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CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. HENRIK SAUGMANDSGAARD ØE

présentées le 6 avril 2016 (1)

Affaire C-24/15

Josef Plöckl

contre

Finanzamt Schrobenhausen

[demande de décision préjudicielle formée par le Finanzgericht München (tribunal des finances de Munich, Allemagne)]

«Renvoi préjudiciel – Fiscalité – Taxe sur la valeur ajoutée – Sixième directive – Article 28 quater, A, sous a) et d) – Transfert intracommunautaire – Exonération – Possibilité pour l’État d’origine de refuser l’exonération en raison de la non-communication du numéro d’identification à la TVA attribué par l’État de destination»





I –    Introduction

1.        Par ordonnance du 4 décembre 2014, parvenue à la Cour le 21 janvier 2015, le Finanzgericht München (tribunal des finances de Munich) a posé une question préjudicielle sur l’interprétation des articles 22, paragraphe 8, et 28 quater, A, sous a), premier alinéa, et d), de la sixième directive 77/388/CEE du Conseil, du 17 mai 1977, en matière d’harmonisation des législations des États membres relatives aux taxes sur le chiffre d’affaires – Système commun de taxe sur la valeur ajoutée: assiette uniforme (JO L 145, p. 1), telle que modifiée par la directive 2005/92/CE du Conseil, du 12 décembre 2005 (JO L 345, p. 19) (ci-après la «sixième directive»).

2.        Cette question a été soulevée dans le cadre d’un litige opposant M. Plöckl au Finanzamt Schrobenhausen (service des impôts de Schrobenhausen) au sujet du refus de ce dernier d’exonérer le transfert par M. Plöckl d’un véhicule automobile affecté à son entreprise, du territoire de la République fédérale d’Allemagne vers celui du Royaume d’Espagne, au motif que M. Plöckl ne lui a pas communiqué de numéro d’identification à la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) attribué par ce dernier État.

II – Le cadre juridique

A –    Le droit de l’Union

3.        L’article 411 de la directive 2006/112/CE du Conseil, du 28 novembre 2006, relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée (JO L 347, p. 1) prévoit l’abrogation de la sixième directive.

4.        Aux termes de son article 413, la directive 2006/112 entre en vigueur le 1er janvier 2007. Or, il ressort des éléments factuels communiqués par la juridiction de renvoi que l’opération en cause dans le litige au principal, à savoir le transfert par M. Plöckl d’une voiture affectée à son entreprise de l’Allemagne vers l’Espagne, s’est déroulée le 20 octobre 2006. Partant, la directive 2006/112 n’était pas entrée en vigueur au moment des faits pertinents du litige au principal.

5.        Il résulte de ce qui précède qu’il y a lieu de faire application des dispositions de la sixième directive dans la présente affaire.

6.        L’article 5, paragraphe 1, de la sixième directive définit la notion de «livraison d’un bien» comme étant le transfert du pouvoir de disposer d’un bien corporel comme un propriétaire.

7.        L’article 22 de la sixième directive, dans sa rédaction résultant de l’article 28 nonies de celle-ci, prévoit plusieurs obligations à la charge des redevables portant notamment sur le dépôt de déclarations, la tenue d’une comptabilité, la facturation, le paiement de la TVA ainsi que le dépôt d’un état récapitulatif.

8.        Aux termes de l’article 22, paragraphe 8, de la sixième directive, dans sa rédaction résultant de l’article 28 nonies de celle-ci:

«Les États membres ont la faculté de prévoir d’autres obligations qu’ils jugeraient nécessaires pour assurer l’exacte perception de la [TVA] et pour éviter la fraude, sous réserve du respect de l’égalité de traitement des opérations intérieures et des opérations effectuées entre États membres par des assujettis, et à condition que ces obligations ne donnent pas lieu dans les échanges entre les États membres à des formalités liées au passage d’une frontière.»

9.        L’article 28 bis de la sixième directive est libellé comme suit:

«1.      Sont également soumises à la [TVA]:

a)      les acquisitions intracommunautaires de biens effectuées à titre onéreux à l’intérieur du pays par un assujetti agissant en tant que tel, ou par une personne morale non assujettie, lorsque le vendeur est un assujetti agissant en tant que tel, qui ne bénéficie pas de la franchise de [TVA] prévue à l’article 24 et qui ne relève pas des dispositions prévues à l’article 8, paragraphe 1, point a), deuxième phrase ou à l’article 28 ter, titre B, paragraphe 1.

[...]

3.      Est considérée comme «acquisition intracommunautaire» d’un bien, l’obtention du pouvoir de disposer comme un propriétaire d’un bien meuble corporel expédié ou transporté à destination de l’acquéreur, par le vendeur ou par l’acquéreur ou pour leur compte, vers un État membre autre que celui du départ de l’expédition ou du transport du bien.

[...]

5.      Est assimilé à une livraison de biens effectuée à titre onéreux:

b)      le transfert par un assujetti d’un bien de son entreprise à destination d’un autre État membre.

Est considéré comme transféré à destination d’un autre État membre, tout bien corporel expédié ou transporté, par l’assujetti ou pour son compte, en dehors du territoire visé à l’article 3, mais à l’intérieur de la Communauté, pour les besoins de son entreprise, autres que les besoins de l’une des opérations suivantes:

[...]

6.      Est assimilée à une acquisition intracommunautaire de biens effectuée à titre onéreux l’affectation par un assujetti aux besoins de son entreprise d’un bien expédié ou transporté, par l’assujetti ou pour son compte, à partir d’un autre État membre à l’intérieur duquel le bien a été produit, extrait, transformé, acheté, acquis au sens du paragraphe 1 ou importé par l’assujetti, dans le cadre de son entreprise, dans cet autre État membre.»

10.      L’article 28 quater, A, sous a) et d), de la sixième directive est libellé comme suit:

«Sans préjudice d’autres dispositions communautaires et dans les conditions qu’ils fixent en vue d’assurer l’application correcte et simple des exonérations prévues ci-après et de prévenir toute fraude, évasion ou abus éventuels, les États membres exonèrent:

a)      les livraisons de biens, au sens de l’article 5, expédiés ou transportés, par le vendeur ou par l’acquéreur ou pour leur compte, en dehors du territoire visé à l’article 3 mais à l’intérieur de la Communauté, effectuées pour un autre assujetti, ou pour une personne morale non assujettie, agissant en tant que tel dans un État membre autre que celui du départ de l’expédition ou du transport des biens.

[...]

d)      les livraisons de biens, au sens de l’article 28 bis, paragraphe 5, point b), qui bénéficieraient des exonérations prévues ci-dessus si elles étaient effectuées pour un autre assujetti.»

11.      La juridiction de renvoi cite également le règlement (CE) n° 1798/2003 du Conseil, du 7 octobre 2003, concernant la coopération administrative dans le domaine de la taxe sur la valeur ajoutée et abrogeant le règlement (CEE) n° 218/92 (JO L 264, p. 1), tel que modifié par le règlement (CE) n° 885/2004 du Conseil, du 26 avril 2004, (JO L 168, p. 1, ci-après le «règlement n° 1798/2003»).

12.      Inséré au sein du chapitre IV, intitulé «Échange d’informations sans demande préalable», l’article 17 du règlement n° 1798/2003 énonce:

«Sans préjudice des dispositions des chapitres V et VI, l’autorité compétente de chaque État membre procède à un échange automatique ou à un échange automatique structuré des informations visées à l’article 1er avec l’autorité compétente de tout autre État membre concerné dans les situations suivantes:

1)      lorsque la taxation est censée avoir lieu dans l’État membre de destination et que l’efficacité du système de contrôle dépend nécessairement des informations fournies par l’État membre d’origine;

2)      lorsqu’un État membre a des raisons de penser qu’une infraction à la législation sur la TVA a été commise ou est susceptible d’avoir été commise dans l’autre État membre;

3)      lorsqu’il existe un risque de perte de recettes fiscales dans l’autre État membre.»

13.      Le chapitre V du règlement n° 1798/2003 est intitulé «Stockage et échange d’informations spécifiques aux transactions intracommunautaires». Au sein de ce chapitre, l’article 22, paragraphe 1, de ce règlement dispose:

«Chaque État membre dispose d’une base de données électronique dans laquelle il stocke et traite les informations qu’il recueille conformément à l’article 22, paragraphe 6, point b), dans la version de l’article 28 nonies, de la [sixième directive].

[...]»

14.      Les articles 23 et 24 du règlement n° 1798/2003 régissent les modalités de la communication automatique des informations stockées conformément à l’article 22, lesquelles portent sur les numéros d’identification à la TVA dans chaque État membre ainsi que sur la valeur totale des livraisons intracommunautaires de biens entre deux personnes titulaires de tels numéros.

