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Avis juridique important

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62000J0333

Arrêt de la Cour (sixième chambre) du 7 novembre 2002. - Eila Päivikki Maaheimo. - Demande de décision préjudicielle: Tarkastuslautakunta - Finlande. - Règlement (CEE) nº 1408/71 - 'Prestations familiales' - Allocation de garde d'enfant à domicile - Condition de résidence de l'enfant. - Affaire C-333/00.

Recueil de jurisprudence 2002 page I-10087


Sommaire
Parties
Motifs de l'arrêt
Décisions sur les dépenses
Dispositif

Mots clés


1. Sécurité sociale des travailleurs migrants - Réglementation communautaire - Champ d'application matériel - Prestations visées et prestations exclues - Critères de distinction - Allocation de garde d'enfant à domicile - Inclusion

(Règlement du Conseil n° 1408/71)

2. Sécurité sociale des travailleurs migrants - Réglementation communautaire - Champ d'application matériel - Prestations visées et prestations exclues - Critères de distinction - Prestation destinée à compenser les charges de famille du bénéficiaire - Allocation de garde d'enfant à domicile - Inclusion

(Règlement du Conseil n° 1408/71, art. 1er, u), i), et 4, § 1, h))

3. Sécurité sociale des travailleurs migrants - Prestations familiales - Travailleur salarié soumis à la législation d'un État membre, mais résidant avec sa famille dans un autre État membre - Droit du conjoint de percevoir une allocation de garde d'enfant à domicile prévue par la législation de l'État d'emploi

(Règlement du Conseil n° 1408/71, art. 73)

Sommaire


1. Une prestation ne peut être considérée comme une prestation de sécurité sociale que si elle est octroyée, en dehors de toute appréciation individuelle et discrétionnaire des besoins personnels, aux bénéficiaires sur la base d'une situation légalement définie.

Une prestation telle que l'allocation de garde d'enfant à domicile, prévue par la laki (1128/96) lasten kotihoidon ja yksityisen hoidon tuesta (loi relative aux allocations de garde d'enfant à domicile et de garde privée), satisfait à cette condition: les dispositions relatives à l'octroi de ladite allocation confèrent aux bénéficiaires un droit légalement défini et le montant de base ainsi que le complément de garde sont accordés automatiquement aux personnes qui répondent à certains critères objectifs, en dehors de toute appréciation individuelle et discrétionnaire des besoins personnels.

( voir points 22-23 )

2. Une prestation telle que l'allocation de garde d'enfant à domicile, prévue par la laki (1128/96) lasten kotihoidon ja yksityisen hoidon tuesta (loi relative aux allocations de garde d'enfant à domicile et de garde privée), rentre dans la définition des prestations familiales et se rapporte dès lors au risque mentionné à l'article 4, paragraphe 1, sous h), du règlement n° 1408/71. En effet, elle est destinée à compenser les charges de famille au sens de l'article 1er, sous u), i), du même règlement.

L'expression «compenser les charges de famille», figurant à l'article 1er, sous u), i), du règlement n° 1408/71, qui définit les «prestations familiales», doit être interprétée en ce sens qu'elle vise, notamment, une contribution publique au budget familial, destinée à alléger les charges découlant de l'entretien des enfants.

( voir points 24-25, disp. 1 )

3. Selon l'article 73 du règlement n° 1408/71, le travailleur salarié qui est soumis à la législation d'un État membre a droit, pour les membres de sa famille qui résident sur le territoire d'un autre État membre, aux prestations familiales prévues par la législation du premier État, comme s'ils résidaient sur le territoire de celui-ci.

Lorsqu'un travailleur salarié vit avec sa famille dans un État membre autre que celui dont la législation lui est applicable, son conjoint est également en droit d'invoquer ledit article.

L'article 73 du règlement n° 1408/71 vise à empêcher qu'un État membre puisse faire dépendre l'octroi d'une prestation familiale de la résidence des membres de la famille du travailleur dans l'État membre prestataire, afin de ne pas dissuader le travailleur communautaire d'exercer son droit à la libre circulation. Par conséquent, il est a fortiori contraire au but dudit article d'instaurer une condition de résidence effective.

