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CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

MME JULIANE KOKOTT

présentées le 8 septembre 2016 (1)

Affaire C-390/15

Rzecznik Praw Obywatelskich (RPO)

[demande de décision préjudicielle formée par le Trybunał Konstytucyjny (Cour constitutionnelle, Pologne)]

« Législation fiscale – Taxe sur la valeur ajoutée (TVA) – Taux réduits de TVA applicables à la fourniture de livres, journaux et périodiques – Validité du point 6 de l’annexe III de la directive 2006/112/CE dans la version de la directive 2009/47/CE – Article 113 TFUE – Participation du Parlement européen – Principe d’égalité de traitement – Inégalité de traitement entre les publications sur papier et autres supports physiques et les publications transmises par voie électronique »





I –    Introduction

1.        La législation fiscale de l’Union en vigueur permet aux États membres d’avantager fiscalement la vente de livres, ainsi que de journaux et de périodiques. Toutefois cela concerne sans restriction uniquement les versions imprimées. Les États membres peuvent soumettre la vente de ces dernières à un taux réduit de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) du bénéfice duquel les versions numériques sont largement exclues.

2.        Par la présente demande de décision préjudicielle, le Trybunał Konstytucyjny (Cour constitutionnelle, Pologne) met en doute la validité du taux réduit de TVA applicable aux livres et autres publications, tel qu’il est régi par le droit de l’Union. La Cour examinera principalement quelle contrainte le principe d’égalité de traitement impose au législateur de l’Union en matière de TVA et dans quelle mesure ce dernier a respecté ces exigences lorsqu’il a prévu les taux réduits de TVA applicables aux livres, aux journaux et aux périodiques.

II – Cadre juridique

3.        L’article 93 CE (2) (devenu l’article 113 TFUE) régissait comme suit la compétence législative de la Communauté européenne :

« Le Conseil, statuant à l’unanimité sur proposition de la Commission et après consultation du Parlement européen et du Comité économique et social, arrête les dispositions touchant à l’harmonisation des législations relatives aux taxes sur le chiffre d’affaires, aux droits d’accises et autres impôts indirects dans la mesure où cette harmonisation est nécessaire pour assurer l’établissement et le fonctionnement du marché intérieur dans le délai prévu à l’article 14. »

4.        C’est sur cette base qu’a été adoptée la directive 2006/112/CE du Conseil, du 28 novembre 2006, relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée (3).

5.        Conformément à l’article 2, paragraphe 1, sous a), de la directive TVA, sont soumises à la TVA « les livraisons de biens effectuées à titre onéreux sur le territoire d’un État membre par un assujetti agissant en tant que tel ». Conformément à cette disposition, sous c), il en va de même des « prestations de services ».

6.        Concernant le taux de TVA, l’article 96 de la directive TVA prévoit que les États membres appliquent un « taux normal » qui ne doit pas être inférieur à un niveau minimal fixé à l’article 97. À titre complémentaire, l’article 98 de la directive TVA dans la version de la directive 2008/8/CE (4) dispose :

« 1. Les États membres peuvent appliquer soit un, soit deux taux réduits.

2. Les taux réduits s’appliquent uniquement aux livraisons de biens et aux prestations de services des catégories figurant à l’annexe III.

Les taux réduits ne sont pas applicables aux services fournis par voie électronique.

[…] »

7.        L’annexe III de la directive TVA, à laquelle renvoie l’article 98, paragraphe 2, premier alinéa, comprend la « liste des livraisons de biens et des prestations de services pouvant faire l’objet des taux réduits visés à l’article 98 ». Le point 6 de cette annexe est libellé comme suit dans la version de la directive 2009/47/CE (5) qui est pertinente pour l’affaire au principal :

« 6.      la fourniture de livres, sur tout type de support physique, y compris en location dans les bibliothèques (y compris les brochures, dépliants et imprimés similaires, les albums, livres de dessin ou de coloriage pour enfants, les partitions imprimées ou en manuscrit, les cartes et les relevés hydrographiques ou autres), les journaux et périodiques, à l’exclusion du matériel consacré entièrement ou d’une manière prédominante à la publicité […] ».

8.        Avant cette modification par la directive 2009/47, cette disposition était libellée comme suit :

« 6.      la fourniture de livres, y compris en location dans les bibliothèques (y compris les brochures, dépliants et imprimés similaires, les albums, livres de dessin ou de coloriage pour enfants, les partitions imprimées ou en manuscrit, les cartes et les relevés hydrographiques ou autres), les journaux et périodiques, à l’exclusion du matériel consacré entièrement ou d’une manière prédominante à la publicité […] ».

9.        Dans la proposition de la Commission, qui est à l’origine de la directive 2009/47, c’était encore la version suivante de la disposition qui était prévue (6) :

« […]

6.      la fourniture, y compris en location dans les bibliothèques, de livres (y compris les brochures, dépliants et imprimés similaires, les albums, livres de dessin ou de coloriage pour enfants, les partitions imprimées ou en manuscrit, les cartes et les relevés hydrographiques ou autres) ainsi que de livres audio, de disques compacts, de cédéroms ou d’autres supports physiques similaires reproduisant principalement la même information que celles contenues dans les livres imprimés, de journaux et de périodiques, à l’exclusion du matériel consacré entièrement ou d’une manière prédominante à la publicité  […] ».

10.      La République de Pologne a fait usage de la faculté prévue à l’article 98, lu conjointement avec l’annexe III, point 6, de la directive TVA, à l’article 41, paragraphe 2, lu conjointement avec les positions 72 à 75 de l’annexe 3, ainsi que les positions 32 à 35 de l’annexe 10 de l’ustawa o podatku od towaróv i usług (loi relative à la taxe sur les biens et services), du 11 mars 2004. Conformément à cette disposition, des taux réduits de 8 %, voire de 5 %, sont actuellement appliqués aux livres, aux journaux et aux périodiques en version imprimée ou sur d’autres supports (notamment sur CD ou cassette). Les livres, les journaux et les périodiques publiés par voie électronique sont soumis au taux normal de 23 %.

III – Litige au principal et procédure devant la Cour

11.      Selon le Rzecznik Praw Obywatelskich (médiateur, Pologne) l’imposition différente de publications identiques qui existe en droit polonais serait contraire au principe d’égalité devant l’impôt tel qu’il découle de la Constitution polonaise. C’est pourquoi il a demandé au Trybunał Konstytucyjny (Cour constitutionnelle) un contrôle de la constitutionnalité des dispositions polonaises relatives au taux réduit de TVA applicable aux publications.

12.      Le Trybunał Konstytucyjny (Cour constitutionnelle) estime que la République de Pologne est obligée d’appliquer le taux normal aux livres transmis par voie électronique et aux autres publications électroniques en raison des prescriptions de la directive TVA. Toutefois, il doute que les dispositions en cause de la directive TVA soient valides. D’une part, pendant la procédure législative de la directive 2009/47, sur laquelle est basée la version actuelle du point 6 de l’annexe III de la directive TVA, le texte aurait été modifié substantiellement après consultation du Parlement européen. D’autre part, il considère que l’exclusion de l’application d’un taux réduit de TVA aux publications électroniques téléchargées sur Internet sous forme de fichiers ou livrées en streaming est incompatible avec le principe de neutralité fiscale qui est l’expression du principe d’égalité de traitement dans le domaine de la TVA.

13.      C’est pourquoi, le 20 juillet 2015, le Trybunał Konstytucyjny (Cour constitutionnelle) a posé les questions préjudicielles suivantes en vertu de l’article 267 TFUE :

« 1)      Le point 6 de l’annexe III de la directive TVA est-il invalide au motif que la procédure législative a été entachée d’une violation des formes substantielles du fait de l’absence de consultation du Parlement européen ?

2)      L’article 98, paragraphe 2, de ladite directive TVA, lu en combinaison avec le point 6 de l’annexe III de cette même directive, est-il invalide au motif qu’il porte atteinte au principe de neutralité fiscale en excluant l’application des taux réduits de taxe aux livres électroniques et aux autres publications électroniques ? »

14.      Dans le cadre de la procédure devant la Cour, le médiateur, le Prokurator Generalny (procureur général, Pologne), la République hellénique, la République de Pologne, le Conseil de l’Union européenne et la Commission européenne ont présenté des observations écrites relatives à ces questions. Le médiateur, la République de Pologne, le Conseil et la Commission ont participé à l’audience du 14 juin 2016.