B –    Le droit allemand

15.      Conformément à l’article 3, paragraphe 1a, première phrase, de la loi relative à la taxe sur le chiffre d’affaires (Umsatzsteuergesetz, ci-après l’«UStG»), dans sa version en vigueur au cours de l’année litigieuse, est assimilé à une «livraison à titre onéreux» le transfert d’un bien de l’entreprise effectué par un entrepreneur du territoire national à destination d’une autre partie du territoire communautaire pour qu’il en dispose, sauf aux fins d’une utilisation simplement temporaire, même si l’entrepreneur a importé le bien à l’intérieur du pays. En application de la deuxième phrase de cette disposition, l’entrepreneur est considéré comme un fournisseur.

16.      En application de l’article 4, point 1, sous b), de l’UStG, les livraisons intracommunautaires sont exonérées.

17.      L’article 6a de l’UStG définit la livraison intracommunautaire, entre autres, comme suit:

«[...]

2.      Le transfert d’un bien assimilé à une livraison est également considéré comme une livraison intracommunautaire […].

3.      L’entrepreneur doit démontrer que les conditions visées aux paragraphes 1 et 2 sont remplies [...]»

18.      L’article 17c du règlement d’application relatif à la taxe sur le chiffre d’affaires (Umsatzsteuer-Durchführungsverordnung), dans sa version en vigueur au cours de l’année litigieuse, impose au fournisseur les obligations suivantes:

«1.      En cas de livraisons intracommunautaires (article 6a, paragraphes 1 et 2, de l’UStG), l’entrepreneur auquel ce règlement s’applique doit établir à l’aide de documents comptables que les conditions de l’exonération fiscale sont réunies, y compris en indiquant le numéro d’identification à la taxe sur le chiffre d’affaires de l’acquéreur. Le respect de ces conditions doit ressortir clairement et de manière aisément vérifiable de la comptabilité.

[...]

3.      Dans les cas de transfert assimilés à une livraison (article 6a, paragraphe 2, de l’UStG), il appartient à l’entrepreneur d’indiquer les éléments suivants:

[...]

2)      l’adresse et le numéro d’identification à la taxe sur le chiffre d’affaires de la partie d’entreprise située dans l’autre État membre;

[...]»

III – Le litige au principal et la question préjudicielle

19.      Au cours de l’année 2006, M. Plöckl a acquis et affecté une nouvelle voiture à son entreprise individuelle «HD Equipment». Le 20 octobre 2006, il a expédié ce véhicule à un revendeur automobile espagnol pour qu’il soit vendu en Espagne. Le 11 juillet 2007, ledit véhicule a été vendu par l’entreprise HD Equipment à l’entreprise espagnole D SL (ci-après «D»).

20.      Dans ses déclarations relatives à la TVA, M. Plöckl n’a déclaré aucun montant au titre de ces opérations pour l’année 2006 et a déclaré une livraison intracommunautaire exonérée pour l’année 2007. Dans sa comptabilité, il a indiqué que le véhicule avait été expédié en Espagne le 20 octobre 2006 (ce qui était attesté par une lettre de voiture CMR) et que celui-ci avait été vendu à D en 2007 (ce qui était attesté par une facture du 11 juillet 2007). M. Plöckl n’a pas communiqué de numéro d’identification à la TVA attribué à son entreprise en Espagne et n’a pas déclaré de chiffre d’affaires en Espagne. Il ressort du dossier transmis par la juridiction de renvoi que la facture communiquée par M. Plöckl mentionnait le numéro d’identification à la TVA de D.

21.      Dans le cadre d’un contrôle sur place, le service des impôts de Schrobenhausen a estimé que les conditions d’exonération au titre d’une livraison intracommunautaire n’étaient pas réunies en 2007 et a émis un avis rectificatif d’imposition à la TVA pour l’année 2007. Au cours de la procédure introduite subséquemment devant le Finanzgericht München (tribunal des finances de Munich), cette juridiction a relevé que le véhicule se trouvait déjà en Espagne en 2007, ce qui a conduit le service des impôts de Schrobenhausen à annuler cet avis de rectification.

22.      À la suite de cette annulation, le service des impôts de Schrobenhausen a rectifié le calcul de la TVA pour l’année 2006, considérant que le transfert du véhicule en 2006 vers l’Espagne était soumis à la TVA et n’était pas exonéré. M. Plöckl a introduit une réclamation contre cette décision, que le service des impôts de Schrobenhausen a rejetée comme étant dépourvue de fondement. Selon ce service, ce transfert n’était pas exonéré de TVA étant donné que M. Plöckl n’avait pas communiqué de numéro d’identification à la TVA attribué à son entreprise en Espagne et n’avait donc pas produit la preuve comptable requise. M. Plöckl a formé un recours contre cette décision.

23.      L’administration fiscale allemande n’a pas informé l’administration fiscale espagnole de la situation.

24.      Selon la juridiction de renvoi, il est constant entre les parties au principal que l’existence d’une fraude est à écarter.

25.      Cette juridiction est d’avis que le transfert du véhicule en 2006 à destination de l’Espagne est soumis à la TVA en tant que transfert par un assujetti d’un bien de son entreprise à destination d’un autre État membre conformément à l’article 28 bis, paragraphe 5, sous b), de la sixième directive. Le lieu de ce transfert se trouverait en Allemagne en application de l’article 8, paragraphe 1, sous a), première phrase, de cette directive.

26.      La juridiction de renvoi exclut l’existence d’une livraison intracommunautaire à D en l’absence d’un lien temporel et matériel suffisant entre le transfert du véhicule vers l’Espagne et sa vente à D. À cet égard, elle souligne que la vente est intervenue plusieurs mois après le transfert et que l’acquéreur n’était pas encore connu au moment de ce transfert.

27.      Par conséquent, il incomberait à cette juridiction de déterminer si le transfert intracommunautaire réalisé par M. Plöckl peut bénéficier de l’exonération prévue à l’article 28 quater, A, sous d), de la sixième directive, au regard notamment de la circonstance qu’il n’aurait pas pris toutes les mesures raisonnables pour communiquer un numéro espagnol d’identification à la TVA attribué par les autorités espagnoles.

28.      La juridiction de renvoi tend à considérer qu’un transfert intracommunautaire se déroulant dans les circonstances telles que décrites ci-dessus doit bénéficier de cette exonération.

29.      La juridiction de renvoi relève que, selon l’article 28 quater, A, sous d), de la sixième directive, est exonéré un transfert intracommunautaire qui bénéficierait de l’exonération prévue à l’article 28 quater, A, sous a), de cette directive, «s’il avait été effectué pour un autre assujetti».

30.      La juridiction de renvoi constate que le transfert intracommunautaire en cause au principal, s’il avait été effectué pour un autre assujetti, remplirait effectivement les conditions établies pour bénéficier de l’exonération prévue à l’article 28 quater, A, sous a), de cette directive. En effet, M. Plöckl, un assujetti, a expédié le véhicule d’Allemagne en Espagne pour continuer à l’utiliser à des fins professionnelles.

31.      Cette juridiction ajoute que, hors l’hypothèse de la fraude, les États membres ne peuvent imposer d’autres conditions que celles établies à l’article 28 quater, A, sous a), de la sixième directive, en particulier quant à l’imposition de l’acquisition intracommunautaire de biens correspondante. Elle cite à cet égard les arrêts Teleos e.a. (C-409/04, EU:C:2007:548, point 70) et VSTR (C-587/10, EU:C:2012:592, points 30 et 55).

32.      Toujours selon cette juridiction, l’affaire au principal ne présente pas d’indices sérieux suggérant l’existence d’une fraude. M. Plöckl aurait simplement commis une erreur de droit en considérant que le transfert du véhicule et la vente subséquente à D constituaient ensemble une livraison intracommunautaire exonérée, ce que reflèterait le contenu de ses déclarations à la TVA et de sa comptabilité. Certes, M. Plöckl aurait dû déclarer un transfert intracommunautaire exonéré en Allemagne ainsi qu’une acquisition intracommunautaire (article 28 bis, paragraphe 6, de la sixième directive) imposable en Espagne (article 28 ter, A, paragraphe 1, de cette directive), laquelle aurait dû être suivie d’une livraison de biens à D imposable en Espagne. Toutefois, l’absence de taxation de l’acquisition intracommunautaire en Espagne ne saurait être constitutive d’une fraude dès lors que M. Plöckl aurait bénéficié d’un droit à déduction de la TVA due en raison de cette acquisition intracommunautaire.

33.      C’est dans ce contexte que la juridiction de renvoi s’interroge sur la possibilité pour l’administration fiscale de refuser le bénéfice d’une exonération lorsque l’assujetti n’a pas communiqué le numéro d’identification à la TVA de son client (en cas de transfert intracommunautaire, la partie de son entreprise située dans un autre État membre).