Dès lors, l'article 73 du règlement n° 1408/71 doit être interprété en ce sens que, si l'octroi d'une prestation telle que l'allocation de garde d'enfant à domicile dépend de la résidence effective de l'enfant sur le territoire de l'État membre compétent, cette condition doit être considérée comme remplie lorsque l'enfant réside sur le territoire d'un autre État membre.

( voir points 31-34, disp. 2 )

Parties


Dans l'affaire C-333/00,

ayant pour objet une demande adressée à la Cour, en application de l'article 234 CE, par le Tarkastuslautakunta (Finlande) et tendant à obtenir, dans une procédure engagée par

Eila Päivikki Maaheimo,

une décision à titre préjudiciel sur l'interprétation des articles 4, paragraphe 1, sous h), 10 bis, 73 et 75 du règlement (CEE) n° 1408/71 du Conseil, du 14 juin 1971, relatif à l'application des régimes de sécurité sociale aux travailleurs salariés, aux travailleurs non salariés et aux membres de leur famille qui se déplacent à l'intérieur de la Communauté, dans sa version modifiée et mise à jour par le règlement (CE) n° 118/97 du Conseil, du 2 décembre 1996 (JO 1997, L 28, p. 1),

LA COUR (sixième chambre)

composée de M. R. Schintgen, président de la deuxième chambre, faisant fonction de président de la sixième chambre, M. V. Skouris, Mmes F. Macken et N. Colneric (rapporteur), et M. J. N. Cunha Rodrigues, juges,

avocat général: M. F. G. Jacobs,

greffier: Mme L. Hewlett, administrateur,

considérant les observations écrites présentées:

- pour le gouvernement finlandais, par Mme E. Bygglin, en qualité d'agent,

- pour la Commission des Communautés Européennes, par Mme H. Michard et M. M. Huttunen, en qualité d'agents,

vu le rapport d'audience,

ayant entendu les observations orales du gouvernement finlandais et de la Commission à l'audience du 10 janvier 2002,

ayant entendu l'avocat général en ses conclusions à l'audience du 7 mars 2002

rend le présent

Arrêt

Motifs de l'arrêt


I. Par décision du 31 mai 2000, parvenue à la Cour le 11 septembre suivant, le Tarkastuslautakunta (ci-après la commission de recours en matière de sécurité sociale) a posé, en vertu de l'article 234 CE, trois questions préjudicielles relatives à l'interprétation des articles 4, paragraphe 1, sous h), 10 bis, 73 et 75 du règlement (CEE) n° 1408/71 du Conseil, du 14 juin 1971, relatif à l'application des régimes de sécurité sociale aux travailleurs salariés, aux travailleurs non salariés et aux membres de leur famille qui se déplacent à l'intérieur de la Communauté, dans sa version modifiée et mise à jour par le règlement (CE) n° 118/97 du Conseil, du 2 décembre 1996 (JO 1997, L 28, p. 1, ci-après le «règlement n° 1408/71»).

II. Ces questions ont été posées dans le cadre d'un litige opposant Mme Maaheimo à la Kansaneläkelaitos (caisse nationale des retraites) au sujet du refus de cette dernière de verser à Mme Maaheimo l'allocation de garde d'enfant à domicile prévue par la laki (1128/1996) lasten kotihoidon ja yksityisen hoidon tuesta (loi relative aux allocations de garde d'enfant à domicile et de garde privée, ci-après la loi sur l'allocation de garde d'enfant à domicile).

Réglementation communautaire

III. L'article 4, paragraphe 1, sous h), du règlement n° 1408/71 dispose:

Le présent règlement s'applique à toutes les législations relatives aux branches de sécurité sociale qui concernent:

[...]

h))les prestations familiales.

