paiement d’une indemnisation par la société ne constitue pas une distribution de capital.

76.      Dès lors qu’un paiement à un tiers créancier, qui est également un actionnaire, ne constitue pas une «distribution» de capital au sens de l’article 15 de la deuxième directive sur le droit des sociétés, cette disposition ne fait pas obstacle à un tel paiement.

77.      L’article 16 de la deuxième directive sur le droit des sociétés se borne à demander que toute distribution faite en contravention de l’article 15 de ladite directive soit restituée. Compte tenu de mes constatations sur l’interprétation qu’il convient de donner à cet article 15, il s’ensuit que ledit article 16 est sans incidence sur la problématique actuelle.

 L’interdiction faite à une société d’acquérir ses propres actions et les exceptions à cette règle

78.      L’article 18, paragraphe 1, de la deuxième directive sur le droit des sociétés interdisait à une société de souscrire ses propres actions. Toutefois, l’article 19 de cette directive prévoyait que les États membres pouvaient permettre à une société d’acquérir ses propres actions aux conditions qu’il fixait, tandis que l’article 20 de ladite directive leur permettait de ne pas appliquer ledit article 19 dans des cas particuliers où une société acquérait des actions.

79.      Ces articles visaient à protéger les actionnaires et les créanciers de comportements de marché susceptibles de réduire le capital d’une société et de faire augmenter artificiellement le cours de l’action. Cet objectif n’est pas remis en cause lorsqu’une société acquiert ses propres actions en cas d’obligation légale. De fait, comme le gouvernement portugais et la Commission l’ont souligné à juste titre, l’article 20, paragraphe 1, sous d), de la deuxième directive sur le droit des sociétés permet expressément aux États membres d’autoriser une société à acquérir des actions «en vertu d’une obligation légale», sans avoir à recourir à l’une des procédures prévues à l’article 19 de cette directive. Par conséquent, dans la mesure où la réglementation nationale en cause impose à une société anonyme de (ré)acquérir ses propres actions en tant que mesure de réparation d’un manquement à ses obligations, une telle acquisition intervient en vertu d’une obligation légale que ledit article 20, paragraphe 1, sous d), permet expressément aux États membres d’autoriser.

80.      Il s’ensuit que l’article 18 de la deuxième directive sur le droit des sociétés ne faisait pas obstacle à la réglementation nationale en cause.

 Le principe d’égalité de traitement

81.      L’article 42 de la deuxième directive sur le droit des sociétés disposait que, pour l’application de cette dernière, les législations des États membres devaient garantir «un traitement égal des actionnaires qui se trouvent dans des conditions identiques». Cette obligation ne s’appliquait, ainsi qu’il ressort de l’incise «pour l’application de la présente directive», seulement dans le cadre particulier de cette directive (28).

82.      Un actionnaire qui a légalement droit à réparation pour l’acquisition d’actions réalisée sur le fondement d’un prospectus trompeur n’est pas dans la même situation qu’un actionnaire qui ne s’est pas fié à ce prospectus. Le principe d’égalité des actionnaires ne fait donc pas obstacle à ce qu’un actionnaire se voit accorder une réparation (29) à laquelle il a droit.

 L’article 12 de la deuxième directive sur le droit des sociétés

83.      L’article 12 de la deuxième directive sur le droit des sociétés interdisait d’exempter les actionnaires de l’obligation de fournir leur apport, protégeant ainsi le capital souscrit lors de la constitution de la société en exigeant que la totalité du capital souscrit soit apporté. Étant donné que M. Hirmann, d’une part, a acheté des actions ordinaires sur le marché secondaire et, d’autre part, a payé la totalité de ces actions, cette disposition est sans incidence en l’espèce.

 Quid si le paiement nécessite de recourir au capital souscrit ou à des réserves ou est susceptible d’entraîner l’insolvabilité de la société?

84.      Je commence par observer que, pour autant que je puisse en juger, cette question est purement hypothétique. Aucun élément du dossier soumis à la Cour ne permet de penser que, si Immofinanz devait se voir ordonner de racheter 1 375,02406 actions et de verser à M. Hirmann la somme de 10 013,75 euros, majorée des intérêts, elle serait contrainte de puiser dans ses réserves ou d’entamer le capital souscrit pour satisfaire à cette obligation.

