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CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. MELCHIOR WATHELET

présentées le 7 septembre 2016 ( 1 )

Affaire C-453/15

A,

B

[demande de décision préjudicielle formée par le Bundesgerichtshof (Cour fédérale de justice, Allemagne)]

«Renvoi préjudiciel — Fiscalité — Taxe sur la valeur ajoutée — Directive 2006/112/CE — Article 56 — Lieu de la prestation de services — Notion d’“autres droits similaires” — Transfert de quotas d’émission de gaz à effet de serre»

1. 

Dans cette affaire qui concerne la vente « d’un droit de polluer », je ne résiste pas à la tentation de citer cette réflexion de M. Le Bars ( 2 ) : « [a]vec [la] législation internationale et communautaire, l’air et sa “pathologie”, à savoir la pollution, se retrouvent aux frontières du domaine marchand. Une telle démarche peut sembler immorale tant la notion de droit est traditionnellement associée à des contenus positifs, ce qui n’est pas le cas de la pollution. De plus, l’idée que des agents privés puissent gagner de l’argent avec de la pollution, en exerçant une fonction d’intermédiaires financiers en quotas d’émission, semble inadmissible ».

2. 

Tel n’est évidemment pas l’objet du présent renvoi préjudiciel du Bundesgerichtshof (Cour fédérale de justice, Allemagne), parvenu au greffe de la Cour le 24 août 2015, lequel, à propos des quotas d’émission de gaz à effet de serre, interroge la Cour sur l’interprétation de l’article 56, paragraphe 1, sous a), de la directive 2006/112/CE ( 3 ). Ledit renvoi a été décidé dans le cadre d’une procédure pénale engagée en Allemagne contre A et B du chef de complicité de fraude fiscale.

3. 

En résumé, se pose la question de savoir si un quota d’émission de gaz à effet de serre au sens de l’article 3, sous a), de la directive 2003/87/CE ( 4 ) – qui autorise à émettre une tonne d’équivalent-dioxyde de carbone au cours d’une période spécifiée – constitue un « autre droit similaire » au sens de l’article 56, paragraphe 1, sous a), de la directive TVA.

I – Le cadre juridique

A – Le droit de l’Union

4.

L’article 56, paragraphe 1, de la directive TVA prévoit :

« 1.   Le lieu des prestations de services suivantes, fournies à des preneurs établis en dehors de la Communauté ou à des assujettis établis dans la Communauté mais en dehors du pays du prestataire, est l’endroit où le preneur a établi le siège de son activité économique ou dispose d’un établissement stable pour lequel la prestation de services a été fournie ou, à défaut, le lieu de son domicile ou de sa résidence habituelle :

a)

les cessions et concessions de droits d’auteurs, de brevets, de droits de licences, de marques de fabrique et de commerce, et d’autres droits similaires ;

[...] »

5.

L’article 3, sous a), de la directive 2003/87 énonce :

« Aux fins de la présente directive, on entend par :

a)

“quota”, le quota autorisant à émettre une tonne d’équivalent-dioxyde de carbone au cours d’une période spécifiée, valable uniquement pour respecter les exigences de la présente directive, et transférable conformément aux dispositions de la présente directive ;

[...] »

B – Le droit allemand

6.

Aux termes de l’article 3a de l’Umsatzsteuergesetz (loi relative à la taxe sur la valeur ajoutée, ci-après l’« UStG »), intitulé « Lieu des autres prestations », dans sa version applicable aux faits du litige au principal :

« 1.   Sous réserve des articles 3b et 3f, les autres prestations sont effectuées au lieu où l’entrepreneur exerce son activité. Lorsqu’une telle prestation est effectuée par un établissement stable, celui-ci est réputé être le lieu de la prestation.

[...]

3.   Si le preneur d’une des autres prestations mentionnées au paragraphe 4 est une entreprise, par dérogation au paragraphe 1, la prestation est censée être fournie à l’endroit où le preneur exerce son activité. Néanmoins, si la prestation est effectuée là où se trouve l’établissement stable d’une entreprise, c’est le lieu de cet établissement qui est déterminant. Si le preneur d’une des autres prestations mentionnées au paragraphe 4 n’est pas une entreprise et a son domicile ou son siège sur le territoire d’un pays tiers, la prestation est réputée être effectuée à son domicile ou siège.

4.   Au sens du paragraphe 3, on entend par “autres prestations” :

1)

la concession, le transfert et la mise en œuvre de brevets, de droits d’auteur, de droits liés aux marques et d’autres droits similaires ;

[...] »

II – Le litige au principal et la question préjudicielle

7.

A et B, qui travaillent pour une grande société de conseil fiscal, ont été condamnés par le Landgericht Hamburg (tribunal régional de Hambourg, Allemagne) à des peines d’amende pour complicité de fraude fiscale dans le cadre d’une affaire concernant un système de fraude à la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) mis en œuvre par un autre prévenu, G, du mois d’avril 2009 au mois de mars 2010 et visant à soustraire à ladite taxe des échanges de quotas d’émission de gaz à effet de serre.

8.

Dans ce système de fraude, étaient impliquées plusieurs sociétés. Une société E, établie en Allemagne et contrôlée en fait par G, a acheté à l’étranger des quotas d’émission de gaz à effet de serre exonérés de TVA et les a revendus à une société I établie au Luxembourg, dirigée également par G. Cette dernière a établi, à titre de factures, des notes de crédit en faveur de la société E mentionnant la TVA applicable en Allemagne et a revendu les quotas à une société C, établie en Allemagne, les notes de crédit établies pour cette transaction mentionnant également la TVA applicable en Allemagne.

9.

Dans ses déclarations provisoires de TVA des deuxième, troisième et quatrième trimestres de l’année 2009, la société E a déclaré le produit de la vente des quotas à la société I en procédant, sur la base de fausses factures de prétendus fournisseurs nationaux, à une déduction de la TVA versée en amont. Pour les mois de janvier et de mars 2010, elle n’a pas fait de déclaration provisoire. Elle a ainsi éludé le versement d’une somme totale de 11484179,12 euros. La société I, quant à elle, a déclaré, pour les périodes des mois d’avril à juillet 2009, de septembre 2009 à janvier 2010 et de mars 2010, les prestations fournies à la société C en tant qu’opérations soumises à la TVA et a indûment déduit la TVA figurant sur les notes de crédit établies en faveur de la société E en tant que taxe payée en amont, éludant ainsi le paiement de la somme de 10667491,10 euros.

10.

A et B ont exercé, à compter de la fin du mois de mai 2009, une activité de conseil fiscal au profit de la société I et ont été chargés par G de réaliser une brève expertise sur la situation de cette société en matière de TVA. Dans cette expertise, ils ont indiqué que la société I ne pouvait mentionner une TVA applicable en Allemagne et la déduire en tant que taxe payée en amont que si elle disposait en Allemagne d’un établissement y exerçant les activités correspondantes et que les factures établies avant la création d’un établissement en Allemagne devaient être corrigées.

11.

Au vu d’un contrat antidaté de location d’espaces de bureau en Allemagne à partir du 1er avril 2009, A et B, qui n’avaient pas connaissance du rôle joué par la société I dans le système de fraude fiscale, ont établi, au nom de celle-ci, des déclarations provisoires de TVA corrigées pour les mois d’avril et de mai 2009, qu’ils ont adressées le 12 août 2009 à l’administration fiscale. Ils ont fait figurer, dans ces déclarations, la TVA mentionnée dans les notes de crédit établies en faveur de la société E en tant que taxe payée en amont, et ce à hauteur de 147519,80 euros pour le mois d’avril 2009 et de 1146788,70 euros pour le mois de mai 2009, bien qu’ils estimassent « très probable » que la société I ne disposait pas d’un établissement en Allemagne.

