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ARRÊT DE LA COUR (deuxième chambre)

14 septembre 2017 (*)

« Renvoi préjudiciel – Libre circulation des capitaux – Article 63 TFUE – Champ d’application – Législation fiscale d’un État membre – Impôt sur les sociétés – Crédit d’impôt – Fonds de pension – Refus d’accorder le bénéfice du crédit d’impôt aux actionnaires non assujettis à l’impôt sur des revenus d’investissement pour des dividendes issus de revenu étranger – Interprétation de l’arrêt du 12 décembre 2006, Test Claimants in the FII Group Litigation (C-446/04, EU:C:2006:774) – Crédit d’impôt illégalement retenu – Voies de recours »

Dans l’affaire C-628/15,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par la Court of Appeal (England & Wales) (Civil Division) [Cour d’appel (Angleterre et pays de Galles) (division civile), Royaume-Uni], par décision du 11 novembre 2015, parvenue à la Cour le 24 novembre 2015, dans la procédure


The Trustees of the BT Pension Scheme

contre

Commissioners for Her Majesty’s Revenue and Customs,

LA COUR (deuxième chambre),

composée de M. M. Ilešič, président de chambre, Mme A. Prechal, M. A. Rosas (rapporteur), Mme C. Toader et M. E. Jarašiūnas, juges,

avocat général : M. M. Wathelet,

greffier : Mme L. Hewlett, administrateur principal,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 9 novembre 2016,

considérant les observations présentées :

–        pour The Trustees of the BT Pension Scheme, par M. M. Gammie, QC, M. C. McDonnell, barrister, ainsi que par Mme N. Hine et M. R Collins, solicitors,

–        pour le gouvernement du Royaume-Uni, par Mmes S. Simmons et J. Kraehling ainsi que par M. D. Robertson, en qualité d’agents, assistés de M. R. Baldry, QC,

–        pour la Commission européenne, par MM. R. Lyal et W. Roels, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 21 décembre 2016,

rend le présent

Arrêt

1        La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation des articles 49 et 63 TFUE.

2        Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant The Trustees of the BT Pension Scheme (ci-après les « Trustees ») aux Commissioners for Her Majesty’s Revenue and Customs (administration fiscale et douanière, Royaume-Uni) (ci-après les « Commissioners ») au sujet du refus de reconnaître un droit à crédit d’impôt à un fonds de pension, non assujetti à l’impôt sur ses revenus d’investissement, au titre de la perception par celui-ci de dividendes représentant des revenus d’origine étrangère d’une société ayant sa résidence fiscale au Royaume-Uni.

 Le cadre juridique

 Sur le paiement anticipé de l’impôt sur les sociétés (advance corporation tax) et sur le droit à un crédit d’impôt

3        Il ressort de la décision de renvoi que, durant la période visée par le litige au principal, le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord appliquait un système d’imposition dit d’« imputation partielle », selon lequel, afin d’éviter la double imposition économique, lorsqu’une société résidente distribuait des bénéfices, une partie de l’impôt sur les sociétés payé par cette société était imputée à ses actionnaires.

4        En application de ce système d’imputation partielle, lorsqu’une société résidant au Royaume-Uni versait des dividendes à ses actionnaires, elle devait procéder, conformément à l’article 14 de l’Income and Corporation Taxes Act 1988 (loi sur l’impôt sur les revenus et les sociétés de 1988, ci-après l’« ICTA »), au paiement anticipé de l’impôt sur les sociétés (advance corporation tax, ci-après l’« ACT »), calculé sur une somme égale au montant ou à la valeur de la distribution effectuée.

5        Une telle société distributrice avait le droit, au titre d’une distribution réalisée au cours d’un exercice comptable donné, d’imputer l’ACT payé sur le montant dont elle était redevable pour cet exercice au titre de l’impôt sur les sociétés (mainstream corporation tax) ou elle pouvait transférer, le cas échéant, l’ACT payé soit sur un exercice antérieur ou ultérieur, soit aux filiales de cette société, résidant au Royaume-Uni, lesquelles pouvaient l’imputer sur le montant dont elles-mêmes étaient redevables au titre de l’impôt sur les sociétés.

6        Le paiement de l’ACT par la société distributrice des dividendes s’accompagnait d’un crédit d’impôt dans le chef de l’actionnaire bénéficiaire.

7        Ainsi, conformément à l’article 20 de l’ICTA, un actionnaire résidant au Royaume-Uni était assujetti à l’impôt sur les revenus pour des dividendes versés par une société résidant dans ce même État, pour autant que ceux-ci n’étaient pas spécifiquement exclus du paiement de cet impôt.

8        Lorsque les dividendes versés par une société résidant au Royaume-Uni avaient été soumis à l’ACT, l’actionnaire bénéficiaire résidant dans ce même État avait droit, en vertu de l’article 231, paragraphe 1, de l’ICTA, à un crédit d’impôt égal au montant de l’ACT versé par la société distributrice.

9        Selon l’article 231, paragraphe 3, de l’ICTA, ce crédit d’impôt pouvait être déduit du montant dû par l’actionnaire au titre de l’impôt sur les revenus relatif au dividende ou, lorsque le montant d’un tel crédit d’impôt dépassait le montant de l’impôt sur les revenus dû par l’actionnaire, cet actionnaire pouvait réclamer auprès de l’administration fiscale le paiement en liquide d’un montant correspondant audit crédit d’impôt.

 Sur le régime de dividende de revenu étranger (foreign income dividend)

10      Avant le 1er juillet 1994, lorsqu’une société résidant au Royaume-Uni percevait des dividendes d’une société résidant en dehors de cet État, les dividendes ainsi perçus n’étaient pas qualifiés de revenus d’investissement exonérés et la société bénéficiaire desdits dividendes n’avait pas droit à un crédit d’impôt au titre de ces dividendes. En application des articles 788 et 790 de l’ICTA, elle bénéficiait, s’il y avait lieu, d’un dégrèvement au titre de l’impôt payé par la société distributrice dans son État de résidence, dégrèvement accordé soit en vertu de la législation en vigueur au Royaume-Uni, soit en vertu d’une convention préventive de la double imposition conclue par celui-ci avec cet autre État.