34.      La réponse à apporter à cette interrogation dépendrait, en bonne partie, de l’interprétation à donner de l’arrêt VSTR (C-587/10, EU:C:2012:592) dans le contexte d’un transfert intracommunautaire. Selon la juridiction de renvoi, il peut être déduit des points 44, 46 et 51 de cet arrêt qu’une exonération de la TVA doit être accordée si les exigences de fond sont satisfaites, même si certaines exigences de forme ont été omises par l’assujetti. Il n’en irait autrement que lorsque la violation de telles exigences de forme a pour effet d’empêcher d’apporter la preuve certaine que les exigences de fond ont été satisfaites. Partant, l’exigence formelle relative au numéro d’identification à la TVA ne pourrait remettre en cause le droit à l’exonération de la TVA lorsque les exigences de fond sont satisfaites, ce qui serait le cas dans l’affaire au principal.

35.      C’est au regard de ces circonstances que le Finanzgericht München (tribunal des finances de Munich) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour la question préjudicielle suivante:

«Les articles 22, paragraphe 8, et 28 quater, A, sous a), premier alinéa, et d), de la [sixième directive] autorisent-ils les États membres à refuser le bénéfice de l’exonération pour une livraison intracommunautaire (ici, un transfert intracommunautaire), lorsque le fournisseur n’a certes pas pris toutes les mesures raisonnables concernant les exigences formelles relatives à l’indication du numéro d’identification à la [TVA], mais qu’il n’existe aucun indice sérieux suggérant l’existence d’une fraude, que le bien a été transféré à destination d’un autre État membre et que les autres conditions d’exonération sont également remplies?»

IV – La procédure devant la Cour

36.      La demande de décision préjudicielle a été enregistrée au greffe de la Cour le 21 janvier 2015.

37.      Ont présenté des observations écrites le service des impôts de Schrobenhausen, les gouvernements hellénique et portugais ainsi que la Commission européenne.

38.      Ont comparu à l’audience du 20 janvier 2016 pour y être entendus en leurs observations les représentants du service des impôts de Schrobenhausen, le gouvernement allemand et la Commission.

V –    Analyse de la question préjudicielle

39.      La juridiction de renvoi demande si les articles 22, paragraphe 8, et 28 quater, A, sous a), premier alinéa, et d), de la sixième directive doivent être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à ce que l’administration fiscale de l’État d’origine refuse d’exonérer un transfert intracommunautaire au motif que l’assujetti n’a pas communiqué de numéro d’identification à la TVA attribué par l’État de destination, lorsqu’il n’existe aucun indice sérieux suggérant l’existence d’une fraude, que le bien a été transféré à destination d’un autre État membre et que les autres conditions d’exonération sont également remplies.

40.      Un transfert intracommunautaire consiste, pour un assujetti, à transférer un bien corporel de son entreprise du territoire d’un État membre vers le territoire d’un autre État membre, et ce pour les besoins de son entreprise.

41.      Ce type d’opération est, en principe, exonéré dans l’État d’origine et soumis à la TVA dans l’État de destination, dans le respect du principe de la neutralité de la TVA. Le litige au principal porte sur le refus de l’État d’origine (en l’occurrence la République fédérale d’Allemagne) d’octroyer l’exonération au motif que l’assujetti n’a pas communiqué, aux autorités de cet État, de numéro d’identification à la TVA attribué par l’État de destination (en l’occurrence le Royaume d’Espagne).

42.      Je tiens à mettre en exergue trois constats factuels effectués par la juridiction de renvoi. En premier lieu, cette juridiction considère qu’il n’existe pas d’indice sérieux de fraude. En deuxième lieu, ladite juridiction ajoute que toutes les exigences prévues pour bénéficier de l’exonération sont remplies, à l’exception de l’obligation de communiquer le numéro d’identification à la TVA attribué par l’État de destination. En troisième lieu, la même juridiction précise que la communication de ce numéro n’aurait pas contribué à clarifier le contexte factuel, celui-ci étant déjà connu. C’est à la lumière de ces trois constats que je répondrai à la question posée.

A –    Le régime applicable aux transferts intracommunautaires

43.      Le régime des transferts intracommunautaires a été créé lors de l’introduction du «régime transitoire de taxation des échanges entre les États membres» par la directive 91/680/CEE du Conseil, du 16 décembre 1991, complétant le système commun de la taxe sur la valeur ajoutée et modifiant, en vue de l’abolition des frontières fiscales, la directive 77/388 (JO L 376, p. 1).

44.      Dans le cadre de ce régime transitoire, le transfert intracommunautaire est, d’une part, assimilé à une livraison de biens et exonéré dans l’État d’origine ainsi que, d’autre part, assimilé à une acquisition intracommunautaire soumise à la TVA dans l’État de destination. Ce traitement des transferts intracommunautaires est conforme à l’objectif du régime transitoire de taxation des échanges entre les États membres, qui est de transférer la recette fiscale à l’État membre où a lieu la consommation finale des biens livrés (2).

1.      L’assimilation du transfert intracommunautaire à une livraison de biens effectuée à titre onéreux dans l’État d’origine

45.      Un transfert intracommunautaire ne constitue pas une livraison de biens au regard de la définition établie à l’article 5, paragraphe 1, de la sixième directive. En effet, en vertu de cette disposition, une livraison de biens requiert le transfert du pouvoir de disposer d’un bien corporel comme un propriétaire. Or, dans le cadre d’un transfert intracommunautaire, l’assujetti conserve le pouvoir de disposer des biens en question comme un propriétaire, lesdits biens étant simplement transférés vers une partie de son entreprise se situant dans un autre État membre.

46.      Cet élément permet de distinguer les transferts intracommunautaires des livraisons intracommunautaires «ordinaires». Lorsque le pouvoir de disposer d’un bien corporel comme un propriétaire est transféré à un autre assujetti (ou à une personne morale non assujettie) agissant en tant que tel dans un autre État membre, l’opération doit être qualifiée de livraison intracommunautaire «ordinaire». À l’inverse, lorsque ledit pouvoir n’est pas transféré, le bien en question restant affecté à l’entreprise de l’assujetti concerné, l’opération constitue un transfert intracommunautaire.

47.      Je partage ainsi l’analyse de la juridiction de renvoi selon laquelle les opérations effectuées par M. Plöckl doivent être qualifiées non pas de livraison intracommunautaire «ordinaire» à D, mais de transfert intracommunautaire (matérialisé par l’expédition du véhicule vers l’Espagne) suivi d’une livraison d’un bien à D (matérialisée par la vente du véhicule). En effet, la qualification de livraison intracommunautaire exige, selon moi, que l’identité de l’acquéreur soit connue au moment du transport ou de l’expédition du bien vers un autre État membre, ce qui n’était pas le cas dans le litige au principal selon les constatations de la juridiction de renvoi (3).

48.      Il découle de ce qui précède que, sur le seul fondement de la définition établie à l’article 5, paragraphe 1, de la sixième directive, un transfert intracommunautaire ne devrait pas être soumis à la TVA.

49.      Toutefois, l’article 28 bis, paragraphe 5, sous b), de la sixième directive assimile le transfert intracommunautaire à une livraison de biens effectuée à titre onéreux.

50.      L’utilisation de la technique de l’assimilation a une implication pratique importante. En effet, un transfert intracommunautaire peut seulement être soumis à la TVA lorsque sont remplies toutes les conditions d’assimilation prévues à l’article 28 bis, paragraphe 5, sous b), de la sixième directive. Les cinq conditions d’assimilation, telles qu’elles résultent de cette disposition, sont les suivantes:

–        le transfert doit être réalisé par un assujetti ou pour son compte;

–        le transfert doit porter sur un bien corporel de l’entreprise de l’assujetti;

–        le bien doit être expédié ou transféré en dehors du territoire visé à l’article 3 de cette directive mais à l’intérieur de l’Union (c’est-à-dire du territoire d’un État membre vers le territoire d’un autre État membre);

–        le bien doit être transféré pour les besoins de l’entreprise, et

–        le bien n’est pas transféré pour les besoins de l’une des opérations énumérées par ladite disposition (4).

51.      J’ajoute que, en application des règles classiques de répartition de la charge de la preuve, il incombe aux autorités fiscales d’apporter la preuve que ces conditions d’assimilation sont remplies avant de soumettre un transfert intracommunautaire à la TVA. Certes, la tâche incombant aux autorités fiscales est facilitée par l’imposition d’obligations déclaratives à charge des assujettis (5), mais il n’en reste pas moins que ces autorités ne peuvent soumettre un transfert intracommunautaire à la TVA sans avoir établi que l’ensemble des conditions d’assimilation sont satisfaites.