IV. L'article 1er, sous u), i), dudit règlement définit les prestations familiales comme désignant toutes les prestations en nature ou en espèces destinées à compenser les charges de famille dans le cadre d'une législation prévue à l'article 4 paragraphe 1 point h), à l'exclusion des allocations spéciales de naissance ou d'adoption mentionnées à l'annexe II.

V. Aux termes de l'article 4, paragraphe 4, du règlement n° 1408/71, est exclu du champ d'application matériel de ce règlement, entre autres, l'assistance sociale et médicale.

VI. L'article 14, point 1, sous a), du règlement n° 1408/71 prévoit que la personne qui exerce une activité salariée sur le territoire d'un État membre au service d'une entreprise dont elle relève normalement et qui est détachée par cette entreprise sur le territoire d'un autre État membre afin d'y effectuer un travail pour le compte de celle-ci, demeure soumise à la législation du premier État, à condition que la durée prévisible de ce travail n'excède pas douze mois [...].

VII. L'article 73 du règlement n° 1408/71 dispose:

Le travailleur salarié ou non salarié soumis à la législation d'un État membre a droit, pour les membres de sa famille qui résident sur le territoire d'un autre État membre, aux prestations familiales prévues par la législation du premier État, comme s'ils résidaient sur le territoire de celui-ci [...].

VIII. En vertu de l'article 75, paragraphe 1, première phrase, du règlement n° 1408/71, les prestations familiales sont servies, dans les cas visés à l'article 73 dudit règlement, par l'institution compétente de l'État à la législation duquel le travailleur salarié ou non salarié est soumis. Aux termes de la seconde phrase de ce paragraphe, elles sont servies conformément aux dispositions que ces institutions appliquent, que la personne physique ou morale à laquelle ces prestations doivent être servies réside, séjourne ou ait son siège sur le territoire de l'État compétent ou sur celui d'un autre État membre.

IX. Selon son article 4, paragraphe 2 bis, sous a), le règlement n° 1408/71 s'applique aux prestations spéciales à caractère non contributif relevant d'une législation ou d'un régime autres que ceux qui sont visés au paragraphe 1 du même article, lorsque ces prestations sont destinées à couvrir, à titre supplétif, complémentaire ou accessoire, les éventualités correspondant aux branches visées audit paragraphe 1. L'article 10 bis, paragraphe 1, du règlement n° 1408/71 dispose que les personnes auxquelles ce règlement est applicable bénéficient des prestations spéciales en espèces à caractère non contributif visées à l'article 4, paragraphe 2 bis, du même règlement exclusivement sur le territoire de l'État membre dans lequel elles résident et au titre de la législation de cet État, pour autant que ces prestations soient mentionnées à l'annexe II bis dudit règlement. La république de Finlande n'a pas inscrit l'allocation de garde d'enfant à domicile dans ladite annexe.

Législation nationale

X. Conformément à la laki (36/1973) lasten päivähoidosta (loi sur la garde des enfants, ci-après la loi sur la garde des enfants), en Finlande, tous les parents ou toute personne ayant la charge d'un enfant ont droit à une place dans une crèche communale à partir de l'expiration de la période de versement de l'allocation parentale et jusqu'à ce que l'enfant soit soumis à l'obligation scolaire. Selon l'article 11 bis, paragraphe 1, de cette loi, la commune veille à ce que soit proposé aux ayants droit un tel service de garde des enfants. En vertu du paragraphe 2 du même article, les parents qui n'optent pas pour le placement dans une crèche ont droit à une allocation en vertu de la loi sur l'allocation de garde d'enfant à domicile.

XI. Selon l'article 1er de la loi sur l'allocation de garde d'enfant à domicile, celle-ci a pour objet de réglementer le droit à l'aide financière octroyée pour organiser la garde de l'enfant comme une alternative au placement en crèche prévu par la loi sur la garde des enfants. Aux termes de l'article 3, premier alinéa, de la loi sur l'allocation de garde d'enfant à domicile, [l]'allocation prévue par la présente loi est versée pour autant que les parents ou toute personne ayant la charge de l'enfant ne choisissent pas de le placer dans un service de garde visé à l'article 11 bis, paragraphe 1, de la loi sur la garde des enfants et que l'enfant réside réellement en Finlande.