11      Conformément au principe exposé au point 4 du présent arrêt, lorsqu’une société résidente du Royaume-Uni, qui percevait des dividendes d’une société non-résidente, distribuait des dividendes à ses propres actionnaires, elle devait s’acquitter de l’ACT sur le montant de la distribution.

12      Toutefois, il était fréquent que l’impôt sur les sociétés dû par les sociétés percevant d’importants dividendes d’origine étrangère soit insuffisant pour couvrir le montant de l’ACT acquitté par ladite société. Lorsque l’ACT dû par une société distribuant des dividendes à ses actionnaires était supérieur à l’impôt sur les sociétés dont la société distributrice était redevable, et lorsque cet ACT ne pouvait être transféré ni sur les exercices antérieurs ou ultérieurs de la société distributrice ni aux filiales de celle-ci, un « excédent » d’ACT, susceptible de représenter une charge financière irrécupérable, apparaissait dans le chef de cette société.

13      En vue de permettre à de telles sociétés d’atténuer l’incidence des excédents d’ACT, les articles 246A à 246Y de l’ICTA ont institué, à partir du 1er juillet 1994, un régime dit de « dividende de revenu étranger » (foreign income dividend, ci-après le « FID »). En application de ce régime, une société résidant au Royaume-Uni pouvait choisir de distribuer à ses actionnaires un dividende qualifié de FID, sur lequel l’ACT était dû, mais qui permettait à cette société, pour autant que le dividende qualifié de FID correspondait aux revenus d’origine étrangère perçus, de demander un remboursement pour l’ACT payé en excédent (ci-après le « régime FID »).

 Sur la perception des dividendes qualifiés de FID par un fonds de pension non assujetti à l’impôt sur ses revenus d’investissement

14      Selon l’article 246C de l’ICTA, lorsqu’un actionnaire percevait un dividende qualifié de FID, il n’avait pas droit à un crédit d’impôt relatif à un tel dividende. En effet, aux termes de cet article :

« L’article 231, paragraphe 1, ne s’applique pas lorsque la distribution en cause constitue un dividende de revenu étranger. »

15      L’article 246D de l’ICTA prévoyait toutefois que les actionnaires assujettis à l’impôt qui percevaient un dividende qualifié de FID étaient considérés comme ayant reçu un revenu qui avait déjà été imposé à un taux plus bas (20 %) pour l’exercice fiscal concerné. Pour de tels actionnaires, l’effet de l’application de cette disposition était, selon la juridiction de renvoi, effectivement le même que si ceux-ci avaient bénéficié d’un crédit d’impôt en vertu de l’article 231 de l’ICTA.

16      En revanche, l’article 246D de l’ICTA ne s’appliquait pas aux actionnaires non assujettis à l’impôt sur les revenus au titre des dividendes.

17      Durant la période en cause au principal, un « régime de pension exonéré agréé » (exempt approved scheme) bénéficiait, conformément à l’article 592, paragraphe 2, de l’ICTA, d’une exonération d’impôt sur les revenus au titre des dividendes, qu’ils soient d’origine nationale ou étrangère.

18      Compte tenu de l’article 246C de l’ICTA, lorsqu’un actionnaire non assujetti à l’impôt sur les revenus au titre de dividendes percevait des dividendes qualifiés de FID, celui-ci ne pouvait, au titre de l’article 231, paragraphe 1, de l’ICTA, ni bénéficier d’un crédit d’impôt ni, à plus forte raison, réclamer auprès de l’administration fiscale le paiement en liquide d’un montant correspondant à un éventuel crédit d’impôt excédant sa dette au titre de l’impôt sur les revenus.

19      Le système de l’ACT et le régime FID ont été supprimés pour les distributions de dividendes effectuées à partir du 6 avril 1999.

 Le litige au principal et les questions préjudicielles

20      Le BT Pension Scheme est un fonds de pension à prestations définies auquel sont affiliés des employés et d’anciens employés de British Telecommunications plc. Il est géré par les Trustees, qui constituent l’entité imposable pertinente, le BT Pension Scheme étant le bénéficiaire effectif des actifs.

21      Le BT Pension Scheme est exonéré au Royaume-Uni de l’impôt sur les revenus au titre de ses investissements. Pendant la période en cause au principal, les actions de sociétés représentaient, en valeur de marché, environ 70 % à 75 % des investissements du BT Pension Scheme. Certaines des participations de celui-ci étaient des investissements dans des sociétés résidant au Royaume-Uni, d’autres des investissements dans des sociétés résidant dans d’autres États membres de l’Union européenne ou dans des États tiers. La majeure partie, à savoir environ 97 %, du portefeuille d’actions du BT Pension Scheme, était investie dans de grandes sociétés cotées au Royaume-Uni et à l’étranger. Ayant une relation de simple actionnaire avec les sociétés dans lesquelles il avait investi, le BT Pension Scheme détenait en général moins de 2 % du capital de telles sociétés et, en tout état de cause, toujours moins de 5 %.

22      Le portefeuille d’investissement du BT Pension Scheme comportait des actions de sociétés résidant au Royaume-Uni qui avaient choisi d’appliquer le régime FID pour distribuer à leurs actionnaires des dividendes représentant des revenus d’origine étrangère. Ainsi, en sa qualité d’actionnaire de telles sociétés, le BT Pension Scheme a perçu des dividendes qualifiés de FID. Si, en application de l’article 246C de l’ICTA, les Trustees n’avaient pas droit à des crédits d’impôt pour ces dividendes, ils avaient en revanche droit à de tels crédits pour les dividendes reçus, en dehors du régime FID, de sociétés résidant au Royaume-Uni.