85.      Pour autant qu’il soit nécessaire de répondre à cette question, je n’en demeure pas moins ferme dans mon avis selon lequel, puisqu’un tel paiement à un tiers créancier ne constitue pas une distribution de capital au sens de l’article 15 de la deuxième directive sur le droit des sociétés, les limites imposées par cette disposition sur le montant de capital qu’une société anonyme peut distribuer à ses actionnaires ne sont pas applicables à un tel paiement. Il s’ensuit que le paiement par une société anonyme ayant manqué à ses obligations d’une indemnisation à un investisseur n’aurait pas été interdit par ledit article 15, même si pour s’acquitter de cette obligation, la société pourrait être amenée à puiser dans ses actifs nets et que cela puisse entraîner son insolvabilité.

86.      Je ne peux cependant que réitérer que, sur la base des informations communiquées à la Cour, cette question paraît plus hypothétique que réelle.

87.      Je conclus donc que la deuxième directive sur le droit des sociétés ne faisait pas obstacle à une réglementation nationale telle celle en cause dans le litige au principal.

 Les quatrième et cinquième questions

88.      Par ses quatrième et cinquième questions, la juridiction de renvoi s’interroge en substance sur la chronologie, aussi examinerai-je ces questions ensemble. La faute alléguée s’est produite le 7 janvier 2005. M. Hirmann a intenté son action en réparation le 15 août 2011. La directive «garanties» fait-elle obstacle et/ou la deuxième directive sur le droit des sociétés le faisait-elle à une réglementation nationale prévoyant la résolution à effet rétroactif d’un contrat d’achat d’actions, ayant pour effet la restitution du prix d’achat payé à l’origine, à la date où la faute s’est produite (restitution basée sur la valeur des actions ex tunc)? Ou est-ce que, effectivement, ces directives exigeaient que la responsabilité de l’émetteur soit appréciée par rapport à la valeur des actions au jour de l’introduction de la demande (restitution basée sur la valeur des actions ex nunc)?

89.      M. Hirmann affirme avoir droit au prix d’achat payé à l’origine (majoré des intérêts) au motif que, s’il n’avait pas été abusé, il n’aurait pas procédé à l’opération d’achat d’actions. Le gouvernement autrichien s’étant aligné sur la position adoptée par l’Oberster Gerichtshof (30), dans le sens que la protection des actionnaires prévaut sur l’intangibilité du capital social, il ne se prononce pas sur ces questions en tant que telles.

90.      À l’inverse, Immofinanz soutient que le fait de permettre à un investisseur de réclamer le prix d’achat payé initialement pourrait avoir les mêmes effets que la constatation de la nullité de la société. Cela créerait une incertitude juridique et serait contraire aux articles 12 et 13 de la directive «garanties», qui indiquent de manière exhaustive les conditions de prononcé de la nullité d’une société. Immofinanz affirme ensuite (en invoquant l’arrêt E. Friz (31), soutenue en cela par Aviso Zeta) que la sauvegarde de l’existence de la société est essentielle. Ainsi, si l’opération relative aux actions devait être défaite, les actions restituées à Immofinanz et les fonds correspondants remboursés, le montant à rembourser doit être déterminé ex nunc (valeur des actions à la date de l’introduction de la demande) et non ex tunc (prix initial d’acquisition).

91.      Le gouvernement portugais et la Commission sont d’avis que les articles 12 et 13 de la directive «garanties» ne trouvent pas application. La résolution de l’opération d’achat d’actions n’emporterait pas la nullité d’Immofinanz. Une telle décision ne peut être prise que par un juge. En outre, ni ces dispositions de la directive «garanties» ni la deuxième directive sur le droit des sociétés ne demandent que la résolution d’un contrat ne produise des effets que ex nunc ou que toute responsabilité y afférente soit déterminée ex nunc. La Commission ajoute qu’il appartient au juge national de déterminer l’étendue de la responsabilité de l’émetteur, en tenant compte du principe d’égalité de traitement des actionnaires se trouvant dans une même situation.

92.      Je partage ces avis du gouvernement portugais et de la Commission.

93.      L’article 12, sous a), de la directive «garanties» dispose que la «nullité doit être prononcée par décision judiciaire» et elle ne peut l’être que dans les seuls cas visés limitativement audit article 12, sous b), i) à vi). L’article 13 de cette directive renferme des dispositions relatives aux conséquences du prononcé d’une telle nullité. Toutefois, une décision judiciaire constatant que la responsabilité d’une société est engagée à l’égard d’un investisseur n’équivaut pas à une décision prononçant la nullité. Par conséquent, les articles 12 et 13 de la directive «garanties» sont manifestement sans objet relativement à la responsabilité d’une société anonyme ayant manqué à ses obligations d’information et sans incidence sur la question des effets de celle-ci sur une base ex nunc ou ex tunc.

