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CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

Mme VERICA Trstenjak

présentées le 25 mai 2011 (1)

Affaire C-539/09

Commission européenne

contre

République fédérale d’Allemagne


«Manquement d’État – Article 258 TFUE – Pouvoirs de contrôle de la Cour des comptes de l’Union européenne – Article 248 CE – Règlement (CE, Euratom) n° 1605/2002 – Contrôle de la coopération des autorités administratives nationales dans le domaine de la taxe sur la valeur ajoutée – Règlement (CE) n° 1798/2003 – Ressources propres provenant de la taxe sur la valeur ajoutée – Décision 2000/597/CE, Euratom – Principe de proportionnalité – Principe de subsidiarité»






Table des matières


I –   Introduction

II – Le droit de l’Union 

A –   Le droit primaire

B –   Le droit dérivé

1.     La décision 2000/597/CE, Euratom

2.     Le règlement (CE, Euratom) n° 1605/2002

3.     Le règlement (CE) n° 1798/2003

III – Les faits

IV – Procédure précontentieuse

V –   Procédure devant la Cour et conclusions des parties

VI – Principaux arguments des parties

VII – Appréciation juridique

A –   Remarques liminaires

B –   Le système des ressources propres sous l’empire de la décision 2000/597

C –   Les compétences de contrôle de la Cour des comptes

1.     L’objet, la portée et les limites des compétences de contrôle de la Cour des comptes

a)     Le pouvoir de vérifier les actes des institutions et des États membres de l’Union présentant un lien direct suffisant avec les recettes ou les dépenses de l’Union

b)     Le champ d’application du droit de l’Union en tant que restriction de compétence dans le cadre du contrôle d’actes des États membres par la Cour des comptes

c)     L’obligation de respecter le principe de subsidiarité et le principe de proportionnalité

i)     Le principe de subsidiarité

ii)   Le principe de proportionnalité

2.     Les critères de contrôle pour la vérification des comptes par la Cour des comptes

3.     Conclusion provisoire

D –   Compétence de la Cour des comptes pour vérifier la coopération entre les autorités administratives nationales dans le domaine de la taxe sur la valeur ajoutée au titre du règlement n° 1798/2003

1.     Le contrôle de la coopération entre les autorités administratives nationales dans le domaine de la taxe sur la valeur ajoutée au titre du règlement n° 1798/2003 présente un lien direct suffisant avec les recettes de l’Union

2.     Sur le respect du principe de subsidiarité et du principe de proportionnalité

a)     Sur le respect du principe de subsidiarité

b)     Sur le respect du principe de proportionnalité

E –   Sur le manquement de la République fédérale d’Allemagne aux obligations de coopération qui lui incombent envers la Cour des comptes

VIII – Synthèse

IX – Sur les dépens

X –   Conclusion

I –    Introduction

1.        La présente affaire a pour objet un recours en manquement introduit par la Commission européenne sur le fondement de l’article 258 TFUE, par lequel celle-ci demande à la Cour de constater que, en refusant de permettre à la Cour des comptes de l’Union européenne de contrôler, en Allemagne, la coopération transfrontalière des autorités administratives nationales dans le domaine de la taxe sur la valeur ajoutée (ci-après, également, la «TVA»), la République fédérale d’Allemagne a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu du droit de l’Union.

2.        Du point de vue procédural, cette affaire présente la particularité que la Commission a ouvert une procédure d’infraction à l’encontre d’un État membre au motif que celui-ci aurait méconnu les pouvoirs de contrôle conférés à la Cour des comptes. Bien que par le passé elle ait expressément plaidé pour qu’une possibilité de recours lui soit reconnue afin de faire valoir devant la Cour, de manière autonome, ses droits et prérogatives par rapport aux États membres (2), la Cour des comptes ne dispose pas non plus après la dernière révision, par le traité de Lisbonne, du système des voies de recours en droit de l’Union, d’une possibilité de recours direct contre des États membres qui auraient méconnu ses compétences de contrôle (3). La Cour des comptes est au contraire obligée de signaler une telle infraction à la Commission afin que celle-ci puisse, comme en l’espèce, ouvrir à l’encontre de l’État membre concerné une procédure d’infraction en vertu de l’article 258 TFUE à laquelle la Cour des comptes peut ensuite participer comme partie intervenante.

3.        Le présent litige offre à la Cour l’occasion de préciser, à l’aide de l’exemple d’un projet d’audit concret, l’étendue et l’objet des pouvoirs de la Cour des comptes en ce qui concerne le contrôle de l’action des États membres. En l’occurrence, il s’agit en effet de la première procédure d’infraction ayant pour origine le refus d’un État membre de permettre qu’un contrôle prévu par la Cour des comptes en ce qui concerne les recettes de l’Union puisse être effectué sur son territoire et d’assister à cet effet ladite Cour.

4.        La décision du Parlement européen d’intervenir, pour la première fois, au soutien de la Commission dans une procédure en manquement engagée à l’encontre d’un État membre atteste de l’importance institutionnelle du présent litige.

II – Le droit de l’Union (4)

A –    Le droit primaire

En droit primaire, les attributions de la Cour des comptes ont été énoncées à l’article 248 CE.

B –    Le droit dérivé

1.      La décision 2000/597/CE, Euratom

5.        L’article 2 de la décision 2000/597/CE, Euratom du Conseil, du 29 septembre 2000, relative au système des ressources propres des Communautés européennes (5), dispose:

«1. Constituent des ressources propres inscrites au budget de l’Union européenne, les recettes provenant:

a)      des prélèvements, primes, montants supplémentaires ou compensatoires, montants ou éléments additionnels et des autres droits établis ou à établir par les institutions des Communautés sur les échanges avec les pays non membres dans le cadre de la politique agricole commune ainsi que des cotisations et autres droits prévus dans le cadre de l’organisation commune des marchés dans le secteur du sucre;

b)      des droits du tarif douanier commun et des autres droits établis ou à établir par les institutions des Communautés sur les échanges avec les pays non membres et des droits de douane sur les produits relevant du traité instituant la Communauté européenne du charbon et de l’acier;

c)      de l’application d’un taux uniforme valable pour tous les États membres à l’assiette harmonisée de la TVA, déterminée selon les règles de la Communauté. L’assiette à prendre en compte à cet effet n’excède pas 50 % [du produit national brut (PNB)] de chaque État membre, tel qu’il est défini au paragraphe 7;

d)      de l’application d’un taux – à fixer dans le cadre de la procédure budgétaire compte tenu de toutes les autres recettes – à la somme des PNB de tous les États membres.

[…]

4. Le taux uniforme visé au paragraphe 1, point c), correspond au taux résultant de la différence entre:

a)      le taux d’appel maximal de la ressource TVA, qui est fixé à:

0,75 % en 2002 et 2003,

0,50 % à partir de 2004,

et

b)      un taux (‘taux gelé’) équivalant au ratio entre le montant de la compensation visée à l’article 4 et la somme des assiettes TVA [établies conformément au paragraphe 1, point c)] de tous les États membres, en tenant compte du fait que le Royaume-Uni est exclu du financement de la correction dont il bénéficie et que la part de l’Allemagne, de l’Autriche, des Pays-Bas et de la Suède dans le financement de la correction accordée au Royaume-Uni est ramenée à un quart par rapport à sa valeur normale.

5. Le taux fixé au paragraphe 1, point d), est applicable au PNB de chaque État membre.

[…]

7. Pour l’application de la présente décision, le PNB est défini comme le [revenu national brut (RNB)] pour l’année aux prix du marché, tel qu’il est déterminé par la Commission en application du [système européen de comptes économiques intégrés (SEC 95)], conformément au règlement (CE) n° 2223/96.

En cas de modifications du SEC 95 entraînant des changements du RNB tel qu’il est déterminé par la Commission, le Conseil, statuant à l’unanimité sur proposition de la Commission et après consultation du Parlement européen, décide si ces modifications s’appliquent aux fins de la présente décision.»

6.        L’article 8 de la décision 2000/597 énonce:

«1. Les ressources propres communautaires visées à l’article 2 paragraphe 1, points a) et b), sont perçues par les États membres conformément aux dispositions législatives, réglementaires et administratives nationales qui sont, le cas échéant, adaptées aux exigences de la réglementation communautaire.

[…]

Les États membres mettent les ressources prévues à l’article 2, paragraphe 1, points a) à d), à la disposition de la Commission.

2. Sans préjudice de la vérification des comptes et des contrôles de conformité et de régularité prévus à l’article 248 du traité CE et à l’article 160 C du traité Euratom, cette vérification et ces contrôles portant essentiellement sur la fiabilité et l’efficacité des procédures et systèmes nationaux de détermination de la base pour les ressources propres provenant de la TVA et du PNB, et sans préjudice des contrôles organisés en vertu de l’article 279, point c), du traité CE et de l’article 183, point c), du traité Euratom, le Conseil, statuant à l’unanimité sur proposition de la Commission et après consultation du Parlement européen, arrête les dispositions nécessaires à la mise en œuvre de la présente décision ainsi que celles relatives au contrôle du recouvrement, à la mise à disposition de la Commission et au versement des recettes visées aux articles 2 et 5.»

2.      Le règlement (CE, Euratom) n° 1605/2002

7.        L’article 140 du règlement (CE, Euratom) n° 1605/2002 du Conseil, du 25 juin 2002, portant règlement financier applicable au budget général des Communautés européennes (6), dispose:

«1. L’examen par la Cour des comptes de la légalité et la régularité des recettes et des dépenses a lieu au regard des dispositions des traités, du budget, du présent règlement, des modalités d’exécution ainsi que de tous actes pris en exécution des traités.

2. Dans l’accomplissement de sa mission, la Cour des comptes peut prendre connaissance, dans les conditions déterminées à l’article 142, de tous documents et informations relatifs à la gestion financière des services ou organismes concernant les opérations financées ou cofinancées par les Communautés. Elle a le pouvoir d’entendre tout agent dont la responsabilité est engagée dans une opération de dépense ou de recette et d’utiliser toutes les possibilités de contrôle reconnues auxdits services ou organismes. Le contrôle dans les États membres s’effectue en liaison avec les institutions de contrôle nationales ou, si celles-ci ne disposent pas des compétences nécessaires, avec les services nationaux compétents. La Cour des comptes et les institutions de contrôle nationales des États membres pratiquent une coopération empreinte de confiance et respectueuse de leur indépendance.

[…]»

8.        Aux termes de l’article 142, paragraphe 1, du règlement n° 1605/2002:

«La Commission, les autres institutions, les organismes gérant des recettes ou des dépenses au nom des Communautés, ainsi que les bénéficiaires finaux de paiements effectués sur le budget, apportent à la Cour des comptes toutes les facilités et lui donnent tous les renseignements dont celle-ci estime avoir besoin dans l’accomplissement de sa mission. Ils tiennent à la disposition de la Cour des comptes toutes pièces concernant la passation et l’exécution des marchés financés par le budget communautaire et tous comptes en deniers et matières, toutes pièces comptables ou justificatives, ainsi que les documents administratifs qui s’y rapportent, toute documentation relative aux recettes et aux dépenses des Communautés, tous inventaires, tous organigrammes que la Cour des comptes estime nécessaires à la vérification sur pièce ou sur place du rapport sur le résultat de l’exécution budgétaire et financière et, pour les mêmes fins, tous documents et données établis ou conservés sur un support magnétique.

Les divers services et corps de contrôle internes des administrations nationales concernées apportent à la Cour des comptes toutes les facilités dont celle-ci estime avoir besoin dans l’accomplissement de sa mission.

Le premier alinéa s’applique également aux personnes physiques ou morales bénéficiaires de versements provenant du budget communautaire.

3.      Le règlement (CE) n° 1798/2003

9.        L’article 1er, paragraphe 1, du règlement (CE) n° 1798/2003 du Conseil, du 7 octobre 2003, concernant la coopération administrative dans le domaine de la taxe sur la valeur ajoutée et abrogeant le règlement (CEE) n° 218/92 (7), dispose:

«Le présent règlement détermine les conditions dans lesquelles les autorités administratives chargées, dans les États membres, de l’application de la législation relative à la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) sur les livraisons de biens et les prestations de services, l’acquisition intracommunautaire de biens et l’importation de biens coopèrent entre elles ainsi qu’avec la Commission en vue d’assurer le respect de cette législation.

À cette fin, il définit des règles et des procédures permettant aux autorités compétentes des États membres de coopérer et d’échanger entre elles toutes les informations susceptibles de leur permettre l’établissement correct de la TVA.

Le présent règlement définit, en outre, des règles et procédures pour l’échange de certaines informations par voie électronique, notamment en ce qui concerne la TVA sur les transactions intracommunautaires.

[…]»

10.      Aux termes de l’article 3, paragraphe 2, du règlement n° 1798/2003, chaque État membre désigne un unique bureau central de liaison comme responsable privilégié, par délégation, des contacts avec les autres États membres dans le domaine de la coopération administrative et en informe la Commission ainsi que les autres États membres.

11.      L’article 5 du règlement n° 1798/2003 dispose:

«1. Sur demande de l’autorité requérante, l’autorité requise communique les informations visées à l’article 1er, y compris celles qui concernent un ou plusieurs cas précis.

2. En vue de la communication visée au paragraphe 1, l’autorité requise fait effectuer s’il y a lieu les enquêtes administratives nécessaires pour obtenir ces informations.

3. La demande visée au paragraphe 1 peut comprendre une demande motivée portant sur une enquête administrative précise. Si l’État membre décide qu’aucune enquête administrative n’est nécessaire, il informe immédiatement l’autorité requérante des raisons de cette décision.

4. Pour obtenir les informations demandées, ou pour procéder à l’enquête administrative demandée, l’autorité requise, ou l’autorité administrative saisie par cette dernière, procède comme si elle agissait pour son propre compte ou à la demande d’une autre autorité de son propre État membre.»

12.      L’article 35, paragraphe 1, du règlement n° 1798/2003 dispose:

«Les États membres et la Commission examinent et évaluent le fonctionnement du dispositif de coopération administrative prévu par le présent règlement. La Commission centralise l’expérience des États membres en vue d’améliorer le fonctionnement de ce dispositif.»

13.      L’article 43, paragraphe 1, du règlement n° 1798/2003 énonce ce qui suit:

«Aux fins de l’application du présent règlement, les États membres prennent toutes les mesures nécessaires pour:

a)      assurer une bonne coordination interne entre les autorités compétentes visées à l’article 3;

b)      établir une coopération directe entre les autorités habilitées en vue de cette coordination;

c)      garantir le bon fonctionnement du système d’échange d’informations prévu par le présent règlement.»