23      Les Trustees, estimant que cette absence de droit à crédit d’impôt pour des dividendes qualifiés de FID était incompatible avec le droit de l’Union, ont introduit un recours contre les Commissioners devant le First-tier Tribunal (Tax Chamber) [tribunal de première instance (chambre de la fiscalité), Royaume-Uni], afin d’obtenir, notamment, un crédit d’impôt pour les dividendes qualifiés de FID qu’ils avaient perçus durant la période en question. Leur recours ayant été accueilli par le First-tier Tribunal (Tax Chamber) [tribunal de première instance (chambre de la fiscalité)] et le jugement rendu par celui-ci ayant été confirmé en appel par l’Upper Tribunal (Tax and Chancery Chamber) [tribunal supérieur (chambre de la fiscalité et de la Chancery), Royaume-Uni], les Commissioners ont interjeté appel de l’arrêt rendu par cette dernière juridiction devant la Court of Appeal (England & Wales) (Civil Division) [Cour d’appel (Angleterre et pays de Galles) (division civile), Royaume-Uni].

24      Dans la décision de renvoi, la Court of Appeal (England & Wales) (Civil Division) [Cour d’appel (Angleterre et pays de Galles) (division civile)] explique que le litige au principal porte uniquement sur les exercices fiscaux au titre des années 1997 et 1998, le recours des Trustees étant prescrit en application du droit national pour le surplus. La juridiction de renvoi estime que la réponse à apporter à la question de savoir si les Trustees ont droit aux crédits d’impôt rend nécessaire l’interprétation du droit de l’Union concernant, notamment, le champ d’application de l’article 63 TFUE.

25      Elle rappelle, à cet égard, que la Cour a jugé, dans l’arrêt du 12 décembre 2006, Test Claimants in the FII Group Litigation (C-446/04, EU:C:2006:774), notamment, que l’article 63 TFUE s’opposait à certains aspects de la législation du Royaume-Uni portant sur le régime FID. Toutefois, elle se demande si cette disposition confère des droits à des actionnaires, tels que les Trustees, dans les circonstances en cause au principal.

26      Selon la juridiction de renvoi, à moins que les Trustees ne tirent directement des droits de l’article 63 TFUE, la législation nationale n’impose pas d’écarter l’application de l’article 246C de l’ICTA en ce qui concerne leur situation. Dans la mesure où ces derniers peuvent se prévaloir directement du droit de l’Union afin de se voir reconnaître le bénéfice du crédit d’impôt, cette juridiction se demande quelles voies de recours doivent être disponibles en vertu du droit national afin d’en prévoir, le cas échéant, le remboursement.

27      Dans ces conditions, la Court of Appeal (England & Wales) (Civil Division) [Cour d’appel (Angleterre et pays de Galles) (division civile)] a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :

« 1)      Compte tenu de ce que la Cour, dans l’arrêt du 12 décembre 2006, Test Claimants in the FII Group Litigation (C-446/04, EU:C:2006:774), a répondu à la quatrième question que les articles 43 et 56 CE – désormais articles 49 et 63 TFUE – s’opposent à une législation d’un État membre qui accorde aux sociétés résidentes distribuant à leurs actionnaires des dividendes issus de dividendes d’origine étrangère qu’elles ont perçus la faculté d’opter pour un régime leur permettant de recouvrer l’impôt sur les sociétés payé par anticipation, mais, d’une part, oblige ces sociétés à acquitter ledit impôt anticipé et à en demander le remboursement par la suite et, d’autre part, ne prévoit pas de crédit d’impôt pour leurs actionnaires, alors que ceux-ci en auraient reçu un dans le cas d’une distribution effectuée par une société résidente sur la base de dividendes d’origine nationale, le droit de l’Union confère-t-il des droits à ces actionnaires, que ce soit au titre de l’article 63 TFUE ou à un autre titre, lorsqu’ils sont les bénéficiaires des dividendes que la société a choisi de distribuer en optant pour ce régime, en particulier lorsque l’actionnaire réside dans le même État membre que la société qui distribue les dividendes ?

2)      Si l’actionnaire visé à la première question ne peut lui-même se prévaloir de droits tirés de l’article 63 TFUE, peut-il invoquer une violation des droits que les articles 49 et 63 TFUE confèrent à la société qui distribue les dividendes ?

3)      S’il est répondu à la première ou à la deuxième question que le droit de l’Union confère des droits à l’actionnaire ou qu’il peut être invoqué par ce dernier, le droit de l’Union impose-t-il des conditions quant aux voies de recours qui doivent être ouvertes à l’actionnaire en vertu du droit national ?

4)      Les circonstances suivantes ont-elles une incidence sur les réponses de la Cour aux questions précédentes :

a)      l’actionnaire n’est pas soumis à l’impôt sur les revenus dans l’État membre sur les dividendes qu’il perçoit, de sorte que, dans le cas d’une distribution effectuée par une société résidente en dehors du régime susmentionné, le crédit d’impôt auquel a droit l’actionnaire en vertu de la législation nationale peut donner lieu au versement dudit crédit à l’actionnaire par l’État membre ;

b)      la juridiction nationale considère que la violation du droit de l’Union par la législation nationale en cause n’est pas suffisamment caractérisée pour que l’État membre soit tenu de réparer les dommages à l’égard de la société distribuant les dividendes, conformément aux principes établis dans l’arrêt du 5 mars 1996, Brasserie du pêcheur et Factortame (C-46/93 et C-48/93, EU:C:1996:79), ou

c)      dans certains cas seulement, la société qui distribue les dividendes sous le régime susmentionné peut avoir augmenté le montant de ses distributions à tous les actionnaires de manière à verser une somme en liquide équivalente à celle qu’aurait obtenu un actionnaire exonéré lors du versement de dividendes en dehors de ce régime ? »

 Sur les questions préjudicielles

 Sur la première question

28      Par sa première question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si les articles 49 et 63 TFUE doivent être interprétés en ce sens qu’ils confèrent des droits à un actionnaire bénéficiaire de dividendes qualifiés de FID, qui réside dans le même État membre que la société distributrice desdits dividendes, compte tenu notamment de l’arrêt du 12 décembre 2006, Test Claimants in the FII Group Litigation (C-446/04, EU:C:2006:774).