12.

Saisi de pourvois en révision formés contre le jugement du Landgericht Hamburg (tribunal régional d’Hambourg) par A et B ainsi que par le ministère public, le Bundesgerichtshof (Cour fédérale de justice) expose que le point de savoir si les prévenus se sont rendus coupables de complicité de fraude fiscale selon le droit pénal allemand dépend de celui de savoir s’ils ont intentionnellement présenté des déclarations provisoires de TVA inexactes à l’administration fiscale, dans lesquelles des taxes payées en amont au titre des notes de crédit sur les prestations de la société E ont été indûment déduites. Dès lors que A et B n’avaient pas connaissance de l’implication des sociétés E et I dans le système de fraude à la TVA mis en œuvre par G, il n’en a été ainsi, poursuit le juge de renvoi, que si aucune déduction de taxe payée en amont ne pouvait être faite au titre des notes de crédit établies en faveur de la société E, car ces dernières ne pouvaient pas mentionner de TVA. Cela n’était toutefois le cas, précise-t-il, pour les factures adressées à la société I, ayant son siège à Luxembourg, que si le lieu de la prestation consistant dans le transfert de quotas ne se trouvait pas en Allemagne. Une mention de la TVA par la société E à l’égard de la société I n’était toutefois illégale que si, en application de l’article 56, paragraphe 1, sous a), de la directive TVA, le lieu de la prestation ne se trouvait pas auprès du prestataire de services, la société E, mais auprès du preneur, la société I, de sorte que la prestation n’était pas imposable en Allemagne.

13.

Le Bundesgerichtshof (Cour fédérale de justice) relève que cette dernière condition suppose que, en 2009, le lieu de la prestation pour les transferts de quotas d’émission de gaz à effet de serre ait été, au sens de l’article 3a, paragraphe 4, de l’UStG, dans sa version applicable aux faits du litige au principal, reposant sur l’article 56, paragraphe 1, sous a), de la directive TVA, l’endroit où le preneur avait établi le siège de son activité économique ou disposait d’un établissement stable, ce qui implique de savoir si l’échange de tels quotas constitue un « autre droit similaire » au sens de ces dispositions.

14.

Le juge de renvoi estime à ce sujet que l’interprétation de la notion d’« autres droits similaires », au sens de l’article 56, paragraphe 1, sous a), de la directive TVA n’est pas d’une évidence telle qu’elle ne laisserait place à aucun doute raisonnable. Il est néanmoins enclin à penser que lesdits quotas sont « similaires » au sens de cette disposition, le terme « similaire » signifiant « dont certaines caractéristiques correspondent » ou « qui est comparable », dans la mesure où les droits cités dans cette disposition se caractérisent par le fait que le législateur octroie au titulaire un droit absolu, lui donne compétence exclusive pour l’utiliser et l’exploiter, en en excluant d’autres personnes. En ce sens, les quotas d’émission seraient comparables aux droits de propriété intellectuelle.

15.

C’est dans ces conditions que le Bundesgerichtshof (Cour fédérale de justice) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour la question préjudicielle suivante :

III – La procédure devant la Cour

16.

Des observations ont été soumises par A, B, le Generalbundesanwalt beim Bundesgerichtshof (procureur général de la République fédérale auprès de la Cour fédérale de justice, Allemagne), les gouvernements allemand et hellénique, ainsi que par la Commission européenne. Toutes les parties, sauf le gouvernement hellénique, ont été entendues à l’audience du 13 juillet 2016.

IV – Appréciation

A – Synthèse des observations des parties

17.

A et B estiment qu’il convient de répondre à la question posée en ce sens qu’un « quota d’émission » au sens de l’article 3, sous a), de la directive 2003/87 ne constitue pas un « droit similaire » au sens de l’article 56, paragraphe 1, sous a), de la directive TVA.

18.

A fait observer que ce dernier article mentionne cinq droits relevant du domaine de la propriété intellectuelle et complète cette énumération par une notion « fourre-tout » de « droits similaires ». Alors que, selon le Bundesgerichtshof (Cour fédérale de justice), le terme utilisé dans la version allemande (ähnlich) signifie que les autres droits doivent être des droits dont certaines caractéristiques correspondent ou « qui sont comparables » aux droits expressément cités, A fait valoir qu’il ressort toutefois d’autres versions linguistiques de la directive TVA que, plutôt qu’une simple comparabilité, c’est un lien étroit qui doit exister entre les droits expressément cités dans l’article 56, paragraphe 1, sous a), de la directive TVA et ceux qui relèvent de la notion de « droits similaires ». Il conviendrait donc de se demander d’abord quelles sont les caractéristiques essentielles des droits expressément cités. Un quota d’émission devrait également présenter ces caractéristiques pour relever de la notion de « droits similaires ».

19.

Il est douteux, selon A, que la notion de « droit absolu » en droit allemand et dont fait état la juridiction de renvoi, soit pertinente. De plus, un quota ne serait pas un droit absolu, mais ne donnerait à son titulaire qu’un « droit de tolérance »(Duldungsanspruch) invocable vis-à-vis de l’État. Ce droit de tolérance serait en définitive comparable à une créance de droit privé, même s’il est consigné dans un registre public.

20.

Les termes « cession » et « concession » employés dans la version française et leurs équivalents dans d’autres versions linguistiques seraient un élément déterminant, montrant qu’il s’agit de concéder un droit en vue de son utilisation, tous les droits cités expressément reposant sur une prestation intellectuelle propre. Un quota d’émission serait dès lors un intrus par rapport aux droits de propriété intellectuelle qui se caractérisent par le fait que le titulaire peut concéder à son gré à une autre personne une idée qui est juridiquement la sienne en vue de son exercice, sans perdre son droit initial et sans devoir le transférer à celui pouvant l’utiliser.

21.

Cette interprétation serait confirmée par la genèse de l’article 56, paragraphe 1, sous a), de la directive TVA, lequel a son origine dans la formulation de l’article 9, paragraphe 2, sous e), de la sixième directive 77/388/CEE ( 5 ), qui mentionnait les cessions de brevets, de marques de fabrique et de commerce et d’autres droits similaires ainsi que les concessions de licences concernant ces droits. Il en ressortirait que les « droits similaires » doivent, eux aussi, pouvoir faire l’objet de l’octroi d’une licence, ce qui n’est pas le cas d’un quota de CO2.

22.

En outre, une interprétation de la directive TVA allant au-delà de son libellé ne serait pas nécessaire. Elle reviendrait à appliquer de manière générale le principe du pays de destination aux échanges de services entre entreprises alors que celui-ci n’est devenu la règle générale que postérieurement aux faits du litige au principal, à la suite de la modification de ladite directive par la directive 2008/8/CE ( 6 ).

23.

B ajoute que le résultat de l’interprétation de la directive TVA sollicitée dans la présente affaire doit être considéré dans le contexte des conséquences entraînant une responsabilité pénale, ce qui implique de tenir compte des principes applicables en ce domaine et notamment des principes de sécurité juridique, de légalité des délits et des peines, de précision, de l’interdiction de l’application par analogie en droit pénal et du principe d’homogénéité. Au regard du principe de précision, il serait problématique que la responsabilité pénale dépende de la notion très large de « droit similaire ». Dès lors, seule serait possible une interprétation de cette notion obligeant à établir un lien intrinsèque entre le « droit similaire » et les autres droits cités dans la disposition et allant au-delà d’une quelconque comparabilité.

24.

En revanche, le procureur général de la République fédérale auprès de la Cour fédérale de justice, les gouvernements allemand et hellénique ainsi que la Commission considèrent que l’article 56, paragraphe 1, sous a), de la directive TVA doit être interprété en ce sens que le quota au sens de l’article 3, sous a), de la directive 2003/87 constitue un « autre droit similaire ».