52.      En ce qui concerne le lieu du transfert intracommunautaire assimilé à une livraison de biens, il y a lieu de faire application des dispositions régissant le lieu des livraisons de biens. En application de l’article 8, paragraphe 1, sous a), de la sixième directive, le lieu de ce transfert intracommunautaire «assimilé» est réputé se situer sur le territoire de l’État où se trouve le bien au moment du départ de l’expédition ou du transport, à savoir la République fédérale d’Allemagne dans l’affaire au principal.

2.      L’exonération du transfert intracommunautaire dans l’État d’origine

53.      L’article 28 quater, A, sous d), de la sixième directive dispose que les États membres exonèrent les livraisons de biens au sens de l’article 28 bis, paragraphe 5, sous b), de cette directive «qui bénéficieraient des exonérations prévues ci-dessus si elles étaient effectuées pour un autre assujetti».

54.      D’un point de vue logique, il est légitime de s’interroger sur la raison d’être de cette disposition d’extension du champ d’application des exonérations prévues à l’article 28 quater, A, sous a) à c), de la sixième directive. En effet, l’assimilation prévue à l’article 28 bis, paragraphe 5, sous b), de la sixième directive ne suffit-elle pas à faire rentrer les transferts intracommunautaires dans le champ d’application de ces exonérations?

55.      Selon moi, cette disposition d’extension était nécessaire en raison de la mention explicite de deux personnes distinctes, à savoir le vendeur et l’acquéreur, dans chacune de ces dispositions. Un transfert intracommunautaire n’impliquant par définition qu’une seule personne, il a été nécessaire d’étendre leur champ d’application aux transferts intracommunautaires qui en auraient bénéficié s’ils avaient été effectués «pour un autre assujetti».

56.      Il reste à examiner les exigences de fond qu’il y a lieu de satisfaire pour qu’un transfert intracommunautaire bénéficie de l’exonération prévue à l’article 28 quater, A, sous d), de la sixième directive. Ces exigences de fond varient en fonction des biens faisant l’objet de la transaction, à savoir des moyens de transports neufs, des produits soumis à accises ou d’autres biens, qui sont respectivement visés par l’article 28 quater, A, sous b), c) et a), de la sixième directive.

57.      Eu égard au libellé de la question préjudicielle, la juridiction de renvoi estime que l’article 28 quater, A, sous a), de la sixième directive est pertinent dans l’affaire au principal, à savoir la disposition établissant l’éxonération pour les «autres biens». Ce choix implique que le véhicule transféré par M. Plöckl n’était pas un «moyen de transport neuf» au sens des articles 28 bis, paragraphe 2, et 28 quater, A, sous b), de cette directive, ce qu’il appartient à la juridiction de renvoi de déterminer.

58.      Par conséquent, il y a lieu d’identifier les exigences de fond prévues pour bénéficier de l’exonération conjointement établie à l’article 28 quater, A, sous a) et d), de la sixième directive.

59.      D’une part, en application de l’article 28 quater, A, sous d), de cette directive, l’opération en question doit être un transfert intracommunautaire au sens de l’article 28 bis, paragraphe 5, sous b), de ladite directive. Partant, l’opération doit satisfaire aux cinq conditions d’assimilation identifiées au point 50 des présentes conclusions.

60.      D’autre part, les exigences de fond imposées par l’article 28 quater, A, sous a), premier alinéa, de la même directive sont les suivantes:

–        les biens doivent être expédiés ou transportés, par le vendeur ou par l’acquéreur ou pour leur compte, en dehors du territoire visé à l’article 3 mais à l’intérieur de l’Union (c’est-à-dire du territoire d’un État membre vers le territoire d’un autre État membre) et

–        la livraison doit être effectuée pour un autre assujetti, ou pour une personne morale non assujettie, agissant en tant que tel dans un État membre autre que celui du départ de l’expédition ou du transport des biens.

61.      Selon moi, le fait de satisfaire aux cinq conditions d’assimilation identifiées au point 50 des présentes conclusions implique nécessairement que les exigences de fond imposées à l’article 28 quater, A, sous a), premier alinéa, de la sixième directive seront remplies. En particulier, le fait de transférer un bien «pour les besoins de l’entreprise» implique que le transfert est effectué pour un assujetti «agissant en tant que tel» (6).

62.      Partant, la seule exigence de fond supplémentaire imposée par l’article 28 quater, A, sous a), de la sixième directive réside dans les exclusions définies au second alinéa de cette disposition. Toutefois, aucun élément du dossier soumis à la Cour ne suggère que M. Plöckl serait visé par l’une ou l’autre de ces exclusions. Cette disposition n’a d’ailleurs pas été mentionnée par la juridiction de renvoi dans la question préjudicielle posée à la Cour.

63.      Il découle de ce qui précède que les exigences de fond que M. Plöckl doit remplir, dans l’affaire au principal, pour pouvoir bénéficier de l’exonération conjointement établie à l’article 28 quater, A, sous a) et d), de la sixième directive ont une portée équivalente à celle des conditions d’assimilation établies à l’article 28 bis, paragraphe 5, sous b), de cette directive, telles qu’identifiées au point 50 des présentes conclusions. Cet élément revêt une importance particulière dans la réponse que je propose à la Cour (7).

3.      L’assimilation du transfert intracommunautaire à une acquisition intracommunautaire effectuée à titre onéreux dans l’État de destination

64.      L’article 28 bis, paragraphe 3, de la sixième directive définit l’acquisition intracommunautaire d’un bien comme étant l’obtention du pouvoir de disposer comme un propriétaire d’un bien meuble corporel expédié ou transporté vers un État membre autre que celui du départ de l’expédition ou du transport du bien.

65.      Au regard de cette définition, un transfert intracommunautaire ne peut constituer une acquisition intracommunautaire dans l’État de destination du bien, étant donné qu’il n’entraîne pas le transfert à une autre personne du pouvoir de disposer du bien comme un propriétaire (8).

66.      Les transferts intracommunautaires sont toutefois assimilés à des acquisitions intracommunautaires effectuées à titre onéreux par l’article 28 bis, paragraphe 6, de la sixième directive.

67.      En ce qui concerne le lieu du transfert intracommunautaire assimilé à une acquisition intracommunautaire, il y a lieu de faire application des dispositions régissant le lieu des acquisitions intracommunautaires. En application de l’article 28 ter, A, paragraphe 1, de la sixième directive, le lieu de ce transfert intracommunautaire «assimilé» est réputé se situer sur le territoire de l’État où se trouve le bien au moment de l’arrivée de l’expédition ou du transport à destination de l’acquéreur, à savoir le Royaume d’Espagne dans l’affaire au principal.

B –    L’obligation de communiquer le numéro d’identification à la TVA attribué par l’État de destination est une exigence de forme aux fins de l’exonération des transferts intracommunautaires

68.      Le litige au principal porte sur le refus du service des impôts de Schrobenhausen d’exonérer le transfert par M. Plöckl d’un véhicule automobile d’Allemagne vers l’Espagne, au motif que ce dernier ne lui a pas communiqué de numéro d’identification à la TVA attribué par ce dernier État.

69.      Le service des impôts de Schrobenhausen, le gouvernement allemand et la Commission ont souligné, lors de l’audience de plaidoiries, l’importance de la fonction remplie par la communication du numéro d’identification à la TVA attribué par l’État de destination aux fins du contrôle des transactions intracommunautaires. Étant donné le nombre considérable de ces transactions, il serait impossible, en pratique, de procéder à un contrôle individualisé de chacune d’entre elles. Par conséquent, les administrations fiscales des États membres procèderaient à un contrôle automatisé de ces transactions, lequel ne pourrait être mis en place si les assujettis n’avaient pas l’obligation de communiquer le numéro d’identification à la TVA du destinataire dans l’État de destination.

70.      La juridiction de renvoi et le gouvernement portugais ont également évoqué le système mis en place par le règlement n° 1798/2003. L’article 17 de ce règlement prévoit un échange automatique d’informations entre administrations fiscales dans trois hypothèses, à savoir, lorsque la taxation est censée avoir lieu dans l’État membre de destination et que l’efficacité du système de contrôle dépend nécessairement des informations fournies par l’État membre d’origine, lorsqu’un État membre a des raisons de penser qu’une infraction à la législation sur la TVA a été commise, ou est susceptible d’avoir été commise dans l’autre État membre, et lorsqu’il existe un risque de perte de recettes fiscales dans l’autre État membre.

71.      En outre, les articles 22 à 24 du règlement n° 1798/2003 mettent en place le stockage électronique et l’échange automatique d’informations en ce qui concerne les transactions intracommunautaires, portant sur les numéros d’identification à la TVA dans chaque État membre ainsi que sur la valeur totale des livraisons intracommunautaires de biens entre deux personnes titulaires de tels numéros.