29      À titre liminaire, il y a lieu de relever que, selon la décision de renvoi, le BT Pension Scheme détenait, durant la période en cause au principal, moins de 5 % du capital social des entreprises dans lesquelles il avait investi et n’avait qu’une relation de simple actionnaire avec celles-ci.

30      Il résulte d’une jurisprudence constante de la Cour qu’une acquisition de titres sur le marché des capitaux, effectuée dans la seule intention de réaliser un placement financier sans intention d’influer sur la gestion et le contrôle de l’entreprise, relève, en principe, du champ d’application de l’article 63 TFUE, et non de celui de l’article 49 TFUE, ce dernier s’appliquant uniquement aux participations permettant d’exercer une influence certaine sur les décisions d’une société et de déterminer les activités de celle-ci (voir, en ce sens, arrêt du 13 novembre 2012, Test Claimants in the FII Group Litigation, C-35/11, EU:C:2012:707, points 91 et 92 ainsi que jurisprudence citée).

31      En l’occurrence, dès lors que les participations du BT Pension Scheme dans les sociétés dans lesquelles il avait investi ne permettaient pas d’exercer une telle influence, la question de la juridiction de renvoi doit être examinée uniquement sous l’angle de l’article 63 TFUE.

32      S’agissant de la question, ainsi précisée, de savoir si l’article 63 TFUE confère, dans des circonstances telles que celles en cause au principal, des droits à un actionnaire bénéficiaire de dividendes qualifiés de FID, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante de la Cour, l’article 63, paragraphe 1, TFUE interdit de façon générale les restrictions aux mouvements de capitaux entre les États membres et entre les États membres et les pays tiers (voir, en ce sens, arrêt du 28 septembre 2006, Commission/Pays-Bas, C-282/04 et C-283/04, EU:C:2006:608, point 18 et jurisprudence citée).

33      Pour ce qui est, en particulier, de la réglementation nationale en cause au principal, la Cour a déjà dit pour droit, au point 173 de l’arrêt du 12 décembre 2006, Test Claimants in the FII Group Litigation (C-446/04, EU:C:2006:774), que l’article 63 TFUE s’oppose à une législation d’un État membre qui, tout en exonérant du paiement de l’ACT les sociétés résidentes distribuant à leurs actionnaires des dividendes issus de dividendes d’origine nationale, accorde aux sociétés résidentes distribuant à leurs actionnaires des dividendes issus de dividendes d’origine étrangère la faculté d’opter pour un régime leur permettant de recouvrer l’ACT payé, mais, notamment, ne prévoit pas de crédit d’impôt pour leurs actionnaires, alors que ceux-ci en auraient reçu un dans le cas d’une distribution effectuée par une société résidente sur la base de dividendes d’origine nationale.

34      Ainsi, la Cour a considéré, en particulier, que, dans la mesure où le système fiscal du Royaume-Uni, en ce compris le régime FID, privait des actionnaires percevant des dividendes de leur droit à un crédit d’impôt lorsque ces dividendes étaient issus des bénéfices d’origine étrangère d’une société résidente, contrairement à ce qui était prévu dans le cas des dividendes issus des bénéfices d’origine nationale d’une société résidente, ce système établissait une restriction à la libre circulation des capitaux au sens de l’article 63 TFUE.

35      En l’occurrence, les Trustees ont perçu des dividendes qualifiés de FID, sans pour autant avoir eu droit à un crédit d’impôt afférent auxdits dividendes.

36      Une telle absence de crédit d’impôt dans le chef des actionnaires non assujettis à l’impôt sur les revenus au titre des dividendes, tels que les Trustees, est susceptible de dissuader ces actionnaires d’investir dans le capital des sociétés résidentes du Royaume-Uni, qui perçoivent des dividendes des sociétés résidant en dehors du Royaume-Uni, au profit d’investissements dans des sociétés résidentes du Royaume-Uni percevant des dividendes d’autres sociétés résidant dans ce même État (voir, par analogie, arrêt du 12 décembre 2006, Test Claimants in the FII Group Litigation, C-446/04, EU:C:2006:774, point 166).

37      Il s’ensuit que la situation des Trustees relève du traitement visé au point 173 de l’arrêt du 12 décembre 2006, Test Claimants in the FII Group Litigation (C-446/04, EU:C:2006:774), auquel s’oppose l’article 63 TFUE. Ainsi, ceux-ci peuvent se prévaloir dudit article afin d’écarter une disposition nationale, telle que l’article 246C de l’ICTA, qui les prive d’un crédit d’impôt.

38      Les Commissioners, devant la juridiction de renvoi, ainsi que le gouvernement du Royaume-Uni, devant la Cour, font néanmoins valoir que les Trustees ne peuvent invoquer l’article 63 TFUE pour écarter l’application de l’article 246C de l’ICTA, au motif que l’investissement des capitaux par ceux-ci dans des sociétés résidant au Royaume-Uni, soumises au régime FID, n’impliquerait aucun mouvement de capitaux entre les États membres, au sens de la nomenclature figurant à l’annexe I de la directive 88/361/CEE du Conseil, du 24 juin 1988, pour la mise en œuvre de l’article [63 TFUE] (JO 1988, L 178, p. 5), établie en vue de guider l’interprétation de cet article.

39      À cet égard, il convient de rappeler que, selon la jurisprudence de la Cour, une réglementation nationale indistinctement applicable aux ressortissants de tous les États membres n’est, en règle générale, susceptible de relever des dispositions du traité FUE en matière de libre circulation des capitaux que dans la mesure où elle s’applique à des situations ayant un lien avec les échanges entre les États membres (voir, en ce sens, arrêt du 5 mars 2002, Reisch e.a., C-515/99, C-519/99 à C-524/99 et C-526/99 à C-540/99, EU:C:2002:135, point 24).

40      En effet, les dispositions du traité FUE en matière de libre circulation des capitaux ne trouvent pas à s’appliquer à une situation dont tous les éléments se cantonnent à l’intérieur d’un seul État membre (arrêt du 20 mars 2014, Caixa d’Estalvis i Pensions de Barcelona, C-139/12, EU:C:2014:174, point 42).