III – Les faits

14.      Par lettre du 26 juin 2006, la Cour des comptes a informé la Cour des comptes fédérale allemande qu’elle envisageait d’effectuer une visite de contrôle du 10 au 13 octobre 2006. L’audit avait pour objet la coopération administrative dans le domaine de la taxe sur la valeur ajoutée au titre du règlement n° 1798/2003 et des modalités d’exécution y afférentes. L’objectif central était de déterminer si les États membres avaient mis en place les structures administratives et organisationnelles nécessaires à ladite coopération administrative et d’examiner comment cette coopération fonctionne dans la pratique en cas de demandes d’informations visées à l’article 5 du règlement n° 1798/2003. Le contrôle concernait pour l’essentiel les services du bureau central de liaison au sens de l’article 2, paragraphe 2, de ce règlement, mais pouvait également inclure, le cas échéant, d’autres services impliqués dans la coopération administrative.

15.      Se référant à ce premier courrier, la Cour des comptes, par lettre du 7 septembre 2006, a communiqué à la Cour des comptes fédérale de plus amples détails sur le contrôle. Cette lettre annonçait notamment une visite d’audit auprès du bureau central de liaison allemand entre le 10 et le 13 octobre 2006. Ladite lettre était accompagnée d’un programme de visite que la Cour des comptes fédérale était priée de transmettre au bureau central de liaison.

16.      Dans ce programme de la mission de contrôle, le bureau central de liaison est invité à transmettre des renseignements sur les demandes d’informations reçues ou faites en 2004/2005 au titre de l’article 5 du règlement n° 1798/2003. Le programme comporte, en outre, un aperçu des différents thèmes qui devaient être abordés lors de la visite, dont 1) l’organisation, l’équipement et le fonctionnement du bureau central de liaison, 2) l’échange d’informations sans demande préalable au sens du chapitre IV du règlement n° 1798/2003, 3) la saisie et l’échange d’informations sur les opérations intracommunautaires (base de données «VIES»), 4) les problèmes juridiques qui entravent la coopération administrative, 5) d’autres mesures visant à améliorer la coopération administrative et à prévenir les abus, ainsi que 6) l’examen, par sondage, des demandes d’informations qui ont été reçues ou envoyées.

17.      Par lettre du 18 septembre 2006, la Cour des comptes fédérale a confirmé qu’elle participerait au contrôle de la Cour des comptes. À cet effet, une réunion préparatoire devait avoir lieu le 9 octobre 2009 à la Cour des comptes fédérale.

18.      Étant donné que le bureau central de liaison concerné par la mission d’audit ne semblait pas disposé à coopérer avec la Cour des comptes, celle-ci s’est de nouveau adressée à la Cour des comptes fédérale, par lettre du 5 octobre 2006, pour l’informer que le bureau central de liaison n’avait ni confirmé les dates de la visite de contrôle ni transmis les documents préalablement demandés qui étaient nécessaires à la préparation adéquate du contrôle. Dans ces conditions, la Cour des comptes a indiqué qu’elle avait l’intention de reporter la visite de contrôle qui aurait lieu du 14 au 17 novembre 2006. Elle priait, en même temps, la Cour des comptes fédérale d’intervenir auprès du bureau central de liaison en vue du bon déroulement de ce contrôle.

19.      Par lettre du 9 novembre 2006, la Cour des comptes s’est plainte auprès du ministère fédéral des Finances de ce que le bureau central de liaison à contrôler n’avait ni confirmé les dates d’audit du 14 au 17 novembre 2006 ni transmis les documents nécessaires. La Cour des comptes a indiqué qu’elle reportait encore une fois les dates de la visite de contrôle, à savoir du 4 au 7 décembre 2006. En même temps, elle réexpliquait le but du contrôle et précisait, à cet égard, qu’il était entre autres prévu d’analyser des échantillons, datant de 2005, de demandes d’informations envoyées par le bureau central de liaison et de demandes d’informations reçues en provenance d’autres États membres. Les opérations imposables (et la bonne application de la taxe sur la valeur ajoutée) proprement dites, dans la mesure où elles pouvaient ressortir des documents à examiner, ne faisaient pas l’objet du contrôle. Il s’agissait plutôt de vérifier l’efficacité et l’effectivité de la coopération administrative. Dans sa lettre de réponse du 4 décembre 2006, le ministère fédéral des Finances a indiqué que, en l’absence de base juridique, un contrôle par la Cour des comptes n’était pas possible.

20.      Par lettre du 13 décembre 2006, la Cour des comptes s’est de nouveau adressée à la Cour des comptes fédérale en lui demandant de répondre à plusieurs questions concernant différentes demandes d’informations qui avaient été échangées, dans le cadre de l’article 5 du règlement n° 1798/2003, entre le bureau central de liaison de la République fédérale d’Allemagne et les bureaux centraux de liaison d’autres États membres. La Cour des comptes fédérale a rejeté cette demande le 6 mars 2007 en rappelant qu’en l’espèce le ministère fédéral des Finances avait déjà marqué son opposition au contrôle annoncé par la Cour des comptes. Pour des raisons de neutralité, la Cour des comptes fédérale ne s’estimait, dès lors, pas en mesure de transmettre les éléments pertinents.

21.      Par lettre du 4 mai 2007, la Cour des comptes s’est encore adressée au ministère fédéral des Finances et lui a exposé une série de constatations auxquelles elle était parvenue à la suite des contrôles effectués dans d’autres États membres. Dans sa lettre de réponse du 29 juin 2007, le ministère fédéral des Finances a pris position sur ces observations. Toutefois, rien dans cette lettre ne semblait indiquer qu’il avait changé son point de vue négatif à l’égard de la réalisation de l’audit par la voie d’une visite de contrôle effectuée en Allemagne.

22.      La Cour des comptes a publié les résultats de son audit dans son rapport spécial n° 8/2007 relatif à la coopération administrative dans le domaine de la taxe sur la valeur ajoutée (8) (ci-après le «rapport spécial n° 8/2007»). Les observations relatives à la République fédérale d’Allemagne formulées dans ce rapport sont fondées sur des constatations résultant de missions d’audit effectuées dans d’autres États membres, sur des informations obtenues pendant les missions d’audit effectuées auprès de la Commission et sur des rapports rendus publics (9).

IV – Procédure précontentieuse

23.      Par lettre de mise en demeure du 23 septembre 2008, la Commission a informé la République fédérale d’Allemagne que celle-ci avait manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 248, paragraphes 1, 2 et 3, CE, ainsi que des articles 140, paragraphe 2, et 142, paragraphe 1, du règlement n° 1605/2002, et de l’article 10 CE. Selon la Commission, ce manquement résultait de ce que la Cour des comptes avait été empêchée d’accomplir sa tâche d’assurer le contrôle des recettes de l’Union. Par ailleurs, l’audit en question de la Cour des comptes visait à vérifier les dépenses de l’Union liées à la mise en œuvre du règlement n° 1798/2003, en évaluant, tout particulièrement, l’efficacité et l’efficience de la base de données «VIES».

24.      Dans sa réponse du 23 décembre 2008, la République fédérale d’Allemagne a réfuté les griefs soulevés à son encontre. Elle tenait pour décisif que le projet d’audit de la Cour des comptes n’était pas couvert par l’article 248 CE, car cet audit ne portait ni sur les recettes ni sur les dépenses de l’Union. Le gouvernement allemand invoquait également le principe de subsidiarité.

25.      Par lettre du 23 mars 2009, la Commission a adressé à la République fédérale d’Allemagne un avis motivé en application de l’article 226 CE. Elle y maintenait son point de vue selon lequel la Cour des comptes est habilitée à contrôler la coopération administrative entre les États membres dans le domaine de la taxe sur la valeur ajoutée. La Cour des comptes serait, en outre, également habilitée à évaluer les dépenses de l’Union liées à la base de données «VIES», ce système d’échange d’informations sur la taxe sur la valeur ajoutée étant financé par le budget de l’Union.

26.      En réponse à l’avis motivé, la République fédérale d’Allemagne a, par lettre du 22 mai 2009, confirmé son opinion selon laquelle l’audit en question n’était pas couvert par l’article 248 CE en ce qu’il portait sur le contrôle des recettes de taxe sur la valeur ajoutée. Dans l’hypothèse où l’audit aurait été conçu comme un contrôle des dépenses de l’Union liées à la base de données «VIES», la République fédérale d’Allemagne acceptait expressément que la Cour des comptes soit compétente pour contrôler les dépenses de l’Union à ce titre. Ces dépenses ne faisaient cependant pas l’objet de la demande d’audit initiale.

V –    Procédure devant la Cour et conclusions des parties

27.      Estimant que la République d’Allemagne ne s’était pas conformée à l’avis motivé, la Commission a introduit, le 17 décembre 2009, un recours en application de l’article 258 TFUE.

28.      La Commission conclut à ce qu’il plaise à la Cour:

–        constater que, en ayant refusé à la Cour des comptes d’effectuer des contrôles, en Allemagne, concernant la coopération administrative entre les États membres dans le domaine de la taxe sur la valeur ajoutée au titre du règlement n° 1798/2003 et des modalités d’exécution, la République fédérale d’Allemagne a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 248, paragraphes 1, 2 et 3, CE, ainsi que des articles 140, paragraphe 2, et 142, paragraphe 1, du règlement n° 1605/2002, et de l’article 10 CE;

–        condamner la République fédérale d’Allemagne aux dépens.

29.      Pour sa part, la République fédérale d’Allemagne conclut au rejet du recours et à la condamnation de la Commission aux dépens.

30.      Par ordonnance du président de la Cour du 7 mai 2010, la Cour des comptes et le Parlement ont été admis à intervenir à l’appui des conclusions de la Commission. La Cour des comptes et le Parlement demandent qu’il soit fait droit au recours de la Commission.

31.      Lors de l’audience qui s’est tenue le 15 mars 2011, les représentants de la Commission, du gouvernement allemand, ainsi que de la Cour des comptes et du Parlement ont présenté leurs observations.

VI – Principaux arguments des parties

32.      Selon la Commission, le Parlement et la Cour des comptes, le refus de la République fédérale d’Allemagne de permettre à la Cour des comptes d’effectuer le contrôle de la coopération administrative dans le domaine de la taxe sur la valeur ajoutée aboutit à une violation de l’article 248, paragraphes 1 à 3, CE, des articles 140, paragraphe 2, et 142, paragraphe 1, du règlement n° 1605/2002, ainsi que de l’article 10 CE. Le gouvernement allemand considère, en revanche, que son attitude négative est conforme au droit de l’Union.

33.      La Commission, le Parlement et la Cour des comptes plaident pour une interprétation large des compétences de contrôle de la Cour des comptes ainsi que des obligations de coopération correspondantes des États membres. Ils soulignent, à cet égard, le rôle de la Cour des comptes, tel que consacré par le droit primaire, consistant à évaluer la perception et l’utilisation des fonds de l’Union européenne et à examiner si les opérations financières ont été enregistrées et présentées correctement ainsi qu’exécutées et gérées de manière légale et régulière. En sa qualité d’auditeur externe indépendant, la Cour des comptes contribuerait également à l’amélioration de la gestion financière de l’Union et, partant, à la protection des intérêts financiers des citoyens de l’Union. Dans ces conditions, et afin de garantir l’effet utile des dispositions pertinentes, les compétences de contrôle de la Cour des comptes devraient être interprétées de manière large. Il découlerait en outre des règles du droit de l’Union que, en cas de contrôles dans les États membres, ces derniers doivent offrir leur plein soutien à la Cour des comptes dans l’accomplissement de sa mission.

34.      Les États membres seraient ainsi tenus d’admettre tout contrôle de la Cour des comptes destiné à évaluer la perception et l’utilisation des fonds de l’Union, et d’offrir à la Cour des comptes leur plein soutien à cet égard. Or, c’est précisément ce que les autorités allemandes auraient refusé à la Cour des comptes. Bien que le règlement n° 1798/2003 ne régisse pas en tant que tel la perception des recettes de l’Union, il présente un lien clair et direct avec ces recettes. Il vise à lutter contre les pratiques de fraude et d’évasion fiscales dans le domaine de la taxe sur la valeur ajoutée et contribue à permettre aux États membres de percevoir correctement la taxe sur la valeur ajoutée et à l’Union de disposer, dans les meilleures conditions possibles, des ressources propres de taxe sur la valeur ajoutée qui lui reviennent. En fin de compte, les recettes de taxe sur la valeur ajoutée des États membres constituent en effet la base pour déterminer les ressources de l’Union provenant de la taxe sur la valeur ajoutée. Sous cet angle, le fait de vérifier si les États membres ont mis en place un système efficace de coopération et d’assistance mutuelle dans le domaine de la taxe sur la valeur ajoutée s’inscrit dans le cadre du contrôle des ressources propres provenant de la taxe sur la valeur ajoutée. On ne saurait non plus ignorer que les autres États membres devraient compenser les éventuels déficits au niveau des ressources propres provenant de la taxe sur la valeur ajoutée par des contributions plus importantes dans le domaine des ressources propres provenant du RNB.

35.      La Cour des comptes et le Parlement insistent également dans ce contexte sur la différence existant entre les contrôles réalisés par la Cour des comptes et d’éventuels contrôles menés par la Commission. L’objectif des contrôles effectués par la Cour des comptes ne serait pas d’examiner l’application du règlement par les États membres afin de les faire sanctionner en cas d’éventuel manquement à leurs obligations, mais plutôt de vérifier si le système de coopération administrative fonctionne bien en pratique et, si nécessaire, de proposer des améliorations. À cet égard, la Cour des comptes souligne que l’interprétation restrictive des compétences de la Cour des comptes prônée par le gouvernement allemand aurait pour résultat qu’elle ne pourrait procéder dans le domaine des ressources propres provenant de la taxe sur la valeur ajoutée qu’à des audits financiers très limités, ce qui l’empêcherait de réaliser des audits de la performance. Ces derniers seraient cependant nécessaires afin que la Cour des comptes puisse respecter son obligation découlant du texte même de l’article 248 CE.

36.      La Commission s’estime du reste confortée dans son analyse par l’article 43, paragraphe 1, du règlement n° 1798/2003, l’article 8, paragraphe 2, de la décision 2000/597 et l’article 140, paragraphe 1, du règlement n° 1605/2002. Selon elle, il ressort de ces dispositions que les États membres eux-mêmes ont donné aux compétences de la Cour des comptes, au titre de l’article 248 CE, une interprétation large qui englobe des contrôles concernant la coopération administrative entre les États membres dans le domaine de la taxe sur la valeur ajoutée au titre du règlement n° 1798/2003.

37.      Le gouvernement allemand préconise, en revanche, une interprétation plus restrictive des compétences de la Cour des comptes. La mission de la Cour des comptes se limiterait manifestement au contrôle d’opérations qui présentent un lien direct avec les recettes et les dépenses de l’Union.

38.      Selon le gouvernement allemand, le règlement n° 1798/2003 ne concerne pas les recettes de l’Union. Les recettes des États membres provenant de la taxe sur la valeur ajoutée, qui sont protégées par le règlement n° 1798/2003, ne constituent pas des recettes de l’Union, mais sont uniquement intégrées en tant que valeur fixe dans le calcul des ressources propres de l’Union provenant de la taxe sur la valeur ajoutée. Les dispositions pertinentes pour ce calcul ne comporteraient aucun mode de correction permettant de prendre en compte les recettes de taxe sur la valeur ajoutée que les États membres auraient pu percevoir en sus, par exemple, grâce à un meilleur fonctionnement de la coopération administrative entre États membres.