94.      Les directives sur la protection des associés ne posent aucune condition particulière sur la nature de la réparation qu’un État membre doit imposer si un émetteur méconnaît son obligation d’information, sinon que les sanctions prononcées doivent être «effectives, proportionnées et efficaces». Les États membres disposent donc d’une large marge d’appréciation, qui intègre nécessairement le pouvoir de décider si la résolution d’une opération d’achat d’actions doit produire des effets sur une base ex tunc ou ex nunc.

95.      Dans son arrêt E. Friz (32), la Cour a constaté que le fait pour un consommateur d’exercer son droit de révocation de l’adhésion à un fonds immobilier fermé, constitué sous la forme d’une société de personnes (directive 85/577/CEE (33)), ne s’oppose pas à ce que la résolution du contrat soit prononcée sur une base ex nunc (34). Cet arrêt ne saurait être interprété comme exigeant des États membres, dans le contexte des autres directives examinées ici, de veiller à ce que la résolution d’une opération d’achat d’actions en raison d’un manquement d’une société à son obligation d’information ne puisse produire des effets que sur une base ex nunc.

96.      Enfin, je ne trouve rien dans le texte des articles 12, 15, 16, 18, 19 et/ou 42 de la deuxième directive sur le droit des sociétés qui permettrait de penser que ces articles renferment une telle exigence. Je partage l’avis de la Commission selon lequel le juge national peut être amené à prendre des mesures pour garantir que tous les actionnaires ayant acheté des actions sur la base des mêmes informations trompeuses fassent l’objet d’une égalité de traitement, comme le demande ledit article 42. Mis à part cela, je suis d’avis que ces dispositions sont dénuées de pertinence pour se prononcer sur la question des effets ex nunc ou ex tunc. Comme je l’ai déjà indiqué, cette question relève du droit national.

 Conclusion

97.      Compte tenu des considérations qui précèdent, j’ai l’honneur de proposer qu’il plaise à la Cour apporter les réponses suivantes aux questions préjudicielles déférées par le Handelsgericht Wien:

1)      La directive 2003/71/CE du Parlement européen et du Conseil, du 4 novembre 2003, concernant le prospectus à publier en cas d’offre au public de valeurs mobilières ou en vue de l’admission de valeurs mobilières à la négociation, et modifiant la directive 2001/34/CE, la directive 2004/109/CE du Parlement européen et du Conseil, du 15 décembre 2004, sur l’harmonisation des obligations de transparence concernant l’information sur les émetteurs dont les valeurs mobilières sont admises à la négociation sur un marché réglementé et modifiant la directive 2001/34/CE, et la directive 2003/6/CE du Parlement européen et du Conseil, du 28 janvier 2003, sur les opérations d’initiés et les manipulations de marché, ne font pas obstacle à une réglementation nationale prévoyant que, si une société anonyme manque à l’une des obligations qui lui incombent en vertu de ces directives, elle est tenue de racheter les actions et de restituer le prix d’achat à l’investisseur. De même, une telle réglementation nationale n’est pas interdite par les articles 12, 15, 16, 18, 19 et/ou 42 de la deuxième directive 77/91/CEE du Conseil, du 13 décembre 1976, tendant à coordonner pour les rendre équivalentes les garanties qui sont exigées dans les États membres des sociétés au sens de l’article 58 deuxième alinéa du traité, en vue de la protection des intérêts tant des associés que des tiers, en ce qui concerne la constitution de la société anonyme ainsi que le maintien et les modifications de son capital.

2)      Ni la directive 2009/101/CE du Parlement européen et du Conseil, du 16 septembre 2009, tendant à coordonner, pour les rendre équivalentes, les garanties qui sont exigées, dans les États membres, des sociétés au sens de l’article 48, deuxième alinéa, du traité, pour protéger les intérêts tant des associés que des tiers, ni la directive 77/91 ne font obstacle à la résolution avec effet rétroactif d’un contrat d’acquisition d’actions emportant la restitution du prix d’achat initialement payé.


1 –      Langue originale: l’anglais.