IV – Appréciation juridique

15.      En posant ses questions préjudicielles, le Trybunał Konstytucyjny (Cour constitutionnelle) cherche à savoir si la version actuelle du point 6 de l’annexe III de la directive TVA, telle qu’elle découle de l’article 1er, point 13, lu conjointement avec le point 1 de l’annexe de la directive 2009/47, est valide d’un point de vue de la forme et du point de vue de fond.

A –    La première question préjudicielle : validité du point de vue de la forme

16.      La première question préjudicielle vise à savoir si la procédure d’élaboration de la directive 2009/47, qui comporte la version actuelle du point 6 de l’annexe III de la directive TVA, s’est déroulée comme il se doit. En effet, il se pourrait que le Parlement n’ait pas été suffisamment impliqué concernant cette modification.

17.      La directive 2009/47 a été adoptée sur la base de l’article 93 CE. Conformément à cette disposition, le Conseil arrête les dispositions touchant à l’harmonisation des législations relatives, notamment, aux taxes sur le chiffre d’affaires, seulement après consultation du Parlement.

18.      Selon une jurisprudence constante, la consultation régulière du Parlement constitue une formalité substantielle dont le non-respect entraîne la nullité de l’acte concerné (7).

19.      En l’espèce, le Parlement a été consulté concernant la proposition initiale de la Commission et a présenté des observations écrites relatives à cette proposition (8). La proposition initiale prévoyait de compléter le point 6 de l’annexe III de la directive TVA de façon à ajouter d’autres exemples à la liste des types de « livres » auxquels un taux réduit de TVA peut être appliqué, à savoir « [les] livres audio, […] disques compacts, […] cédéroms ou […] autres supports physiques similaires reproduisant principalement la même information que celles contenues dans les livres imprimés » (9).

20.      Toutefois, ultérieurement, pendant la procédure législative, le Conseil s’est écarté de cette proposition. La directive 2009/47, qui a finalement été adoptée, a modifié la version alors en vigueur du point 6 de l’annexe III de la directive TVA uniquement en ajoutant à la formule introductive, « la fourniture de livres », les mots « sur tout type de support physique » (10). En revanche, les exemples figurant dans le projet de directive initial n’ont pas été retenus.

21.      Le Parlement n’a plus été consulté concernant cette version du point 6 de l’annexe III de la directive TVA. Or, selon une jurisprudence constante, une nouvelle consultation du Parlement est nécessaire lorsque le texte finalement adopté, « considéré dans son ensemble, s’écarte dans sa substance même » de celui sur lequel le Parlement a déjà été consulté, à l’exception des cas où les amendements correspondent, pour l’essentiel, au souhait exprimé par le Parlement lui-même (11).

22.      Comme un tel souhait du Parlement n’apparaît pas en l’espèce, il convient uniquement de se demander si, après avoir consulté le Parlement, le Conseil a modifié le texte de la directive 2009/47 de telle façon que « considéré dans son ensemble, [celui-ci] s’écarte dans sa substance même » de la proposition de la Commission.

23.      Tout d’abord, il convient de donner raison au Trybunał Konstytucyjny (Cour constitutionnelle) lorsqu’il voit une modification de fond dans la reformulation effectuée par le Conseil de la nouvelle version du point 6 de l’annexe III de la directive TVA.

24.      Certes, il n’est pas certain que le libellé de la nouvelle version ne vise plus les livres audio, contrairement à la proposition de la Commission, ce dont le Trybunał Konstytucyjny (Cour constitutionnelle) est convaincu. En effet, il est également possible de considérer que les livres audio sont encore des livres sur un support physique (12).

25.      Cependant, le fait que la version finalement adoptée du point 6 de l’annexe III de la directive TVA ne comporte plus la condition supplémentaire, prévue dans la proposition de directive, aux termes de laquelle les supports « reproduis[e]nt principalement la même information que celles contenues dans les livres imprimés », constitue une modification de fond du texte. De surcroît, tant dans la version en langue anglaise que dans la version en langue française de la proposition de directive, le taux réduit de TVA devait tout d’abord ne pouvoir être étendu qu’à des supports physiques similaires comme les livres audio, les disques compacts et les cédéroms (13), alors que le point 6 de l’annexe III de la directive TVA vise désormais tout type de support physique. Ces deux modifications ont, dans une certaine mesure, élargi le champ d’application du taux réduit de TVA par rapport à la proposition de la Commission (14).

26.      Toutefois, cela n’a pas entraîné une modification de la proposition de directive tellement importante qu’une nouvelle consultation du Parlement aurait été nécessaire. Selon la jurisprudence, seules les modifications qui touchent le cœur même de la disposition en cause doivent être qualifiées de « substantielles » (15).

27.      L’un des objectifs essentiels de la proposition de directive était de permettre durablement à tous les États membres d’appliquer des taux réduits à certains services fournis localement (16). En revanche, l’extension du champ d’application du taux réduit applicable aux livres n’a qu’une importance secondaire dans la proposition et est qualifiée de simple « adaptation technique » (17).

28.      À supposer même que le critère du caractère substantiel doive être respecté concernant toute disposition autonome d’une proposition d’acte législatif, la suppression de la limitation relative aux informations contenues dans un support et le remplacement des supports « similaires » par « tout type » de support ne touchent pas le cœur même de la disposition modifiant le taux réduit de TVA applicable aux livres. En effet, cette disposition est caractérisée surtout par l’extension à d’autres supports physiques que le papier du champ d’application du taux réduit applicable aux livres. Dans le cadre de cette extension de principe, les extensions du champ d’application évoquées ne sont qu’accessoires.

29.      En outre, lors de la consultation, le Parlement a eu de toute façon l’opportunité de donner un avis sur ces points, puisque les limitations du champ d’application abandonnées par la suite figuraient déjà dans la proposition de la Commission (18).

30.      Comme, par conséquent, le Parlement a été dûment impliqué dans le cadre de la procédure législative qui a conduit à l’adoption de la directive 2009/47, à cet égard, la validité de la version actuelle du point 6 de l’annexe III de la directive TVA n’est pas affectée.

B –    La seconde question préjudicielle : validité du point de vue du fond

31.      La seconde question préjudicielle vise à savoir si le point 6 de l’annexe III, lu conjointement avec l’article 98, paragraphe 2, de la directive TVA, est invalide en ce qu’il exclut l’application d’un taux réduit de TVA aux livres transmis par voie électronique et aux autres publications électroniques.

32.      Bien que, dans la formulation de la question préjudicielle, la juridiction de renvoi se fonde sur une violation du principe de neutralité fiscale, il ressort des motifs de la décision de renvoi qu’elle souhaite un contrôle à l’aune du principe d’égalité de traitement (19).

33.      D’ailleurs, un tel contrôle est le seul possible. En effet, l’invalidité du point 6 de l’annexe III de la directive TVA peut découler uniquement du droit primaire. Or, en tant que tel, le principe de neutralité fiscale est seulement un outil d’interprétation de la directive TVA qui n’a pas rang constitutionnel (20). Il en va également ainsi dans la mesure où le principe de neutralité fiscale, dans le sens d’une neutralité du point de vue de la concurrence (21), est un corollaire du principe d’égalité de traitement (22). En effet, malgré tout, le contrôle de la validité d’une disposition de la directive TVA peut seulement être effectué à l’aune du principe d’égalité de traitement en tant que tel, qui est le seul à avoir rang constitutionnel et qui, selon la jurisprudence, pose également d’autres exigences que le principe de neutralité fiscale.

34.      Il ressort de la question préjudicielle, à la lumière de la motivation de cette dernière dans la décision de renvoi, que ce sont plusieurs inégalités de traitement qu’il convient de contrôler à l’aune du principe d’égalité de traitement. En premier lieu, la juridiction de renvoi fait valoir que les livres numériques seraient traités différemment selon qu’ils sont mis à la disposition du client au moyen d’un support physique, comme un cédérom, ou par voie électronique, par exemple, par téléchargement sur Internet (23) (voir ci-après, sous 1). En second lieu, la juridiction de renvoi met également en cause le traitement différent d’autres publications que les livres, auxquelles le taux réduit de TVA est applicable, c’est-à-dire les journaux et les périodiques. Nous examinerons d’abord le fait que ces dernières sont exclues de l’application d’un taux réduit de TVA même lorsqu’elles sont livrées sur un support physique (voir ci-après, sous 2), avant de devoir examiner enfin le traitement différent de toutes les publications numériques fournies par voie électronique par rapport aux publications imprimées (voir ci-après, sous 3).