41      Or, il n’apparaît pas que la législation en cause au principal concernerait seulement des situations n’ayant aucun lien avec les échanges entre les États membres, ou que les éléments pertinents caractérisant l’affaire au principal se cantonneraient uniquement à l’intérieur du Royaume-Uni.

42      Au contraire, le traitement fiscal défavorable de certains actionnaires percevant des dividendes qualifiés de FID, à savoir l’absence de crédit d’impôt prévue à l’article 246C de l’ICTA, est précisément dû au fait que ces dividendes sont issus des bénéfices que la société distributrice a perçus d’une société non-résidente du Royaume-Uni, alors que dans le cas des dividendes issus des bénéfices perçus d’une société résidant au Royaume-Uni, toutes choses étant par ailleurs égales, ces actionnaires bénéficiaires auraient eu droit à un tel crédit d’impôt.

43      Le gouvernement du Royaume-Uni soutient qu’une telle restriction est, en tout état de cause, autorisée dès lors qu’elle est justifiée par la nécessité d’assurer la cohérence du régime fiscal national. Toutefois, il suffit de relever, à cet égard, qu’il ressort notamment du point 163 de l’arrêt du 12 décembre 2006, Test Claimants in the FII Group Litigation (C-446/04, EU:C:2006:774), que la restriction à l’article 63 TFUE constatée dans cet arrêt ne pouvait pas, selon la Cour, être justifiée par la nécessité de préserver la cohérence du régime fiscal en cause. Ainsi qu’il a été relevé par M. l’avocat général au point 66 de ses conclusions, les arguments avancés par ce gouvernement au cours de la présente procédure sont en substance identiques à ceux qui ont été rejetés par la Cour dans le cadre de cette dernière affaire. Par conséquent, ils ne sauraient justifier, en l’espèce, la restriction à l’article 63 TFUE constatée au point 36 du présent arrêt.

44      Dans ces conditions, il convient de répondre à la première question que l’article 63 TFUE doit être interprété en ce sens qu’il confère, dans des circonstances telles que celles en cause au principal, des droits à un actionnaire bénéficiaire de dividendes qualifiés de FID.

 Sur la deuxième question

45      Compte tenu de la réponse apportée à la première question, il n’y a pas lieu de répondre à la deuxième question.

 Sur la troisième question

46      Par sa troisième question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si et, le cas échéant, dans quelle mesure le droit de l’Union exige que le droit national d’un État membre prévoie des voies de recours ouvertes à des actionnaires qui, dans une situation telle que celle en cause au principal, ont perçu des dividendes qualifiés de FID sans toutefois avoir obtenu un crédit d’impôt afférent auxdits dividendes, afin de permettre à ces actionnaires de faire valoir les droits que l’article 63 TFUE leur confère.

47      Il y a lieu de relever, d’emblée, qu’il incombe aux États membres, notamment en vertu du principe de coopération loyale énoncé à l’article 4, paragraphe 3, premier alinéa, TUE d’assurer, sur leur territoire respectif, l’application et le respect du droit de l’Union et que, en vertu de l’article 4, paragraphe 3, deuxième alinéa, TUE, les États membres prennent toute mesure générale ou particulière propre à assurer l’exécution des obligations découlant des traités ou résultant des actes des institutions de l’Union. Par ailleurs, l’article 19, paragraphe 1, second alinéa, TUE impose aux États membres d’établir les voies de recours nécessaires pour assurer une protection juridictionnelle effective dans les domaines couverts par le droit de l’Union.

48      Conformément à la réponse apportée à la première question, l’article 63 TFUE confère, dans des circonstances telles que celles en cause au principal, aux actionnaires bénéficiaires de dividendes qualifiés de FID, le droit au même traitement fiscal desdits dividendes que celui réservé, dans leur chef, à des dividendes issus des revenus que la société distributrice résidant au Royaume-Uni a perçus d’une société résidant également dans cet État.

49      Selon la jurisprudence constante de la Cour, l’article 63 TFUE peut être invoqué devant le juge national et entraîner l’inapplicabilité des règles nationales qui lui sont contraires (voir, en ce sens, arrêts du 14 décembre 1995, Sanz de Lera e.a., C-163/94, C-165/94 et C-250/94, EU:C:1995:451, point 48, ainsi que du 18 décembre 2007, A, C-101/05, EU:C:2007:804, point 27).

50      Il est également de jurisprudence constante de la Cour que le droit d’obtenir le remboursement de taxes perçues par un État membre en violation des règles du droit de l’Union est la conséquence et le complément des droits conférés aux justiciables par les dispositions du droit de l’Union, telles qu’elles ont été interprétées par la Cour. L’État membre est donc tenu, en principe, de rembourser les taxes perçues en violation du droit de l’Union (voir, en ce sens, arrêts du 9 novembre 1983, San Giorgio, 199/82, EU:C:1983:318, point 12 ; du 14 janvier 1997, Comateb e.a., C-192/95 à C-218/95, EU:C:1997:12, point 20, ainsi que du 6 septembre 2011, Lady & Kid e.a., C-398/09, EU:C:2011:540, point 17).

51      Or, d’après le gouvernement du Royaume-Uni, un tel droit d’obtenir le remboursement de taxes indument perçues n’existe pas en l’occurrence, compte tenu du fait que les Trustees, n’étant pas assujettis à l’impôt sur les revenus au titre des dividendes, n’ont versé aucun impôt au titre des dividendes auxquels les crédits d’impôt réclamés sont afférents.