XII. Selon l'article 2 de la loi sur l'allocation de garde d'enfant à domicile, on entend par allocation de garde d'enfant à domicile une allocation versée aux parents ou à toute personne ayant la charge de l'enfant pour en organiser la garde et comprenant un montant de base (hoitoraha) et, le cas échéant, un complément de garde (hoitolisä). Le montant de base est versé pour chaque enfant d'une famille et varie en fonction de l'âge et du nombre des enfants. Le complément de garde, qui est défini à l'article 5 de la loi sur l'allocation de garde d'enfant à domicile, est versé intégralement pour un seul enfant par famille si les revenus mensuels de la famille sont inférieurs aux plafonds de ressources déterminés en fonction du nombre de membres de la famille.

XIII. En outre, l'article 20 de ladite loi permet une allocation sous forme de supplément communal (kunnallinen lisä). Il dispose que, [n]onobstant les dispositions de la présente loi concernant le montant de base et le complément de l'allocation de garde, il peut être versé sur décision de la commune un montant supplémentaire en majoration du montant de base et du complément de garde (supplément communal). Cette allocation n'est toutefois pas visée par les questions préjudicielles.

XIV. C'est aux communes qu'incombe le financement de l'organisation de la garde. Toutefois, en vertu de l'article 8 de la loi sur l'allocation de garde d'enfant à domicile, il appartient à la caisse nationale des retraites d'effectuer les opérations prévues par la loi. En ce qui concerne le financement de l'allocation de garde d'enfant à domicile, l'article 9 de la même loi dispose que la commune doit rembourser les frais occasionnés par cette allocation à la caisse nationale des retraites.

Litige au principal

XV. Mme Maaheimo, demanderesse au principal, est ressortissante finlandaise, de même que son mari et ses enfants. Ayant obtenu un congé parental, elle a pu s'occuper de ses enfants à la maison. À partir du 8 janvier 1998, elle a perçu l'allocation de garde d'enfant à domicile. Au cours de la période allant du 1er mai 1998 au 30 avril 1999, son mari a travaillé en Allemagne en tant que travailleur détaché. Du 10 juillet 1998 au 31 mars 1999, Mme Maaheimo s'est installée avec ses enfants chez son mari en Allemagne. Selon elle, son domicile permanent est resté à Helsinki. Pendant cette période, toute la famille était légalement couverte par la sécurité sociale finlandaise.

XVI. Par décision du 27 août 1998, la caisse nationale des retraites a cessé de verser à Mme Maaheimo l'allocation de garde d'enfant à domicile à partir du 10 août 1998. Cette décision a été prise en application de l'article 3, premier alinéa, de la loi sur l'allocation de garde d'enfant à domicile au motif que, en fait, les enfants ne résidaient pas en Finlande.

XVII. Le recours formé par Mme Maaheimo contre cette décision devant la commission d'assurance maladie a été rejeté par décision du 1er mars 1999. Le 31 mars 1999, la demanderesse a introduit devant la commission de recours de sécurité sociale un appel tendant à l'annulation de la décision de la commission d'assurance maladie et à ce que la caisse nationale des retraites soit obligée de continuer à payer l'allocation.

XVIII. C'est dans ces conditions que cette commission, organe indépendant statuant en dernier ressort sur les appels en matière d'allocation de garde d'enfant à domicile, a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes:

1) L'allocation de garde de l'enfant à domicile, octroyée en application de la laki lasten kotihoidon tuesta ja yksityisen hoidon tuesta (loi relative aux allocations de garde d'enfant à domicile et de garde privée), relève-t-elle du domaine d'application du droit communautaire en tant que prestation familiale au sens de l'article 4, paragraphe 1, sous h), du règlement (CEE) n° 1408/71 du Conseil, du 14 juin 1971, relatif à l'application des régimes de sécurité sociale aux travailleurs salariés, aux travailleurs non salariés et aux membres de leur famille qui se déplacent à l'intérieur de la Communauté, dans sa version modifiée et mise à jour par le règlement (CEE) n° 2001/83 du Conseil, du 2 juin 1983, tel que modifié par le règlement (CEE) n° 3427/89 du Conseil, du 30 octobre 1989?