25.

Le procureur général de la République fédérale auprès de la Cour fédérale de justice observe que la liste des droits cités à l’article 56, paragraphe 1, sous a), de la directive TVA n’est pas homogène et que ces droits sont soumis à différentes réglementations.

26.

Quant à la détermination du lieu de la prestation, l’élément déterminant serait le fait que ces droits donnent une possibilité d’utilisation économique par le preneur qui va au-delà de la simple exploitation du droit en tant que tel. Le lieu de la prestation devrait donc être le lieu d’établissement du preneur dans le cas où le coût de la prestation de services effectuée entre assujettis entre dans le prix du bien. Aux fins d’établir le lieu de la prestation, les caractéristiques déterminantes des droits mentionnés à cet article seraient donc qu’ils confèrent des droits d’utilisation positifs à leur titulaire, qui lui profitent économiquement en vue de continuer à créer de la valeur ajoutée soit parce qu’il les utilise lui-même, soit parce qu’il les vend et les transfère à des tiers. Or, un quota d’émission de gaz à effet de serre présenterait ces caractéristiques prédominantes.

27.

Le gouvernement allemand relève, tout d’abord, que le transfert de quotas d’émission de gaz à effet de serre constitue une prestation de services au sens de l’article 24, paragraphe 1, de la directive TVA et que l’objet du transfert est le droit d’émission donné par le quota. Il observe, ensuite, que l’imposition des droits mentionnés à l’article 56, paragraphe 1, sous a), de la directive TVA a lieu, par dérogation au principe dit de l’origine (résultant de l’article 43 de la directive TVA en vigueur jusqu’au 31 décembre 2009), dans l’État du preneur, pour autant que celui-ci soit établi dans un pays tiers ou qu’il s’agisse d’un assujetti établi dans un État membre autre que celui du prestataire.

28.

Enfin, selon ce gouvernement, pour qu’un droit soit « similaire », il importe de savoir s’il est comparable aux droits cités à l’article 56, paragraphe 1, sous a), de la directive TVA et s’il présente les mêmes caractéristiques que ces droits. Il ne serait pas nécessaire que ce droit soit identique à ceux-ci et, par conséquent, un « droit similaire » n’existerait pas uniquement en matière de propriété intellectuelle. Observant que l’énumération contenue dans cet article ne contient que des droits protégés, se caractérisant par le fait que le législateur octroie au titulaire un droit absolu en ce sens qu’il a compétence exclusive pour l’utiliser et l’exploiter, il estime que les quotas d’émission de gaz à effet de serre peuvent être considérés comme similaires.

29.

En effet, seul le titulaire du quota serait autorisé à émettre une tonne d’équivalent-dioxyde de carbone au cours d’une période spécifiée. L’exclusivité du droit d’exploitation découlerait d’une attribution figurant dans le registre des échanges de quotas d’émission et le titulaire du compte aurait la possibilité de disposer dudit quota soit en l’utilisant pour remplir ses obligations de restitution, soit en le vendant et en le transférant sur le compte d’un autre titulaire de compte.

30.

Il ajoute que la finalité de l’article 56, paragraphe 1, sous a), de la directive TVA plaide en faveur de son application aux quotas d’émission de gaz à effet de serre, étant donné que l’utilisation des droits d’émission conférés par les quotas a habituellement lieu là où celui qui les a achetés exerce son activité économique.

31.

La République hellénique considère qu’il ressort du libellé de l’article 56, paragraphe 1, sous a), de la directive TVA que l’énumération qui y est continue n’est pas exhaustive. Les droits sur des actifs incorporels qui y sont mentionnés auraient pour caractéristique principale d’offrir à leur titulaire le pouvoir exclusif d’utiliser et d’exploiter lesdits droits, en excluant d’autres personnes. Dès lors, les « autres droits similaires » pourraient être considérés soit comme des droits qui confèrent à leur titulaire un tel pouvoir absolu, soit comme des droits dont l’exclusivité de l’utilisation est garantie par des droits de créance ou d’autres droits.

32.

Ferait partie de cette catégorie, en raison de sa nature et de ses caractéristiques, le quota autorisant à émettre une tonne d’équivalent-dioxyde de carbone au cours d’une période spécifiée. En effet, étant donné que chaque titulaire du droit visé à l’article 3, sous a), de la directive 2003/87 figure au registre des échanges de quotas d’émission prévu à l’article 19 de cette directive, la position du titulaire et son droit d’utilisation exclusif seraient pleinement garantis. Il serait également déterminant que quiconque viole les dispositions du droit national adoptées en application de cette directive s’expose à des sanctions. Le pouvoir reconnu au titulaire d’un tel droit s’apparenterait donc au pouvoir correspondant dont est investi le titulaire d’un des droits incorporels expressément visés à l’article 56, paragraphe 1, sous a), de la directive TVA.

33.

Selon la Commission, l’échange de quotas d’émission de gaz à effet de serre constitue une prestation de services, au sens de l’article 24, paragraphe 1, de la directive TVA.

34.

À première vue, observe la Commission, il n’est pas manifeste que la notion « d’autres droits similaires » inclue les quotas d’émission, les situations juridiques expressément visées à l’article 56, paragraphe 1, sous a), de la directive TVA concernant la protection de la propriété intellectuelle, alors que les quotas représentent une autorisation de l’État ou des autorités d’émettre des gaz à effet de serre. Cependant, on pourrait constater des points de similitude importants entre la propriété intellectuelle et ces quotas.

35.

La question de savoir si un droit donné présente une similitude avec les droits mentionnés à l’article 56, paragraphe 1, sous a), de la directive TVA appellerait tout d’abord une réponse au regard de l’esprit et de la finalité de cette disposition.

B – Analyse

1. Observations liminaires

36.

Avant toute chose, je tiens à préciser que la réponse de la Cour ne doit porter que sur l’interprétation de la directive TVA et non sur les conséquences qu’elle peut avoir sur le plan pénal dans la procédure au principal, ce qui relève de la compétence exclusive du juge de renvoi, qui n’interroge pas la Cour à ce sujet. Ces conclusions seront adaptées à cette constatation.

37.

Le Bundesgerichtshof (Cour fédérale de justice) nous interroge sur la question de savoir si l’article 56, paragraphe 1, sous a), de la directive TVA doit être interprété en ce sens que le quota au sens de l’article 3, sous a) de la directive 2003/87, qui autorise à émettre une tonne d’équivalent-dioxyde de carbone au cours d’une période spécifiée, constitue un « autre droit similaire » au sens de l’article 56, paragraphe 1, sous a), de la directive TVA.

38.

Tout d’abord, la Cour n’a pas encore eu à interpréter ladite notion au sens de l’article 56, paragraphe 1, sous a), de la directive TVA.

39.

Ensuite, depuis le 1er janvier 2010, la règle générale est désormais que le lieu d’une prestation de services est l’endroit où est établi le siège du preneur alors que les règles en vigueur applicables en l’espèce prévoyaient le principe du pays d’origine.

40.

Cette nouvelle règle qui consacre le principe du pays de destination figure désormais à l’article 44 de la directive TVA modifiée par la directive 2008/8. En outre, par la directive 2010/23/UE entrée en vigueur le 9 avril 2010 ( 7 ), le législateur de l’Union a indiqué qu’il partait du principe que le transfert de quotas d’émission au sens de la directive 2003/87 devait être imposé dans l’État membre du siège de l’acquéreur (pays de destination). Par cette directive, il a introduit dans la directive TVA un nouvel article 199 bis qui prévoit expressément que les États membres peuvent prévoir que le redevable de la TVA est l’assujetti destinataire d’un transfert de quota d’émission à effet de serre, et ce afin de restreindre les possibilités de fraude à la TVA de type carrousel. Cette disposition qui limitait cette possibilité à une période se terminant le 30 juin 2015 a été reconduite jusqu’au 31 décembre 2018 par la directive 2013/43/UE ( 8 ).