72.      La jurisprudence de la Cour n’attachant pas les mêmes conséquences à la violation des exigences de fond qu’à celle des exigences de forme (9), il est nécessaire de déterminer si l’obligation de communiquer un numéro d’identification à la TVA attribué par l’État de destination est une exigence de forme ou une exigence de fond aux fins de l’octroi de l’exonération litigieuse.

73.      Dans leurs observations écrites et orales, le service des impôts de Schrobenhausen ainsi que les gouvernements allemand et portugais ont fait valoir que cette obligation devait être qualifiée non pas d’exigence de forme, mais d’exigence «matérielle», d’exigence «quasi matérielle» ou encore d’exigence «formelle ayant des effets matériels».

74.      J’estime toutefois que ladite obligation doit être qualifiée d’«exigence de forme» pour les motifs suivants.

75.      D’une part, la méthodologie appliquée par la Cour pour identifier les exigences de fond subordonnant le droit à une exonération ou à la déduction de la TVA consiste en une analyse du libellé de la disposition de la sixième directive établissant le droit revendiqué (10).

76.      En l’espèce, l’exonération revendiquée par M. Plöckl est conjointement établie à l’article 28 quater, A, sous a) et d), de la sixième directive. Or, l’obligation de communiquer un numéro d’identification à la TVA attribué par l’État de destination n’est mentionnée au libellé d’aucune de ces deux dispositions. Les exigences de fond pouvant être identifiées par une «analyse» du libellé de ces deux dispositions ont été énumérées aux points 59 et 60 des présentes conclusions.

77.      D’autre part, l’obligation de s’identifier à la TVA (11) et celle de communiquer le numéro d’identification à la TVA (12) ont été, de manière constante, considérées comme des exigences de forme par la Cour en ce qui concerne tant le droit à déduction que l’exonération des livraisons intracommunautaires. Il n’existe, à ma connaissance, aucune raison de revenir sur cette jurisprudence dans le contexte de l’exonération des transferts intracommunautaires.

78.      Il découle de ce qui précède que M. Plöckl, en ne communiquant pas de numéro espagnol d’identification à la TVA au service des impôts de Schrobenhausen, a violé une exigence de forme imposée par le législateur allemand aux fins de l’octroi de l’exonération des transferts intracommunautaires. Il y a lieu à présent de déterminer les conséquences de la violation d’une telle exigence de forme au regard des principes établis par la Cour.

C –    La jurisprudence sur le non-respect des exigences de forme en matière de TVA

79.      L’exonération des transferts intracommunautaires prévue à l’article 28 quater, A, sous a) et d), de la sixième directive peut-elle être refusée par les autorités fiscales de l’État d’origine en raison de la violation d’une exigence de forme, telle que l’obligation de communiquer un numéro d’identification à la TVA attribué par l’État de destination?

80.      La jurisprudence de la Cour en matière de TVA se caractérise par un rejet du formalisme. Ce rejet du formalisme se traduit, en pratique, par une obligation pour les autorités fiscales des États membres d’octroyer le bénéfice d’un droit lorsque toutes les exigences de fond sont satisfaites, et ce même si certaines exigences de forme n’ont pas été respectées (13).

81.      Ce rejet du formalisme connaît toutefois deux exceptions. D’une part, ce principe ne peut être invoqué par un assujetti ayant participé intentionnellement à une fraude à la TVA (14). D’autre part, il ne peut être invoqué par un assujetti pour se libérer de son obligation d’apporter la preuve qu’il satisfait aux exigences de fond (15). J’exposerai ci-après les motifs pour lesquels j’estime que ces deux exceptions ne sont pas applicables dans des circonstances telles que celles du litige au principal, de telle sorte que le service des impôts de Schrobenhausen devait exonérer le transfert intracommunautaire réalisé par M. Plöckl.

82.      Eu égard à certaines observations écrites et orales soumises à la Cour, je m’attacherai également à rejeter l’existence d’une hypothétique troisième exception au principe du rejet du formalisme, qui trouverait sa source dans l’arrêt VSTR (C-587/10, EU:C:2012:592), et en vertu de laquelle le bénéfice d’une exonération pourrait être refusé lorsque l’assujetti n’a pas pris toutes les mesures pouvant être raisonnablement exigées de lui pour satisfaire aux exigences de forme (16).

1.      Le principe du rejet du formalisme établi dans l’arrêt Collée (C-146/05, EU:C:2007:549)

83.      Dans l’arrêt Collée (C-146/05, EU:C:2007:549), qui concernait le refus d’exonérer une livraison intracommunautaire au motif que la preuve comptable de cette livraison avait été produite tardivement, la Cour a identifié les sources du principe du rejet du formalisme en matière de TVA comme étant, d’une part, le caractère objectif des notions définies par la législation TVA et, d’autre part, le principe de neutralité fiscale.

84.      Selon les termes utilisés par la Cour, «une mesure nationale qui subordonne, pour l’essentiel, le droit à l’exonération d’une livraison intracommunautaire au respect d’obligations formelles, sans prendre en compte les exigences de fond et, notamment, sans s’interroger sur le point de savoir si celles-ci étaient satisfaites, va au-delà de ce qui est nécessaire afin d’assurer l’exacte perception de la [TVA]» (17).

85.      Selon la Cour, «les opérations doivent être taxées en prenant en considération leurs caractéristiques objectives. Or, s’agissant de la détermination du caractère intracommunautaire d’une livraison, il résulte de la jurisprudence de la Cour que, si une livraison répond aux conditions prévues à l’article 28 quater, A, sous a), premier alinéa, de la sixième directive, aucune TVA n’est due au titre d’une telle livraison» (18).

86.      En conséquence, «le principe de neutralité fiscale exige que l’exonération de la TVA soit accordée si les exigences de fond sont satisfaites, même si certaines exigences formelles ont été omises par les assujettis» (19).

87.      Ce principe, selon lequel le principe de neutralité fiscale exige que la déduction ou l’exonération de la TVA «soit accordée si les exigences de fond sont satisfaites, même si certaines exigences formelles ont été omises par les assujettis» (ci-après le «principe du rejet du formalisme»), a été appliqué à de nombreuses reprises par la Cour, tant en ce qui concerne le droit à déduction (20) que l’exonération des livraisons intracommunautaires (21).

88.      En outre, ce principe a été appliqué à différentes exigences de forme telles que l’obligation de s’identifier à la TVA (22), l’obligation de communiquer le numéro d’identification à la TVA du cocontractant (23), ou encore les obligations d’établir une déclaration (24), une facture (25) et une comptabilité (26) conformes à la sixième directive.

89.      En ce qui concerne le litige au principal, la juridiction de renvoi a constaté que M. Plöckl remplit toutes les exigences prévues pour bénéficier de l’exonération de son transfert intracommunautaire, à l’exception de l’obligation de communiquer un numéro d’identification à la TVA attribué par l’État de destination (27).

90.      Cette dernière obligation étant une exigence de forme, il peut être déduit de cette constatation que M. Plöckl remplit toutes les exigences de fond prévues pour bénéficier de cette exonération. Partant, le service des impôts de Schrobenhausen était en principe tenu d’exonérer le transfert intracommunautaire réalisé par M. Plöckl.

91.      Il n’en irait autrement que si la situation de M. Plöckl relevait de l’une des deux exceptions au principe du rejet du formalisme. J’estime cependant que tel n’est pas le cas pour les motifs suivants.

2.      La première exception: la participation intentionnelle à une fraude fiscale

92.      Selon la jurisprudence de la Cour, le principe du rejet du formalisme doit être écarté lorsque l’assujetti a «intentionnellement participé à une fraude fiscale qui a mis en péril le bon fonctionnement du système commun de la TVA». La Cour a en effet jugé que le principe de neutralité fiscale, qui est à la source du rejet du formalisme (28), ne peut être valablement invoqué par un assujetti qui a intentionnellement participé à une fraude fiscale (29).

93.      À cet égard, il convient de rappeler que, dans le cadre de la procédure introduite au titre de l’article 267 TFUE, la Cour n’est compétente ni pour vérifier ni pour apprécier les circonstances de fait relatives à l’affaire au principal. Il appartient donc à la juridiction nationale d’effectuer une appréciation globale de tous les éléments et circonstances de fait de cette affaire afin de déterminer si l’assujetti a agi de bonne foi et a pris toutes les mesures pouvant raisonnablement être exigées de lui pour s’assurer que l’opération réalisée ne le conduisait pas à participer à une fraude fiscale (30).