2) Si tel est le cas, les articles 73 et 75 du règlement n° 1408/71, compte tenu de l'article 10 bis du même règlement et du fait que la loi finlandaise n'est pas mentionnée dans l'annexe II bis du règlement, imposent-ils le versement de l'allocation de garde d'enfant à domicile pour un enfant de la famille du travailleur salarié qui est détaché temporairement dans un autre État membre, également dans le cas où la condition de résidence réelle prévue par la législation nationale n'est pas remplie, avec pour résultat qu'il n'est pas possible d'effectuer le choix légalement prévu entre une place en crèche communale et l'allocation de garde d'enfant à domicile ou que ce choix n'a pas été réellement effectué?

3) Si l'allocation de garde d'enfant à domicile ne relève pas du droit communautaire au titre des dispositions précitées, existe-t-il d'autres règles de ce droit qui en imposent le versement dans un autre État membre dans le cas mentionné sous 2)?

Sur les questions préjudicielles

XIX. Il convient de relever que, eu égard à la date des faits au principal, la version applicable du règlement n° 1408/71 paraît être celle modifiée et mise à jour par le règlement n° 118/97, de sorte que c'est cette dernière version qu'il y a lieu d'interpréter. Il convient toutefois de souligner que les dispositions pertinentes du règlement n° 1408/71 sont restées les mêmes en substance.

Sur la première question

XX. Par sa première question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si une allocation telle que l'allocation de garde d'enfant à domicile en cause au principal peut être regardée comme une prestation familiale au sens de l'article 4, paragraphe 1, sous h), du règlement n° 1408/71.

XXI. Le gouvernement finlandais soutient, en premier lieu, que l'allocation de garde d'enfant à domicile n'a pas trait à l'un des risques énumérés à l'article 4, paragraphe 1, du règlement n° 1408/71, mais qu'il s'agit d'une assistance sociale au sens du paragraphe 4 du même article. Il se réfère, à cet égard, à l'arrêt du 11 juin 1998, Kuusijärvi (C-275/96, Rec. p. I-3419, point 60), dans lequel la Cour aurait indiqué que doit être assimilée à une prestation familiale une prestation qui vise à permettre à l'un des parents de se consacrer à l'éducation d'un jeune enfant, plus précisément à rétribuer l'éducation dispensée à l'enfant, à compenser les autres frais de garde et d'éducation et, le cas échéant, à atténuer les désavantages financiers qu'implique la renonciation à un revenu provenant d'une activité professionnelle. Or, en l'espèce, le bénéfice de l'allocation de garde d'enfant à domicile ne supposerait pas que le parent garde lui-même l'enfant à la maison ni qu'il se retire de la vie professionnelle en raison de la garde de l'enfant. L'objectif de ladite allocation serait l'organisation de la garde de l'enfant pendant la journée. Dès lors, elle ne serait pas destinée à couvrir les frais familiaux, mais ferait partie d'une organisation communale de services sociaux.

XXII. À cet égard, il y a lieu de rappeler que, selon une jurisprudence constante, une prestation ne peut être considérée comme une prestation de sécurité sociale que si elle est octroyée, en dehors de toute appréciation individuelle et discrétionnaire des besoins personnels, aux bénéficiaires sur la base d'une situation légalement définie (voir, notamment, arrêts du 16 juillet 1992, Hughes, C-78/91, Rec. p. I-4839, point 15, et du 15 mars 2001, Offermanns, C-85/99, Rec. p. I-2261, point 28).

XXIII. Une prestation telle que l'allocation de garde d'enfant à domicile en cause au principal satisfait à cette condition: les dispositions relatives à l'octroi de ladite allocation confèrent aux bénéficiaires un droit légalement défini et le montant de base ainsi que le complément de garde sont accordés automatiquement aux personnes qui répondent à certains critères objectifs, en dehors de toute appréciation individuelle et discrétionnaire des besoins personnels.