41.

Dès lors, se pose la question de savoir si, antérieurement à ces modifications et outre la formulation de l’article 56, paragraphe 1, sous a), de la directive TVA, il découlait déjà de la ratio legis de celle-ci ou d’autres dispositions voire d’autres éléments que des quotas d’émission de gaz à effet de serre devaient, eu égard à leurs caractéristiques, être considérés comme entrant dans la catégorie des « droits similaires » au sens de cette disposition.

2. Quid de la nature juridique des quotas d’émission de gaz à effet de serre ?

42.

Conformément à l’article 3, sous a), de la directive 2003/87, un quota d’émission de gaz à effet de serre autorise à émettre une tonne d’équivalent-dioxyde de carbone au cours d’une période spécifiée.

43.

Il convient de noter que les tiers qui ne disposent pas d’un tel quota n’ont pas ce droit. Sa valeur économique est donc non négligeable, car seuls ceux possédant les autorisations découlant des quotas peuvent exercer les activités mentionnées à l’annexe I de la directive 2003/87. Le quota est donc une condition pour que l’entreprise puisse continuer à créer de la valeur ajoutée. Le droit d’émettre l’équivalent-dioxyde de carbone en découlant peut en outre être librement transféré et négocié dans le cadre de la procédure prévue à cet effet.

44.

Le transfert de quotas d’émission de gaz à effet de serre constitue une prestation de services au sens de l’article 24, paragraphe 1, de la directive TVA (l’opération considérée en l’espèce consiste en « la cession d’un bien incorporel» ( 9 ), à savoir la compétence d’émettre une certaine quantité de CO2 au cours d’une période donnée, compétence qui est représentée par un titre).

45.

Ainsi que l’a souligné le gouvernement allemand, l’objet du transfert est donc le droit d’émission donné par le quota.

46.

Toutefois, la directive 2003/87 ne donne pas d’indices sur la nature juridique de ces quotas ( 10 ). De plus, ainsi que je l’ai relevé ci-dessus, la Cour n’a pas encore eu à se prononcer sur ce sujet.

47.

En ce qui concerne la directive 2003/87, en effet, « [m]uch debate on emissions trading concerns the legal basis of the scheme and its implementation into existing legal systems. The legal nature of allowances is a very controversial issue, as the [Directive 2003/87] does not contain any mention of it. Nevertheless allowances have aspects of both administrative grants or licences and of private property and it is understood that different conclusions as to their legal nature have already been reached in certain Member States » et « it is also discussed if emission allowances may be defined as intangible goods instead of concessions» ( 11 ).

48.

D’ailleurs, « [t]he treatment of the quotas under tax law, accounting standards and financial services regulation is particularly relevant, as if it differs among countries, it may seriously affect the development of the emissions trading market » et « [w]ith regard to the tax regime applicable to emission allowances, currently there are no authoritative accounting pronouncements in either International Financial Reporting Standards (IFRS) or United States Generally Accepted Accounting Principles (US GAAP) that specifically address accounting for emissions trading schemes. Both the International Financial Reporting Interpretations Committee (IFRIC) and the Emerging Issues Task Force (EITF) have considered accounting for emissions trading schemes, but in practice no guidance has been implemented» ( 12 ).

49.

La doctrine a donné différentes interprétations à la nature juridique des quotas d’émission de gaz à effet de serre ( 13 ). Par exemple, selon le législateur français, les quotas d’émission sont des biens meubles exclusivement matérialisés par une inscription au compte du détenteur ( 14 ). En Belgique, il n’y pas de définition légale de la nature juridique des quotas, mais ils sont considérés comme des biens meubles incorporels ( 15 ). La doctrine belge a parfois considéré ( 16 ) les quotas comme étant des instruments financiers, puisqu’il y a pour les produits financiers dérivés, un marché secondaire fondé sur les quotas.

50.

À mon avis, les quotas d’émission de gaz à effet de serre doivent être considérés comme des biens meubles incorporels auxquels un droit de propriété réglementée est attaché.

51.

Les caractéristiques de ce droit de propriété sont notamment les suivantes : i) il s’agit d’un droit évaluable en argent (le prix des quotas transférables peut fluctuer en fonction de l’offre et de la demande sur le marché) ; ii) l’usus (c’est un droit susceptible d’être utilisé, car il permet au titulaire de poursuivre une activité industrielle) ; iii) l’abusus (il s’agit d’un droit susceptible d’être transféré par voie contractuelle à un autre titulaire). C’est en outre un droit soumis à une inscription dans un registre public (la directive 2003/87 impose cette obligation aux États membres et aux titulaires du droit pour assurer l’opposabilité aux tiers ainsi que la cohérence du système des quotas). Il s’agit enfin d’un droit limité dans le temps ( 17 ) (car tous les quotas sont amenés à disparaître soit par compensation avec les émissions réelles, soit par demande de destruction introduite par son titulaire).

3. La comparabilité des quotas d’émission avec les droits de propriété intellectuelle

52.

Pour ce qui est du lieu des prestations de services, il convient de recourir en priorité aux dispositions particulières des articles 44 et suivants (titre V, chapitre 3, section 2) de la directive TVA. Ce n’est que si ces dispositions ne s’appliquent pas que le siège de l’activité économique du prestataire doit, conformément à l’article 43 de la directive TVA, être considéré comme le lieu de la prestation de services (il s’agirait, en l’espèce, du siège de la société « E » en Allemagne).

53.

Ainsi que le relève le Bundesgerichtshof (Cour fédérale de justice), en ce qui concerne la cession de droits, l’application de l’article 56, paragraphe 1, sous a) de la directive TVA doit entrer en ligne de compte. Selon cet article, en l’espèce, le lieu de la prestation de services serait en principe le siège de l’activité économique du preneur, soit la société I au Luxembourg dans la présente affaire.

54.

Je pense (comme la Commission) que la première condition posée par cette disposition, selon laquelle il doit s’agir de prestations de services en faveur d’assujettis établis dans un autre État membre que celui du prestataire, est incontestablement remplie, le prestataire étant en Allemagne et le preneur au Luxembourg. Il en va de même pour la deuxième condition, à savoir que la prestation de services consiste en « cessions et concessions » de certains droits. À cet égard, il convient de rejeter l’argument de A présenté à l’audience, selon lequel les droits cités à l’article 56, paragraphe 1, sous a), de la directive TVA comme les « autres droits similaires » devraient être susceptibles à la fois de cessions et de concessions, ce qui n’est pas le cas des quotas d’émission qui ne peuvent être que cédés. En effet, l’article 56, paragraphe 1, sous a), de la directive TVA envisage les deux hypothèses qui ne sont donc pas cumulatives. D’ailleurs, ainsi que l’a relevé le procureur général de la République fédérale auprès de la Cour fédérale de justice, en Allemagne et en Autriche, le droit d’auteur ne peut pas être cédé (seule une licence étant possible).

55.

Cela nous amène à la troisième condition, laquelle impose que les quotas au sens de l’article 3, sous a), de la directive 2003/87 constituent « d’autres droits similaires » aux « droits d’auteurs, de brevets, de droits de licences, de marques de fabrique et de commerce». Le mot « similaires » est important ici, parce que la thèse de A revient à soutenir que ces droits devraient être « identiques », ce qui n’est manifestement pas l’exigence énoncée à l’article 56, paragraphe 1, sous a), de la directive TVA.