39.      Dans ce contexte, le gouvernement allemand fait également une comparaison avec les ressources propres provenant du RNB. Ce gouvernement souligne notamment à cet égard que le calcul des ressources propres provenant du RNB repose, en fin de compte, sur le RNB des différents États membres. Si la manière dont est constituée la base des ressources propres était soumise au contrôle de la Cour des comptes, celle-ci serait habilitée à contrôler, dans le cadre d’une vérification des ressources propres provenant du RNB, l’ensemble de la politique économique de l’État membre concerné, puisque cette politique a justement une incidence sur le RNB de tout État membre.

40.      Ces considérations amènent le gouvernement allemand à la conclusion que les pouvoirs de contrôle de la Cour des comptes ne peuvent porter que sur la détermination et le calcul des recettes nettes de taxe sur la valeur ajoutée effectivement encaissées ainsi que sur les calculs que les États membres effectuent sur la base de ces recettes pour déterminer l’assiette pour les ressources propres provenant de la taxe sur la valeur ajoutée. Les différentes procédures administratives, procédures de perception et procédures de détermination, à savoir la procédure fiscale proprement dite dans les États membres, ne seraient en revanche pas soumises à son contrôle, car cette procédure n’entrerait absolument pas dans l’objet de la détermination et du calcul des ressources propres provenant de la taxe sur la valeur ajoutée. À cet égard, on ne saurait non plus, selon le gouvernement allemand, déduire de l’article 8, paragraphe 2, de la décision 2000/597 une compétence de la Cour des comptes pour contrôler la mise en œuvre dans les États membres du règlement n° 1798/2003.

41.      Les parties s’opposent également sur le point de savoir si un contrôle par la Cour des comptes de la coopération administrative entre les États membres dans le domaine de la taxe sur la valeur ajoutée porte atteinte au principe de subsidiarité.

42.      Le gouvernement allemand soutient que tel est le cas. Il relève que ce sont en principe les cours des comptes nationales qui vérifient la perception de la taxe sur la valeur ajoutée. Pour autant qu’elle considère qu’un contrôle des aspects transfrontaliers ne serait possible que par la Cour des comptes, la Commission méconnaîtrait que, en vertu de l’article 35 du règlement n° 1798/2003, il est déjà prévu un contrôle et une évaluation du règlement par la Commission en coopération avec les États membres. En d’autres termes, le législateur communautaire a déjà pris des dispositions pour tenir compte du domaine de compétence limité des cours des comptes nationales. Un contrôle de la Cour des comptes ne serait à cet égard pas nécessaire.

43.      Dans ce contexte, le gouvernement allemand souligne également que l’organisation de l’administration fiscale, le contrôle des assujettis et le recouvrement de la taxe sont des domaines relevant de la compétence des États. Cette répartition des compétences de droit administratif entre l’Union et les États membres est, selon ce gouvernement, indissociable de la question de savoir quel organe de contrôle est habilité à auditer des activités administratives correspondantes. La délimitation des compétences de contrôle de la Cour des comptes devrait, par conséquent, correspondre à la délimitation des compétences administratives. À défaut d’une base expresse dans le traité, il ne serait dès lors pas possible d’examiner des actes administratifs relevant de la compétence des États membres.

44.      Selon la Commission, le Parlement et la Cour des comptes, l’argument tiré de la subsidiarité n’emporte pas la conviction. La nature transfrontalière de la coopération administrative au titre du règlement n° 1798/2003 plaiderait plutôt en faveur d’une compétence de contrôle de la Cour des comptes. La Commission souligne également le caractère autonome des contrôles réalisés par la Cour des comptes. Il résulterait des considérations qui précèdent qu’une compétence de contrôle de la Commission ou des cours des comptes nationales n’exclut pas d’office celle de la Cour des comptes.

45.      Dans son mémoire en réplique, la Commission fait valoir, en outre, que la mise en œuvre du règlement n° 1798/2003 entraîne également des dépenses pour la Communauté, étant donné que la conception et le fonctionnement des systèmes d’informations prévus dans ce règlement sont (co)financés par le budget communautaire. Partant, le contrôle de la mise en œuvre et de l’application du règlement n° 1798/2003 ferait également partie du contrôle de la légalité et de la régularité des dépenses de l’Union.

46.      Le gouvernement allemand considère ce moyen comme irrecevable à un double égard. D’une part, faute d’avoir été présenté dans la requête, cet argument devrait être rejeté, en vertu de l’article 42, paragraphe 2, premier alinéa, du règlement de procédure de la Cour, comme tardif et, partant, irrecevable. D’autre part, ce contrôle des dépenses n’aurait pas fait l’objet de la demande de contrôle de la Cour des comptes.

VII – Appréciation juridique

A –    Remarques liminaires

47.      L’appréciation de la légalité, au regard du droit de l’Union, du refus de la République fédérale d’Allemagne de permettre à la Cour des comptes d’effectuer un contrôle de la coopération administrative entre les États membres dans le domaine de la taxe sur la valeur ajoutée dépend, en définitive, de la réponse à la question de savoir si la Cour des comptes était ou non compétente pour réaliser ledit contrôle. Si la Cour des comptes n’était pas habilitée à effectuer un tel contrôle, la République fédérale d’Allemagne serait en droit de lui refuser, sans autre justification, une coopération en la matière. En revanche, si la Cour des comptes, comme le soutiennent la Commission, le Parlement et la Cour des comptes elle-même, était habilitée à mener ce contrôle, le refus opposé par la République fédérale d’Allemagne pourrait s’analyser comme un manquement aux obligations de coopération qui incombent à cet État en vertu du droit de l’Union.

48.      Aux termes de l’article 7, paragraphe 1, CE, la Cour des comptes fait partie des institutions de l’Union et agit dans les limites des attributions qui lui sont conférées par ce traité. En droit primaire, ces attributions ont été énoncées à l’article 248 CE, dont le paragraphe 1 dispose que la Cour des comptes examine les comptes de la totalité des recettes et dépenses de l’Union, ainsi que les comptes de la totalité des recettes et dépenses de tout organisme créé par l’Union, dans la mesure où l’acte de fondation n’exclut pas cet examen.

49.      Les compétences de contrôle de la Cour des comptes concernent donc, en principe, les recettes et les dépenses de l’Union (10). Dans ce contexte, la question qui se pose en premier lieu en l’espèce est celle de savoir si un contrôle de la coopération administrative entre les États membres dans le domaine de la taxe sur la valeur ajoutée concerne ou non les recettes ou dépenses de l’Union. Compte tenu notamment de la circonstance que la jurisprudence de la Cour ne comporte, jusqu’à présent, que peu d’énonciations quant à la portée des pouvoirs de contrôle attribués à la Cour des comptes, nous estimons que, aux fins de la réponse à cette question, il convient tout d’abord de décrire brièvement la structure de base du système des ressources de l’Union sous l’empire de la décision 2000/597, qui était applicable ratione temporis. Sur cette base, nous aborderons ensuite le point de savoir si et à quelles conditions il y a lieu de considérer le contrôle qui a été refusé par la République fédérale d’Allemagne comme un contrôle des recettes ou des dépenses de l’Union, à la réalisation duquel la République fédérale d’Allemagne était tenue d’apporter son soutien.

B –    Le système des ressources propres sous l’empire de la décision 2000/597

50.      En vertu de l’article 269, premier alinéa, CE, le budget de l’Union est, sans préjudice des autres recettes, intégralement financé par des ressources propres. Aux termes du second alinéa de cet article, le Conseil, statuant à l’unanimité sur proposition de la Commission et après consultation du Parlement, arrête à cet effet les dispositions relatives au système des ressources propres de l’Union.

51.      S’agissant de la période en cause en l’espèce, le système des ressources propres a été défini dans la décision 2000/597. L’article 2, paragraphe 1, de cette décision établit une distinction entre les recettes provenant de droits et de cotisations dans le domaine agricole [sous a)], les recettes provenant de droits de douane perçus à l’importation [sous b)], les ressources propres TVA [sous c)], et les ressources propres RNB (11) [sous d)].

52.      Selon l’article 8, paragraphe 1, de la décision 2000/597, les droits et cotisations agricoles ainsi que les droits de douane dus à l’Union, qui constituent également ce qu’il est convenu d’appeler les «ressources propres traditionnelles», sont perçus par les États membres conformément aux dispositions législatives, réglementaires et administratives nationales. En vertu de l’article 2, paragraphe 3, de ladite décision, les États membres sont en droit de retenir, à titre de frais de perception, une indemnité forfaitaire s’élevant à 25 % du montant des ressources propres traditionnelles perçues.

53.      Conformément à l’article 2, paragraphe 1, sous c), de la décision 2000/597, les ressources propres TVA de l’Union sont déterminées sur la base de calculs complexes. À cet effet, l’assiette harmonisée pour les ressources propres TVA est déterminée dans un premier temps pour chaque État membre à partir des recettes de TVA effectives. Les règles détaillées en vue de la détermination de cette assiette figurent dans le règlement (CEE, Euratom) n° 1553/89 du Conseil, du 29 mai 1989, concernant le régime uniforme définitif de perception des ressources propres provenant de la taxe sur la valeur ajoutée (12). L’assiette ainsi calculée de l’État membre concerné est ensuite écrêtée à 50 % de son RNB défini conformément à l’article 2, paragraphe 7, de la décision 2000/597 (écrêtement de l’assiette de TVA) (13). Un taux uniforme valable pour tous les États membres est ensuite appliqué à l’assiette ainsi établie (14). De ces calculs résultent les ressources propres TVA dues par chaque État membre, ressources que les États membres sont tenus de mettre à la disposition de la Commission conformément à l’article 8, paragraphe 1, troisième alinéa, de la décision 2000/597.

54.      Les ressources propres RNB proviennent, en vertu de l’article 2, paragraphe 1, sous d), de la décision 2000/597, de l’application d’un taux – à fixer dans le cadre de la procédure budgétaire compte tenu de toutes les autres recettes – à la somme des RNB de tous les États membres. Ces ressources propres servent à équilibrer le budget de l’Union européenne et peuvent être considérées dans ce contexte comme une sorte de clé de voûte (15), dont le système des ressources propres a besoin, car un emprunt de l’Union n’est en principe pas admis (16). Cela signifie que des pertes structurelles de recettes dans les trois autres catégories de ressources propres doivent en principe être compensées par des recettes plus élevées de ressources propres RNB. En vertu de l’article 8, paragraphe 1, troisième alinéa, de la décision 2000/597, les États membres sont tenus de mettre les ressources propres RNB à la disposition de la Commission.

55.      Une différence importante entre les ressources propres traditionnelles, d’une part, et les ressources propres provenant de la TVA et du RNB, d’autre part, réside dans le fait que les ressources propres traditionnelles que les États membres sont tenus de transférer à la Commission doivent, en principe, correspondre aux droits agricoles et droits de douane perçus par les États membres – moins l’indemnité forfaitaire au titre des frais de perception –, alors qu’un tel lien direct n’existe pas entre les ressources propres TVA et les recettes de TVA nationales ou entre les ressources propres RNB et le RNB national.

56.      Dans ce contexte, l’article 8, paragraphe 1, premier alinéa, de la décision 2000/597 prévoit une disposition expresse concernant la perception des ressources propres traditionnelles. En vertu de cette disposition, lesdites ressources propres sont perçues par les États membres conformément aux dispositions législatives, réglementaires et administratives nationales, qui sont, le cas échéant, adaptées aux exigences de la réglementation de l’Union. Les principales règles du droit de l’Union relatives à la perception des ressources propres traditionnelles figurent dans le règlement (CE, Euratom) n° 1150/2000 du Conseil, du 22 mai 2000, portant application de la décision 2000/597 (17), dont l’article 17 règle certains aspects de l’obligation de perception et de mise à disposition de ces ressources propres par les États membres (18). Par ailleurs, en vertu de l’article 18 de ce règlement, la Commission peut non seulement demander aux États membres d’effectuer des contrôles supplémentaires relatifs à la constatation et à la mise à disposition des ressources propres traditionnelles, mais a également le droit de participer activement à ces vérifications.

57.      Ni la décision 2000/597 ni le règlement n° 1150/2000 ne contiennent de dispositions expresses en ce qui concerne la perception de la TVA nationale par les États membres. Malgré l’harmonisation en la matière, la TVA doit être considérée comme une taxe nationale qui est en principe perçue conformément aux dispositions nationales (19). L’article 12, paragraphe 1, du règlement n° 1553/89 établit cependant l’obligation pour les États membres d’informer la Commission de leurs procédures d’enregistrement des assujettis ainsi que de détermination et de recouvrement de la TVA, ainsi que des modalités et résultats de leurs systèmes de contrôle dans le domaine de cette taxe. En vertu du paragraphe 2 de ce même article, la Commission examine en collaboration avec chaque État membre concerné si d’éventuelles améliorations des procédures peuvent être envisagées en vue d’en accroître l’efficacité.

58.      L’importance des quatre catégories de ressources propres dans le cadre du financement du budget de l’Union a considérablement changé depuis la moitié des années 1990. Alors qu’en 1996, dans la composition des ressources propres de l’Union européenne, le pourcentage des «ressources propres traditionnelles» s’élevait à 19,1 %, celui des ressources propres TVA à 51,3 % et celui des ressources propres RNB à 29,6 %, en 2005, la part des «ressources propres traditionnelles» a baissé à 11,4 % et celle des recettes TVA à 14,1 %, tandis que le pourcentage des ressources propres RNB est passé à 74,5 % (20). Par conséquent, les ressources propres RNB, qui n’ont été introduites qu’en 1988, sont devenues, à la place des ressources propres TVA, la principale source de financement du budget de l’Union.

59.      Comme nous l’avons déjà évoqué, les ressources propres RNB constituent désormais non seulement la principale source de recettes de l’Union européenne, mais servent également à équilibrer le budget de l’Union. Dans la mesure où d’éventuelles pertes de recettes dans les autres catégories de ressources propres ne sont pas neutralisées en adaptant les dépenses dans le budget de l’Union européenne, elles doivent par conséquent être compensées par des ressources propres RNB plus élevées.

60.      Dans sa jurisprudence relative à la perception des ressources propres traditionnelles par les États membres, la Cour tient compte expressément de ce lien entre les différentes catégories de ressources propres. Partant de la constatation que des recettes déficitaires d’une ressource propre devront être compensées soit par une autre ressource propre, soit par une adaptation des dépenses, la Cour a jugé, dans l’arrêt du 15 novembre 2005, Commission/Danemark, que les États membres ont l’obligation de constater, le cas échéant, les droits de l’Union sur les ressources propres traditionnelles, sous peine d’admettre que l’équilibre financier de l’Union soit bouleversé par le comportement d’un État membre (21).