94.      Or, en l’espèce, il ressort de l’ordonnance de renvoi qu’il est constant entre les parties au principal que M. Plöckl n’a pas participé à une fraude fiscale. Selon le libellé même de la question préjudicielle posée à la Cour, la juridiction de renvoi considère qu’il n’existe aucun indice sérieux suggérant l’existence d’une fraude. La juridiction de renvoi relève à cet égard les éléments suivants. D’une part, M. Plöckl a communiqué toutes les données pertinentes au service des impôts de Schrobenhausen (31), et notamment la date de l’expédition du véhicule en Espagne, l’identité du destinataire de cette expédition (un revendeur), la date de la vente du véhicule en Espagne ainsi que l’identité et le numéro d’identification à la TVA en Espagne de l’acquéreur (en l’occurrence D) (32). D’autre part, M. Plöckl aurait, en toute hypothèse, bénéficié de la déduction de la TVA due sur le transfert intracommunautaire en Espagne, étant donné que ce transfert a été effectué pour les besoins de la livraison de biens imposable à D (33).

95.      Il résulte de ce qui précède que M. Plöckl ne relève pas, à mon avis, de la première exception au principe du rejet du formalisme.

3.      La seconde exception: l’obligation d’apporter la preuve que les exigences de fond sont satisfaites

96.      Selon la jurisprudence de la Cour, le principe du rejet du formalisme doit également être écarté lorsque «la violation des exigences formelles a pour effet d’empêcher d’apporter la preuve certaine que les exigences de fond ont été satisfaites». Cette seconde exception au principe du rejet du formalisme, qui concerne les preuves pouvant être exigées de la part des assujettis par les autorités fiscales des États membres, a été établie par la Cour en ce qui concerne tant le droit à déduction (34) que l’exonération des livraisons intracommunautaires (35).

97.      Cette exception est conforme aux principes classiques régissant la charge de la preuve, selon lesquels il appartient à la personne revendiquant un avantage fiscal d’apporter la preuve qu’il satisfait aux exigences établies à cette fin. En matière d’exonération des livraisons intracommunautaires, la Cour a ainsi précisé qu’il incombe au fournisseur de biens d’apporter la preuve que les conditions prévues pour l’application de l’article 28 quater, A, sous a), premier alinéa, de la sixième directive sont remplies (36).

98.      La Cour a toutefois établi une «exception à cette exception» qui revêt une importance particulière dans la présente affaire. En effet, selon une jurisprudence constante de la Cour, dès lors que l’administration fiscale dispose des données nécessaires pour établir que les exigences de fond sont satisfaites, elle ne saurait imposer des conditions supplémentaires pouvant avoir pour effet de réduire à néant l’exercice du droit revendiqué (37).

99.      Dans le litige au principal, la communication du numéro d’identification à la TVA attribué en Espagne, qui a été exigée par le service des impôts de Schrobenhausen, pourrait contribuer à apporter la preuve de la qualité d’assujetti de M. Plöckl dans cet État (38).

100. Toutefois, le régime des transferts intracommunautaires, applicable dans l’affaire au principal, présente une particularité à cet égard. Compte tenu du fait que, en vertu de l’article 28 bis, paragraphe 5, sous b), de la sixième directive, l’expédition ou le transport du bien «pour les besoins de l’entreprise» de l’assujetti constitue une condition de fond pour l’assimilation d’un transfert intracommunautaire à une livraison de biens effectuée à titre onéreux, et dès lors que le service des impôts de Schrobenhausen a constaté l’existence d’une telle opération imposable, celui-ci peut-il encore refuser l’exonération de la TVA prévue à l’article 28 quater, A, sous d), de cette directive au motif que l’assujetti n’a pas apporté la preuve que ce transfert a été réalisé «pour un assujetti agissant en tant que tel»?

101. Comme je l’ai indiqué précédemment, le fait pour un assujetti de transférer un bien «pour les besoins de l’entreprise» (exigence de fond au stade de l’assimilation du transfert à une livraison de biens effectuée à titre onéreux) implique que le transfert est effectué pour un assujetti «agissant en tant que tel», c’est-à-dire agissant dans le cadre de son activité taxable (exigence de fond au stade de l’exonération du transfert) (39).

102. Partant, étant donné que le service des impôts de Schrobenhausen a décidé d’imposer le transfert intracommunautaire réalisé par M. Plöckl, il faut en déduire que le service des impôts de Schrobenhausen disposait de toutes les données nécessaires pour établir que le transfert avait été effectué «pour les besoins de l’entreprise», et donc pour un assujetti «agissant en tant que tel». Revêt une pertinence particulière, à cet égard, le fait que le service des impôts de Schrobenhausen disposait d’une facture communiquée par M. Plöckl et établissant la vente du véhicule en question à D (40). J’ajoute que la juridiction de renvoi considère également comme établi le fait que M. Plöckl a expédié le véhicule d’Allemagne en Espagne pour continuer à l’utiliser à des fins professionnelles (41).

103. Il s’ensuit, à mon avis, que le service des impôts de Schrobenhausen disposait des données nécessaires pour établir que les exigences de fond requises pour bénéficier de l’exonération litigieuse étaient satisfaites. Partant, M. Plöckl ne relève pas de la seconde exception au principe du rejet du formalisme.

D –    Sur l’absence d’exception introduite par l’arrêt VSTR (C-587/10, EU:C:2012:592) au principe du rejet du formalisme

104. Le service des impôts de Schrobenhausen, le gouvernement portugais et la Commission ont tiré argument de certains passages de l’arrêt VSTR (C-587/10, EU:C:2012:592), et notamment de ses points 52 et 58, pour plaider en faveur de la reconnaissance de ce qui constituerait, à mon avis, une troisième exception au principe du rejet du formalisme.

105. Selon eux, la Cour aurait permis aux autorités fiscales de refuser le bénéfice d’un droit revendiqué par un assujetti, alors que toutes les exigences de fond sont satisfaites, lorsque cet assujetti n’a pas pris toutes les mesures pouvant être raisonnablement exigées de lui pour satisfaire à une exigence de forme. Cette argumentation revêt une importance particulière dans la présente affaire étant donné que la juridiction de renvoi a explicitement interrogé la Cour à ce sujet.

106. Selon moi, une telle interprétation «stricte» de l’arrêt VSTR (C-587/10, EU:C:2012:592) doit être rejetée pour les trois motifs suivants.

107. En premier lieu, j’estime que cette interprétation stricte procède d’une lecture erronée de l’arrêt VSTR (C-587/10, EU:C:2012:592). Pour rappel, cette affaire concernait le refus de l’exonération prévue pour les livraisons intracommunautaires en raison du non-respect d’une exigence formelle imposée au fournisseur consistant à communiquer le numéro d’identification à la TVA de l’acquéreur (voir le point 39 de cet arrêt).

108. Aux points 40 à 47 dudit arrêt, la Cour résume sa jurisprudence antérieure sur les limitations au pouvoir des États membres de subordonner l’exonération des livraisons intracommunautaires au respect d’exigences de forme, en ce compris le respect des exigences probatoires. En particulier, les points 45 à 46 du même arrêt rappellent que le principe de la neutralité de la TVA impose le rejet du formalisme, sauf dans l’hypothèse de la participation intentionnelle de l’assujetti à une fraude. En revanche, la Cour ne fait aucune allusion à l’existence d’une exception au rejet du formalisme lorsque l’assujetti n’a pas pris toutes les mesures pouvant être raisonnablement exigées de lui pour satisfaire à une exigence de forme.

109. Aux points 48 à 53 de l’arrêt VSTR (C-587/10, EU:C:2012:592), la Cour procède à l’application des principes rappelés précédemment aux circonstances particulières de cette affaire. En particulier, au point 51 de cet arrêt, la Cour applique le principe du rejet du formalisme:

«Ainsi, si le numéro d’identification à la TVA apporte la preuve du statut fiscal de l’assujetti et facilite le contrôle des opérations intracommunautaires, il ne s’agit cependant que d’une exigence formelle, qui ne peut pas mettre en cause le droit à l’exonération de la TVA dans la mesure où les conditions matérielles d’une livraison intracommunautaire sont remplies».

110. Au point 52 dudit arrêt, qui est en partie reproduit au point 58 du même arrêt et sur lequel se fonde l’interprétation stricte préconisée par les parties mentionnées au point 104 des présentes conclusions, la Cour examine la pertinence de la première exception à ce principe, à savoir la participation de l’assujetti à une fraude fiscale, au regard des circonstances concrètes de l’affaire au principal:

«Par conséquent, s’il est légitime d’exiger du fournisseur qu’il agisse de bonne foi et qu’il prenne toutes les mesures pouvant raisonnablement être exigées de lui pour s’assurer que l’opération qu’il effectue ne le conduit pas à participer à une fraude fiscale [...], les États membres iraient au-delà des mesures strictement nécessaires à la bonne perception de l’impôt s’ils refusaient le bénéfice de l’exonération de la TVA à une livraison intracommunautaire au seul motif que le numéro d’identification à la TVA n’a pas été transmis par le fournisseur, alors même que celui-ci ne peut, de bonne foi, et après avoir pris toutes les mesures pouvant être raisonnablement exigées de lui, transmettre ce numéro, mais qu’il transmet par ailleurs d’autres indications de nature à démontrer de manière suffisante que l’acquéreur est un assujetti agissant en tant que tel dans l’opération en cause» (italique ajouté par mes soins).