56.

Il ressort du renvoi préjudiciel que le Bundesgerichtshof (Cour fédérale de justice) a tendance à considérer que cette condition est elle aussi satisfaite et je relève que toutes les parties dans la procédure devant la Cour (sauf A et B) partagent cette thèse.

57.

Selon le Bundesgerichtshof (Cour fédérale de justice), le point de vue selon lequel le titre matérialisant un quota d’émission constitue un « autre droit similaire » au sens de l’article 3a, paragraphe 4, point 1, de l’UStG, et donc également au sens de l’article 56, paragraphe 1, sous a), de la directive TVA, est tout d’abord conforme à l’opinion, jusqu’à présent unanime en Allemagne, de la doctrine ( 18 ), de l’administration fiscale ( 19 ) et de la jurisprudence ( 20 ).

58.

Je partage ce point de vue qui me paraît conforme à l’économie et à la finalité de l’article 56, paragraphe 1, sous a), de la directive TVA, même si les opérations juridiques expressément citées à l’article 56, paragraphe 1, sous a), de la directive TVA concernent la protection de la propriété intellectuelle et industrielle ( 21 ), alors que les quotas visés dans la directive 2003/87 constituent une autorisation de l’État ou des autorités publiques à émettre des gaz à effet de serre ( 22 ) et ce pour les raisons qui suivent.

59.

Premièrement, il ressort clairement du libellé de cette disposition que l’énumération qui y est contenue est exemplative et non limitative. Le législateur de l’Union a manifestement choisi de ne pas limiter les droits mentionnés dans cette disposition aux seuls droits de propriété industrielle ou à la propriété intellectuelle en général.

60.

Deuxièmement, je pense (comme le procureur général de la République fédérale auprès de la Cour fédérale de justice) que la liste n’est manifestement pas homogène, car, par « droits de licences », elle entend un ensemble de divers droits d’exploitation qui peuvent être différents des droits de protection intellectuelle expressément cités. Mais il peut y avoir des licences portant sur d’autres droits que le droit d’auteur ou les droits conférés par un brevet ou une marque.

61.

Troisièmement, le fait que les réglementations applicables aux quotas d’émission de gaz à effet de serre soient différentes de celles applicables aux droits expressément cités à l’article 56, paragraphe 1, sous a), de la directive TVA est sans importance. Il en va d’ailleurs de même pour eux : les marques et les brevets doivent être enregistrés alors que le droit d’auteur naît dès la création de l’œuvre protégée. En outre, leurs durées respectives sont variables. En réalité, l’élément déterminant n’est pas la comparabilité des droits en tant que tels, mais celle de leur transfert (cession ou concession). C’est en effet le critère commun permettant l’imposition harmonisée du chiffre d’affaires; il ne peut y avoir de prestation de services imposable au sens de la directive qu’en cas de transfert et, dans ce cas, le lieu de la prestation doit être déterminé ( 23 ).

62.

D’ailleurs, à y regarder de plus près, on constate des points de similitude importants entre la propriété industrielle et les quotas d’émission :

a)

tous deux sont des droits protégés, représentés par un titre que le titulaire peut transférer à des tiers (seul le titulaire d’un quota étant autorisé à émettre une tonne d’équivalent-dioxyde de carbone au cours d’une période spécifiée ( 24 )) ;

b)

comme le Bundesgerichtshof (Cour fédérale de justice) l’a indiqué dans sa demande préjudicielle ( 25 ), tous deux se caractérisent par le fait que le législateur octroie au titulaire un droit absolu, en ce sens qu’il a compétence exclusive pour utiliser et exploiter ledit droit, en en excluant d’autres personnes, même si le droit de la propriété intellectuelle a toutes les caractéristiques d’un droit de propriété, c’est-à-dire, usus, fructus et abusus, alors que le droit de propriété des quotas d’émission n’est pas susceptible de produire des fruits civils (fructus, à savoir par voie de licence) ;

c)

les deux catégories contiennent des droits évaluables en argent, car la valeur des droits d’auteur, de brevets et de marques comme la valeur des quotas d’émissions sont déterminées par le jeu de l’offre et de la demande sur le marché ;

d)

certains droits de propriété intellectuelle sont soumis comme les quotas d’émission à un enregistrement dans un registre public. L’exclusivité du droit d’exploitation découle de l’attribution claire dans le registre des échanges de quotas d’émission. Les quotas d’émission de gaz à effet de serre ont une identification électronique claire et ne peuvent figurer sur le compte que d’un seul titulaire de compte. Par conséquent, seul ce dernier a la possibilité de disposer du quota d’émission soit en l’utilisant pour remplir ses obligations de restitution (selon la législation en matière d’échange de quotas d’émission), soit en le vendant et en le transférant sur le compte d’un autre titulaire de compte ;

e)

les deux catégories des droits sont soumises à une limitation temporelle, même si la « durée de vie » du droit de propriété intellectuelle est plus longue ;

f)

de plus, dans les deux cas, après le transfert, le titulaire du droit n’est plus autorisé à utiliser le droit en cause. Par conséquent, le transfert des quotas d’émission de gaz à effet de serre profite économiquement à son titulaire et peut être comparé du point de vue de la TVA, à la cession de brevets, de marques, de licences ou de droits d’auteur.

63.

Quatrièmement, ainsi que le relève la Commission, la question de savoir si un droit donné présente une similitude avec les droits mentionnés à l’article 56, paragraphe 1, sous a), de la directive TVA appelle avant tout une réponse au regard de l’esprit et de la finalité de cette disposition. Il résulte d’une lecture synoptique des considérants 4, 10, 17, 19, 20, 22 et 23 ainsi que des articles 45, 52, 53, 55 et 56 de la directive TVA que, afin d’éviter les distorsions de concurrence sur le marché intérieur pour les livraisons de biens et prestations de services intracommunautaires en faveur de personnes assujetties, il convient d’appliquer, dans toute la mesure du possible, le principe du pays de destination, c’est-à-dire que l’imposition doit avoir lieu dans l’État membre du destinataire de la livraison ou de la prestation. Cette pratique correspond aussi au principe même de la TVA en tant qu’impôt général sur la consommation ( 26 ), prélevé en principe sur le lieu de la consommation.

64.

Il découle de la ratio legis de l’article 56, paragraphe 1, sous a), de la directive TVA que, pour déterminer si une position juridique est « similaire », il importe donc de savoir si, au moment du transfert, l’application du principe du pays de destination pose ou non problème. Dans le cas de droits inscrits dans un registre public, l’acquéreur, son siège et, par conséquent, également le pays de destination peuvent être déterminés aisément et avec une grande certitude juridique. Tel est le cas des quotas d’émission de gaz à effet de serre. Un traitement identique en matière de TVA peut donc leur être réservé.

65.

Bien que les quotas d’émission n’aient pas la même finalité qu’un droit de propriété intellectuelle (protéger une activité créatrice humaine), la comparabilité de ces deux catégories pour l’analyse de l’article 56 de la directive TVA me paraît établie.

66.

À cet égard, ce qui est important du point de vue du traitement fiscal est la potentialité de ces droits de créer une valeur ajoutée. Cette condition est remplie en l’espèce, car, à travers le transfert des quotas ou les cessions de droit de brevets, voire de droit d’auteur, le titulaire du droit exerce son droit de disposition en contrepartie d’un certain prix.

4. La jurisprudence de la Cour

67.

Même si l’article 56, paragraphe 1, sous a), de la directive TVA n’a pas encore fait l’objet d’une interprétation jurisprudentielle, nous pouvons nous inspirer du fait que la Cour a néanmoins eu l’occasion d’interpréter d’autres points du même paragraphe.