61.      En conclusion, eu égard aux développements qui précèdent, il convient de relever que le système des ressources propres de l’Union comprend plusieurs catégories de ressources propres, à savoir les ressources propres traditionnelles, les ressources propres TVA et les ressources propres RNB. Dans ce contexte, les ressources propres TVA que les différents États membres sont tenus de mettre à disposition sont déterminées sur la base des recettes de TVA nationales, lesquelles sont prises en compte, dans le cadre de calculs complexes, en tant que valeur statistique pour établir les contributions qui sont dues par les différents États membres au titre des ressources propres TVA (22).

C –    Les compétences de contrôle de la Cour des comptes

62.      Afin d’apprécier si la République fédérale d’Allemagne a, par son refus de permettre à la Cour des comptes de contrôler, en Allemagne, la coopération administrative dans le domaine de la taxe sur la valeur ajoutée, violé le droit de l’Union, il importe en définitive de savoir si la Cour des comptes était habilitée à effectuer ce contrôle et si, lors de la préparation et de la réalisation dudit contrôle, elle est restée dans les limites de ses pouvoirs de contrôle. En effet, les États membres ne sont tenus de coopérer avec la Cour des comptes que pour autant que celle-ci agisse dans les limites des attributions de contrôle qui lui sont conférées (23).

63.      Dès lors, dans les développements qui suivent, nous analyserons d’abord l’objet, la portée et les limites des compétences de contrôle de la Cour des comptes. Nous aborderons en outre les critères de contrôle dont la Cour des comptes dispose dans l’accomplissement de sa mission. Cette analyse permettra ensuite d’apprécier si et de quelle manière la Cour des comptes est concrètement habilitée à soumettre à un contrôle la coopération administrative dans le domaine de la taxe sur la valeur ajoutée au titre du règlement n° 1798/2003.

1.      L’objet, la portée et les limites des compétences de contrôle de la Cour des comptes

a)      Le pouvoir de vérifier les actes des institutions et des États membres de l’Union présentant un lien direct suffisant avec les recettes ou les dépenses de l’Union

64.      En vertu de l’article 248, paragraphe 1, CE, la Cour des comptes examine les comptes de la totalité des recettes et dépenses de l’Union ainsi que de la totalité des recettes et dépenses de tout organisme créé par l’Union dans la mesure où l’acte de fondation n’exclut pas cet examen. Aux termes de l’article 248, paragraphe 2, CE, elle examine dans ce cadre la légalité et la régularité des recettes et dépenses et s’assure de la bonne gestion financière, en signalant en particulier toute irrégularité (24). L’article 140, paragraphe 1, du règlement n° 1605/2002 – qui a été arrêté sur la base de l’article 279 CE – prévoit en termes analogues que la Cour des comptes examine la légalité et la régularité des recettes et des dépenses de l’Union au regard des dispositions des traités, du budget, du règlement n° 1605/2002, des modalités d’exécution ainsi que de tous actes pris en exécution des traités (25).

65.      Sur la base de ces règles de compétence, la Cour des comptes est en principe habilitée à examiner tous actes des institutions et des États membres de l’Union qui présentent un lien direct suffisant avec les recettes ou les dépenses de l’Union. À cet effet, la Cour des comptes peut évaluer la légalité des actes examinés des institutions et des États membres de l’Union à la lumière de toutes les règles et normes du droit de l’Union qui sont susceptibles d’avoir une incidence sur les finances de l’Union (26). Il résulte en outre des dispositions de l’article 248, paragraphe 2, deuxième et troisième alinéas, CE, aux termes desquels le contrôle des recettes peut s’effectuer également sur la base des constatations des recettes et le contrôle des dépenses également sur la base des engagements, que, pour mener ses contrôles, la Cour des comptes n’a pas besoin d’attendre que les opérations concernées de recettes ou de dépenses soient clôturées, mais peut au contraire opter pour ce qu’il est convenu d’appeler un «contrôle en parallèle» (27).

66.      L’existence d’un lien direct suffisant entre l’objet du contrôle et les recettes ou les dépenses de l’Union constitue dès lors la principale condition pour qu’il y ait une compétence de contrôle de la Cour des comptes.

b)      Le champ d’application du droit de l’Union en tant que restriction de compétence dans le cadre du contrôle d’actes des États membres par la Cour des comptes

67.      Dans le cas du contrôle d’actes des institutions de l’Union, il suffit en règle générale qu’il y ait un lien direct entre les finances de l’Union et le domaine d’audit choisi par la Cour des comptes pour pouvoir, ipso facto, retenir une compétence de contrôle de la Cour des comptes.

68.      Dans le cas du contrôle d’actes des États membres, il convient en revanche de tenir compte en outre du fait que les États membres peuvent prendre de nombreuses décisions qui, si elles concernent les finances de l’Union, se situent cependant totalement en dehors du champ d’application du droit de l’Union. Étant donné que, en vertu des dispositions de l’article 248, paragraphe 2, CE, la Cour des comptes a le droit d’évaluer, au regard des dispositions pertinentes du droit de l’Union, non seulement la régularité et la bonne gestion financière du domaine d’audit qu’elle a défini, mais également la légalité de celui-ci (28), il nous semble exclu qu’elle fasse de décisions nationales, que les États membres ont arrêtées dans l’exercice de la souveraineté qu’ils ont conservée de manière inconditionnelle, l’objet principal d’un audit (29).

69.      Pour ce qui concerne les actes d’États membres, la compétence de contrôle de la Cour des comptes exige donc non seulement que les actes examinés des États membres présentent un lien direct suffisant avec les finances de l’Union, mais également que, lors de l’accomplissement de ces actes, les États membres devaient assurer le respect d’exigences du droit de l’Union.

70.      Pour mieux saisir cette restriction de compétence supplémentaire en cas de contrôle d’actes des États membres, il nous semble utile d’aborder brièvement les caractéristiques essentielles des contrôles de légalité effectués par la Cour des comptes.

71.      En vertu de l’article 248, paragraphe 2, CE, la Cour des comptes peut soumettre les actes des institutions et des États membres de l’Union qui concernent les finances de l’Union à un contrôle de légalité. S’il peut y avoir des points de recoupement entre ce contrôle et les fonctions judiciaires de la Cour de justice (30), la mise en œuvre et les effets des contrôles de légalité effectués, respectivement, par la Cour des comptes et par la Cour sont radicalement différents (31). S’agissant de la mise en œuvre du contrôle de légalité, la Cour ne peut agir qu’après avoir été valablement saisie. En outre, la Cour statue en général en fonction de l’objet du litige. En vertu de l’article 248, paragraphe 4, deuxième alinéa, CE, la Cour des comptes peut en revanche agir également de sa propre initiative en définissant elle-même – dans la limite de ses compétences – le champ d’audit. S’agissant des effets, les arrêts de la Cour acquièrent cependant une force de chose jugée formelle et matérielle et ont une portée contraignante. Les communications, rapports et avis de la Cour des comptes sont en revanche dépourvus de force obligatoire formelle (32).

72.      Bien que la Cour des comptes n’ait dès lors pas vocation, dans le cadre de son contrôle de légalité, à tirer des conclusions définitives en droit, il n’en demeure pas moins qu’une autorité technique considérable s’attache, en pratique, à ses déclarations relatives à la légalité des opérations contrôlées (33). Dans ce contexte, il convient également de faire observer que les audits de la Cour des comptes constituent normalement non seulement un contrôle, mais dans le même temps une forme de consultation ciblée, l’identification et le traitement de dysfonctionnements et de carences au regard du droit de l’Union visant à ce que la pratique constatée change (34).

73.      Compte tenu notamment de l’autorité dont jouit la Cour des comptes, ses communications, rapports et avis sur la légalité des actes contrôlés des États membres, bien que dépourvus de force obligatoire formelle, sont susceptibles d’exercer une influence considérable sur l’action de ces États membres dans les domaines contrôlés. L’éventualité d’une telle influence déterminante de la Cour des comptes signifie, selon nous, qu’il n’appartient pas à celle-ci de faire d’actes des États membres qui échappent totalement au champ d’application du droit de l’Union l’objet principal de ses contrôles, même dans l’hypothèse où les actes en question présenteraient un lien direct avec des recettes ou des dépenses de l’Union.

74.      En effet, s’il était possible que des actes des États membres intervenant dans un domaine où il n’existe pas de règles du droit de l’Union à observer puissent devenir l’objet principal d’un contrôle de la Cour des comptes, on courrait le risque que, par le biais du contrôle de légalité, la Cour des comptes puisse imposer aux États membres des appréciations au regard du droit de l’Union dans des domaines où ce droit ne saurait s’appliquer. Dans ces conditions, un contrôle de la légalité de l’action des États membres dans des domaines dans lesquels ils n’ont pas à respecter des dispositions du droit de l’Union porterait atteinte aux limites de compétence de la Cour des comptes (35).

75.      S’agissant des dépenses de l’Union, il nous semble que l’existence d’un lien direct suffisant entre les actes d’États membres à contrôler et les dépenses de l’Union implique, en règle générale, que ces actes relèvent du champ d’application du droit de l’Union.

76.      S’agissant des recettes de l’Union, il existe en revanche une multitude de règles, de procédures, de décisions et d’opérations des États membres qui, tout en se situant entièrement en dehors du champ d’application du droit de l’Union, sont néanmoins susceptibles d’avoir une incidence sur les recettes de l’Union. En s’inspirant de l’argumentation développée par le gouvernement allemand (36), il peut être renvoyé, dans ce contexte, au lien entre la politique économique des différents États membres et les ressources propres RNB que ces États membres doivent fournir.

77.      Étant donné que les décisions de principe des différents États membres en matière de politique économique ont, normalement, toujours une incidence sur le RNB de ces États, il est incontestable que lesdites décisions des États membres influent en définitive également sur le calcul des recettes RNB de l’Union (37). De telles décisions ne sauraient cependant faire l’objet d’un contrôle de la Cour des comptes, et ce indépendamment du fait qu’elles présentent ou non un lien direct avec les recettes de l’Union. En effet, dans ce contexte, il est déterminant que ces décisions se situent totalement en dehors du champ d’application du droit de l’Union.

c)      L’obligation de respecter le principe de subsidiarité et le principe de proportionnalité

78.      Il résulte des considérations qui précèdent que les actes des institutions ainsi que les actes – relevant du champ d’application du droit de l’Union – des États membres, qui présentent un lien direct suffisant avec les recettes ou les dépenses de l’Union peuvent, en principe, faire l’objet d’un contrôle de la Cour des comptes. Lorsque la Cour des comptes décide de contrôler de tels actes, elle est cependant tenue, lors de la préparation, de la mise en œuvre et de la clôture de ce contrôle, de respecter le principe de proportionnalité ainsi que – vis-à-vis des États membres – le principe de subsidiarité.

i)      Le principe de subsidiarité

79.      En vertu de l’article 5, deuxième alinéa, CE, dans les domaines qui ne relèvent pas de sa compétence exclusive, l’Union n’intervient, conformément au principe de subsidiarité, que si et dans la mesure où les objectifs de l’action envisagée ne peuvent pas être réalisés de manière suffisante par les États membres et peuvent donc, en raison des dimensions ou des effets de l’action envisagée, être mieux réalisés au niveau de l’Union.

80.      Aux termes du point 1 du protocole (n° 30, annexé au traité CE), sur l’application des principes de subsidiarité et de proportionnalité, dans l’exercice de ses compétences, chaque institution veille au respect du principe de subsidiarité (38). Par conséquent, dans l’exercice de ses pouvoirs de contrôle, la Cour des comptes est également tenue de respecter le principe de subsidiarité.

81.      L’applicabilité du principe de subsidiarité à l’action de la Cour des comptes résulte, en outre, directement de la fonction de ce principe dans l’ordonnancement des compétences de l’Union. Étant donné que le principe de subsidiarité constitue une limite de droit primaire à l’exercice des compétences (39), dans le système général du traité CE, tout transfert de compétences à des institutions de l’Union s’effectue nécessairement sous réserve que ces compétences ne peuvent être exercées que dans le respect du principe de subsidiarité (40).

82.      Il convient cependant de préciser à cet égard qu’une violation du principe de subsidiarité par la Cour des comptes ne pourrait être retenue que dans des cas exceptionnels. Dans la mesure où la Cour des comptes examine, dans le cadre de contrôles concernant les dépenses de l’Union, des actes des États membres, le contexte de droit de l’Union dans lequel s’inscrit le financement implique également en règle générale qu’un contrôle de ces actes soit effectué au niveau de l’Union et, partant, par la Cour des comptes. De même, lorsque, en matière de recettes de l’Union, l’action de plusieurs États membres doit être contrôlée, il nous semble logique que la Cour des comptes soit, en règle générale, l’organe approprié pour mener à bien un tel contrôle à caractère transfrontalier.

83.      Pour le cas où la Cour des comptes limiterait un contrôle en matière de recettes de l’Union à un seul État membre, on peut en revanche aisément imaginer des circonstances dans lesquelles les objectifs de l’audit sont susceptibles d’être intégralement réalisés par les institutions de contrôle nationales de sorte qu’un contrôle direct par la Cour des comptes serait contraire au principe de subsidiarité. Dans un tel cas de figure, la Cour des comptes devrait d’abord saisir l’institution nationale compétente en lui demandant d’effectuer le contrôle envisagé et de communiquer les résultats d’audit ainsi que toute information pertinente. Dans l’hypothèse où l’institution de contrôle nationale s’opposerait à un tel contrôle ou si la Cour des comptes n’approuvait pas les résultats du contrôle national, la Cour des comptes pourrait ensuite procéder elle-même au contrôle sans enfreindre le principe de subsidiarité. En effet, dans ce cas, le refus de l’institution de contrôle nationale d’effectuer ce contrôle, ou les résultats insuffisants – aux yeux de la Cour des comptes – du contrôle national confirmeraient clairement que les objectifs de l’audit en question en matière de recettes de l’Union ne peuvent précisément pas être réalisés de manière suffisante au niveau des États membres.

84.      Lors de l’audience, interrogé sur le principe de subsidiarité, le Parlement a fait valoir que ce principe est au fond axé sur l’action du législateur de l’Union et ne trouve dès lors à s’appliquer que dans le contexte de l’adoption d’actes contraignants par les institutions de l’Union. Or, puisque la Cour des comptes ne dispose pas de pouvoirs de décision, mais exerce simplement les pouvoirs de contrôle qui lui ont été conférés, le Parlement estime que le principe de subsidiarité n’est normalement pas applicable en ce qui concerne la Cour des comptes.

85.      Ce raisonnement n’emporte pas notre conviction. Bien que les conditions d’application du principe de subsidiarité concernent en premier lieu des activités normatives, ce principe vise normalement l’Union et, partant, toutes les institutions de l’Union, et ce quelle que soit la fonction que les institutions concernées exercent. La seule restriction que le traité CE apporte au champ d’application de ce principe a trait à la nature des compétences exercées par les institutions de l’Union. En effet, en vertu de l’article 5, deuxième alinéa, CE, les institutions de l’Union ne sont pas tenues de respecter le principe de subsidiarité que lorsqu’elles interviennent dans un domaine entrant dans les compétences exclusives de l’Union (41).