35.      La Cour ne s’est pas encore prononcée sur tous ces points. Même dans une décision récente, rendue dans le cadre d’un recours en manquement concernant l’application du point 6 de l’annexe III de la directive TVA aux livres numériques transmis par voie électronique, elle a expressément renoncé à examiner si cette disposition est compatible avec le principe d’égalité de traitement (24).

1.      Le traitement différent des livres numériques selon leur mode de transmission

36.      En premier lieu, il convient de déterminer si le point 6 de l’annexe III, lu conjointement avec l’article 98, paragraphe 2, de la directive TVA, viole le principe d’égalité de traitement en ce qu’il permet aux États membres d’appliquer un taux réduit de TVA aux livres (audio) numériques seulement lorsqu’ils sont fournis sur un support physique et non pas par voie électronique (25).

37.      Selon une jurisprudence constante, le principe d’égalité de traitement veut que le législateur de l’Union ne traite pas des situations comparables de manière différente, à moins qu’une différenciation ne soit objectivement justifiée (26). Ce principe général d’égalité de traitement est désormais inscrit à l’article 20 de la Charte (27).

a)      Situations comparables

38.      Tout d’abord, il convient de se demander si la fourniture de livres numériques sur un support physique, d’une part, et leur fourniture par voie électronique, d’autre part, constituent des situations comparables.

39.      Selon une jurisprudence désormais constante, le caractère comparable de deux situations doit être apprécié à la lumière de l’objet de l’acte de l’Union qui institue la distinction en cause ainsi qu’au vu des principes et des objectifs du domaine dont relève l’acte en cause (28). C’est pourquoi, pour considérer que deux situations ne sont pas comparables, il n’est suffisant ni de constater tout simplement des différences objectives, sans démontrer leur pertinence au regard des objectifs de l’acte (29), ni de suivre aveuglément l’appréciation du législateur de l’Union (30).

i)      Les objectifs du domaine dont relève l’acte en cause

40.      Le système commun de TVA, dont la réglementation du taux réduit de TVA fait partie, contribue à la réalisation de l’objectif de l’instauration d’un marché intérieur, comme l’indique le considérant 4 de la directive TVA. À cette fin, une harmonisation au niveau de l’Union vise à éviter que la concurrence ne soit faussée par les États membres en raison de la perception de taxes sur le chiffre d’affaires, tant au niveau de l’Union qu’au niveau national.

41.      En outre, conformément au considérant 8, l’harmonisation des taxes sur le chiffre d’affaires vise aussi à créer une assiette déterminée d’une manière uniforme aux fins des ressources propres de l’Union. Toutefois, cet objectif de la réglementation importe peu en l’espèce, car les dispositions litigieuses de la directive TVA ont pour objet le taux de TVA et non pas la détermination de l’assiette.

42.      Quant à l’objectif d’éviter que la concurrence ne soit faussée, certes, la Cour a déjà constaté qu’une violation du principe d’égalité de traitement en matière de TVA n’est pas limitée aux situations concernant des opérateurs économiques concurrents (31). Cependant, en tout état de cause, dès lors qu’il existe une situation de concurrence susceptible d’être faussée par des dispositions différentes en matière de TVA, il y a lieu de considérer que les situations sont comparables du point de vue de l’objectif fondamental du système commun de TVA (32). D’ailleurs, l’approche consistant à se baser sur l’existence d’une situation de concurrence entre deux produits correspond à celle que la Cour a déjà adoptée dans sa jurisprudence lors de l’élaboration du principe d’égalité de traitement (33).

43.      En l’espèce, les livres numériques distribués au moyen d’un support physique et les livres numériques distribués par voie électronique se trouvent dans une situation de concurrence l’un avec l’autre. En effet, pour le consommateur, dont ce sont les besoins qui créent une situation de concurrence, il s’agit dans les deux cas du même produit, à savoir le fichier d’un livre numérique, qui, à chaque fois, n’est pas utilisable sans un appareil de lecture supplémentaire. Seul le moyen de transmission au consommateur diffère. C’est pourquoi, selon les conditions de l’offre, le consommateur choisira l’un ou l’autre moyen de transmission, pour obtenir le même produit.

44.      Généralement, il en va également ainsi si, comme la Commission l’a soutenu lors de l’audience, en cas d’obtention d’un livre numérique par voie électronique, le consommateur ne devait pas acquérir de droit de transmission du fichier à une autre personne, contrairement au cas d’obtention sur un support physique (34). En effet, en règle générale, un consommateur achète un livre numérique pour son usage personnel, si bien que la possibilité de transmettre un fichier à un tiers, à supposer qu’elle dépende effectivement du mode de fourniture, n’a pas d’influence déterminante sur la situation de concurrence. De surcroît, dans le contexte de la protection du droit d’auteur, la Cour a déjà constaté que, « d’un point de vue économique », la vente de contenus sur CD-ROM ou DVD et la vente de contenus par téléchargement au moyen d’Internet sont similaires (35).

45.      Ainsi, les deux modes de fourniture d’un livre numérique sont comparables au regard de l’objectif fondamental du système commun de TVA, qui est d’empêcher que la concurrence ne soit faussée.

ii)    Les principes du domaine dont relève l’acte en cause

46.      Le fait que, conformément aux dispositions du système commun de TVA, la fourniture d’un livre numérique sur un support physique constitue une livraison de biens (article 14, paragraphe 1, de la directive TVA) et la fourniture par voie électronique une prestation de services (article 24, paragraphe 1, de la directive TVA) (36) ne fait pas obstacle à leur caractère comparable.

47.      Aux termes du considérant 5 de la directive TVA, la taxe est perçue « d’une manière aussi générale que possible », c’est-à-dire sur la totalité des produits. Cela est confirmé à l’article 1er, paragraphe 2, premier alinéa, de la directive TVA, aux termes duquel le principe du système commun de TVA est d’appliquer un impôt général sur la consommation. C’est pourquoi les deux faits générateurs, pour la livraison de biens [article 2, paragraphe 1, sous a), de la directive TVA] et pour la prestation de services [article 2, paragraphe 1, sous c), de la directive TVA] sont subordonnés à des conditions identiques. Ainsi, la TVA vise en principe à imposer de la même manière la consommation de biens et de services.

48.      Lorsque, à titre d’exception, les dispositions du système commun de TVA distinguent la livraison de biens de la prestation de services, il y a, à chaque fois, une raison particulière à cela. Par exemple, dans le cadre de la détermination du lieu d’une opération imposable (articles 31 et suivants de la directive TVA), il est uniquement possible de faire référence à la livraison d’un bien avec un moyen de transport physique.

49.      Toutefois, en l’espèce, qui concerne la fixation du taux de TVA, cette différence liée à la présence matérielle du produit n’est pas pertinente. S’agissant de la fixation des taux de TVA, la directive TVA ne distingue pas la livraison de biens de la prestation de services. Au contraire, l’article 96 de la directive TVA dispose expressément que le taux de TVA doit être le même pour les livraisons de biens et les prestations de services. De surcroît, conformément à l’article 98, paragraphe 2, premier alinéa, les taux réduits de TVA sont prévus tant pour les livraisons de biens que pour les prestations de services.

iii) L’objectif de la disposition examinée

50.      Enfin, il convient d’apprécier le caractère comparable des fournitures « physiques » et électroniques de livres numériques au regard de l’objectif poursuivi par la disposition examinée.

51.      Le point 6 de l’annexe III de la directive TVA permet aux États membres d’accorder un taux réduit de TVA pour les livres, les journaux et les périodiques. Ni le texte de la directive 92/77/CEE, par laquelle cette disposition a été introduite (37), ni la genèse de celle-ci ne font apparaître l’objectif poursuivi par l’octroi de cet avantage fiscal.

52.      Dans le cadre de la présente affaire, le Conseil et la Commission n’ont pas été en mesure de donner une réponse satisfaisante à cette question. Il ressort d’ailleurs d’une communication de la Commission de 2007 relative aux taux réduits de TVA que les dispositions en cause de la directive « n[e sont] pas fondée[s] sur une approche bien structurée ou logique, mais qu’elle[s] reflète[nt] plutôt simplement la situation qui existait dans les États membres au début des années quatre-vingt-dix » (38). Ainsi, selon la Commission, la structure actuelle des taux de TVA ne répond à aucune logique claire (39).

53.      C’est pourquoi, en réponse à une question posée lors de l’audience, la Commission a indiqué notamment que le taux réduit de TVA applicable aux livres, aux journaux et aux périodiques a été prévu dans le droit de l’Union uniquement parce que, à ce moment-là, au moins quelques États membres appliquaient un tel taux réduit de TVA et que le droit de l’Union ne devait pas les priver de cette possibilité.