68.

Dans l’arrêt du 16 septembre 1997, von Hoffmann (C-145/96, EU:C:1997:406), la Cour a interprété par voie d’un renvoi préjudiciel le contenu de l’article 9, paragraphe 2, sous e), de la sixième directive 77/388 ( 27 ). La Cour y a analysé si les services d’un arbitre entraient dans le champ d’application de la notion d’« autres prestations similaires » comparables aux services fournis par les avocats ou les conseillers.

69.

Bien que l’avocat général Fennelly ait suggéré à la Cour une interprétation large de la notion, mettant en exergue le fait qu’il n’était pas nécessaire d’appliquer le principe d’interprétation fondé sur l’identité de genre, parce qu’une telle situation ne serait pas conforme à l’économie et à l’objet de la sixième directive ( 28 ), la Cour n’a pas suivi cette interprétation.

70.

La Cour a souligné dans son arrêt que :

le législateur communautaire visait non pas des professions mais des prestations, les professions n’étant mentionnées dans cette disposition que comme moyen de définir les catégories de prestations qui y sont visées ( 29 ) ;

les termes « autres prestations similaires » se réfèrent non pas à quelque élément commun des activités hétérogènes mentionnées à l’article 9, paragraphe 2, sous e), troisième tiret, de la sixième directive 77/388, mais à des prestations analogues à chacune de ces activités, envisagées séparément ( 30 ) ;

une prestation doit être considérée comme analogue à une des activités mentionnées dans cet article, lorsque toutes deux répondent à la même finalité ( 31 ).

71.

Onze ans plus tard, par son arrêt du 6 novembre 2008, Kollektivavtalsstiftelsen TRR Trygghetsrådet (C-291/07, EU:C:2008:609), la Cour a clarifié la jurisprudence précitée.

72.

Il s’agissait de l’interprétation de la même disposition que dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt von Hoffmann (C-145/96, EU:C:1997:406). Une fondation de droit suédois exerçait tant des activités économiques que d’autres activités et la question qui se posait était liée aux conséquences fiscales de certaines prestations de conseil dont la fondation voulait bénéficier pour ses seules activités qui n’entraient pas dans le champ de la directive TVA.

73.

La Cour a rappelé au point 24 de son arrêt l’objectif des règles qui déterminent le lieu de rattachement fiscal des prestations de services qui est d’éviter, d’une part, des conflits de compétence susceptibles de conduire à des doubles impositions et, d’autre part, la non-imposition des recettes. Elle a continué son raisonnement, en donnant une interprétation téléologique à la disposition en cause en mentionnant que l’article 9, paragraphe 2, sous e) ( 32 ), ne précisait pas si son application était soumise à la condition que l’assujetti bénéficiaire d’une prestation de services utilise ou non cette prestation pour les besoins de son activité économique ( 33 ).

74.

De plus, elle a ajouté qu’une telle interprétation :

s’accorde avec l’objectif poursuivi par l’article en cause qui est celui d’une règle de conflit visant à éviter les risques de double imposition et de non-imposition ( 34 ) ;

est conforme aux finalités et aux règles de fonctionnement du régime communautaire de la TVA dans la mesure où elle assure que le consommateur final de la prestation des services supporte le coût final de la TVA due ( 35 ) ;

est également conforme au principe de sécurité juridique et permet de réduire la charge pesant sur les commerçants opérant dans tout le marché unique ainsi que de faciliter la libre circulation de services ( 36 ).

75.

Cette interprétation extensive a été confirmée par la Cour dans une affaire concernant l’exonération des opérations de gestion du patrimoine au moyen de valeurs mobilières. Ainsi au point 54 de l’arrêt du 19 juillet 2012, Deutsche Bank (C-44/11, EU:C:2012:484), la Cour a souligné ce qui suit :

« Dans la mesure où la gestion de portefeuille effectuée par Deutsche Bank dans le litige au principal est une prestation de nature financière et où l’article 56, paragraphe 1, sous e), de la directive [TVA] ne saurait recevoir une interprétation stricte (voir, en ce sens, arrêts du 26 septembre 1996, Dudda, C-327/94, EU:C:1996:355, point 21, ainsi que du 27 octobre 2005, Levob Verzekeringen et OV Bank, C-41/04, EU:C:2005:649, point 34 et jurisprudence citée), il convient de considérer que cette activité, en tant qu’opération financière, relève du champ d’application de l’article 56, paragraphe 1, sous e), de la directive [TVA] » (c’est moi qui souligne).

76.

Dans ce dernier arrêt Levob Verzekeringen et OV Bank (C-41/04, EU:C:2005:649), la Cour devait se prononcer sur le lieu de rattachement fiscal des « prestations des conseillers, ingénieurs, bureaux d’études, avocats, experts-comptables et autres prestations similaires » et a indiqué que la disposition pertinente de la directive visait non pas « des professions, telles que celles d’avocat, de conseiller, d’expert-comptable ou d’ingénieur, mais les prestations effectuées par ces professionnels et celles qui leur sont similaires» ( 37 ).

77.

Cette interprétation téléologique de ces dispositions de la directive TVA est, en outre, conforme au principe général d’interprétation du droit de l’Union, tel qu’il a été exprimé par la Cour dans l’arrêt Cilfit e.a. ( 38 ). À cet égard, chaque disposition de droit de l’Union doit être replacée dans son contexte juridique et interprétée à la lumière de l’ensemble des dispositions de ce droit, de ses finalités et de l’état de son évolution à la date à laquelle l’application de la disposition en cause doit être faite.

78.

Transposées à la présente affaire, les principes qui ressortent de la jurisprudence citée conduisent à la conclusion que les quotas d’émission entrent dans la catégorie des « autres droits similaires » mentionnée à l’article 56, paragraphe 1, sous a), de la directive TVA. Non seulement, le droit qu’ils confèrent est comparable du point de vue de ses caractéristiques aux droits de propriété intellectuelle, mais aussi pareille interprétation est compatible avec le but spécifique de l’article 56 qui est d’éviter la double imposition et le risque de non-imposition.

79.

Comme l’utilisation des droits d’émission conférés par les quotas a habituellement lieu là où celui ayant acheté les quotas exerce son activité économique, que l’acquéreur exploite lui-même une installation pour les émissions de laquelle des quotas doivent être restitués ou revende ces quotas, l’application de l’article 56, paragraphe 1, sous a), de la directive TVA conduit donc à une solution rationnelle du point de vue fiscal, dès lors que les services concernés sont soumis au régime de la TVA de l’État membre sur le territoire duquel les personnes ayant acheté les quotas exercent leur activité économique ( 39 ).

5. Quid de la pratique dans les États membres ?

80.

Non seulement cette question mérite analyse parce que, dans la procédure devant la Cour, la République fédérale d’Allemagne a soutenu que tous les autres États membres avaient adopté la même position que la sienne, mais aussi parce qu’elle pourrait confirmer mon analyse, à défaut d’une autre interprétation dans les États qui pourrait mieux correspondre à la finalité du régime TVA en général et de l’article 56, paragraphe 1, sous a), de la directive TVA en particulier.

a) La position du comité consultatif de la TVA

81.

Ce comité, institué en vertu de l’article 398 de la directive TVA, qui est composé de représentants des États membres et de la Commission, est arrivé à la même conclusion.

82.

Dans le droit fil de la proposition de la Commission, le comité consultatif de la TVA a considéré que les quotas d’émission régis par la directive 2003/87 relevaient de l’article 9, paragraphe 2, sous e), de la sixième directive. Le contenu de cette disposition correspond en grande partie à celui de l’article 56, paragraphe 1, sous a), de la directive TVA.

83.