86.      Étant donné que, par l’audit en cause, la Cour des comptes n’est pas intervenue dans un domaine qui relève des compétences exclusives de l’Union, elle était dès lors tenue de respecter le principe de subsidiarité lors de la réalisation de cet audit (42).

ii)    Le principe de proportionnalité

87.      Selon l’article 5, troisième alinéa, CE, l’action de l’Union n’excède pas ce qui est nécessaire pour atteindre les objectifs du présent traité. Conformément au principe de proportionnalité ainsi formulé qui, selon une jurisprudence constante, est également considéré comme faisant partie des principes généraux du droit de l’Union, les actes des institutions ne doivent pas dépasser les limites de ce qui est approprié et nécessaire à la réalisation des objectifs légitimes poursuivis par la mesure en cause, étant entendu que, lorsqu’un choix s’offre entre plusieurs mesures appropriées, il convient de recourir à la moins contraignante, et que les inconvénients causés ne doivent pas être démesurés par rapport aux buts visés (43).

88.      En ce qui concerne l’applicabilité du principe de proportionnalité à l’action de la Cour des comptes, nous nous permettons de renvoyer à nos observations ci-dessus relatives à l’applicabilité du principe de subsidiarité. En effet, dans l’ordonnancement des compétences de l’Union, le principe de proportionnalité s’analyse également comme une limite à l’exercice des compétences dont l’applicabilité aux actes de la Cour des comptes peut d’ailleurs être directement inférée du point 1 du protocole (n° 30) sur l’application des principes de subsidiarité et de proportionnalité.

89.      Lors de l’audience, interrogés sur le principe de proportionnalité, la Commission, le Parlement et la Cour des comptes se sont prononcés contre une application de ce principe à l’action de la Cour des comptes. À cet égard, le Parlement a fait valoir que ledit principe ne vaut qu’en ce qui concerne les actes législatifs. La Cour des comptes a, quant à elle, souligné qu’il n’existe pas de règle de minimis pour l’exercice de ses compétences de contrôle.

90.      Ces arguments n’emportent pas la conviction. Bien que les questions cruciales d’une intervention démesurée dans la sphère de compétence des États membres devraient, en pratique, se poser principalement pour des actes juridiques contraignants de l’Union, le champ d’application du principe de proportionnalité s’étend à toute l’action de l’Union (44). La Cour des comptes est dès lors, elle aussi, tenue de respecter ce principe dans l’exercice de ses compétences.

91.      Ainsi que nous l’avons déjà expliqué en d’autres occasions, dans le cadre du contrôle juridictionnel du respect du principe de proportionnalité par les institutions de l’Union, il convient en principe de s’appuyer sur un examen en trois étapes (45), où il faudra vérifier, premièrement, le caractère approprié, deuxièmement, le caractère nécessaire et, troisièmement, le caractère non démesuré des actes en cause.

92.      En conclusion, il convient dès lors de considérer que l’action de la Cour des comptes doit également être appréciée à l’aune du principe de proportionnalité. Il y aurait lieu de constater une violation de ce principe notamment en cas de caractère inapproprié, non nécessaire ou démesuré de cette action au regard des objectifs visés.

2.      Les critères de contrôle pour la vérification des comptes par la Cour des comptes

93.      Les critères d’appréciation que la Cour des comptes peut utiliser dans l’exercice de ses compétences de contrôle sont énumérés à l’article 248, paragraphe 2, CE. Aux termes de cette disposition, la Cour des comptes examine (1) la légalité et (2) la régularité des recettes et des dépenses et (3) s’assure de la bonne gestion financière, en (4) signalant toute irrégularité.

94.      En pratique, la Cour des comptes ne fait en règle générale pas de distinction formelle entre le contrôle de la légalité et celui de la régularité des recettes et des dépenses de l’Union (46). Si tant est qu’il faille distinguer ces deux notions, par contrôle de la régularité, il y a lieu en général de comprendre le contrôle de l’exactitude comptable des écritures budgétaires, le contrôle de la légalité consistant alors à vérifier la conformité de l’objet du contrôle avec le droit de l’Union pertinent (47).

95.      Le contrôle de la bonne gestion financière porte en substance sur le rapport entre l’objectif poursuivi par l’action contrôlée et les moyens utilisés. À cet effet, il est notamment examiné si les meilleurs moyens ont été mis en œuvre pour atteindre les objectifs visés (48). Bien que, selon une conception traditionnelle, un contrôle de la bonne gestion financière s’effectue en principe par rapport aux dépenses de l’Union (49), il nous semble qu’un contrôle de la gestion financière au sens de l’article 248, paragraphe 2, CE est également possible en ce qui concerne les recettes de l’Union. C’est ce qui résulte notamment de l’économie de l’article 248 CE, le paragraphe 1 de cet article définissant la mission de contrôle de la Cour des comptes et le paragraphe 2 établissant les critères d’examen à appliquer dans ce contexte (50). Étant donné que la mission de contrôle de la Cour des comptes concerne, en vertu de l’article 248, paragraphe 1, CE, tant les dépenses que les recettes de l’Union, il n’existe aucune raison logique de limiter aux dépenses de l’Union les vérifications sur la base du critère de la bonne gestion financière prévu à l’article 248, paragraphe 2, CE.

96.      Dans le cadre de son examen des finances de l’Union, la Cour des comptes doit en outre signaler toute irrégularité. Par «irrégularité», il convient d’entendre, dans ce contexte, des atteintes à la légalité, à la régularité et à la bonne gestion, qui affectent les recettes ou les dépenses de l’Union (51).

3.      Conclusion provisoire

97.      Eu égard aux considérations qui précèdent, nous parvenons à la conclusion que la Cour des comptes est en principe habilitée à examiner tous les actes des institutions et des États membres de l’Union qui présentent un lien direct suffisant avec les recettes ou les dépenses de l’Union. Dans ce contexte, l’action d’un État membre ne peut cependant devenir l’objet principal d’un contrôle de la Cour des comptes que si elle relève du droit de l’Union. Tel est notamment le cas lorsque les États membres sont tenus de satisfaire aux exigences du droit de l’Union dans le cadre de l’adoption ou de la détermination des règles, des procédures, des opérations ou des décisions examinées.

98.      Dans l’exercice de ses compétences de contrôle, la Cour des comptes doit respecter tant le principe de subsidiarité que le principe de proportionnalité. Dans le cadre de ses vérifications, la Cour des comptes peut examiner tant la légalité et la régularité des actes contrôlés que l’efficience de ces actes et signaler, dans ce contexte, toute irrégularité.

D –    Compétence de la Cour des comptes pour vérifier la coopération entre les autorités administratives nationales dans le domaine de la taxe sur la valeur ajoutée au titre du règlement n° 1798/2003

99.      Il résulte de nos observations ci-dessus qu’une acceptation de la compétence de la Cour des comptes pour vérifier la coopération entre les autorités administratives nationales dans le domaine de la taxe sur la valeur ajoutée suppose que cet objet de l’audit présente un lien direct suffisant avec les finances de l’Union et qu’il relève du champ d’application du droit de l’Union.

100. Il est facile d’apporter une réponse affirmative à la question de savoir si la coopération des autorités administratives nationales dans le domaine de la taxe sur la valeur ajoutée qui est examinée par la Cour des comptes entre dans le champ d’application du droit de l’Union. En effet, l’audit en question a pour objectif de vérifier cette coopération «au titre du règlement n° 1798/2003». Il en résulte directement que la coopération administrative examinée relève en principe du champ d’application de l’Union.

101. L’existence d’un lien direct suffisant entre le domaine d’audit et les recettes ou les dépenses de l’Union est dès lors déterminante pour répondre à la question de savoir si la Cour des comptes est habilitée à effectuer le contrôle en question. Dans un premier temps, nous examinerons si un tel lien existe. Étant d’avis qu’il convient d’admettre l’existence d’un lien direct suffisant avec les finances de l’Union, nous aborderons ensuite le point de savoir si la Cour des comptes a respecté le principe de subsidiarité et le principe de proportionnalité lors de son audit. Ce faisant, nous nous pencherons également sur les critiques qui ont été émises par le gouvernement allemand à l’égard de certaines observations de la Cour des comptes figurant dans son rapport spécial n° 8/2007.

1.      Le contrôle de la coopération entre les autorités administratives nationales dans le domaine de la taxe sur la valeur ajoutée au titre du règlement n° 1798/2003 présente un lien direct suffisant avec les recettes de l’Union

102. Dans le cadre de l’examen du point de savoir si l’audit en cause de la Cour des comptes présente un lien direct suffisant avec les finances de l’Union, il convient, en premier lieu, de rejeter comme irrecevable l’argument de la Commission selon lequel cet audit concerne des dépenses de l’Union.

103. Certes, il est désormais constant entre les parties que la conception et le fonctionnement de certains systèmes d’information qui ont été introduits aux fins de la mise en œuvre et de la réalisation dans les États membres de la coopération prévue dans le règlement n° 1798/2003 ont été (co)financés par le budget de l’Union, de sorte que ces dépenses peuvent en principe faire l’objet d’un contrôle de la Cour des comptes. Toutefois, le gouvernement allemand souligne à bon droit que la Commission a soulevé ce moyen non pas dans la requête, mais seulement dans le mémoire en réplique. Pour ce seul motif déjà, il y a lieu de rejeter cet argument de la Commission comme irrecevable en vertu de l’article 42, paragraphe 2, du règlement de procédure.

104. En l’espèce, il reste dès lors à vérifier si l’audit prévu par la Cour des comptes et rejeté par la République fédérale d’Allemagne en ce qui concerne la coopération entre les autorités administratives nationales dans le domaine de la taxe sur la valeur ajoutée présente un lien direct suffisant avec les recettes de l’Union.

105. Selon nous, cette question appelle en définitive une réponse affirmative.

106. À cet égard, rappelons tout d’abord que le système de coopération administrative dans le domaine de la taxe sur la valeur ajoutée, tel que prévu dans le règlement n° 1798/2003, vise en substance à lutter contre la pratique de la fraude et de l’évasion fiscales par-delà les frontières des États membres, dans la mesure où l’échange d’informations entre les États membres est indispensable à une bonne application des règles en matière de taxe sur la valeur ajoutée (52). Dans ce contexte, la Cour des comptes a notamment voulu savoir si les États membres participant à l’audit avaient mis en place les structures administratives et organisationnelles afin d’assurer la coopération entre les autorités administratives prévue par le règlement n° 1798/2003. La Cour des comptes voulait en outre examiner et évaluer à l’aide d’un échantillon de plusieurs demandes concrètes d’informations le déroulement pratique de l’«échange d’informations sur demande» prévu aux articles 5 et suivants dudit règlement, entre les autorités compétentes des États membres participant à l’audit (53).

107. Par conséquent, l’audit de la Cour des comptes porte sur la mise en œuvre juridique et pratique de dispositions du droit de l’Union relatives à l’amélioration de l’échange d’informations entre les autorités administratives nationales dans le domaine de la taxe sur la valeur ajoutée. Étant donné que cette coopération vise en définitive l’établissement correct de la TVA qui est due aux États membres sur les livraisons de biens et les prestations de services transfrontalières ainsi que sur les acquisitions intracommunautaires de biens et l’importation de biens, l’audit concerne, ainsi que la République fédérale d’Allemagne l’a relevé à juste titre, en premier lieu les intérêts financiers des États membres concernés. En effet, un recul de la fraude et de l’évasion fiscales en matière de taxe sur la valeur ajoutée se traduit en définitive par des recettes de TVA plus élevées pour les États membres.

108. Toutefois, il résulte également de la description que nous avons faite plus haut du système des ressources propres de l’Union que le niveau des recettes de TVA des États membres influe de plusieurs manières sur ledit système. Étant donné que l’assiette des ressources propres TVA pertinente pour chaque État membre est calculée à partir des recettes de TVA effectives de chaque État membre, une augmentation des recettes de TVA nationales entraîne en principe automatiquement une augmentation des recettes propres TVA qui sont dues par cet État membre à l’Union (54). À dépenses constantes, une telle augmentation des recettes propres TVA aboutit en outre à une baisse des ressources propres RNB nécessaires pour assurer le financement du budget de l’Union européenne (55).

109. Dans ce contexte, il faut bien entendu toujours garder à l’esprit que les recettes de TVA plus élevées d’un État membre n’ont une incidence sur le montant des ressources propres TVA dues par cet État membre que si aucun écrêtement de l’assiette des ressources propres TVA n’est opéré (56). Cette exception n’est cependant pas pertinente en l’espèce. En effet, des problèmes d’ordre structurel ou pratique affectant le fonctionnement d’un bureau central de liaison national influent sur l’établissement correct de la TVA non seulement dans son propre État, mais également dans tous les autres États membres qui envoient des demandes d’informations à l’État membre concerné.

110. Le lien étroit entre les recettes de TVA des États membres et les ressources propres TVA de l’Union est souligné à plusieurs endroits dans la sixième directive TVA (57). Ainsi, le deuxième considérant de ladite directive indique déjà que le budget de l’Union sera, sans préjudice des autres recettes, intégralement financé par des ressources propres à l’Union, lesquelles comprennent, entre autres, celles provenant de la taxe sur la valeur ajoutée. Les onzième et quatorzième considérants se réfèrent, à cet égard, à la nécessité d’harmoniser les règles de fond en matière de taxe sur la valeur ajoutée pour assurer une perception comparable des ressources propres TVA dans tous les États membres.

111. Dans la jurisprudence de la Cour, le lien étroit existant entre le recouvrement de la taxe sur la valeur ajoutée par les États membres et le versement par ceux-ci des ressources propres TVA à l’Union est également itérativement confirmé.

112. Nous considérons comme particulièrement instructifs à cet égard trois arrêts du 12 septembre 2000 (58), dans lesquels la Cour a confirmé que la non-détermination de la TVA nationale en ce qui concerne des opérations qui, conformément à la sixième directive TVA, sont en principe soumises à la TVA, constitue une infraction de l’État membre compétent pour le recouvrement de la TVA non seulement à ladite directive, mais également, dans la même mesure, à la réglementation de l’Union relative à la perception des ressources propres TVA. À l’appui de son raisonnement, la Cour a notamment souligné que, dans la mesure où une opération relevant de la TVA n’a pas été soumise à celle-ci, les montants correspondants n’ont pas été pris en compte en vue de la détermination de la base des ressources propres TVA. Cela suffit pour retenir une infraction à la réglementation relative au système des ressources propres de l’Union (59).