52      Cependant, il y a lieu de rappeler que le droit au remboursement, au sens de la jurisprudence mentionnée au point 50 du présent arrêt, vise non seulement les montants payés à l’État membre au titre des taxes illégales, mais également tout montant retenu dont le remboursement est indispensable au rétablissement de l’égalité de traitement exigée par les dispositions du traité FUE relatives aux libertés de circulation (voir, par analogie, arrêts du 8 mars 2001, Metallgesellschaft e.a., C-397/98 et C-410/98, EU:C:2001:134, point 87 ; du 12 décembre 2006, Test Claimants in the FII Group Litigation, C-446/04, EU:C:2006:774, point 205, ainsi que du 19 juillet 2012, Littlewoods Retail e.a., C-591/10, EU:C:2012:478, point 25), y compris, par conséquent, les montants dus au justiciable au titre d’un crédit d’impôt dont celui-ci a été privé en vertu de la législation nationale à laquelle s’oppose le droit de l’Union.

53      Ainsi, dans des circonstances telles que celles en cause au principal, les actionnaires non assujettis à l’impôt sur les revenus au titre des dividendes, qui ont perçu des dividendes qualifiés de FID sans avoir toutefois obtenu de crédit d’impôt afférent auxdits dividendes, tels que les Trustees, ont droit au versement du crédit d’impôt dont ils ont été indument privés en vertu de la législation nationale incompatible avec l’article 63 TFUE.

54      Ensuite, il y a lieu de rappeler que, selon une jurisprudence constante de la Cour, tant les autorités administratives que les juridictions nationales chargées d’appliquer, dans le cadre de leurs compétences respectives, les dispositions du droit de l’Union ont l’obligation d’assurer le plein effet de ces dispositions en laissant au besoin inappliquée, de leur propre autorité, toute disposition nationale contraire, sans demander ni attendre l’élimination préalable de cette disposition nationale par la voie législative ou par tout autre procédé constitutionnel (voir en ce sens, s’agissant des autorités administratives, arrêts du 22 juin 1989, Costanzo, 103/88, EU:C:1989:256, point 31, et du 29 avril 1999, Ciola, C-224/97, EU:C:1999:212, points 26 et 30, ainsi que, s’agissant des juridictions, arrêts du 9 mars 1978, Simmenthal, 106/77, EU:C:1978:49, point 24, et du 5 juillet 2016, Ognyanov, C-614/14, EU:C:2016:514, point 34).

55      Par ailleurs, cette obligation n’empêche pas les juridictions nationales compétentes d’appliquer, parmi les divers procédés de l’ordre juridique interne, ceux qui sont appropriés pour sauvegarder les droits individuels conférés par le droit de l’Union (voir, en ce sens, arrêts du 22 octobre 1998, IN. CO. GE.’90 e.a., C-10/97 à C-22/97, EU:C:1998:498, point 21, ainsi que du 19 juillet 2012, Littlewoods Retail e.a., C-591/10, EU:C:2012:478, point 33).

56      Il s’ensuit que, dans le cadre d’un recours intenté par les actionnaires non assujettis bénéficiaires de dividendes qualifiés de FID en vue d’obtenir le versement du montant du crédit d’impôt dont ils ont été indument privés par la législation nationale en cause au principal, le juge national est, en principe, tenu d’écarter l’application des dispositions de cette législation à l’origine du traitement contraire à l’article 63 TFUE, afin d’assurer le plein effet du droit de l’Union.

57      S’agissant, enfin, des modalités procédurales d’un tel recours, il n’appartient pas à la Cour de qualifier juridiquement les recours introduits par les Trustees devant la juridiction de renvoi, dès lors qu’il incombe à ceux-ci de préciser la nature et le fondement de leur action, sous le contrôle de la juridiction de renvoi. Il ressort néanmoins de la jurisprudence de la Cour que les justiciables doivent disposer d’une voie de recours effective leur permettant d’obtenir le versement du crédit d’impôt dont ils ont été indument privés (voir, par analogie, arrêt du 12 décembre 2006, Test Claimants in the FII Group Litigation, C-446/04, EU:C:2006:774, points 201 et 220).

58      Ainsi, s’il appartient, en l’absence de réglementation de l’Union en matière de versement de crédits d’impôt dont les ayants droit ont été indument privés, à l’ordre juridique interne de chaque État membre de régler les modalités procédurales des recours destinés à assurer la sauvegarde des droits que les justiciables tirent du droit de l’Union, ces modalités ne doivent pas être, conformément au principe d’équivalence, moins favorables que celles concernant des recours similaires de nature interne (voir, en ce sens, arrêts du 16 décembre 1976, Rewe-Zentralfinanz et Rewe-Zentral, 33/76, EU:C:1976:188, point 5 ; du 8 mars 2001, Metallgesellschaft e.a., C-397/98 et C-410/98, EU:C:2001:134, point 85 ; du 12 décembre 2006, Test Claimants in the FII Group Litigation, C-446/04, EU:C:2006:774, point 203, ainsi que du 6 octobre 2015, Târșia, C-69/14, EU:C:2015:662, points 26 et 27).

59      En outre, en application du principe d’effectivité, les États membres ont la responsabilité d’assurer, dans chaque cas, une protection effective des droits conférés par le droit de l’Union et, en particulier, de garantir le respect du droit à un recours effectif et à accéder à un tribunal impartial, consacré à l’article 47, paragraphe 1, de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (voir, en ce sens, arrêts du 15 septembre 2016, Star Storage e.a., C-439/14 et C-488/14, EU:C:2016:688, point 46 ; du 8 novembre 2016, Lesoochranárske zoskupenie VLK, C-243/15, EU:C:2016:838, point 65, ainsi que du 16 mai 2017, Berlioz Investment Fund, C-682/15, EU:C:2017:373, point 44).

60      En l’occurrence, il appartient notamment à la juridiction de renvoi, d’une part, de veiller à ce que les actionnaires non assujettis à l’impôt sur les revenus au titre des dividendes, qui ont perçu des dividendes issus des dividendes d’origine étrangère et qualifiés de FID, tels que les Trustees, disposent d’une voie de recours de nature à assurer le versement du crédit d’impôt afférent auxdits dividendes, dont les ayants droit ont été indument privés, selon des modalités qui ne soient pas moins favorables que celles concernant un recours visant le versement d’un tel crédit d’impôt, ou d’un avantage fiscal comparable, dans une situation où l’administration fiscale aurait indument privé les ayants droit de ce crédit d’impôt ou de cet avantage fiscal lors d’une distribution des dividendes issus des dividendes perçus d’une société résidant au Royaume-Uni. D’autre part, cette juridiction doit s’assurer que cette voie de recours permette de garantir la protection des droits conférés à l’article 63 TFUE à de tels actionnaires de manière effective.