Le 14 octobre 2004, il a adopté les orientations suivantes :

b) La pratique des États membres

84.

Dans une grande majorité des États membres (21 des 25 ( 40 ) ordres juridiques examinés), une disposition nationale correspondant à l’article 56, paragraphe 1, de la directive TVA s’applique aux quotas d’émission de gaz à effet de serre. Cette constatation se fonde sur les actes nationaux s’alignant sur les orientations émises par le comité consultatif de la TVA en 2004 ( 41 ).

85.

Dans ce cadre, il convient de relever que, dans deux États membres (Estonie, Slovaquie), les cessions de quotas d’émission de gaz à effet de serre ont été prévues explicitement comme un point distinct dans la loi nationale transposant l’article 56, paragraphe 1, de la directive TVA.

86.

Dans de nombreux autres États membres (Belgique, Bulgarie, République tchèque, Irlande, France ( 42 ), Lituanie, Hongrie, Autriche, Slovénie, Finlande ( 43 ), Suède, Royaume-Uni), des avis ou circulaires ou recommandations ont été émis par les administrations compétentes pour que les cessions desdits quotas soient considérées comme relevant de la disposition nationale correspondant à l’article 56, paragraphe 1, sous a), de la directive TVA.

87.

Dans trois autres États membres (Espagne, Italie ( 44 ), Pologne), il ressort des pratiques administratives sous forme de décisions individuelles prises par les administrations fiscales que les cessions de quotas de gaz à effet de serre ont été considérées comme constituant des transactions pour lesquelles le lieu de prestations se trouve à l’endroit où le preneur est établi.

88.

Enfin, dans quatre autres États membres, des travaux préparatoires (Danemark, Luxembourg, Pays-Bas), ou des correspondances entre les ministères (Lettonie), font état d’un point de vue similaire.

89.

À cet égard, il est important de souligner que, tandis que dans certains ordres juridiques, les cessions de quotas ont été explicitement catégorisées comme des « droits similaires » (Italie, Pays-Bas, Slovénie, Finlande, Suède), il en existe d’autres où lesdites cessions de quotas d’émission ont simplement été qualifiées comme relevant de la disposition nationale correspondant à l’article 56, paragraphe 1, sous a), de la directive TVA, sans apporter de précision quant à la catégorie spécifique à laquelle lesdits quotas ont été affectés (Belgique, Bulgarie, République Tchèque, Danemark, Allemagne, Irlande, Espagne, France, Italie, Lettonie, Luxembourg, Hongrie, Autriche, Pologne, Royaume-Uni), ou bien en précisant une catégorie spécifique « cession de quotas d’émission de gaz à effet de serre » (Estonie, Slovaquie), différente des catégories énoncées expressément à audit point a) de l’article 56, paragraphe 1, de la directive TVA.

90.

Par ailleurs, il convient de noter que la jurisprudence dans ces différents États membres abordant la question de la fixation du lieu d’imposition des cessions de quotas d’émission de gaz à effet de serre avant 2010 semble peu étoffée.

91.

Pour les autres ordres juridiques (Grèce, Chypre, Malte, Roumanie), il n’a pas été possible d’identifier si et/ou comment les cessions de quotas d’émission de gaz à effet de serre étaient catégorisées aux fins de la TVA et, dès lors, quel était le lieu de prestation pour lesdites cessions.

92.

Il ressort de tout ce qui précède que la notion d’« autres droits similaires » visée à l’article 56, paragraphe 1, sous a), de la directive TVA doit être interprétée en ce sens qu’elle englobe également les quotas d’émission de gaz à effet de serre.

V – Conclusion

93.

Pour ces raisons et en rappelant que la règle générale est désormais que le lieu d’une prestation de service se situe là où est établi le preneur, je propose à la Cour de répondre à la question préjudicielle posée par le Bundesgerichtshof (Cour fédérale de justice, Allemagne) comme suit :

La notion d’« autres droits similaires » visée à l’article 56, paragraphe 1, sous a), de la directive 2006/112/CE du Conseil, du 28 novembre 2006, relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée, doit être interprétée en ce sens qu’elle englobe également les quotas tels que définis à l’article 3, sous a), de la directive 2003/87/CE du Parlement européen et du Conseil, du 13 octobre 2003, établissant un système d’échange de quotas d’émission de gaz à effet de serre dans la Communauté et modifiant la directive 96/61/CE du Conseil.


( 1 )   Langue originale : le français.

( 2 )   Le Bars, B., « La nature juridique des quotas d’émission de gaz à effet de serre après l’ordonnance du 15 avril 2004, Réflexions sur l’adaptabilité du droit des biens », La Semaine juridique, Édition générale no 28, 7 juillet 2004, doctrine 148.

( 3 )   Directive du Conseil du 28 novembre 2006, relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée (JO 2006, L 347, p. 1), dans sa version en vigueur en 2009 (ci-après la « directive TVA »).

( 4 )   Directive du Parlement européen et du Conseil du 13 octobre 2003, établissant un système d’échange de quotas d’émission de gaz à effet de serre dans la Communauté et modifiant la directive 96/61/CE du Conseil (JO 2003, L 275, p. 32).

( 5 )   Directive du Conseil du 17 mai 1977, en matière d’harmonisation des législations des États membres relatives aux taxes sur le chiffre d’affaires – Système commun de taxe sur la valeur ajoutée: assiette uniforme (JO 1977, L 145, p. 1).

( 6 )   Directive du Conseil du 12 février 2008, modifiant la directive 2006/112/CE en ce qui concerne le lieu des prestations de service (JO 2008, L 44, p. 11).

( 7 )   Directive du Conseil du 16 mars 2010, modifiant la directive 2006/112 relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée en ce qui concerne l’application facultative et temporaire de l’autoliquidation aux prestations de certains services présentant un risque de fraude (JO 2010, L 72, p. 1). Le considérant 3 de la directive 2010/23 qualifie le transfert de quotas d’émission de « particulièrement exposé[s] à la fraude ».

( 8 )   Directive du Conseil du 22 juillet 2013, modifiant la directive 2006/112 relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée en ce qui concerne l’application facultative et temporaire de l’autoliquidation aux livraisons de certains biens et prestations de certains services présentant un risque de fraude (JO 2013, L 201, p. 4).

( 9 )   Article 25, sous a), de la directive TVA.

( 10 )   En ce qui concerne le traitement fiscal, voir le rapport réalisé pour la Commission (direction générale « Fiscalité et union douanière ») par Copenhagen Economics, Tax treatment of ETS allowances, Options for improving transparency and efficiency, October 2010.

( 11 )   Une grande partie des discussions concernant l’échange de quotas d’émission porte sur la base juridique de ce système et sa mise en œuvre dans les systèmes juridiques existants. La nature juridique des quotas d’émission est un problème très controversé, vu le fait que la directive 2003/87 ne contient aucune allusion à cet égard. Cependant, les quotas ont des caractéristiques à la fois de concessions ou licences administratives ainsi que de propriété privée et, apparemment, certains États membres sont parvenus à des conclusions différentes sur cette nature juridique. La discussion porte également sur la question de savoir si les quotas d’émission peuvent être définis comme des biens immatériels (et non des licences administratives) (c’est moi qui traduis). Voir Colangelo, M., Creating property rights, Law and Regulation of Secondary Trading in the European Union, Martinus Nijhoff, 2012, p. 162 et 165 (qui fait référence à Jacometti, V., Lo scambio di quote di emissione. Analisi di un nuovo strumento di tutela ambientale in prospettiva comparatistica, Milan, Giuffrè, 2010).