113. Dans sa jurisprudence plus récente, la Cour a saisi l’occasion offerte par l’examen d’un régime d’amnistie italien en matière de TVA pour, une fois encore, souligner le lien existant entre la réglementation de l’Union relative à la détermination des ressources propres TVA et l’obligation pour les États membres d’assurer la perception correcte de la TVA. Ce faisant, la Cour a tout d’abord précisé que les États membres sont tenus de garantir que les assujettis respectent les obligations qui découlent du système commun de TVA. Bien que la Cour de justice ait reconnu aux États membres une certaine latitude lors de l’utilisation des moyens dont ils disposent, elle a cependant souligné dans le même temps que cette marge de manœuvre est limitée par l’obligation de garantir un prélèvement efficace des ressources propres de l’Union et par l’obligation de ne pas créer de différences significatives dans la manière dont sont traités les assujettis (60). En procédant à cette constatation, la Cour a en définitive expressément confirmé que des obligations précises dans le cadre de la perception de la TVA par les États membres peuvent également découler des obligations concernant la mise à disposition des ressources propres TVA par ces États.

114. Pour résumer, nous constatons dès lors que la coopération entre les autorités administratives nationales dans le domaine de la taxe sur la valeur ajoutée au titre du règlement n° 1798/2003 sert à la détermination régulière de la taxe sur la valeur ajoutée dans les États membres, étant précisé qu’il devrait y avoir un recul de l’évasion et de la fraude fiscales en matière de TVA et, partant, une augmentation des recettes de TVA nationales. Compte tenu notamment de la circonstance que la Cour a confirmé, dans une jurisprudence constante, la relation directe existant entre les recettes de TVA des États membres et les ressources propres TVA de l’Union, on ne saurait raisonnablement contester que la coopération entre les autorités administratives nationales dans le domaine de la taxe sur la valeur ajoutée au titre du règlement n° 1798/2003 présente un lien direct suffisant avec les recettes de l’Union. Étant donné que cette coopération relève, en outre, du champ d’application du droit de l’Union, elle peut, en principe, faire l’objet d’un audit de la Cour des comptes.

115. Eu égard aux développements qui précèdent, nous concluons qu’il convient de considérer le contrôle en question de la coopération entre les autorités administratives nationales dans le domaine de la taxe sur la valeur ajoutée au titre du règlement n° 1798/2003 comme un contrôle dans le domaine des recettes de l’Union, relevant en principe des compétences de contrôle de la Cour des comptes en vertu de l’article 248, paragraphes 1 et 2, CE ainsi que de l’article 140, paragraphe 1, du règlement n° 1605/2002.

2.      Sur le respect du principe de subsidiarité et du principe de proportionnalité

116. Ayant constaté que la Cour des comptes était habilitée à effectuer le contrôle en cause, il reste à présent à vérifier si ce pouvoir de contrôle a bien été exercé en conformité avec le droit de l’Union. À cet égard, nous examinerons d’abord si l’audit en cause est compatible avec le principe de subsidiarité. Nous aborderons ensuite le caractère proportionné de ce contrôle.

a)      Sur le respect du principe de subsidiarité

117. Étant donné que, en procédant au contrôle en question, la Cour des comptes n’intervient pas dans un domaine relevant des compétences exclusives de l’Union, elle est tenue de respecter le principe de subsidiarité lors de la mise en œuvre dudit contrôle (61). Le dossier ne renferme cependant aucun élément qui permettrait de conclure que la Cour des comptes a méconnu ce principe lors de l’audit en cause.

118. Dans le cadre de la préparation du contrôle, la Cour des comptes a informé la République fédérale d’Allemagne (62) qu’elle avait l’intention de vérifier si les États membres participant à l’audit avaient mis en place les structures administratives et organisationnelles en vue d’assurer la coopération entre les autorités administratives prévue par le règlement n° 1798/2003. La Cour des comptes souhaitait en outre examiner et évaluer, à partir de l’exemple de plusieurs demandes d’échange concrètes, le déroulement pratique de l’«échange d’informations sur demande», qui est régi aux articles 5 et suivants dudit règlement, entre les autorités compétentes des États membres participant à l’audit.

119. Confrontée aux réserves du gouvernement allemand, la Cour des comptes, par lettre du 9 novembre 2006 adressée au ministre fédéral des Finances (63), a indiqué qu’il était prévu d’examiner un échantillon de demandes d’informations faites par le bureau central de liaison et/ou reçues d’autres États membres en 2005 afin d’évaluer la coopération administrative dans la pratique en cas de demandes d’informations. Les opérations imposables (et la bonne application de la taxe sur la valeur ajoutée) proprement dites, dans la mesure où elles pouvaient ressortir des documents à examiner, ne faisaient pas l’objet du contrôle. Il s’agissait plutôt de vérifier l’efficacité et l’effectivité de la coopération administrative. Les résultats du contrôle devaient permettre de tirer des conclusions en vue d’une lutte plus efficace contre l’évasion et la fraude fiscales en matière de taxe sur la valeur ajoutée.

120. Compte tenu notamment des aspects transfrontaliers du domaine d’audit, de la procédure de contrôle ainsi que des objectifs de l’audit, il est clair que le contrôle en question ne pouvait pas raisonnablement être préparé et réalisé ni par les cours des comptes nationales ni par d’autres instances nationales de contrôle.

121. La procédure prévue à l’article 35 du règlement n° 1798/2003 en vue de l’examen et de l’évaluation de ce règlement par la Commission en collaboration avec les États membres ne représente pas non plus, dans ce contexte, une alternative pleinement valable à un contrôle par la Cour des comptes de la coopération des autorités administratives concernées. En effet, la procédure prévue à l’article 35 du règlement n° 1798/2003 ne permet guère de réaliser de façon centralisée et systématique un contrôle et une évaluation de la coopération transfrontalière entre les différentes autorités administratives nationales, l’échange d’informations pertinent étant, entre autres, contrôlé et évalué grâce à plusieurs échantillons.

122. Eu égard aux développements qui précèdent, nous concluons que le principe de subsidiarité ne s’oppose pas à la réalisation de l’audit en cause en l’espèce par la Cour des comptes.

b)      Sur le respect du principe de proportionnalité

123. Par le biais de l’audit qui nous occupe en l’espèce, la Cour des comptes voulait analyser certains aspects tant structurels que pratiques de la coopération administrative au sens du règlement n° 1798/2003 afin d’en tirer des conclusions en vue d’une lutte plus efficace contre l’évasion et la fraude fiscales en matière de taxe sur la valeur ajoutée. Cet audit avait pour objectif d’évaluer si les échanges d’informations entre États membres étaient réalisés en temps opportun et de manière efficace, et si des structures et des procédures administratives appropriées étaient en place pour soutenir la coopération administrative (64).

124. Il résulte de la description des objectifs de l’audit ainsi que des éléments d’information figurant au dossier que la Cour des comptes avait l’intention de contrôler la coopération des autorités administratives en substance sur la base des critères de la «légalité» ainsi que de la «bonne gestion financière» fixés à l’article 248, paragraphe 2, CE (65).

125. À cet égard, le programme de visite transmis à la Cour des comptes fédérale le 7 septembre 2006, dans lequel la Cour des comptes énumérait les domaines thématiques qui devaient être abordés dans le cadre de la visite d’audit envisagée auprès du bureau central de liaison, est particulièrement révélateur (66). Il ressort notamment de ce programme que, d’une part, dans le cadre d’un contrôle de la légalité, la Cour des comptes souhaitait vérifier si la République fédérale d’Allemagne, en application des dispositions du règlement n° 1798/2003, avait mis en place un bureau central de liaison et si les échanges d’informations réalisés entre les autorités administratives satisfaisaient aux exigences de ce règlement. D’autre part, dans le cadre d’un contrôle de la bonne gestion financière, la Cour des comptes souhaitait examiner s’il était possible d’organiser de manière plus efficace la coopération entre les autorités administratives.

126. Dans le cadre du contrôle ainsi organisé de la coopération administrative, la Cour des comptes est tenue de respecter le principe de proportionnalité. Ce principe exige notamment que les différentes procédures d’audit soient appropriées, nécessaires et adéquates pour atteindre les objectifs de l’audit (67).

127. Selon la jurisprudence de la Cour, une mesure est appropriée à la réalisation de l’objectif invoqué si elle répond véritablement au souci de l’atteindre d’une manière cohérente et systématique (68). Une mesure est nécessaire lorsqu’elle est, parmi plusieurs mesures appropriées à la réalisation de l’objectif poursuivi, la moins contraignante pour l’intérêt ou le bien concerné (69). On se trouve en présence d’une restriction démesurée à l’égard des intérêts ou des biens concernés lorsque la mesure, malgré la contribution qu’elle apporte à la réalisation des objectifs qu’elle poursuit légitimement, conduit à porter excessivement atteinte à ces intérêts ou biens.

128. Quant au caractère approprié de l’audit en cause à la réalisation des objectifs que celui-ci poursuit, il est clair, selon nous, que les procédures d’audit de la Cour des comptes visaient à soumettre les aspects tant structurels que pratiques de la coopération administrative à un contrôle cohérent et systématique. L’audit est, par conséquent, approprié à la réalisation de l’objectif qu’il poursuit, consistant à analyser la légalité et l’efficience des échanges d’informations entre États membres ainsi que des structures et des procédures administratives mises en place à cet effet.

129. Les procédures d’audit de la Cour des comptes sont, selon nous, également nécessaires pour atteindre ces objectifs. On ne voit notamment pas comment un audit moins approfondi des administrations des finances nationales ainsi que des différents modes opératoires aurait pu apporter les informations souhaitées.

130. Dans le cadre du contrôle de l’adéquation de l’audit en cause, il convient notamment d’examiner si les procédures d’audit de la Cour des comptes n’ont pas abouti à porter excessivement atteinte à la sphère de compétence des États membres concernés.

131. Par l’audit qui nous occupe en l’espèce, la Cour des comptes souhaitait, d’une part, contrôler si la République fédérale d’Allemagne, conformément aux dispositions du règlement n° 1798/2003, avait mis en place un bureau central de liaison et si les échanges d’informations réalisés entre les autorités administratives répondaient aux exigences de ce règlement. Elle souhaitait, d’autre part, examiner s’il était possible d’organiser de manière plus efficace la coopération entre les autorités administratives. Bien que ce contrôle de l’efficience de procédures administratives concrètes implique une analyse critique de décisions des États membres qui relèvent de l’autonomie administrative nationale, le dossier ne comporte aucun élément qui soit susceptible de rendre les différentes procédures d’audit inadéquates dans le cadre global du contrôle en cause.

132. Ces considérations relatives à la proportionnalité de l’action de la Cour des comptes dans le contexte de l’audit dont il s’agit peuvent être illustrées à l’aide d’une analyse des critiques que le gouvernement allemand a émises à l’égard de différentes constatations de la Cour des comptes consignées dans son rapport spécial n° 8/2007.

133. Selon le gouvernement allemand, le rapport spécial n° 8/2007 comporte des appréciations du mode d’organisation ainsi que des compétences juridiques des administrations des finances dans les différents États membres qui constituent une ingérence inadmissible et, partant, disproportionnée, dans les compétences des États membres. À cet égard, le gouvernement allemand critique notamment le fait que, aux points 38 et suivants de son rapport spécial, la Cour des comptes a abordé la structure organisationnelle des bureaux centraux de liaison dans les États membres examinés et constaté, entre autres, que les tâches du bureau central de liaison allemand ont été réparties entre trois unités du bureau fiscal fédéral central, l’une basée à Bonn, les deux autres à Saarlouis (70). Le gouvernement allemand se plaint en outre de ce que, aux points 22 et suivants du rapport spécial, la Cour des comptes constate que les États membres n’ont pas suffisamment exploité les possibilités offertes, de manière facultative, par le règlement n° 1798/2003 en matière de déconcentration.

134. Les critiques du gouvernement allemand concernant la proportionnalité de l’action de la Cour des comptes n’emportent pas la conviction.

135. Si le gouvernement allemand souligne à juste titre que, en analysant le mode d’organisation ainsi que les compétences juridiques des administrations des finances nationales, la Cour des comptes a contrôlé des décisions des États membres concernés qui ne peuvent pas soulever d’objections au regard du droit de l’Union, on ne saurait cependant en inférer que la Cour des comptes aurait exercé de façon disproportionnée les compétences de contrôle qui lui sont conférées.

136. Il convient notamment de souligner, à cet égard, que les déclarations concernant la déconcentration insuffisante tendent à expliquer pourquoi les possibilités d’échanges d’informations entre les États membres au sens de l’article 5 du règlement n° 1798/2003 ne sont pas exploitées de manière particulièrement intense (71). L’analyse de la structure organisationnelle du bureau central de liaison allemand s’inscrit quant à elle dans le cadre de l’examen de la constatation que la moitié des demandes d’informations au titre de l’article 5 du règlement n° 1798/2003 font l’objet d’une réponse tardive (72). La Cour des comptes note à cet égard que, dans certains États membres où le nombre de réponses tardives est très élevé, les retards et les problèmes en matière de contrôle sont également dus à la complexité de la structure organisationnelle (73). La République italienne, le Royaume des Pays-Bas ainsi que la République fédérale d’Allemagne sont cités à titre d’exemples d’États membres présentant une complexité de la structure organisationnelle (74).

137. Il résulte clairement des éléments qui viennent d’être exposés que l’analyse, qui est critiquée par le gouvernement allemand, du mode d’organisation ainsi que des compétences juridiques des administrations des finances nationales sert d’une manière cohérente et systématique l’objectif de l’audit consistant à évaluer les échanges d’informations entre les États membres, ainsi que les structures et les procédures administratives mises en place à cet effet, du point de vue de leur efficacité. Compte tenu de cet objectif d’audit, ces analyses de la Cour des comptes sont également nécessaires pour interpréter et expliquer les insuffisances objectivement constatées dans la coopération entre les autorités administratives.

138. Notamment eu égard au fait que les constatations de la Cour des comptes qui sont contestées par le gouvernement allemand font partie d’un audit de la performance, la Cour des comptes soulignant à différents endroits la conformité au droit de l’Union des décisions critiquées (75) et clarifiant ainsi qu’aucun grief au regard du droit de l’Union ne saurait être tiré de ces analyses à l’encontre des États membres concernés, lesdites constatations ne constituent pas non plus une intervention démesurée de la Cour des comptes dans la sphère de compétence des États membres (76).

139. Dans ces conditions, il est incontestable, selon nous, que l’analyse de la répartition des compétences entre les différents services administratifs nationaux, ainsi que de la structure organisationnelle des bureaux centraux de liaison, que la Cour des comptes a effectuée par le biais d’un audit de la performance est également proportionnée.

140. Sur la base de ces considérations, nous parvenons à la conclusion que la Cour des comptes a respecté le principe de proportionnalité tant au niveau de la conception générale qu’au niveau de l’organisation concrète, de la réalisation ainsi que du résultat de son contrôle de la coopération administrative dans le domaine de la taxe sur la valeur ajoutée au titre du règlement n° 1798/2003.

E –    Sur le manquement de la République fédérale d’Allemagne aux obligations de coopération qui lui incombent envers la Cour des comptes

141. Lorsque, comme en l’espèce, la Cour des comptes décide, dans l’exercice des compétences qui lui sont conférées et dans le respect des principes de subsidiarité et de proportionnalité, de procéder à un contrôle de la coopération entre les autorités administratives nationales dans le domaine de la taxe sur la valeur ajoutée, les États membres sont tenus à une obligation de coopération loyale avec la Cour des comptes.