111. À mes yeux, le premier membre de phrase rappelle le principe de la première exception au rejet du formalisme, alors que le dernier membre de phrase, introduit par la locution «alors même que», procède à une application in concreto de cette exception. La Cour a ainsi jugé que la participation du fournisseur à une fraude pouvait être exclue au regard de la circonstance que ce fournisseur ne pouvait, de bonne foi, et après avoir pris toutes les mesures pouvant être raisonnablement exigées de lui, transmettre le numéro d’identification de l’acquéreur. Le point 53 du même arrêt corrobore cette interprétation, dès lors que la Cour y conclut que «ni l’un ni l’autre de ces intervenants ne semblent avoir agi de manière frauduleuse» (italique ajouté par mes soins).

112. Par conséquent, et contrairement aux allégations du service des impôts de Schrobenhausen, du gouvernement portugais et de la Commission, le point 52 de l’arrêt VSTR (C-587/10, EU:C:2012:592) n’établit pas une troisième exception au principe du rejet du formalisme, en vertu de laquelle l’assujetti serait tenu de prendre toutes les mesures pouvant raisonnablement être exigées de lui pour satisfaire à toute exigence de forme, sous peine de perdre le bénéfice de l’exonération. À mes yeux, la Cour y a seulement rappelé et appliqué la première exception à ce principe, en vertu de laquelle l’assujetti doit prendre toutes les mesures pouvant raisonnablement être exigées de lui pour s’assurer que l’opération qu’il effectue ne le conduit pas à participer à une fraude fiscale, sous peine de perdre le bénéfice de l’exonération.

113. En deuxième lieu, l’existence d’une troisième exception au principe du rejet du formalisme ne trouve aucun appui dans la jurisprudence antérieure ou postérieure à l’arrêt VSTR (C-587/10, EU:C:2012:592). Je souligne à cet égard que la Cour n’a mentionné l’existence de cette hypothétique troisième exception, fondée sur le double critère de la «bonne foi» et des «mesures pouvant être raisonnablement exigées de l’assujetti», dans aucun des arrêts rendus postérieurement à cet arrêt et dans lesquels elle a réaffirmé le principe du rejet du formalisme (42).

114. En troisième et dernier lieu, l’interprétation stricte préconisée par le service des impôts de Schrobenhausen, le gouvernement portugais et la Commission est irréconciliable avec les solutions adoptées par la Cour dans les arrêts antérieurs et postérieurs à l’arrêt VSTR (C-587/10, EU:C:2012:592). En effet, la Cour n’a jamais fait application d’un critère d’une telle sévérité dans ces arrêts.

115. La jurisprudence sur la violation de l’obligation d’établir une déclaration, une facture et une comptabilité conformes à la législation TVA (43), de l’obligation d’identification à la TVA (44) ou encore de l’obligation de communiquer le numéro d’identification à la TVA du cocontractant (45) permet d’illustrer ce propos. En effet, sauf circonstances exceptionnelles telles que celles ayant donné lieu à l’arrêt VSTR (C-587/10, EU:C:2012:592, point 53), l’assujetti prenant «toutes les mesures pouvant être raisonnablement exigées de lui» pourra toujours satisfaire à de telles exigences de forme. Or, la Cour a jugé à de multiples reprises que le non-respect d’une exigence de forme ne pouvait entraîner la perte du droit à déduction ou de l’exonération lorsque les exigences de fond sont satisfaites.

116. À mes yeux, un critère d’une telle sévérité réduirait la portée du principe du rejet du formalisme aux cas de force majeure. En effet, le non-respect d’une exigence de forme entraînerait toujours la perte du droit revendiqué, sauf dans des circonstances où il était impossible à l’assujetti d’y satisfaire malgré l’adoption de toutes les mesures pouvant être raisonnablement exigées de lui. Il ne fait guère de doute, selon moi, qu’une telle interprétation provoquerait un revirement radical de la jurisprudence constante de la Cour sur le rejet du formalisme en matière de TVA.

117. Il résulte de ce qui précède que doit être rejetée l’interprétation stricte de l’arrêt VSTR (C-587/10, EU:C:2012:592) préconisée par le service des impôts de Schrobenhausen, le gouvernement portugais et la Commission, en faveur d’une troisième exception au principe du rejet du formalisme.

E –    Sur l’impossibilité de justifier le refus de l’exonération litigieuse par la violation d’autres obligations imposées par ou en vertu de la sixième directive

118. Au sein des observations écrites et orales soumises à la Cour, plusieurs obligations imposées par ou en vertu de la sixième directive ont été invoquées pour justifier le refus d’octroyer l’exonération litigieuse en raison de la non-communication d’un numéro d’identification à la TVA attribué par l’État de destination.

119. Une première disposition invoquée dans ce contexte est la première phrase de l’article 28 quater, A, de la sixième directive, selon laquelle il appartient aux États membres de fixer les conditions dans lesquelles ils exonèrent les opérations intracommunautaires «en vue d’assurer l’application correcte et simple des exonérations prévues ci-après et de prévenir toute fraude, évasion ou abus éventuels».

120. Il ressort d’une jurisprudence constante de la Cour que, dans l’exercice des pouvoirs conférés par cette disposition, les États membres doivent respecter les principes généraux du droit qui font partie de l’ordre juridique de l’Union, au nombre desquels figurent notamment les principes de sécurité juridique, de proportionnalité ainsi que de protection de la confiance légitime (46).

121. En outre, il y a lieu de relever que cette phrase n’a jamais été interprétée par la Cour comme permettant aux États membres de refuser une exonération en raison de la seule violation d’une exigence de forme. Plus précisément, la Cour a jugé à plusieurs reprises que la seule violation d’une exigence de forme, et notamment de l’exigence de communiquer le numéro d’identification de l’acquéreur, ne pouvait entraîner le refus de l’exonération des livraisons intracommunautaires prévue à l’article 28 quater, A, sous a), de la sixième directive (47). Je ne vois aucune raison de revenir sur cette jurisprudence en ce qui concerne les transferts intracommunautaires.

122. Une deuxième disposition invoquée pour justifier le refus de l’exonération litigieuse, et faisant l’objet de la question préjudicielle, est l’article 22, paragraphe 8, de la sixième directive, dans sa rédaction résultant de l’article 28 nonies de celle-ci, selon lequel «les États membres ont la faculté de prévoir d’autres obligations qu’ils jugeraient nécessaires pour assurer l’exacte perception de la [TVA] et pour éviter la fraude».

123. Il me faut à nouveau souligner que cette disposition n’a jamais été interprétée comme permettant aux États membres de refuser une exonération en raison de la seule violation d’une exigence de forme. En effet, selon une jurisprudence constante de la Cour, les mesures que les États membres ont la faculté d’adopter en vertu de ladite disposition ne peuvent remettre en cause le principe fondamental de la neutralité de la TVA (48). Partant, de telles mesures ne peuvent être utilisées de manière à remettre en cause le principe du rejet du formalisme, lequel découle du principe de la neutralité de la TVA (49).

124. En d’autres termes, ce n’est qu’en cas de participation intentionnelle de l’assujetti à une fraude fiscale que les autorités fiscales peuvent refuser le bénéfice d’une exonération en raison du non-respect d’une exigence formelle. Cette hypothèse est toutefois exclue par la juridiction de renvoi dans le cadre du litige au principal (50).

125. Une troisième catégorie de dispositions de la sixième directive a été invoquée pour justifier le refus de l’exonération litigieuse, à savoir celles établissant certaines obligations formelles à charge des assujettis telles que l’obligation d’établir une facture mentionnant les numéros d’identification du vendeur et de l’acquéreur (article 22, paragraphe 3, de la sixième directive, dans sa rédaction résultant de l’article 28 nonies de celle-ci) ou encore l’obligation d’établir un état récapitulatif des acquéreurs identifiés à la TVA auxquels l’assujetti a livré des biens dans les conditions prévues à l’article 28 quater, A, sous a) et d), de la sixième directive (prévue à l’article 22, paragraphe 6, sous b), de cette directive, dans sa rédaction résultant de l’article 28 nonies de celle-ci).

126. Sans remettre en cause la possibilité d’infliger une sanction proportionnée en cas de violation de ces obligations formelles, je ne vois aucune raison pour laquelle une telle violation pourrait entraîner la perte de l’exonération conjointement prévue à l’article 28 quater, A, sous a) et d), de la sixième directive. En particulier, ces dernières dispositions ne subordonnent pas l’octroi de cette exonération au respect d’obligations formelles établies par d’autres dispositions de la sixième directive.