2 –      Deuxième directive du Conseil du 13 décembre 1976 tendant à coordonner pour les rendre équivalentes les garanties qui sont exigées dans les États membres des sociétés au sens de l’article 58 deuxième alinéa du traité, en vue de la protection des intérêts tant des associés que des tiers, en ce qui concerne la constitution de la société anonyme ainsi que le maintien et les modifications de son capital (JO 1977, L 26, p. 1). Cette directive a été abrogée et remplacée par la directive 2012/30/UE du Parlement européen et du Conseil, du 25 octobre 2012, tendant à coordonner, pour les rendre équivalentes, les garanties qui sont exigées dans les États membres des sociétés au sens de l’article 54, deuxième alinéa, du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, en vue de la protection des intérêts tant des associés que des tiers, en ce qui concerne la constitution de la société anonyme ainsi que le maintien et les modifications de son capital (JO L 315, p. 74). Elle avait été modifiée par la directive 92/101/CEE du Conseil, du 23 novembre 1992, modifiant la directive 77/91/CEE concernant la constitution de la société anonyme ainsi que le maintien et les modifications de son capital (JO L 347, p. 64), ce texte modifié étant celui en vigueur au 7 janvier 2005, date de la conclusion du contrat d’achat d’actions objet du litige au principal. Elle a été modifiée de nouveau par la directive 2006/68/CE du Parlement européen et du Conseil, du 6 septembre 2006, modifiant la directive 77/91/CEE du Conseil en ce qui concerne la constitution de la société anonyme ainsi que le maintien et les modifications de son capital (JO L 264, p. 32), puis par la directive 2006/99/CE du Conseil, du 20 novembre 2006, portant adaptation de certaines directives dans le domaine du droit des sociétés, en raison de l’adhésion de la Bulgarie et de la Roumanie (JO L 363, p. 137).


3 –      Voir note en bas de page 2.


4 –      L’article 17 de la directive 2012/30, citée à la note en bas de page 2, remplace l’article 15 de la deuxième directive sur le droit des sociétés.


5 –      L’article 20 de la directive 2012/30, citée à la note en bas de page 2, remplace l’article 18 de la deuxième directive sur le droit des sociétés.


6 –      Directive du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003 concernant le prospectus à publier en cas d’offre au public de valeurs mobilières ou en vue de l’admission de valeurs mobilières à la négociation, et modifiant la directive 2001/34/CE (JO L 345, p. 64, ci-après la «directive ‘prospectus’»). Cette directive devait être transposée par les États membres au plus tard le 1er juillet 2005 (article 29). J’ignore si cette version de la directive «prospectus» avait été transposée en droit autrichien à la date du 7 janvier 2005, date du contrat d’achat des actions. Dans la négative, le droit national devait intégrer les exigences déjà posées par la directive 89/298/CEE du Conseil, du 17 avril 1989, portant coordination des conditions d’établissement, de contrôle et de diffusion du prospectus à publier en cas d’offre publique de valeurs mobilières (JO L 124, p. 8). La directive «prospectus» a ensuite été modifiée par la directive 2008/11/CE du Parlement européen et du Conseil, du 11 mars 2008, modifiant la directive 2003/71/CE concernant le prospectus à publier en cas d’offre au public de valeurs mobilières ou en vue de l’admission de valeurs mobilières à la négociation, en ce qui concerne les compétences d’exécution conférées à la Commission (JO L 76, p. 37), mais ses articles 6 et 25, pertinents en l’espèce, ont gardé la même rédaction.


7 –      Directive du Parlement européen et du Conseil du 15 décembre 2004 sur l’harmonisation des obligations de transparence concernant l’information sur les émetteurs dont les valeurs mobilières sont admises à la négociation sur un marché réglementé et modifiant la directive 2001/34/CE (JO L 390, p. 38, ci-après la «directive ‘obligations de transparence’»). Cette directive ne devait être transposée que pour le 20 janvier 2007. À la date de l’opération d’achat d’actions, le droit national devait intégrer les obligations de transparence de la directive 2001/34/CE du Parlement européen et du Conseil, du 28 mai 2001, concernant l’admission de valeurs mobilières à la cote officielle et l’information à publier sur ces valeurs (JO L 184, p. 1), entrée en vigueur le 26 juillet 2001 et portant codification de plusieurs anciennes directives, notamment la directive 82/121/CEE du Conseil, du 15 février 1982, relative à l’information périodique à publier par les sociétés dont les actions sont admises à la cote officielle d’une bourse de valeurs (JO L 48, p. 26).