54.      Certes, il est tout à fait concevable qu’une disposition du droit de l’Union ne poursuive aucun objectif propre autre que celui de laisser la responsabilité de certaines dispositions aux États membres. Cependant, ce n’est pas le cas en l’espèce. En effet, la directive TVA ne laisse pas tout simplement aux États membres le soin de réglementer les taux réduits de TVA, mais elle permet, conformément à l’article 98, lu conjointement avec l’annexe III de la directive TVA, uniquement l’application de taux réduits à des contenus précisément déterminés et énumérés limitativement et à aucun autre. Ce faisant, le droit de l’Union prend lui-même la responsabilité des conditions d’application de taux réduits de TVA par les États membres. Par conséquent, les objectifs poursuivis par le législateur de l’Union en conférant aux États membres la faculté d’appliquer des taux réduits de TVA précisément aux livres, aux journaux et aux périodiques doivent être déterminés de manière autonome en droit de l’Union.

55.      Bien que, dans la présente affaire, le Conseil et la Commission aient tous deux soutenu que la directive TVA ne poursuivrait pas d’objectif d’aide à certains secteurs, il est manifeste que la possibilité d’appliquer un taux réduit de TVA permet bien aux États membres de soutenir la vente de certains produits et qu’elle poursuit donc certains objectifs politiques (40). En effet, un taux réduit de TVA permet aux assujettis de faire une offre à un meilleur prix. En outre, cette aide bénéficie uniquement au consommateur puisque la TVA vise à grever uniquement celui-ci (41).

56.      La finalité de cette aide fiscale nous paraît d’ailleurs évidente. Le taux réduit de TVA applicable aux livres, aux journaux et aux périodiques a un objectif culturel. Il vise, au sens large, à favoriser la culture des citoyens de l’Union grâce à la lecture, qu’il s’agisse de littérature ou d’ouvrages spécialisés, ou bien de journaux et de périodiques politiques, spécialisés ou de divertissement. L’exclusion des publications « consacré[es] entièrement ou d’une manière prédominante à la publicité » au point 6 de l’annexe III de la directive TVA constitue un indice en ce sens. En effet, de telles publications ne poursuivent pas un objectif culturel. En outre, cet objectif se retrouve également ailleurs dans le système commun de TVA, à savoir avec l’avantage fiscal important accordé aux prestations de formation à l’article 132, paragraphe 1, sous i) et j), de la directive TVA.

57.      La réalisation de cet objectif culturel dépend du seul contenu, mais non pas du mode de transmission d’un livre numérique. C’est pourquoi, a priori, il n’existe pas de différence entre les livres numériques vendus sur des supports physiques et les livres numériques vendus par voie électronique au regard de l’objectif poursuivi par le point 6 de l’annexe III de la directive TVA. Par conséquent, les deux formes de fourniture sont comparables du point de vue de l’objectif de la disposition examinée.

iv)    Conclusion intermédiaire

58.      Au vu des considérations qui précèdent, il y a lieu de constater que la fourniture de livres numériques sur un support physique, d’une part, et la fourniture par voie électronique, d’autre part, sont comparables tant du point de vue de l’objectif de la disposition examinée que des objectifs et des principes du domaine dont relève cette disposition.

b)      Justification

59.      Toutefois, une différence de traitement peut être justifiée dès lors qu’elle poursuit un but légalement admissible et que cette différence est proportionnée au but poursuivi par le traitement concerné (42).

60.      Ces exigences doivent être respectées quel que soit le domaine du droit dans lequel une inégalité de traitement est constatée. Elles s’appliquent même lorsque la Cour a reconnu expressément au législateur de l’Union un large pouvoir d’appréciation (43), comme notamment dans le domaine de la politique agricole (44).

61.      Néanmoins, l’intensité du contrôle de la justification d’une inégalité de traitement est différente selon l’étendue du pouvoir d’appréciation dont dispose le législateur de l’Union dans le cas d’espèce. Si le législateur de l’Union prévoit une différence de traitement sur le fondement d’un critère de distinction interdit par l’article 21 de la Charte, comme le sexe ou la race (45), alors la justification de l’inégalité de traitement est soumise à un contrôle plus strict de la Cour (46). En revanche, si la distinction est fondée sur un autre critère, le contrôle de la Cour est moins strict, afin d’éviter que le juge de l’Union substitue sa propre appréciation à celle du législateur de l’Union (47). Selon la jurisprudence, il en va ainsi tout particulièrement de dispositions concernant des appréciations complexes d’ordre politique, économique, social ou médical (48). Néanmoins, même dans ces cas, le contrôle de proportionnalité de la Cour doit être d’autant plus strict que les conséquences d’un inégalité de traitement sont graves pour le citoyen de l’Union (49).

i)      L’objectif de l’inégalité de traitement

62.      Dans le contexte de ce contrôle limité, il convient tout d’abord d’identifier l’objectif que poursuit le législateur de l’Union en prévoyant une inégalité de traitement entre la fourniture de livres numériques sur des supports physiques et leur fourniture par voie électronique.

63.      L’inégalité de traitement a été introduite par la directive 2009/47. Il est indiqué au considérant 4 de cette directive que l’extension de l’aide fiscale prévue à l’article 6 de l’annexe III de la directive TVA aux livres numériques fournis sur un support physique vise à « préciser et [à] adapter à l’évolution technologique la référence aux livres qui figure à l’annexe III ». Toutefois, la directive 2009/47 a laissé inchangée notamment la disposition de l’article 98, paragraphe 2, second alinéa, de la directive TVA, prévoyant que les taux réduits ne sont en aucun cas applicables aux services fournis par voie électronique. C’est pourquoi, en tant que tels, les livres numériques transmis par voie électronique ne peuvent pas être soumis à un taux réduit de TVA (50).

64.      Ainsi, l’adaptation à l’évolution technologique n’a pas été complète. Le mode « naturel » de transmission des livres électroniques, à savoir la voie électronique, ne devait justement pas pouvoir profiter d’un taux réduit de TVA. En fin de compte, cela est dû à la disposition de l’article 98, paragraphe 2, second alinéa, de la directive TVA qui exclut l’application d’un taux réduit de TVA pour la totalité des services fournis par voie électronique (51), et donc non pas seulement pour les livres numériques transmis par voie électronique. Par conséquent, l’objectif de cette disposition générale applicable au marché des prestations de services électroniques est déterminant pour justifier l’inégalité de traitement en cause en l’espèce.

65.      L’article 98, paragraphe 2, second alinéa, de la directive TVA a pour origine la disposition de l’article 12, paragraphe 3, sous a), quatrième alinéa, lu conjointement avec l’article 9, paragraphe 2, sous e), dernier tiret, de la sixième directive 77/388/CE (52), qui avait été introduite par la directive 2002/38/CE (53). Les considérants de la directive 2002/38 ne donnent aucune indication sur les objectifs de cette disposition.

66.      Néanmoins, la proposition de la Commission évoque l’incertitude concernant le taux de TVA applicable,à laquelle pourraient être confrontés les prestataires de services fournis par voie électronique (54). En effet, la directive 2002/38 a soumis les fournisseurs de services par voie électronique établis en dehors de l’Union à l’obligation de s’acquitter de la TVA dans l’État membre où le consommateur est établi (55). Cela vise à éviter que la concurrence ne soit faussée (56) en raison de la politique fiscale d’États tiers. Cette réglementation a pour effet de soumettre les services fournis par voie électronique au taux de TVA de l’État membre dans lequel se trouve le consommateur.

67.      En même temps, les assujettis établis en dehors de l’Union devaient s’acquitter plus facilement de leurs nouvelles obligations fiscales, bien sûr également afin de renforcer la probabilité que ces obligations soient respectées (57). Les simplifications devaient également profiter aux administrations fiscales des États membres et renforcer les possibilités de contrôle de celles-ci (58). Tout d’abord, cela consistait à permettre aux assujettis de s’acquitter de leurs obligations en remplissant des déclarations fiscales électroniques dans un seul État membre pour l’ensemble de l’Union (59). En outre, la disposition antérieure de l’article 98, paragraphe 2, second alinéa, de la directive TVA garantissait que le taux pouvant être appliqué aux services fournis par voie électronique aux consommateurs d’un État membre soit toujours seulement le taux normal de cet État membre.