61      Par conséquent, il y a lieu de répondre à la troisième question que le droit de l’Union exige que le droit national d’un État membre prévoie des voies de recours ouvertes à des actionnaires qui, dans une situation telle que celle en cause au principal, ont perçu des dividendes qualifiés de FID sans toutefois avoir obtenu un crédit d’impôt afférent auxdits dividendes, afin de permettre à ces actionnaires de faire valoir les droits que l’article 63 TFUE leur confère. À cet égard, la juridiction nationale compétente doit veiller à ce que les actionnaires non assujettis à l’impôt sur les revenus au titre des dividendes, qui ont perçu des dividendes issus de dividendes d’origine étrangère et qualifiés de FID, tels que les Trustees, disposent d’une voie de recours qui, d’une part, soit de nature à assurer le versement d’un tel crédit d’impôt, dont les ayants droit ont été indument privés, selon des modalités qui ne soient pas moins favorables que celles concernant un recours visant le versement d’un crédit d’impôt, ou d’un avantage fiscal comparable, dans une situation où l’administration fiscale aurait indument privé les ayants droit de ce crédit d’impôt ou de cet avantage fiscal lors d’une distribution de dividendes issus de dividendes perçus d’une société résidant au Royaume-Uni et, d’autre part, permette de garantir la protection des droits conférés à l’article 63 TFUE à de tels actionnaires de manière effective.

 Sur la quatrième question, sous a)

62      Par sa quatrième question, sous a), la juridiction de renvoi demande, en substance, quelle est l’incidence éventuelle, quant aux réponses qu’il convient de donner aux trois premières questions préjudicielles, de la circonstance que les Trustees ne sont pas assujettis à l’impôt sur les revenus au Royaume-Uni au titre des dividendes qu’ils perçoivent.

63      À cet égard, il y a lieu de rappeler que la violation de l’article 63 TFUE, telle que constatée par la Cour au point 173 de l’arrêt du 12 décembre 2006, Test Claimants in the FII Group Litigation (C-446/04, EU:C:2006:774), réside, notamment, dans la différence de traitement des dividendes perçus par un actionnaire, tel que les Trustees, selon que ces dividendes sont issus de dividendes d’origine étrangère et qualifiés de FID ou qu’ils sont issus de dividendes d’origine nationale et non qualifiés de FID.

64      Ainsi que l’a relevé en substance M. l’avocat général au point 88 de ses conclusions, dans la mesure où le respect de l’article 63 TFUE implique seulement la suppression du traitement fiscal différencié entre ces deux catégories de dividendes perçus par des actionnaires, tels que les Trustees, la question de savoir si l’actionnaire bénéficiaire de dividendes qualifiés de FID est, ou non, assujetti à l’impôt sur les revenus au titre de tels dividendes n’apparaît pas pertinente.

65      Il y a donc lieu de répondre à la quatrième question, sous a), que la circonstance que les Trustees ne sont pas assujettis à l’impôt sur les revenus au titre des dividendes qu’ils perçoivent n’est pas susceptible de modifier les réponses apportées aux trois premières questions posées par la juridiction de renvoi.

 Sur la quatrième question, sous b)

66      Par sa quatrième question, sous b), la juridiction de renvoi s’interroge sur l’incidence éventuelle, quant aux réponses à apporter aux trois premières questions préjudicielles, du fait que la violation du droit de l’Union en cause n’est pas, selon elle, suffisamment caractérisée pour entraîner la responsabilité non contractuelle de l’État membre concerné à l’égard de la société distribuant des dividendes qualifiés de FID, conformément aux principes établis dans l’arrêt du 5 mars 1996, Brasserie du pêcheur et Factortame (C-46/93 et C-48/93, EU:C:1996:79).

67      En l’occurrence, il ressort de la décision de renvoi que l’action en responsabilité non contractuelle du fait des violations de l’article 63 TFUE a été introduite contre le Royaume-Uni par des sociétés distribuant des dividendes, et non par les Trustees.

68      À cet égard, il convient de constater, ainsi que l’a relevé M. l’avocat général au point 91 de ses conclusions, que les droits conférés aux actionnaires en question à l’article 63 TFUE sont, en tout état de cause, indépendants de ceux conférés aux sociétés distribuant les dividendes.

69      Dans ces conditions, il y a lieu de répondre à la quatrième question, sous b), que, même si la violation du droit de l’Union en cause au principal n’est pas, selon la juridiction de renvoi, suffisamment caractérisée pour entraîner la responsabilité non contractuelle de l’État membre concerné à l’égard de la société distribuant des dividendes qualifiés de FID, conformément aux principes établis dans l’arrêt du 5 mars 1996, Brasserie du pêcheur et Factortame (C-46/93 et C-48/93, EU:C:1996:79), cette circonstance n’est pas susceptible de modifier les réponses apportées aux trois premières questions préjudicielles.

 Sur la quatrième question, sous c)

70      Par sa quatrième question, sous c), la juridiction de renvoi s’interroge sur l’incidence éventuelle, quant aux réponses à apporter aux trois premières questions préjudicielles, du fait qu’il est possible que, dans certains cas, l’actionnaire ayant perçu des dividendes qualifiés de FID ait obtenu un montant de dividendes augmenté de la part de la société distributrice afin de pallier l’absence de crédit d’impôt dans le chef d’un tel actionnaire.