142. Les devoirs de coopération correspondants des États membres découlent tout d’abord des dispositions spécifiques de l’article 248, paragraphe 3, CE (77). En vertu de l’article 248, paragraphe 3, premier alinéa, CE, le contrôle a lieu sur pièces et, au besoin, sur place dans les États membres, en liaison avec les institutions de contrôle nationales ou, si celles-ci ne disposent pas des compétences nécessaires, avec les services nationaux compétents. La Cour des comptes et les institutions de contrôle nationales des États membres doivent pratiquer une coopération empreinte de confiance et respectueuse de leur indépendance. Selon l’article 248, paragraphe 3, deuxième alinéa, CE, tout document ou toute information nécessaire à l’accomplissement de la mission de la Cour des comptes est communiqué à celle-ci, sur sa demande, par les institutions de contrôle nationales ou, si celles-ci ne disposent pas des compétences nécessaires, par les services nationaux compétents.

143. En plus des devoirs de coopération expressément prévus à l’article 248, paragraphe 3, CE, les États membres sont en outre soumis à l’obligation générale de coopération loyale avec la Cour des comptes en vertu des dispositions combinées des articles 10 CE et 248, paragraphes 1 et 2, CE.

144. Le règlement n° 1605/2002, qui a été adopté sur le fondement de l’article 279 CE, comporte également, dans ce contexte, des règles concernant la coopération entre les États membres et la Cour des comptes. Ainsi, l’article 140, paragraphe 2, de ce règlement dispose que le contrôle dans les États membres s’effectue en liaison avec les institutions de contrôle nationales ou, si celles-ci ne disposent pas des compétences nécessaires, avec les services nationaux compétents, et que la Cour des comptes et les institutions de contrôle nationales pratiquent une coopération empreinte de confiance et respectueuse de leur indépendance.

145. Compte tenu de ces prescriptions du droit de l’Union, le refus du bureau central de liaison allemand, du ministère fédéral des Finances ainsi que de la Cour des comptes fédérale de permettre à la Cour des comptes d’effectuer l’audit en cause et de l’aider à cet effet s’analyse, ainsi que la Commission l’a fait valoir dans sa requête, comme une infraction de la République fédérale d’Allemagne à l’article 10 CE, lu en combinaison avec les articles 248, paragraphes 1 et 2, CE, 248, paragraphe 3, CE, et à l’article 140, paragraphe 2, du règlement n° 1605/2002.

146. Dans son recours, la Commission reproche cependant également à la République fédérale d’Allemagne d’avoir violé l’article 142, paragraphe 1, du règlement n° 1605/2002, aux termes duquel la Commission, les autres institutions, les organismes gérant des recettes ou des dépenses au nom des Communautés, ainsi que les bénéficiaires finaux de paiements effectués sur le budget, apportent à la Cour des comptes toutes les facilités et lui donnent tous les renseignements dont celle-ci estime avoir besoin dans l’accomplissement de sa mission.

147. Il résulte des faits que ce moyen peut seulement être compris en ce sens que des organismes gérant des recettes au nom de l’Union auraient refusé une coopération loyale à la Cour des comptes. La Commission n’a cependant pas expliqué quels organismes allemands pourraient, dans le contexte de la demande d’audit de la Cour des comptes, être considérés comme «gérant des recettes au nom de l’Union». Compte tenu notamment de ce que, malgré l’harmonisation dans ce domaine, la taxe sur la valeur ajoutée s’analyse comme une taxe nationale qui est en principe perçue conformément aux dispositions nationales (78), ni le bureau central de liaison ni le ministère fédéral des Finances ne sauraient, dans ce contexte, être considérés d’emblée comme des organismes qui gèrent des recettes au nom de l’Union.

148. Étant donné que, dans le cadre d’une procédure en manquement en vertu de l’article 258 TFUE, il incombe à la Commission d’établir le manquement allégué et d’apporter à la Cour tous les éléments nécessaires à l’appréciation de l’affaire (79), et faute pour la Commission d’avoir satisfait à cette obligation en ce qui concerne le manquement invoqué à l’article 142, paragraphe 1, du règlement n° 1605/2002, ce moyen doit être rejeté comme irrecevable.

VIII – Synthèse

149. Pour résumer, nous parvenons à la conclusion que la Cour des comptes est habilitée, en vertu de l’article 248, paragraphes 1 et 2, CE ainsi que de l’article 140, paragraphe 2, du règlement n° 1605/2002, à contrôler la coopération administrative dans le domaine de la taxe sur la valeur ajoutée au titre du règlement n° 1798/2003. Dans l’exercice de cette compétence de contrôle, la Cour des comptes a respecté tant le principe de subsidiarité que le principe de proportionnalité. La République fédérale d’Allemagne était dès lors tenue, en vertu des articles 248, paragraphe 3, CE et 10 CE, lu en combinaison avec l’article 248, paragraphes 1 et 2, CE, ainsi qu’en vertu de l’article 140, paragraphe 2, du règlement n° 1605/2002, de permettre à la Cour des comptes d’effectuer ce contrôle et de lui apporter un soutien loyal, conformément à ce que prévoient ces dispositions.

150. Dans ces conditions, il y a lieu de considérer le refus du bureau central de liaison, du ministre fédéral des Finances et de la Cour des comptes fédérale de permettre à la Cour des comptes d’effectuer le contrôle de la coopération administrative dans le domaine de la taxe sur la valeur ajoutée et de lui apporter leur soutien à cet effet, comme un manquement de la République fédérale d’Allemagne aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 10 CE, lu en combinaison avec l’article 248, paragraphes 1 et 2, CE, de l’article 248, paragraphe 3, CE et de l’article 140, paragraphe 2, du règlement n° 1605/2002.

IX – Sur les dépens

151. Aux termes de l’article 69, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. En l’occurrence, la Commission ayant conclu à la condamnation de la République fédérale d’Allemagne et celle-ci ayant succombé en l’essentiel de ses moyens, il y a lieu de la condamner aux dépens. En vertu de l’article 69, paragraphe 4, du règlement de procédure, les institutions intervenues au litige supportent leurs propres dépens.

X –    Conclusion

152. Eu égard aux considérations qui précèdent, nous proposons à la Cour de statuer comme suit:

«1)      La République fédérale d’Allemagne a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 10 CE, lu en combinaison avec l’article 248, paragraphes 1 et 2, CE, de l’article 248, paragraphe 3, CE et de l’article 140, paragraphe 2, du règlement (CE, Euratom) n° 1605/2002 du Conseil, du 25 juin 2002, portant règlement financier applicable au budget général des Communautés européennes, en refusant de permettre à la Cour des comptes d’effectuer des contrôles, en Allemagne, concernant la coopération administrative entre les États membres dans le domaine de la taxe sur la valeur ajoutée au titre du règlement (CE) n° 1798/2003 du Conseil, du 7 octobre 2003, concernant la coopération administrative dans le domaine de la taxe sur la valeur ajoutée et abrogeant le règlement (CEE) n° 218/92, et de lui apporter son soutien à cet effet.

2)      Le recours est rejeté pour le surplus.

3)      La République fédérale d’Allemagne est condamnée aux dépens.

4)      Le Parlement européen et la Cour des comptes de l’Union européenne supportent leurs propres dépens.»


1 – Langue originale: l’allemand.


2 – Voir, notamment, rapport de la Cour des comptes au groupe de réflexion sur le fonctionnement du traité sur l’Union européenne de 1995 (Revue trimestrielle de droit européen, 1995, p. 689, point 2.6).


3 – Dans ce contexte, il convient de souligner, de manière générale, que le traité de Lisbonne n’a pas visé à une réforme du système des voies de recours dans le droit de l’Union européenne et que le système préexistant a été en substance maintenu dans ses grandes lignes. Voir, sur ce point: Thiele, A., «Das Rechtsschutzsystem nach dem Vertrag von Lissabon – (K)ein Schritt nach vorn?», EuR, 2010, p. 30 à 51. Une possibilité de recours autonome contre les États membres aurait pu être ouverte à la Cour des comptes sans bouleverser la nouvelle structure du TFUE. Ainsi aurait-on pu prévoir à l’article 271 TFUE, en y insérant un nouveau point e), que la Cour des comptes est en droit de former un recours en manquement au titre de l’article 258 TFUE contre un État membre pour violation de ses prérogatives d’accès et de contrôle au sens de l’article 287 TFUE. Voir, à cet égard, Friedrich, C., et Inghelram, J., «Die Klagemöglichkeiten des Europäischen Rechnungshofs vor dem Europäischen Gerichtshof», DÖV, 1999, p. 669, spécialement p. 676.


4 – En nous fondant sur les termes employés dans le TUE et le TFUE, nous utilisons l’expression «droit de l’Union» pour désigner tant le droit communautaire que le droit de l’Union. Les différentes dispositions du droit primaire citées sont celles qui étaient applicables ratione temporis.


5 – JO L 253, p. 42.


6 – JO L 248, p. 1.


7 – JO L 264, p. 1.


8 – JO 2008, C 20, p. 1.


9 – Rapport spécial n° 8/2007, point 14.


10 – Voir, à cet égard, Ekelmans, M., «Cour des comptes», Répertoire de droit communautaire Dalloz (août 2008), point 47.


11 – Bien que l’article 2, paragraphe 1, sous d), de la décision 2000/597 mentionne non pas le RNB, mais plutôt le PNB des États membres, l’article 2, paragraphe 7, de ladite décision précise que, pour l’application de celle-ci, le «PNB» est défini comme le «RNB» pour l’année aux prix du marché, tel qu’il est déterminé par la Commission en application du SEC 95, conformément au règlement (CE) n° 2223/96 du Conseil, du 25 juin 1996, relatif au système européen des comptes nationaux et régionaux dans la Communauté (JO L 310, p. 1). Au quatrième considérant de la décision, cette adaptation terminologique est justifiée par le fait qu’il est opportun d’employer les notions statistiques les plus récentes aux fins des ressources propres.


12 – JO L 155, p. 9. En substance, selon le règlement n° 1553/89, ce calcul s’effectue comme suit: tout d’abord, les recettes de TVA des États membres sont corrigées des dérogations licites des dispositions nationales par rapport aux dispositions uniformes (articles 2, paragraphe 3, et 5). Les recettes nettes de TVA sont ensuite divisées par le taux de TVA national. Si plusieurs taux de TVA sont appliqués dans un État membre, un taux moyen pondéré de la TVA doit être établi à partir de ces taux (articles 3, 4 et 5). L’assiette obtenue à partir du quotient des recettes nettes par le taux moyen pondéré est ensuite corrigée des opérations effectuées dans le cadre des dérogations licites à la sixième directive 77/388/CEE du Conseil, du 17 mai 1977, en matière d’harmonisation des législations des États membres relatives aux taxes sur le chiffre d’affaires – système commun de taxe sur la valeur ajoutée: assiette uniforme (JO L 145, p. 1, articles 2 et 6). Voir Meermagen, B., Beitrags- und Eigenmittelsystem, Munich, 2002, p. 154.


13 – Cette limite supérieure vise à améliorer l’équité de la péréquation financière entre les États membres; voir Hidien, J., «Der Rechtscharakter der Mehrwertsteuer-Einnahmen der EU», EuR, 1997, p. 95, spécialement p. 103.


14 – Le mode de calcul de ce taux est décrit à l’article 2, paragraphe 4, de la décision 2000/597.


15 – Voir, à cet égard, Wilms, G., «Die Reform des EU-Haushaltes im Lichte der Finanziellen Vorschau 2007-2013 und des Vertrages von Lissabon – Neue Perspektiven für die Europäische Union?», EuR, 2007, p. 707, spécialement p. 710.


16 – Ce principe est exprimé à l’article 268, troisième alinéa, CE, aux termes duquel le budget doit être équilibré en recettes et en dépenses.


17 – JO L 130, p. 1, dans la version résultant du règlement (CE, Euratom) n° 2028/2004 du Conseil, du 16 novembre 2004 (JO L 352, p. 1).


18 – L’article 17, paragraphe 2, du règlement n° 1150/2000 prévoit, entre autres, que les États membres sont dispensés de mettre à la disposition de la Commission les droits constatés sur les ressources propres traditionnelles qui s’avèrent irrécouvrables soit pour des raisons de force majeure, soit pour d’autres raisons qui ne leur sont pas imputables.


19 – Voir Meermagen, B., op. cit. (note 12), p. 161.


20 – Rapport de la Commission sur le fonctionnement du système des ressources propres [COM(2004) 505 final, p. 3].


21 – C-392/02, Rec. p. I-9811, points 54 et 60. Voir, également, arrêts du 16 mai 1991, Commission/Pays-Bas (C-96/89, Rec. p. I-2461, point 37); du 15 juin 2000, Commission/Allemagne (C-348/97, Rec. p. I-4429, point 64), et du 17 juin 2010, Commission/Italie (C-423/08, non encore publié au Recueil, point 39).


22 – En ce sens, à juste titre, le Parlement dans sa résolution du 29 mars 2007 sur l’avenir des ressources propres de l’Union européenne (JO C 27 E, p. 214, considérant D).


23 – Voir points 47 et suiv. des présentes conclusions.


24 – Du point de vue de la technique législative, l’article 248 CE est structuré de telle manière que la mission de contrôle de la Cour des comptes est définie au paragraphe 1. Le paragraphe 2 énumère, quant à lui, les critères selon lesquels ces contrôles s’effectuent. Le paragraphe 3 énonce des règles et des normes concrètes en ce qui concerne la mise en œuvre desdits contrôles. Le paragraphe 4 prévoit enfin les règles relatives à la publication des résultats des contrôles effectués. Voir, à cet égard, Inghelram, J., «L’arrêt Ismeri: quelles conséquences pour la Cour des comptes européenne?», Cahiers de droit européen, 2001, p. 707, spécialement p. 709 et suiv., ainsi qu’Engwirda, M. B., et Moonen, A. F. W., «De Europese Rekenkamer: positie, bevoegdheden en toekomstperspectief», SEW, 2000, p. 246, spécialement p. 249 et suiv.


25 – Étant donné que le règlement n° 1605/2002 est fondé sur la base de droit primaire que constitue l’article 279 CE, la question de la primauté du droit dérivé dans le rapport entre l’article 248 CE et l’article 140, paragraphe 1, du règlement n° 1605/2002 ne se pose pas en l’espèce. Sur le principe de primauté du droit dérivé, voir points 99 et suiv. de nos conclusions présentées le 11 février 2010 dans l’affaire Commission/Allemagne (arrêt du 29 avril 2010, C-160/08, Rec. p. I-3713).