68.      En revanche, les prestataires de services fournis par voie électronique établis dans l’Union se trouvaient dans une situation différente. En effet, la directive 2002/38 ne devait rien changer pour eux. Ils devaient continuer à soumettre leurs services fournis par voie électronique à la TVA dans leur État membre d’établissement, quel que soit le lieu d’établissement du consommateur (60), c’est pourquoi ils étaient soumis au maximum aux trois taux différents de cet État membre.

69.      Toutefois, en l’espèce, la Commission a indiqué en substance que l’interdiction de taux réduits applicables à des services fournis par voie électronique importerait également pour les assujettis opérant à l’intérieur de l’Union car elle empêcherait une concurrence fiscale dommageable entre les États membres. En effet, comme, pour ces assujettis, seul leur lieu d’établissement serait déterminant concernant la charge fiscale liée aux services fournis par voie électronique, un État membre aurait justement pu tenter d’inciter ces prestataires à s’établir sur son territoire en introduisant un tel taux réduit de TVA. En effet, il est relativement facile de transférer la centrale d’un réseau de distribution par voie électronique.

70.      Néanmoins, le droit a changé fondamentalement depuis le 1er janvier 2015. Dorénavant, conformément à la version en vigueur de l’article 58, paragraphe 1, sous c), de la directive TVA (61), la même règle s’applique aux assujettis établis dans l’Union et à ceux qui sont établis en dehors de l’Union : les services fournis par voie électronique doivent toujours être imposés dans l’État membre du consommateur. Depuis lors, tous les fournisseurs peuvent également s’acquitter de leurs obligations fiscales envers tous les États membres en remplissant une déclaration fiscale dans un seul État membre (62).

71.      En fin de compte nous avons affaire à deux objectifs différents de l’article 98, paragraphe 2, second alinéa, de la directive TVA, qu’il convient de surcroît de distinguer selon les périodes : l’interdiction des taux réduits de TVA applicables aux services fournis par voie électronique visait, jusqu’au 31 décembre 2014, d’une part, à simplifier les obligations fiscales des assujettis établis en dehors de l’Union, d’autre part, à empêcher une concurrence fiscale dommageable entre les États membres ; depuis le 1er janvier 2015, l’interdiction ne vise plus qu’à simplifier les obligations fiscales, mais désormais cela concerne l’ensemble du marché des services fournis par voie électronique.

ii)    Poursuite des objectifs de manière proportionnée

72.      Le législateur de l’Union devrait également avoir poursuivi ces objectifs de manière proportionnée. À cet égard, il convient de comparer les conséquences de l’inégalité de traitement avec les avantages résultant de la poursuite de l’objectif. Ce faisant, il convient de tenir compte de ce que, en matière fiscale, le législateur de l’Union doit porter des appréciations complexes d’ordre économique et financier et dispose d’un pouvoir d’appréciation (63).

73.      Concernant l’objectif de simplification des obligations fiscales en raison d’un nombre moindre de taux de TVA à prendre en compte, il convient de distinguer. En effet, à cet égard, l’interdiction des taux réduits de TVA applicables aux services fournis par voie électronique est utile à la fois pour les assujettis et pour les administrations fiscales des États membres (64).

74.      À cet égard, la simplification dont bénéficie les assujettis ne constitue pas une contrepartie proportionnée pour les inconvénients qu’ils subissent en raison du refus d’application du taux réduit aux livres numériques fournis par voie électronique. En effet, leur protection contre un trop grand nombre de taux différents est trop chèrement payée, car leurs services sont soumis à un taux de TVA plus élevé et subissent donc un désavantage concurrentiel. Bien entendu, le fait de profiter de tout avantage fiscal rend l’application du droit fiscal plus compliquée pour le bénéficiaire. Toutefois, ces complications ne sauraient donner un blanc-seing au législateur pour traiter de manière inégale des situations comparables.

75.      Concernant la simplification du travail des administrations fiscales des États membres, il serait possible d’opposer au caractère proportionné de la poursuite de l’objectif un arrêt ancien de la Cour, aux termes duquel des difficultés d’ordre pratique ne sauraient justifier l’imposition d’une charge manifestement inégale, en l’occurrence aux livres numériques transmis par voie électronique (65). Toutefois, dans le cadre de l’interdiction de discrimination de libertés fondamentales, dernièrement, la Cour a clairement reconnu que les administrations fiscales ont un intérêt légitime à l’introduction de règles pouvant être aisément gérées et contrôlées (66).

76.      C’est pourquoi il relève en principe du pouvoir d’appréciation du législateur de l’Union de mettre en place un système spécifique d’imposition de la totalité des services fournis par voie électronique selon leur lieu de consommation. Le fait qu’un tel système d’imposition spécifique puisse être nécessaire découle de la situation particulière des services fournis par voie électronique qui, par comparaison avec le commerce de biens classique, peuvent traverser les frontières pratiquement sans aucun effort et ne requièrent de surcroît qu’une présence physique minimale, ce qui rend l’intervention des services fiscaux nationaux plus difficile.

77.      En outre, la Cour a déjà reconnu que, lorsque le législateur de l’Union a affaire à un système complexe, il lui est loisible de recourir à une approche par étapes (67). C’est pourquoi il est compréhensible que le législateur de l’Union conçoive tout d’abord un tel système d’imposition le plus simplement possible. Il en va ainsi tout particulièrement à un moment où les prestataires de services fournis par voie électronique proposent un grand nombre de produits d’un type nouveau, dont la classification dans les catégories existantes de taux réduits de TVA peut susciter des doutes.

78.      Néanmoins, le caractère proportionné d’une telle approche progressive est subordonné à un réexamen du système à intervalles réguliers (68). Jusqu’à présent, l’action des institutions compétentes au niveau de l’Union satisfait à cette exigence. Dès l’introduction des dispositions en cause, le Conseil a prévu de réexaminer après un certain temps le système d’imposition spécifique des services fournis par voie électronique, pour tenir compte de l’expérience acquise (69). De surcroît, la Commission a annoncé, il y a peu, qu’elle examinait l’élaboration d’un projet de directive modifiant la directive TVA, afin d’instaurer une égalité de traitement des livres numériques transmis par voie électronique (70).

79.      Certes, dans la mesure où, jusqu’au 31 décembre 2014, l’objectif de simplification du système d’imposition concernait seulement les assujettis établis en dehors de l’Union, les considérations qui précèdent ont relativement peu d’importance. Toutefois, pour cette période, cela est compensé par l’objectif légitime consistant à empêcher une concurrence dommageable entre les États membres (71).

80.      En revanche, l’autre côté de la balance n’a pas beaucoup de poids.

81.      Ainsi, les distorsions de concurrence entre les fournisseurs de livres numériques fournis sur un support physique et ceux des livres numériques fournis par voie électronique devraient être limitées. En effet, lors de l’audience, la République de Pologne a observé à juste titre que les frais de distribution par voie électronique sont beaucoup plus faibles que ceux de la distribution classique de biens. Par conséquent, les livres numériques transmis par voie électronique peuvent généralement être proposés à un prix inférieur à celui des livres qui sont fournis sur un support physique, même s’ils sont soumis à un taux plus élevé de TVA.

82.      Dans ces conditions, il n’y a pas à constater d’atteintes sérieuses à l’accès transfrontalier aux livres, qui est protégé par les libertés fondamentales, ou, ce sur quoi le médiateur a attiré l’attention à juste titre, à l’accès des personnes handicapées aux livres (72).

83.      Partant, les objectifs du législateur de l’Union liés à l’article 98, paragraphe 2, second alinéa, de la directive TVA sont poursuivis de manière proportionnée.

c)      Conclusion intermédiaire

84.      Par conséquent, l’inégalité de traitement concernant le taux réduit de TVA des livres numériques selon leur mode de transmission, qui découle du point 6 de l’annexe III, lu conjointement avec l’article 98, paragraphe 2, de la directive TVA, est justifiée et n’est donc pas contraire au principe d’égalité de traitement.

2.      L’exclusion des journaux et des périodiques numériques fournis sur un support physique

85.      En second lieu, il convient maintenant d’examiner si le fait que le point 6 de l’annexe III, lu conjointement avec l’article 98, paragraphe 2, de la directive TVA, ne permet pas d’appliquer un taux réduit de TVA aux journaux et aux périodiques numériques fournis sur un support physique est compatible avec le principe d’égalité de traitement. À cet égard, il convient d’examiner deux inégalités de traitement différentes.

a)      Comparaison avec les livres numériques

86.      D’une part, de cette façon, les journaux et les périodiques numériques sont traités différemment des livres numériques, puisque ces derniers peuvent être soumis à un taux réduit de TVA, lorsqu’ils sont fournis sur un support physique.