XXIV. Une prestation telle que celle en cause au principal rentre également dans la définition des prestations familiales et se rapporte dès lors au risque mentionné à l'article 4, paragraphe 1, sous h), du règlement n° 1408/71. En effet, elle est destinée à compenser les charges de famille au sens de l'article 1er, sous u), i), du même règlement.

XXV. Comme la Cour l'a constaté au point 41 de l'arrêt Offermanns, précité, l'expression «compenser les charges de famille», figurant à l'article 1er, sous u), i), du règlement n° 1408/71, qui définit les prestations familiales, doit être interprétée en ce sens qu'elle vise, notamment, une contribution publique au budget familial, destinée à alléger les charges découlant de l'entretien des enfants.

XXVI. Certes, une des finalités de la loi sur l'allocation de garde d'enfant à domicile est l'organisation de la garde des enfants. Toutefois, il ressort de la décision de renvoi que l'allocation de garde d'enfant à domicile vise également à compenser les frais de garde et d'éducation et, ainsi, à atténuer les charges financières. Par conséquent, il apparaît qu'il y a un lien étroit entre les charges de famille et l'allocation en cause au principal, en sorte qu'une prestation telle que l'allocation de garde d'enfant à domicile doit être regardée comme une prestation familiale au sens de l'article 4, paragraphe 1, sous h), du règlement n° 1408/71.

XXVII. Le gouvernement finlandais fait valoir, en second lieu, que c'est la commune sur le territoire de laquelle la famille réside qui doit prévoir des places dans une crèche publique et qui supporte le coût de l'allocation de garde d'enfant à domicile versée aux parents. Étant donné que le droit à une place dans une crèche publique est soumis à une condition de résidence, l'octroi de l'allocation devrait lui aussi être soumis à cette condition.

XXVIII. À cet égard, il suffit de constater que le droit à l'allocation de garde d'enfant à domicile n'est en aucune manière subordonné au défaut de place dans une crèche publique et ne dépend pas non plus d'une demande antérieure en vue d'obtenir une telle place. Le gouvernement finlandais a lui-même admis, lors de l'audience, que les parents sont libres d'alterner entre le placement dans une crèche publique et la perception de l'allocation de garde d'enfant à domicile.

XXIX. Il y a lieu, dès lors, de répondre à la première question qu'une prestation telle que l'allocation de garde d'enfant à domicile prévue par la loi sur l'allocation de garde d'enfant à domicile constitue une prestation familiale au sens de l'article 4, paragraphe 1, sous h), du règlement n° 1408/71.

Sur la deuxième question

XXX. Conformément à l'article 14, point 1, sous a), du règlement n° 1408/71, un travailleur détaché demeure soumis à la législation de l'État dans lequel lui et sa famille résident normalement - la législation finlandaise dans l'affaire au principal -, à condition que la durée prévisible du travail à effectuer n'excède pas douze mois.

XXXI. Selon l'article 73 du règlement n° 1408/71, le travailleur salarié qui est soumis à la législation d'un État membre a droit, pour les membres de sa famille qui résident sur le territoire d'un autre État membre, aux prestations familiales prévues par la législation du premier État, comme s'ils résidaient sur le territoire de celui-ci.

XXXII. Il y a lieu de souligner que, conformément à la jurisprudence de la Cour (voir, en ce sens, arrêts du 19 février 1981, Beeck, 104/80, Rec. p. 503, points 7 et 8; Hughes, précité, point 28, et du 10 octobre 1996, Hoever et Zachow, C-245/94 et C-312/94, Rec. p. I-4895, point 38, et Kuusijärvi, précité, point 69), l'article 73 du règlement n° 1408/71 est applicable à un travailleur qui vit avec sa famille dans un État membre autre que celui dont la législation lui est applicable.