8 –      Directive du Parlement européen et du Conseil du 28 janvier 2003 sur les opérations d’initiés et les manipulations de marché (abus de marché) (JO L 96, p. 16, ci-après la «directive ‘abus de marché’»). Bien que l’appellation de «directive ‘intégrité du marché’» serait plus appropriée, compte tenu de ses objectifs, elle est connue sous celle de «directive ‘abus de marché’», et j’adopte donc cette convention. Les États membres devaient la transposer pour le 12 octobre 2004. Elle a été modifiée par la directive 2010/78/UE du Parlement européen et du Conseil, du 24 novembre 2010, modifiant les directives 98/26/CE, 2002/87/CE, 2003/6/CE, 2003/41/CE, 2003/71/CE, 2004/39/CE, 2004/109/CE, 2005/60/CE, 2006/48/CE, 2006/49/CE et 2009/65/CE en ce qui concerne les compétences de l’Autorité européenne de surveillance (Autorité bancaire européenne), l’Autorité européenne de surveillance (Autorité européenne des assurances et des pensions professionnelles) et l’Autorité européenne de surveillance (Autorité européenne des marchés financiers) (JO L 331, p. 120), mais la rédaction de son article 14, paragraphe 1, applicable en l’espèce, n’a pas été changée.


9 –      Directive du Parlement européen et du Conseil du 16 septembre 2009 tendant à coordonner, pour les rendre équivalentes, les garanties qui sont exigées, dans les États membres, des sociétés au sens de l’article 48, deuxième alinéa, du traité, pour protéger les intérêts tant des associés que des tiers (JO L 258, p. 11). Cette directive est postérieure à l’opération d’achat d’action faisant l’objet du litige au principal. Ses articles 12 et 13, cités par la juridiction de renvoi, n’ont pas été modifiés à ce jour.


10 –      Je regrouperai ici ces directives sous l’appellation de «directives sur la protection des associés».


11 –      Cette énumération est maintenue par l’article 1er et l’annexe I de la directive 2012/30, citée à la note en bas de page 2.


12 –      L’article 6 de la directive 2012/30 remplace l’article 6 de la deuxième directive sur le droit des sociétés.


13 –      L’article 14 de la directive 2012/30 remplace l’article 12 de la deuxième directive sur le droit des sociétés.


14 –      Remplacé par l’article 17 de la directive 2012/30.


15 –      Remplacé par l’article 20 de la directive 2012/30.


16 –      Remplacé par l’article 21 de la directive 2012/30.


17 –      Article 19, paragraphe 1, sous a), de la deuxième directive sur le droit des sociétés.


18 –      Article 19, paragraphe 1, sous c), de la deuxième directive sur le droit des sociétés.


19 –      Article 19, paragraphe 1, sous d), de la deuxième directive sur le droit des sociétés.


20 –      Remplacé par l’article 22, paragraphe 1, sous d), de la directive 2012/30.


21 –      Voir considérants 1 et 2 de ladite directive.


22 –      Pour les besoins de cette disposition, les «consommateurs» sont des particuliers agissant pour leur propre compte et non pour le compte d’une société. Il semble que M. Hirmann relève de cette notion en ce qui concerne son acquisition d’actions.


23 –      Il peut paraître curieux que l’achat d’actions par M. Hirmann ne porte pas sur un nombre entier de titres. Tel est cependant le nombre rapporté par la décision de renvoi.


24 –      L’article 28, paragraphe 1, de la directive «obligations de transparence» mentionne également des sanctions civiles.


25 –      Voir note en bas de page 2 précisant la version de la deuxième directive sur le droit des sociétés en vigueur à l’époque.


26 –      Affaire 7 Ob 77/10i.


27 –      Affaire 6 Ob 28/12d.


28 –      Arrêt du 15 octobre 2009, Audiolux e.a. (C-101/08, Rec. p. I-9823, points 37 à 42). Voir, également, cinquième considérant de la deuxième directive sur le droit des sociétés.


29 –      Si plus d’un actionnaire a droit à une réparation, le juge national devra manifestement appliquer le principe d’égalité de traitement à l’égard de tous les actionnaires se trouvant dans la même situation lors de la détermination de la responsabilité de la société envers chacun d’eux.


30 –      Voir notes en bas de page 26 et 27 des présentes conclusions.


31 –      Précité au point 39 des présentes conclusions.


32 –      Précité au point 39 des présentes conclusions.


33 –      Directive du Conseil du 20 décembre 1985 concernant la protection des consommateurs dans le cas de contrats négociés en dehors des établissements commerciaux (JO L 372, p. 31).


34 –      Arrêt E. Friz, précité au point 39 des présentes conclusions (point 50).