87.      Pour qu’il en résulte une violation du principe d’égalité de traitement, il faudrait tout d’abord que les journaux et les périodiques, d’une part, et les livres, d’autre part, soient dans des situations comparables (73).

88.      Or, ce n’est pas le cas. Les situations ne sont comparables ni du point de vue de l’objectif du système commun de TVA ni de l’objectif de la disposition examinée (74).

89.      Premièrement, généralement les journaux et les périodiques ne sont pas en concurrence avec les livres. Les différentes formes de publications s’adressent à des besoins divers du consommateur car, en règle générale, ils diffèrent par la longueur du texte, le type d’informations, l’exigence artistique et la pérennité. C’est pourquoi ils ne sont pas comparables au regard de l’objectif du système commun de TVA, qui est d’empêcher que la concurrence ne soit faussée (75).

90.      Deuxièmement, du point de vue de l’objectif de la disposition examinée, les journaux et les périodiques, d’une part, ainsi que les livres, d’autre part, ne sont pas comparables non plus. En règle générale, l’objectif culturel que poursuit le point 6 de l’annexe III de la directive TVA (76) est très différent chez ces diverses formes de publications. Alors que les journaux et les périodiques ont plutôt un caractère pratique et portent sur l’actualité, les livres visent plutôt à transmettre des savoirs d’importance plus durable ou une expression artistique. Ainsi, l’objectif d’une aide fiscale bénéficiant aux livres d’une part, et celui d’une aide fiscale bénéficiant aux journaux et aux périodiques, d’autre part, sont bien différents à l’intérieur du domaine de la culture.

91.      Partant, l’inégalité de traitement entre les journaux et les périodiques numériques fournis sur un support physique et les livres numériques fournis sur un support physique n’est pas contraire au principe d’égalité de traitement.

b)      Comparaison avec les journaux et les périodiques sur support papier

92.      D’autre part, les journaux et les périodiques fournis sur un support physique sont également traités différemment des journaux et des périodiques publiés sur support papier.

93.      Bien que cela ne soit pas tout à fait aussi clair que dans le cas précédent, nous estimons que les journaux et les périodiques sur support papier ainsi que les journaux et les périodiques numériques fournis sur un support physique ne sont pas non plus objectivement comparables.

94.      Certes, du point de vue de l’objectif d’aide du point 6 de l’annexe III de la directive TVA, il y a lieu a priori de considérer que les journaux et les périodiques numériques et imprimés sont comparables, puisqu’à cet égard seul le contenu devrait importer (77).

95.      Cependant, il n’en va pas de même du point de vue de l’objectif du système commun de TVA, qui est d’empêcher que la concurrence ne soit faussée (78). En effet, dans l’arrêt du 11 septembre 2014, K (C-219/13, EU:C:2014:2207), la Cour a déjà jugé concernant les livres que la version numérique sur un support physique d’un livre ne se trouve pas nécessairement en concurrence avec la version papier. En effet, l’existence d’une telle concurrence dépend d’un grand nombre de circonstances qui varient non seulement d’un État membre à l’autre mais aussi dans le temps (79). Or, dans une situation de fait aussi peu claire, il appartient au seul législateur de l’Union et non à la Cour de procéder à l’appréciation complexe d’une situation de concurrence dans l’ensemble de l’Union, dans le cadre du pouvoir d’appréciation dont il dispose (80).

96.      Par conséquent, le principe d’égalité de traitement n’est pas non plus violé parce que, conformément au point 6 de l’annexe III, lu conjointement avec l’article 98, paragraphe 2, de la directive TVA, les journaux et les périodiques numériques fournis sur un support physique ne peuvent pas être soumis à un taux réduit de TVA, contrairement à leur équivalent papier.

3.      L’inégalité de traitement entre les publications transmises par voie électronique et les publications imprimées

97.      Enfin, il convient encore d’examiner si l’inégalité de traitement entre les publications numériques transmises par voie électronique et les publications imprimées, qui résulte du point 6 de l’annexe III, lu conjointement avec l’article 98, paragraphe 2, de la directive TVA, pourrait être contraire au principe d’égalité de traitement.

98.      Or, au vu des considérations qui précèdent, ce n’est pas le cas.

99.      Finalement, il importe peu de savoir si les publications numériques et imprimées ne sont pas suffisamment comparables de manière générale au sens de la jurisprudence. Ce qui plaide en ce sens du point de vue de l’objectif de la disposition examinée, c’est le fait qu’il existe entre les publications numériques transmises par voie électronique et les publications imprimées une différence importante quant au besoin de bénéficier d’une aide, qui résulte de frais de distribution très différents (81). De surcroît, il conviendrait de prendre en compte le pouvoir d’appréciation du législateur de l’Union pour évaluer la situation en matière de concurrence (82).

100. Toutefois, à supposer même que leurs situations soient comparables, l’inégalité de traitement entre les publications numériques transmises par voie électronique et les publications imprimées serait actuellement justifiée. Cela découle notamment, comme nous l’avons vu, de l’objectif légitime du législateur, consistant à prévoir un système d’imposition spécifique pour les services fournis par voie électronique (83). À cet égard, l’inégalité de traitement entre les publications transmises par voie électronique et les publications imprimées est d’autant plus proportionnée que la situation de concurrence devrait être encore moins marquée qu’entre publications numériques identiques (84).

101. Partant, le fait que le point 6 de l’annexe III, lu conjointement avec l’article 98, paragraphe 2, de la directive TVA, exclut les publications transmises par voie électronique du champ d’application du taux réduit de TVA, contrairement aux publications imprimées, n’est pas contraire au principe d’égalité de traitement.

V –    Conclusion

102. Au vu des considérations qui précèdent, nous concluons à ce qu’il plaise à la Cour juger que l’examen des questions préjudicielles n’a rien fait apparaître qui soit susceptible de remettre en cause la validité du point 6 de l’annexe III de la directive 2006/112/CE du Conseil, du 28 novembre 2006, relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée dans la version de la directive 2009/47/CE du Conseil, du 5 mai 2009, modifiant la directive 2006/112 en ce qui concerne les taux réduits de taxe sur la valeur ajoutée.


1 – Langue originale : l’allemand.


2 – Traité instituant la Communauté européenne dans la version du traité d’Amsterdam (JO 1997, C 340, p. 173).


3 – JO 2006, L 347, p. 1, ci-après la directive TVA.


4 – Voir article 2, point 2, de la directive 2008/8/CE du Conseil, du 12 février 2008, modifiant la directive 2006/112 en ce qui concerne le lieu des prestations de services (JO 2008, L 44, p. 11).


5 – Voir article 1er, point 13, lu conjointement avec le point 1 de l’annexe à la directive 2009/47/CE du Conseil, du 5 mai 2009, modifiant la directive 2006/112 en ce qui concerne les taux réduits de taxe sur la valeur ajoutée (JO 2009, L 116, p. 18).


6 – Voir point 3 de l’annexe à la proposition de la Commission du 7 juillet 2008 de directive du Conseil modifiant la directive 2006/112 en ce qui concerne les taux réduits de taxe sur la valeur ajoutée [COM(2008) 428 final, p. 15].


7 – Voir notamment arrêts du 4 février 1982, Buyl e.a./Commission (817/79, EU:C:1982:36, point 16) ; du 11 novembre 1997, Eurotunnel e.a. (C-408/95, EU:C:1997:532, point 45), ainsi que du 10 septembre 2015, Parlement/Conseil (C-363/14, EU:C:2015:579, point 82).


8 – Voir résolution législative du Parlement européen du 19 février 2009 sur la proposition de directive du Conseil modifiant la directive 2006/112 en ce qui concerne les taux réduits de taxe sur la valeur ajoutée [COM(2008) 428 – C6-0299/2008 – 2008/0143 (CNS)] (JO 2010, C 76 E, p. 110).


9 – Voir point 9 des présentes conclusions.


10 – De surcroît, dans la version en langue allemande du point 6 de l’annexe 3 de la directive TVA, l’exemple « Notenhefte oder -manuskripte » a été remplacé par « Notenhefte oder Manuskripte ». Toutefois, manifestement, il s’agissait seulement d’une correction de la forme et non pas du fond, comme le montrent les versions en langues anglaise et française de cet exemple, qui n’ont pas été modifiées (elles sont libellées comme suit avant et après la modification apportée par la directive 2009/47 : « music printed or in manuscript form » et « les partitions imprimées ou en manuscrit »).