XXXIII. Lorsque tel est le cas, le conjoint du travailleur est également en droit d'invoquer ledit article (voir arrêt Hoever et Zachow, précité, point 38).

XXXIV. Ainsi que la Cour l'a jugé d'une façon constante, l'article 73 du règlement n° 1408/71 vise à empêcher qu'un État membre puisse faire dépendre l'octroi d'une prestation familiale de la résidence des membres de la famille du travailleur dans l'État membre prestataire, afin de ne pas dissuader le travailleur communautaire d'exercer son droit à la libre circulation (voir, notamment, arrêt du 12 juin 1997, Merino García, C-266/95, Rec. p. I-3279, point 28). Par conséquent, il est a fortiori contraire au but dudit article d'instaurer une condition de résidence effective.

XXXV. La circonstance qu'un parent, comme la requérante au principal, ne peut plus opter pour le placement dans une crèche communale ne saurait remettre en cause cette conclusion. En effet, comme il a été relevé au point 28 du présent arrêt, les parents sont libres d'alterner entre le placement dans une crèche publique et la perception de l'allocation de garde d'enfant à domicile.

XXXVI. Les articles 75 et 10 bis du règlement n° 1408/71, mentionnés à cet égard par la juridiction de renvoi, ne remettent pas en question cette conclusion. En effet, l'article 75 ne déroge pas à l'article 73 dudit règlement. Quant à l'article 10 bis, il ne concerne que les prestations spéciales non contributives visées à l'annexe II bis du même règlement. L'allocation finlandaise de garde à domicile n'étant pas mentionnée dans cette annexe, l'article 10 bis ne peut pas trouver application.

XXXVII. Dès lors, une personne se trouvant dans une situation telle que celle de la requérante au principal peut se prévaloir des dispositions de l'article 73 du règlement n° 1408/71.

XXXVIII. Au vu de ce qui précède, il y a lieu de répondre à la deuxième question que l'article 73 du règlement n° 1408/71 doit être interprété en ce sens que, si l'octroi d'une prestation telle que l'allocation de garde d'enfant à domicile en cause au principal dépend de la résidence effective de l'enfant sur le territoire de l'État membre compétent, cette condition doit être considérée comme remplie lorsque l'enfant réside sur le territoire d'un autre État membre.

Sur la troisième question

XXXIX. Compte tenu de la réponse donnée à la première question, il n'y a pas lieu de répondre à la troisième question.

Décisions sur les dépenses


Sur les dépens XL. Les frais exposés par le gouvernement finlandais et par la Commission, qui ont soumis des observations à la Cour, ne peuvent faire l'objet d'un remboursement. La procédure revêtant, à l'égard des parties au principal, le caractère d'un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens.

Dispositif


Par ces motifs,

LA COUR (sixième chambre)

statuant sur les questions à elle soumises par le Tarkastuslautakunta, par décision du 31 mai 2000, dit pour droit:

1) Une prestation telle que l'allocation de garde d'enfant à domicile prévue par la laki (1128/96) lasten kotihoidon ja yksityisen hoidon tuesta (loi relative aux allocations de garde d'enfant à domicile et de garde privée) constitue une prestation familiale au sens de l'article 4, paragraphe 1, sous h), du règlement (CEE) n° 1408/71 du Conseil, du 14 juin 1971, relatif à l'application des régimes de sécurité sociale aux travailleurs salariés, aux travailleurs non salariés et aux membres de leur famille qui se déplacent à l'intérieur de la Communauté, dans sa version modifiée et mise à jour par le règlement (CE) n° 118/97 du Conseil, du 2 décembre 1996.

2) L'article 73 du règlement n° 1408/71, dans sa version modifiée et mise à jour par le règlement n° 118/97, doit être interprété en ce sens que, si l'octroi d'une prestation telle que l'allocation de garde d'enfant à domicile en cause au principal dépend de la résidence effective de l'enfant sur le territoire de l'État membre compétent, cette condition doit être considérée comme remplie lorsque l'enfant réside sur le territoire d'un autre État membre.