71      Au point 207 de l’arrêt du 12 décembre 2006, Test Claimants in the FII Group Litigation (C-446/04, EU:C:2006:774), la Cour a, certes, considéré, notamment, que les sociétés résidentes ayant opté pour le régime FID ne pouvaient, sur la base du droit de l’Union, se prévaloir du préjudice qu’elles prétendaient avoir subi du fait qu’elles se voyaient obligées d’augmenter le montant de leurs dividendes afin de compenser la perte du crédit d’impôt dans le chef de leurs actionnaires, dès lors que de telles augmentations du montant des dividendes reposaient sur des décisions prises par lesdites sociétés distributrices et ne constituaient pas, dans leur chef, une conséquence inévitable du refus du Royaume-Uni d’accorder auxdits actionnaires un traitement équivalent à celui dont bénéficiaient les actionnaires bénéficiaires d’une distribution basée sur des dividendes d’origine nationale.

72      Toutefois, la situation des actionnaires ayant perçu des dividendes qualifiés de FID et l’absence de crédit d’impôt dans leur chef au titre de ces dividendes résultent non pas d’une quelconque décision de leur part, mais de la législation en vigueur au Royaume-Uni au moment de l’exercice fiscal pertinent.

73      Il s’ensuit que, contrairement à la position défendue par le gouvernement du Royaume-Uni, la circonstance qu’une société distribuant des dividendes qualifiés de FID ait, ou non, majoré le montant du dividende versé à de tels actionnaires n’est pas de nature à aboutir à une « double récupération » par les Trustees.

74      Par ailleurs, une éventuelle augmentation du montant des dividendes, qualifiés de FID, distribués par une société résidente du Royaume-Uni, afin de pallier l’absence de crédit d’impôt dans le chef de l’actionnaire bénéficiaire desdits dividendes, ne saurait aboutir à une double récupération des crédits d’impôts dus à cet actionnaire, dès lors que ladite distribution des dividendes par cette société ne peut être assimilée à l’octroi d’un crédit d’impôt par l’administration fiscale. En effet, une telle distribution de bénéfices par une société à son actionnaire ne représente qu’un acte entre la société et son actionnaire, qui n’est pas susceptible d’affecter les droits et les obligations de l’administration fiscale envers ledit actionnaire.

75      Dans ces conditions, il y a lieu de répondre à la quatrième question, sous c), que la circonstance qu’une société résidente du Royaume-Uni ait distribué un montant augmenté de dividendes, qualifiés de FID, pour pallier l’absence de crédit d’impôt dans le chef de l’actionnaire bénéficiaire, n’est pas susceptible de modifier les réponses apportées aux trois premières questions posées par la juridiction de renvoi.

76      Eu égard à l’ensemble de considérations qui précèdent, il y a lieu de répondre à la quatrième question que ni la circonstance que les Trustees ne sont pas assujettis à l’impôt sur les revenus au titre des dividendes qu’ils perçoivent, ni la circonstance que la violation du droit de l’Union en cause n’est pas, selon la juridiction de renvoi, suffisamment caractérisée pour entraîner la responsabilité non contractuelle de l’État membre concerné à l’égard de la société distribuant des dividendes qualifiés de FID, conformément aux principes établis dans l’arrêt du 5 mars 1996, Brasserie du pêcheur et Factortame (C-46/93 et C-48/93, EU:C:1996:79), ni la circonstance qu’une société résidente du Royaume-Uni ait distribué un montant augmenté de dividendes, qualifiés de FID, pour pallier l’absence de crédit d’impôt dans le chef de l’actionnaire bénéficiaire, ne sont susceptibles de modifier les réponses apportées aux autres questions posées par la juridiction de renvoi.

 Sur les dépens

77      La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

Par ces motifs, la Cour (deuxième chambre) dit pour droit :

1)      L’article 63 TFUE doit être interprété en ce sens qu’il confère, dans des circonstances telles que celles en cause au principal, des droits à un actionnaire bénéficiaire de dividendes qualifiés de « dividendes de revenu étranger » (foreign income dividend).

2)      Le droit de l’Union exige que le droit national d’un État membre prévoie des voies de recours ouvertes à des actionnaires qui, dans une situation telle que celle en cause au principal, ont perçu des dividendes qualifiés de « dividendes de revenu étranger » sans toutefois avoir obtenu un crédit d’impôt afférent auxdits dividendes, afin de permettre à ces actionnaires de faire valoir les droits que l’article 63 TFUE leur confère. À cet égard, la juridiction nationale compétente doit veiller à ce que les actionnaires non assujettis à l’impôt sur les revenus au titre des dividendes, qui ont perçu des dividendes issus de dividendes d’origine étrangère et qualifiés de « dividendes de revenu étranger », tels que The Trustees of the BT Pension Scheme, disposent d’une voie de recours qui, d’une part, soit de nature à assurer le versement d’un tel crédit d’impôt, dont les ayants droit ont été indument privés, selon des modalités qui ne soient pas moins favorables que celles concernant un recours visant le versement d’un crédit d’impôt, ou d’un avantage fiscal comparable, dans une situation où l’administration fiscale aurait indument privé les ayants droit de ce crédit d’impôt ou de cet avantage fiscal lors d’une distribution de dividendes issus de dividendes perçus d’une société résidant au Royaume-Uni et, d’autre part, permette de garantir la protection des droits conférés à l’article 63 TFUE à de tels actionnaires de manière effective.

3)      Ni la circonstance que The Trustees of the BT Pension Scheme ne sont pas assujettis à l’impôt sur les revenus au titre des dividendes qu’ils perçoivent, ni la circonstance que la violation du droit de l’Union en cause n’est pas, selon la juridiction de renvoi, suffisamment caractérisée pour entraîner la responsabilité non contractuelle de l’État membre concerné à l’égard de la société distribuant des dividendes qualifiés de « dividendes de revenu étranger », conformément aux principes établis dans l’arrêt du 5 mars 1996, Brasserie du pêcheur et Factortame (C-46/93 et C-48/93, EU:C:1996:79), ni la circonstance qu’une société résidente du Royaume-Uni ait distribué un montant augmenté de dividendes, qualifiés de « dividendes de revenu étranger », pour pallier l’absence de crédit d’impôt dans le chef de l’actionnaire bénéficiaire, ne sont susceptibles de modifier les réponses apportées aux autres questions posées par la juridiction de renvoi.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.