11 – Voir notamment arrêts du 16 juillet 1992, Parlement/Conseil (C-65/90, EU:C:1992:325, point 16) ;  du 5 juillet 1995, Parlement/Conseil (C-21/94, EU:C:1995:220, point 18) ; du 11 novembre 1997, Eurotunnel e.a. (C-408/95, EU:C:1997:532, point 46), ainsi que du 25 septembre 2003, Océ van der Grinten (C-58/01, EU:C:2003:495, point 100) ; voir déjà arrêt du 15 juillet 1970, ACF Chemiefarma/Commission (41/69, EU:C:1970:71, points 69 ainsi que 178 et 179).


12 – Le fait que le considérant 6 de la proposition, qui fait expressément référence aux « livres audio », n’ait pas été repris dans la directive ne change rien à cela.


13 – Voir point 3 de la proposition de la Commission COM (2008) 428 final : « audio books, CD, CD-ROMs or any similar physical support » et « de livres audio, de disques compacts, de cédéroms ou d’autres supports physiques similaires », respectivement p. 13 et 15.


14 – Certes, dans l’arrêt du 5 mars 2015, Commission/Luxembourg (C-502/13, EU:C:2015:143, point 53), la Cour a expliqué que le texte adopté par le Conseil « n’est autre qu’une simplification rédactionnelle » de la proposition de la Commission COM (2008) 428 final . Cependant, à défaut de motivation de ce constat et en raison du contexte différent dans lequel celui-ci a été établi, il est impossible et il n’est pas nécessaire de l’examiner davantage en l’espèce.


15 – Arrêts du 16 juillet 1992, Parlement/Conseil (C-65/90, EU:C:1992:325, point 19) ; du 5 juillet 1995, Parlement/Conseil (C-21/94, EU:C:1995:220, point 22), et du 10 juin 1997, Parlement/Conseil (C-392/95, EU:C:1997:289, point 20).


16 – Voir proposition de la Commission COM (2008), 428 final, exposé des motifs, point 3.1.


17 – Proposition de la Commission COM (2008), 428 final, exposé des motifs, point 5.3, article 1er et considérant 6 de la directive TVA ; voir également résumé du rapport d’analyse d’impact dans le document de travail des services de la Commission [SEC(2008) 2191], qui ne traite même pas de la modification concernant les livres.


18 – Voir, concernant la pertinence d’une telle opportunité de donner un avis, arrêt du 11 novembre 1997, Eurotunnel e.a. (C-408/95, EU:C:1997:532, point 58).


19 – Voir point 3.2.22 de la décision de renvoi.


20 – Voir arrêts du 29 octobre 2009, NCC Construction Danmark (C-174/08, EU:C:2009:669, point 42) ; du 19 juillet 2012, Deutsche Bank (C-44/11, EU:C:2012:484, point 45) ; du 15 novembre 2012, Zimmermann (C-174/11, EU:C:2012:716, point 50) ; du 13 mars 2014, Klinikum Dortmund (C-366/12, EU:C:2014:143, point 40), et du 2 juillet 2015, De Fruytier (C-334/14, EU:C:2015:437, point 37).


21 – Voir, concernant les différents sens de ce principe, arrêt du 15 novembre 2012, Zimmermann (C-174/11, EU:C:2012:716, points 46 à 48), ainsi que, à titre complémentaire, arrêts du 17 mai 2001, Fischer et Brandenstein (C-322/99 et C-323/99, EU:C:2001:280, point 76), ainsi que du 2 juillet 2015, NLB Leasing (C-209/14, EU:C:2015:440, point 40).


22 – Voir à cet égard arrêts du 8 juin 2006, L.u.P. (C-106/05, EU:C:2006:380, point 48) ; du 10 avril 2008, Marks & Spencer (C-309/06, EU:C:2008:211, point 49) ; du 29 octobre 2009, NCC Construction Danmark (C-174/08, EU:C:2009:669, point 41) ; du 10 juin 2010, CopyGene (C-262/08, EU:C:2010:328, point 64) ; du 19 juillet 2012, Lietuvos geležinkeliai (C-250/11, EU:C:2012:496, point 45), et du 28 novembre 2013, MDDP (C-319/12, EU:C:2013:778, point 38).


23 – Voir points 3.2.30 et 3.2.31 de la décision de renvoi.


24 – Arrêt du 5 mars 2015, Commission/Luxembourg (C-502/13, EU:C:2015:143, points 55 et 56).


25 – Voir, concernant ce contenu de la disposition, arrêts du 5 mars 2015, Commission/France (C-479/13, EU:C:2015:141, points 17, 40 et 41), ainsi que du 5 mars 2015, Commission/Luxembourg (C-502/13, EU:C:2015:143, points 26, 47 et 49) ; voir ligne directrice découlant des réunions du comité de la TVA, 92e réunion des 7 et 8 décembre 2010, document A – taxud.c.1(2011)157667 – 684, ainsi que, concernant l’importance des lignes directrices, points 47 à 50 des conclusions que nous avons présentées dans l’affaire RR Donnelley Global Turnkey Solutions Poland (C-155/12, EU:C:2013:57).


26 – Voir arrêts du 19 octobre 1977, Ruckdeschel e.a. (117/76 et 16/77, EU:C:1977:160, point 7) ; du 12 mars 1987, Raiffeisen Hauptgenossenschaft (215/85, EU:C:1987:127, point 23) ; du 17 septembre 1998, Pontillo (C-372/96, EU:C:1998:412, point 41) ; du 16 décembre 2008, Arcelor Atlantique et Lorraine e.a. (C-127/07, EU:C:2008:728, point 23), ainsi que du 4 mai 2016, Pillbox 38 (C-477/14, EU:C:2016:324, point 35) ; voir, concernant une autre approche, basée sur l’article 52, paragraphe 1, de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci-après la « Charte »), arrêt du 29 avril 2015, Léger (C-528/13, EU:C:2015:288, points 50 à 52).


27 – Dans la version adaptée le 12 décembre 2007 à Strasbourg.


28 – Arrêts du 16 décembre 2008, Arcelor Atlantique et Lorraine e.a. (C-127/07, EU:C:2008:728, point 26) ; du 12 mai 2011, Luxembourg/Parlement et Conseil (C-176/09, EU:C:2011:290) ; du 18 juillet 2013, Sky Italia (C-234/12, EU:C:2013:496, point 16) ; du 26 septembre 2013, IBV & Cie (C-195/12, EU:C:2013:598, point 52), ainsi que du 6 novembre 2014, Feakins (C-335/13, EU:C:2014:2343, point 51) ; voir de même, concernant l’interdiction de discrimination dans le cadre des libertés fondamentales, notamment arrêts du 27 novembre 2008, Papillon (C-418/07, EU:C:2008:659, point 27), et du 2 juin 2016, Pensioenfonds Metaal en Techniek (C-252/14, EU:C:2016:402, point 48).


29 – Voir toutefois, en ce sens, notamment, arrêt du 13 décembre 1994, SMW Winzersekt (C-306/93, EU:C:1994:407, point 31).


30 – Voir toutefois, en ce sens, concernant justement la TVA, arrêt du 13 mars 2014, Jetair et BTWE Travel4you (C-599/12, EU:C:2014:144, point 55).


31 – Voir arrêts du 10 avril 2008, Marks & Spencer (C-309/06, EU:C:2008:211, point 49), ainsi que du 25 avril 2013, Commission/Suède (C-480/10, EU:C:2013:263, point 17).


32 – Voir à cet égard également arrêts du 29 octobre 2009, NCC Construction Danmark (C-174/08, EU:C:2009:669, point 44), et du 19 juillet 2012, Lietuvos geležinkeliai (C-250/11, EU:C:2012:496, point 45).


33 – Voir arrêts du 19 octobre 1977, Ruckdeschel e.a. (117/76 et 16/77, EU:C:1977:160, point 8) ; du 19 octobre 1977, Moulins et Huileries de Pont-à-Mousson et Providence agricole de la Champagne (124/76 et 20/77, EU:C:1977:161, point 18), ainsi que du 25 octobre 1978, Royal Scholten-Honig et Tunnel Refineries (103/77 et 145/77, EU:C:1978:186, points 28 et 32).


34 – Sur la base des enseignements de l’arrêt du 3 juillet 2012, UsedSoft (C-128/11, EU:C:2012:407), l’on pourrait toutefois douter de cela.


35 – Arrêt du 3 juillet 2012, UsedSoft (C-128/11, EU:C:2012:407, point 61).


36 – Voir arrêts du 5 mars 2015, Commission/France (C-479/13, EU:C:2015:141, points 17 et 35), ainsi que du 5 mars 2015, Commission/Luxembourg (C-502/13, EU:C:2015:143, points 26 et 42).