26 – Bien que, dans son arrêt du 23 avril 1986, Les Verts/Parlement (294/83, Rec. p. 1339, point 28), la Cour ait constaté de manière générale que la Cour des comptes ne peut qu’examiner la légalité de la dépense par rapport au budget et à l’acte de droit dérivé dont découle cette dépense, cette déclaration, replacée dans le contexte général de cet arrêt, ne saurait être interprétée comme une limitation de principe de la compétence de contrôle de la Cour des comptes à certaines normes du droit de l’Union. À cet égard, l’avocat général Mancini a souligné à juste titre, au point 5 de ses conclusions présentées le 25 mai 1988 dans l’affaire Grèce/Conseil (arrêt du 27 septembre 1988, 204/86, Rec. p. 5323), que la Cour des comptes a le pouvoir de vérifier le respect non seulement des dispositions relatives au budget contenues dans les traités ou dans le règlement financier, mais de toute disposition appartenant à l’ordre juridique communautaire, dans la mesure où elle a une incidence sur les dépenses. En ce sens également: Inghelram, J., «The European Court of Auditors: Current Legal Issues», CMLR, 2000, p. 129, spécialement p. 133 et suiv., ainsi qu’Ekelmans, M., op. cit. (note 10), points 41 et 49.


27 – Voir, à cet égard, Ehlermann, C., Der Europäische Rechnungshof, Nomos, Baden-Baden, 1976, p. 32 et suiv., ainsi que Mageira, S., dans Das Recht der Europäische Union (éditeur Grabitz et Hilf), article 248 CE, point 12 (quarantième mise à jour, octobre 2009).


28 – Sur les critères que la Cour des comptes peut utiliser dans le cadre de l’exercice de ses pouvoirs de contrôle, voir points 93 et suiv. des présentes conclusions.


29 – Cela ne signifie cependant pas que, lors de la conception, de l’organisation et de la mise en œuvre de ses audits, la Cour des comptes doive se cantonner exclusivement à des domaines thématiques relevant du champ d’application du droit de l’Union. Il convient plutôt de considérer que la Cour des comptes, dans le cadre de l’examen d’un domaine d’audit principal – auquel le droit de l’Union s’applique – peut également examiner l’efficience de mesures et de dispositions nationales que les États membres ont prises dans l’exercice de leur souveraineté résiduelle, dans la mesure où un tel examen est approprié, nécessaire et proportionné pour atteindre les objectifs généraux de l’audit. Voir, à cet égard, points 134 et suiv. des présentes conclusions.


30 – À titre d’exemple, voir examen de la Cour des comptes portant sur le financement par la Commission d’actions de lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale (rapport annuel relatif à l’exercice 1995, JO 1996, C 340), à l’issue duquel la Cour des comptes a conclu que le financement de plusieurs projets par le budget de l’Union était dépourvu de base légale (points 6.122 à 6.126). À la suite d’un recours formé par le Royaume-Uni contre la Commission, la Cour, dans son arrêt du 12 mai 1998, Royaume-Uni/Commission (C-106/96, Rec. p. I-2729), est parvenue à la même conclusion et a annulé les décisions en cause de la Commission.


31 – Voir, à cet égard, Ekelmans, M., op. cit. (note 10), point 49.


32 – Aux points 50 et suiv. de ses conclusions présentées le 3 mai 2001 dans l’affaire Ismeri Europa/Cour des comptes (arrêt du 10 juillet 2001, C-315/99 P, Rec. p. I-5281), l’avocat général Ruiz-Jarabo Colomer a rappelé à cet égard que les rapports annuels ou spéciaux de la Cour des comptes contiennent les opinions et les observations de celle-ci sur la gestion financière qu’elle a analysée. Il a notamment souligné que, par leur nature même, les rapports ne sont pas susceptibles de produire directement des droits et obligations dans le chef des institutions ou des organes contrôlés. Ils ne contiennent aucune décision et ne font qu’exprimer une opinion. Dans ces conditions, l’avocat général Ruiz-Jarabo Colomer est, à juste titre, parvenu à la conclusion qu’un rapport de la Cour des comptes ne constitue pas un acte susceptible de produire des effets juridiques vis-à-vis de tiers. Selon la jurisprudence de la Cour, il s’ensuit qu’un tel rapport ne peut pas non plus faire l’objet d’un recours en annulation. En ce sens, voir Inghelram, J., op. cit. (note 24), p. 726 et suiv.


33 – La doctrine souligne à cet égard que, à l’occasion de son entrée en fonction, la Cour des comptes a été décrite par Hans Kutscher, alors président de la Cour de justice, comme la «conscience financière» de l’Union. Voir, entre autres, Inghelram, J., op. cit. (note 3), p. 676.


34 – Sur cette relation entre les activités d’audit/contrôle et de conseil des cours des comptes, voir Freytag, M., Der Europäische Rechnungshof, Nomos, Baden-Baden, 2005, p. 40 et suiv.


35 – Voir, à cet égard, également article 5, premier alinéa, CE, aux termes duquel l’Union agit dans les limites des compétences qui lui sont conférées et des objectifs qui lui sont assignés par le présent traité. Cette compétence de l’Union, qui concerne le rapport vertical entre les États membres et l’Union, commande évidemment aussi les compétences des institutions de l’Union. Sur l’imbrication de la compétence de l’Union et des compétences de ses institutions, voir von Bogdandy et Bast, «Die vertikale Kompetenzordnung der Europäischen Union», EuGRZ ,2001, p. 441, spécialement p. 444 et suiv.


36 – Voir, à cet égard, point 39 des présentes conclusions.


37 – Sur le mode de calcul précis des ressources propres RNB, voir point 54 des présentes conclusions.


38 – Conformément à l’article 311 CE, ce protocole est considéré comme faisant partie du droit de l’Union.


39 – À cet égard voir, notamment, Zuleeg, M., dans Kommentar zum Vertrag über die Europäische Union und zur Gründung der Europäischen Gemeinschaft (éditeur Groeben et Schwarze), volume 1 (sixième édition, Baden-Baden, 2003), article 5 CE, point 26.


40 – Voir, à cet égard, Bast et von Bogdandy, dans Das Recht der Europäischen Union (éditeur Grabitz, Hilf et Nettesheim), article 5 TUE, point 50 (quarante-deuxième mise à jour, septembre 2010), qui soulignent à juste titre dans ce contexte que le principe de subsidiarité s’applique en tant que critère de contrôle lorsque l’Union «intervient», ce qui vise en principe toute action d’une institution ou d’un organisme de l’Union pour laquelle la condition de compétence est exigée.


41 – Voir, à cet égard, Bast et von Bogdandy, op. cit. (note 40), point 53.


42 – Sous l’empire du traité CE, la doctrine dominante considérait en substance comme domaines relevant de la compétence exclusive de l’Union la politique commerciale commune, la fixation du tarif douanier commun, la conservation des ressources halieutiques, le droit interne de l’organisation et le droit procédural ainsi que la politique monétaire (voir Lienbacher, G., dans EU-Kommentar (éditeur Schwarze), deuxième édition, Baden-Baden, 2009, article 5 CE, point 17, avec d’autres références). Depuis l’entrée en vigueur du traité de Lisbonne, les compétences exclusives de l’Union sont désormais énumérées de manière exhaustive à l’article 3 TFUE.


43 – Arrêts du 13 novembre 1990, Fedesa e.a. (C-331/88, Rec. p. I-4023, point 13); du 5 octobre 1994, Crispoltoni e.a. (C-133/93, C-300/93, et C-362/93, Rec. p. I-4863, point 41); du 12 juillet 2001, Jippes e.a. (C-189/01, Rec. p. I-5689, point 81); du 7 septembre 2006, Espagne/Conseil (C-310/04, Rec. p. I-7285, point 97); du 11 juin 2009, Agrana Zucker (C-33/08, Rec. p. I-5035, point 31); du 20 mai 2010, Agrana Zucker (C-365/08, Rec. p. I-4341, point 29), et du 8 juillet 2010, Afton Chemical (C-343/09, non encore publié au Recueil, point 45).


44 – Voir, à cet égard, Bast et von Bogdandy, op. cit. (note 40), point 69.


45 – En ce qui concerne cette structure tripartite du contrôle de proportionnalité, voir, notamment, nos conclusions présentées le 21 janvier 2010 dans l’affaire Agrana Zucker (arrêt du 20 mai 2010, précité à la note 43), point 60; le 24 juin 2010 dans l’affaire Chabo (arrêt du 25 novembre 2010, C-213/09, non encore publié au Recueil), point 67, et le 7 septembre 2010 dans l’affaire AJD Tuna (arrêt du 17 mars 2011, C-221/09, non encore publié au Recueil), point 94. Voir en outre Simon, D., «Le contrôle de proportionnalité exercé par la Cour de justice des Communautés européennes», Petites affiches, 2009, n° 46, p. 17, spécialement p. 20 et suiv. Selon cet auteur, le contrôle de la légitimité des objectifs poursuivis et celui des motifs subjectifs ayant présidé à l’adoption de la mesure en cause constituent, dans certains arrêts, deux étapes de contrôle supplémentaires.


46 – Voir, notamment, Ekelmans, M., op. cit. (note 10), point 42.


47 – En ce sens, Ekelmans, M., op. cit. (note 10), points 41 et suiv., ainsi que Freytag, M., op. cit. (note 34), p. 44. Sur les caractéristiques essentielles des contrôles de légalité effectués par la Cour des comptes, voir points 71 et suiv. des présentes conclusions.


48 – Voir Inghelram, J., article 287 TFUE, dans EU-Verträge: Kommentar nach dem Vertrag von Lissabon (éditeur Lenz et Borchardt), Cologne, 2010, point 5.


49 – Voir, à cet égard, notamment Freytag, M., op. cit. (note 34), p. 44, selon qui le principe de la bonne gestion financière comporte au fond deux dimensions: dans le cadre d’une bonne gestion financière, il faut soit atteindre un résultat optimal moyennant la mise en œuvre prédéterminée de moyens financiers, soit réaliser, avec des charges financières les plus faibles possible, un certain objectif politique au contenu défini.


50 – Voir, sur ce point, note 24 des présentes conclusions.


51 – Mageira, S., op. cit. (note 27), point 11. Voir également, à cet égard, Inghelram, J., op. cit. (note 24), p. 724 et suiv.


52 – À cet égard, voir notamment premier à troisième considérants du règlement n° 1798/2003.


53 – C’est de cette manière que l’objet de l’audit a été présenté dans plusieurs courriers de la Cour des comptes adressés à la Cour des comptes fédérale ainsi qu’au ministère fédéral des Finances. Sur l’échange de lettres entre la Cour des comptes et la République fédérale d’Allemagne, voir points 14 et suiv. des présentes conclusions.


54 – Voir, à cet égard, point 53 des présentes conclusions.


55 – Sur cette corrélation entre le niveau des ressources propres RNB, d’une part, et celui des autres ressources propres, d’autre part, voir point 54 des présentes conclusions.


56 – Voir, à ce sujet, point 53 des présentes conclusions.


57 – Directive 77/388.


58 – Arrêts Commission/France (C-276/97, Rec. p. I-6251); Commission/Irlande (C-358/97, Rec. p. I-6301) et Commission/Royaume-Uni (C-359/97, Rec. p. I-6355).


59 – Voir arrêts précités Commission/France (points 55 et suiv.), Commission/Irlande (points 64 et suiv.) et Commission/Royaume-Uni (points 76 et suiv.).


60 – Arrêt du 17 juillet 2008, Commission/Italie (C-132/06, Rec. p. I-5457, points 37 et suiv.).


61 – Voir points 79 et suiv. des présentes conclusions.


62 – Pour un aperçu de la correspondance échangée entre la Cour des comptes et la République fédérale d’Allemagne, voir points 14 et suiv. des présentes conclusions.


63 – Jointe en annexe 4 de la requête.


64 – En ce sens, expressément, rapport spécial n° 8/2007, point 12.


65 – Voir, à cet égard, points 93 et suiv. des présentes conclusions.


66 – Ce document est joint en annexe au mémoire en intervention de la Cour des comptes. Voir points 15 et suiv. des présentes conclusions.


67 – Voir points 91 et suiv. des présentes conclusions.


68 – Voir arrêts du 17 novembre 2009, Presidente del Consiglio dei Ministri (C-169/08, Rec. p. I-10821, point 42), et du 11 mars 2010, Attanasio Group (C-384/08, Rec. p. I-2055, point 51).


69 – Arrêt du 11 juillet 1989, Schräder (265/87, Rec. p. 2237, point 21).


70 – Bien que la République fédérale d’Allemagne ait refusé à la Cour des comptes de coopérer à l’audit en cause, le rapport spécial n° 8/2007 contient également des déclarations et des observations en ce qui concerne le bureau central de liaison allemand et son efficacité. Ces déclarations et observations sont fondées sur des constatations résultant de missions d’audit effectuées dans d’autres États membres, sur des informations obtenues pendant les missions d’audit effectuées auprès de la Commission, et sur des rapports rendus publics; voir point 22 des présentes conclusions.


71 – Points 19 et suiv. du rapport spécial n° 8/2007.


72 – Ibidem, points 24 et suiv.


73 – Ibidem, point 38.


74 – Ibidem, points 39 à 41.


75 – La Cour des comptes entame son analyse du défaut de transfert de compétences aux services territoriaux en constatant que le transfert territorial qui n’a pas eu lieu constitue une option offerte par le règlement (point 22 du rapport spécial n° 8/2007). Les considérations formulées dans ledit rapport spécial quant à la structure organisationnelle des bureaux centraux de liaison ne vont pas au-delà de la constatation générale que, dans certains États membres visités où le nombre de réponses tardives est très élevé, ces retards sont également dus à la complexité de la structure organisationnelle.


76 – Il importe dès lors que, dans les parties contestées de l’audit, la Cour des comptes a évalué non pas la légalité, mais l’efficience du mode d’organisation ainsi que des compétences juridiques des administrations des finances nationales. En effet, le choix du critère de contrôle que la Cour des comptes applique pour apprécier l’action des États membres se répercute sur l’intensité d’une éventuelle intervention dans la sphère de compétence de l’État membre audité. De toute évidence, un contrôle de la légalité de l’action des États membres est susceptible de constituer une intervention beaucoup plus marquée dans la sphère de compétence des États membres qu’un contrôle de l’efficience de cette action. Alors qu’un contrôle de légalité effectué par la Cour des comptes porte sur le point de savoir si les États membres ont exercé leurs compétences conformément aux prescriptions du droit de l’Union, l’audit de la performance concerne en effet la question – moins grave d’un point de vue purement juridique – de savoir si des mesures nationales sont efficaces, et ce indépendamment de leur conformité au droit de l’Union.


77 – Pour une analyse particulièrement instructive des dispositions de l’article 248, paragraphe 3, CE dans le contexte de la réalisation d’audits par la Cour des comptes dans les États membres, voir Inghelram, J., op. cit. (note 26, p. 138 et suiv.).


78 – Voir point 57 des présentes conclusions.


79 – Voir arrêts du 13 novembre 2007, Commission/Irlande (C-507/03, Rec. p. I-9777, point 33); du 6 octobre 2009, Commission/Suède (C-438/07, Rec. p. I-9517, point 49); du 29 octobre 2009, Commission/Finlande (C-246/08, Rec. p. I-10605, point 52), et du 29 avril 2010, Commission/Allemagne (C-160/08, précité à la note 25, point 116).