( 12 )   Le traitement des quotas d’émission en droit fiscal, dans les normes comptables et la réglementation des services financiers, est particulièrement pertinent, puisque, s’il était différent selon les pays, il pourrait sérieusement nuire au développement du marché des quotas d’émission. En ce qui concerne le régime fiscal applicable aux quotas d’émission, il n’y a pas actuellement de déclarations d’autorités comptables qui fassent autorité ni dans les International Financial Reporting Standards (IFRS) ni dans les United States Generally Accepted Accounting Principles (US GAAP), qui ont abordé spécifiquement la comptabilité des systèmes de quotas d’émission. À la fois, l’ International Financial Reporting Interpretations Committee (IFRIC) et l’Emerging Issues Task Force (EITF) ont examiné la comptabilité des systèmes de quotas d’émission, mais dans la pratique aucune orientation n’a été mise en œuvre (c’est moi qui traduis). Colangelo, op. cit., p. 169 et 170.

( 13 )   Voir Le Bars, B., « La nature juridique des quotas d’émission de gaz à effet de serre après l’ordonnance du 15 avril 2004, Réflexions sur l’adaptabilité du droit des biens », La Semaine juridique, Édition générale no 28, 7 juillet 2004, doctrine 148; Richelle, I., « Emission Trading : Accounting Tax Regime in Beglium », Bulletin for International Taxation, août/septembre 2008, p. 414 à 421 (voir également, Richelle, I., « Emission trading : accounting and tax aspects », in Lang, M., et Vanistendael, F. (éditeurs), Accounting and Taxation & Assessment of ECJ Case Law, EATLP International Tax Series, 2007, vol. 5).

( 14 )   Voir article L-229-18-II du code de l’environnement, introduit par l’ordonnance de 15 avril 2004.

( 15 )   Voir Richelle, I., op. cit. p. 418.

( 16 )   Voir Richelle, I., op. cit. p. 416.

( 17 )   Il s’agit non pas un délai de prescription, mais un délai lié à l’existence du droit en soi.

( 18 )   Voir Küffner/Stöcker/Zugmaier, UStG, 114ème actualisation, article 3a point 121 ; Meyer-Holiatz/Nagel/Krüger dans Elspas/Salje/Stewing, Emissionshandel, chapitre 45 points 3 et suiv.; Adam/Hentschke/Kopp-Assenmacher, Handbuch des Emissionshandelsrechts, chapitre 8.7.

( 19 )   Voir circulaire du ministère fédéral des finances allemand du 2 février 2005, BStBI. I 2005, p. 494 (voir l’annexe 1 des observations de la Commission).

( 20 )   Voir arrêt du 21 juin 2013, Finanzgericht Düsseldorf (tribunal des finances de Düsseldorf), 1 K 2550/11 U.

( 21 )   Il est intéressant de relever ici que, selon l’article 7 du règlement (CE) no 1777/2005 du Conseil, du 17 octobre 2005, portant mesures d’exécution de la directive 77/388 (JO 2005, L 288, p. 1), l’octroi de droits de retransmission télévisée de matchs de football par des organismes établis dans un pays tiers à des assujettis établis dans la Communauté est assimilé aux droits de propriété intellectuelle précités.

( 22 )   Voir articles 4 et suiv. et article 13 de la directive 2003/87. Les émissions de gaz à effet de serre générées par une activité au sens de la directive 2003/87 nécessitent une autorisation à laquelle l’exploitant d’une installation peut prétendre dans les conditions visées à l’article 6 de cette directive. Dans le cadre du système d’échange de quotas d’émission de l’Union européenne, les exploitants d’installations doivent restituer tous les ans un nombre de quotas d’émission de gaz à effet de serre correspondant à leurs émissions effectives. Si un exploitant fait baisser les émissions de son installation, il peut vendre sur le marché les quotas d’émission dont il n’a dès lors plus besoin. Dans le cas inverse, il doit acheter des quotas d’émission pour remplir son obligation de restitution. Si un exploitant d’installation ne satisfait pas à cette obligation de restitution, il fait l’objet de sanctions financières.

( 23 )   Cette détermination n’est évidemment pas nécessaire pour les transferts exonérés [voir, à titre d’exemple, article 135, paragraphe 1, sous f) et j) à l), de la directive TVA].

( 24 )   Voir article 3, sous a), de la directive 2003/87.

( 25 )   Voir points 29 et suiv.

( 26 )   Voir article 1er, paragraphe 2, de la directive TVA.

( 27 )   Qui correspond au contenu de l’actuel article 56, paragraphe 1, sous c), de la directive TVA.

( 28 )   Voir ses conclusions dans l’affaire von Hoffmann (C-145/96, EU:C:1997:218, points 17 et 23).

( 29 )   Voir arrêt du 16 septembre 1997, von Hoffmann (C-145/96, EU:C:1997:406, point 15).

( 30 )   Voir arrêt du 16 septembre 1997, von Hoffmann (C-145/96, EU:C:1997:406, point 20).

( 31 )   Voir arrêt du 16 septembre 1997, von Hoffmann (C-145/96, EU:C:1997:406, point 21).

( 32 )   Actuellement, article 56, paragraphe 1, sous c), de la directive TVA.

( 33 )   Voir arrêt du 6 novembre 2008, Kollektivavtalsstiftelsen TRR Trygghetsrådet (C-291/07, EU:C:2008:609, point 28).

( 34 )   Voir arrêt du 6 novembre 2008, Kollektivavtalsstiftelsen TRR Trygghetsrådet (C-291/07, EU:C:2008:609, point 30). Conformément à une jurisprudence bien établie de la Cour, l’objectif des dispositions déterminant le lieu de rattachement fiscal des prestations de services est d’éviter, d’une part, des conflits de compétence susceptibles de conduire à des doubles impositions et, d’autre part, la non-imposition de recettes (arrêt du 30 avril 2015, SMK, C-97/14, EU:C:2015:290).

( 35 )   Voir arrêt du 8 novembre 2008, Kollektivavtalsstiftelsen TRR Trygghetsrådet (C-291/07, EU:C:2008:609, point 32).

( 36 )   Voir arrêt du 8 novembre 2008, Kollektivavtalsstiftelsen TRR Trygghetsrådet (C-291/07, EU:C:2008:609, point 33).

( 37 )   Arrêt du 27 octobre 2005, Levob Verzekeringen et OV Bank (C-41/04, EU:C:2005:649, point 37).

( 38 )   Voir arrêt du 6 octobre 1982, Cilfit e.a. (283/81, EU:C:1982:335, point 20).

( 39 )   Voir, en ce sens, arrêt du 12 mai 2005, RAL (Channel Islands) e.a. (C-452/03, EU:C:2005:289, point 33).

( 40 )   Le système allemand n’a évidemment pas été analysé ; les données nous ont manqué pour examiner le système juridique portugais et la République de Croatie n’était pas encore membre de l’Union en 2009.

( 41 )   Pour une liste des orientations convenues par le comité consultatif de la TVA, voir le site Internet à l’adresse suivante : https://ec.europa.eu/taxation_customs/sites/taxation/files/docs/body/guidelines-vat-committee-meetings_fr.pdf.

( 42 )   Notons que, en France, origine de la demande des orientations du comité consultatif de la TVA relatives aux quotas d’émission de gaz à effet de serre du point du vue de la TVA, il a été décidé au mois de juin 2009 d’exonérer temporairement les cessions desdits quotas de la TVA en tant qu’opérations portant sur des titres.

( 43 )   La doctrine finlandaise constate qu’il n’était pas clair que tous les États membres aient adopté ce point de vue, et, en Belgique, l’on parlait plutôt d’un « consensus ».

( 44 )   Il convient de préciser que la procédure devant l’administration fiscale italienne concernait un acheteur de quotas d’émission de gaz à effet de serre établi en Suisse.