37 – Voir article 1er, point 5, lu conjointement avec la catégorie 6 de l’annexe à la directive 92/77/CEE du Conseil, du 19 octobre 1992, complétant le système commun de taxe sur la valeur ajoutée et modifiant la directive 77/388 (rapprochement des taux de TVA) (JO 1992, L 316, p. 1).


38 – Point 3.1 de la communication de la Commission au Conseil et au Parlement européen relative aux taux de TVA autres que le taux de TVA normal [COM(2007) 380 final].


39 – COM(2007) 380 final, point 4.2.


40 – Voir également rapport de la commission des affaires économiques et monétaires sur la proposition de directive du Conseil modifiant la directive 2006/112 en ce qui concerne les taux réduits de taxe sur la valeur ajoutée [COM(2008) 428] (session plénière du Parlement européen du 11 février 2009, A6-0047/2009, p. 6).


41 – Arrêts du 3 mai 2012, Lebara (C-520/10, EU:C:2012:264, point 25), ainsi que du 7 novembre 2013, Tulică et Plavoşin (C-249/12 et C-250/12, EU:C:2013:722, point 34).


42 – Voir notamment arrêts du 16 décembre 2008, Arcelor Atlantique et Lorraine e.a. (C-127/07, EU:C:2008:728, point 47) ; du 17 octobre 2013, Schaible (C-101/12, EU:C:2013:661, point 77), ainsi que du 22 mai 2014, Glatzel (C-356/12, EU:C:2014:350, point 43).


43 – Voir arrêt du 16 décembre 2008, Arcelor Atlantique et Lorraine e.a. (C-127/07, EU:C:2008:728, points 57 et 58).


44 – Arrêt du 6 novembre 2014, Feakins (C-335/13, EU:C:2014:2343, point 56).


45 – Les interdictions de discrimination ne sont que des expressions particulières du principe général d’égalité de traitement : voir notamment arrêt du 27 janvier 2005, Europe Chemi-Con (Deutschland)/Conseil (C-422/02 P, EU:C:2005:56, point 33).


46 – Voir de même, déjà, point 32 des conclusions que l’avocat général Poiares Maduro a présentées dans l’affaire Arcelor Atlantique et Lorraine e.a. (C-127/07, EU:C:2008:292, point 32).


47 – Voir en ce sens notamment arrêts du 12 mai 2011, Luxembourg/Parlement et Conseil (C-176/09, EU:C:2011:290, point 35), ainsi que du 22 mai 2014, Glatzel (C-356/12, EU:C:2014:350, point 64).


48 – Voir arrêts du 16 décembre 2008, Arcelor Atlantique et Lorraine e.a. (C-127/07, EU:C:2008:728, point 57), ainsi que du 22 mai 2014, Glatzel (C-356/12, EU:C:2014:350, point 52) ; voir, concernant en particulier la politique agricole commune, arrêts du 29 octobre 1980, Roquette Frères/Conseil (138/79, EU:C:1980:249, point 25) ; du 5 octobre 1994, Allemagne/Conseil (C-280/93, EU:C:1994:367, points 89 et 90), ainsi que du 30 juin 2016, Lidl (C-134/15, EU:C:2016:498, point 47) ; voir en outre, concernant les exigences générales du principe de proportionnalité, notamment arrêts du 12 novembre 1996, Royaume-Uni/Conseil (C-84/94, EU:C:1996:431, point 58) ; du 1er mars 2016, National Iranian Oil Company/Conseil (C-440/14 P, EU:C:2016:128, point 77), et du 4 mai 2016, Pillbox 38 (C-477/14, EU:C:2016:324, point 49).


49 – Voir en ce sens arrêt du 16 décembre 2008, Arcelor Atlantique et Lorraine e.a. (C-127/07, EU:C:2008:728, point 59) ; voir notamment, dans le cas d’atteinte aux droits fondamentaux, arrêt du 8 avril 2014, Digital Rights Ireland e.a. (C-293/12 et C-594/12, EU:C:2014:238, point 47).


50 –      Voir arrêts du 5 mars 2015, Commission/France (C-479/13, EU:C:2015:141, points 17 et 40), ainsi que du 5 mars 2015, Commission/Luxembourg (C-502/13, EU:C:2015:143, points 26 et 47).


51 – Voir à cet égard à l’annexe II de la directive TVA la liste indicative des services fournis par voie électronique visés à l’article 58, paragraphe 1, sous c), ainsi que la définition complémentaire de l’article 7 et de l’annexe I du Règlement d’exécution (UE) n° 282/2011 du Conseil, du 15 mars 2011, portant mesures d’exécution de la directive 2006/112 relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée (JO 2011, L 77, p. 1).


52 – Sixième directive du Conseil du 17 mai 1977 en matière d’harmonisation des législations des États membres relatives aux taxes sur le chiffre d’affaires – Système commun de taxe sur la valeur ajoutée : assiette uniforme (JO 1977, L 145, p. 1), qui était applicable jusqu’au 31 décembre 2006, conformément à l’article 411, paragraphe 1, et à l’article 413 de la directive TVA.


53 – Voir article 1er, point 2, de la directive 2002/38/CE du Conseil, du 7 mai 2002, modifiant, en partie à titre temporaire, la directive 77/388 en ce qui concerne le régime de taxe sur la valeur ajoutée applicable aux services de radiodiffusion et de télévision et à certains services fournis par voie électronique (JO 2002, L 128, p. 41).


54 –      Proposition de directive du Conseil modifiant la directive 77/388 concernant le régime de taxe sur la valeur ajoutée applicable à certains services fournis par voie électronique [COM(2000) 349 final, points 3.1 et 5.2, article 1er, point 2].


55 – Voir article 9, paragraphe 2, sous f), de la sixième directive 77/388 et désormais article 58, paragraphe 1, sous c), de la directive TVA.


56 – Voir désormais considérant 23 de la directive TVA.


57 – Voir COM(2000) 349 final, points 3.1 et 3.2.


58 – Voir COM(2000) 349 final, point 5.


59 – Voir considérant 5 de la directive 2002/38 ; voir désormais articles 358 bis et suiv. de la directive TVA.


60 – Cela découlait de la règle de base de l’article 9, paragraphe 1, de la directive TVA ; voir COM(2000) 349 final, point 2.


61 – Cette disposition a été modifiée par l’article 5, point 1, de la directive 2008/8, avec effet au 1er janvier 2015.


62 – Voir articles 358 à 369 duodecies de la directive TVA.


63 – Voir point 61 des présentes conclusions.


64 –      Voir point 67 des présentes conclusions.


65 – Voir arrêt du 25 octobre 1978, Royal Scholten-Honig et Tunnel Refineries (103/77 et 145/77, EU:C:1978:186, points 81 à 83).


66 – Voir arrêt du 24 février 2015, Sopora (C-512/13, EU:C:2015:108, point 33).


67 – Voir arrêts du 16 décembre 2008, Arcelor Atlantique et Lorraine e.a. (C-127/07, EU:C:2008:728, point 57), ainsi que du 17 octobre 2013, Schaible (C-101/12, EU:C:2013:661, point 91).


68 –      Voir en ce sens arrêt du 16 décembre 2008, Arcelor Atlantique et Lorraine e.a. (C-127/07, EU:C:2008:728, point 62).


69 – Voir articles 4 et 5 de la directive 2002/38, ainsi qu’article 6 de la directive 2008/8.


70 – Voir communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil et au Comité économique et social européen concernant un plan d’action sur la TVA – Vers un espace TVA unique dans l’Union – L’heure des choix [COM (2016) 148 final, point 5].


71 –      Voir point 69 des présentes conclusions.


72 –      Voir à cet égard article 26 de la Charte.


73 – Voir, concernant cette condition, point 37 des présentes conclusions.


74 – Voir, concernant cette condition, point 39 des présentes conclusions.


75 – Voir points 40 et 42 des présentes conclusions.


76 – Voir points 55 et 56 des présentes conclusions.


77 – Voir points 56 et 57 des présentes conclusions.


78 – Voir point 40 des présentes conclusions.


79 – Arrêt du 11 septembre 2014, K (C-219/13, EU:C:2014:2207, points 24 à 32).


80 – Voir point 61 des présentes conclusions.


81 – Voir point 81 des présentes conclusions.


82 – Voir point 95 des présentes conclusions.


83 –      Voir points 66 et suiv. des présentes conclusions.


84 –      Voir point 81 des présentes conclusions.