127. Une quatrième catégorie de dispositions invoquée pour justifier le refus de l’exonération litigieuse concerne l’obligation de déclarer le transfert intracommunautaire en tant qu’acquisition intracommunautaire «assimilée» et soumise à la TVA dans l’État de destination (à savoir le Royaume d’Espagne).

128. Dans le litige au principal, M. Plöckl a apparemment considéré que le transfert et la vente du véhicule en cause au principal en Espagne constituaient une livraison intracommunautaire ordinaire visée à l’article 28 quater, A, sous a), de la sixième directive. Partant, il n’aurait pas déclaré d’acquisition intracommunautaire «assimilée» dans l’État de destination. Dans ce contexte, en effet, il appartenait à D, acquéreur du véhicule, de déclarer une acquisition intracommunautaire.

129. Il ressort toutefois d’une jurisprudence bien établie que l’exonération d’une livraison intracommunautaire ne peut être refusée dans l’État d’origine au motif que l’acquisition intracommunautaire correspondante n’a pas été déclarée dans l’État de destination (51).

130. Par conséquent, dans le litige au principal, le service des impôts de Schrobenhausen ne pouvait refuser l’exonération litigieuse au motif que M. Plöckl n’avait pas déclaré l’acquisition intracommunautaire correspondante en Espagne. Il n’en irait autrement qu’en cas de participation intentionnelle de l’assujetti à une fraude fiscale (52) – hypothèse exclue, pour rappel, par la juridiction de renvoi dans le litige au principal (53).

131. Il résulte de ce qui précède que le refus d’octroyer l’exonération litigieuse, en raison de la non-communication d’un numéro d’identification à la TVA attribué par l’État de destination, ne peut être justifié par la violation d’obligations imposées par ou en vertu des dispositions susmentionnées de la sixième directive.

F –    Sur la possibilité d’infliger une sanction en cas de violation de cette obligation

132. Il résulte de l’ensemble des considérations qui précèdent que le service des impôts de Schrobenhausen ne pouvait refuser d’exonérer le transfert intracommunautaire litigieux au motif que M. Plöckl n’avait pas respecté l’obligation de communiquer un numéro espagnol d’identification à la TVA, dès lors que:

–        cette obligation constitue une exigence de forme;

–        il n’existe aucun indice sérieux suggérant l’existence d’une fraude, et

–        le service des impôts de Schrobenhausen disposait des données nécessaires pour établir que les exigences de fond étaient satisfaites.

133. Cette conclusion me semble, en outre, conforme au principe de proportionnalité. En effet, le refus d’octroyer l’exonération litigieuse, et la double taxation du transfert intracommunautaire qui pourrait en découler (54), constituerait à mes yeux une sanction disproportionnée dans la mesure où, comme le suggère la juridiction de renvoi, M. Plöckl se serait seulement rendu coupable d’une erreur quant à la qualification juridique de l’opération en cause.

134. Toutefois, l’obligation d’exonérer le transfert intracommunautaire litigieux dans les circonstances du litige au principal ne signifie pas que les autorités fiscales de l’État d’origine ne peuvent pas sanctionner le défaut de communication par l’assujetti d’un numéro d’identification attribué par l’État de destination.

135. Je tiens à souligner, à cet égard, que l’approche que je préconise ne remet pas en cause le principe de l’obligation qui incombe aux assujettis de communiquer le numéro d’identification à la TVA attribué par l’État de destination en cas de transfert intracommunautaire, au regard notamment de son importance aux fins du contrôle des transactions intracommunautaires. En réalité, cette approche ne se distingue de celle proposée par le service des impôts de Schrobenhausen, les gouvernements allemand et portugais ainsi que la Commission qu’en ce qui concerne la sanction attachée à cette obligation.

136. J’estime en effet, au regard de la jurisprudence de la Cour sur le rejet du formalisme, que la violation de l’obligation de communiquer le numéro d’identification à la TVA attribué par l’État de destination ne peut être sanctionnée par un refus de l’exonération litigieuse, contrairement à ce que soutiennent ces parties.

137. Cependant, il ne fait guère de doute à mes yeux que la violation de cette obligation peut faire l’objet d’une sanction administrative. Il résulte en effet d’une jurisprudence constante de la Cour que l’assujetti qui ne respecte pas les exigences de forme établies par ou en vertu de la sixième directive peut être passible d’une sanction administrative, conformément aux mesures nationales transposant cette directive en droit national (55).

138. En l’absence d’harmonisation de la législation de l’Union dans le domaine des sanctions applicables en cas d’inobservation des conditions prévues par un régime institué par cette législation, les États membres demeurent, en effet, compétents pour choisir les sanctions qui leur semblent appropriées. Ils sont toutefois tenus d’exercer leur compétence dans le respect du droit de l’Union et de ses principes généraux et, par conséquent, dans le respect du principe de proportionnalité (56).

139. Afin d’apprécier si la sanction en cause est conforme au principe de proportionnalité, il convient de tenir compte, notamment, de la nature et de la gravité de l’infraction que cette sanction vise à pénaliser, ainsi que des modalités de détermination du montant de celle-ci (57).

140. En application de ces principes, il est loisible aux autorités fiscales des États membres d’infliger une sanction administrative à l’assujetti ne respectant pas une exigence de forme telle que l’obligation de communiquer le numéro d’identification attribué par l’État de destination. Le montant de cette sanction peut notamment refléter l’importance, soulignée lors de l’audience de plaidoiries, de la communication de ce numéro aux fins du contrôle des transferts intracommunautaires (58). Au cours de l’audience de plaidoiries, le service des impôts de Schrobenhausen a admis que la législation allemande prévoit effectivement la possibilité d’infliger une amende administrative en cas de non-respect de cette obligation. En tout état de cause, l’appréciation finale du caractère proportionné d’une telle sanction incombe à la seule juridiction de renvoi (59).

VI – Conclusion

141. Eu égard à ce qui précède, je propose à la Cour de répondre comme suit à la question préjudicielle posée par le Finanzgericht München (tribunal des finances, Munich):

Les articles 22, paragraphe 8, et 28 quater, A, sous a), premier alinéa, et d), de la sixième directive 77/388/CEE du Conseil, du 17 mai 1977, en matière d’harmonisation des législations des États membres relatives aux taxes sur le chiffre d’affaires – Système commun de taxe sur la valeur ajoutée: assiette uniforme, telle que modifiée par la directive 2005/92/CE du Conseil, du 12 décembre 2005, doivent être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à ce que l’administration fiscale de l’État d’origine refuse d’exonérer un transfert intracommunautaire au motif que l’assujetti n’a pas communiqué de numéro d’identification à la TVA attribué par l’État de destination, lorsqu’il n’existe aucun indice sérieux suggérant l’existence d’une fraude, que le bien a été transféré à destination d’un autre État membre et que les autres conditions d’exonération sont également remplies.


1 – Langue originale: le français.


2 – Arrêts Twoh International (C-184/05, EU:C:2007:550, point 22); R. (C-285/09, EU:C:2010:742, points 37 et 38), ainsi que VSTR (C-587/10, EU:C:2012:592, points 27 et 28).


3 – Voir point 26 des présentes conclusions.


4 – Dans le cadre du litige au principal, il est constant que le transfert réalisé par M. Plöckl remplit cette dernière condition, de telle sorte qu’il n’est pas nécessaire d’examiner les opérations énumérées par cette disposition.


5 – Voir, notamment, article 22, paragraphe 4, de la sixième directive, dans sa rédaction résultant de l’article 28 nonies de celle-ci.


6 – Selon la jurisprudence, un assujetti agit en cette qualité lorsqu’il effectue des opérations dans le cadre de son activité taxable. Voir, en ce sens, arrêt VSTR (C-587/10, EU:C:2012:592, point 49).


7 – Voir points 100 à 103 des présentes conclusions.


8 – Voir points 45 et 46 des présentes conclusions.


9 – Voir points 79 à 103 des présentes conclusions.


10 – Voir, en ce qui concerne l’exonération des livraisons intracommunautaires, arrêts Teleos e.a. (C-409/04, EU:C:2007:548, points 27 et 28); Collée (C-146/05, EU:C:2007:549, point 30); Twoh International (C-184/05, EU:C:2007:550, point 23); VSTR (C-587/10, EU:C:2012:592, points 29 et 30), ainsi que Mecsek-Gabona (C-273/11, EU:C:2012:547, point 31). Voir, en ce qui concerne le droit à déduction, arrêt Idexx Laboratories Italia (C-590/13, EU:C:2014:2429, points 41 à 43).


11 – Voir jurisprudence citée à la note en bas de page 22.


12 –      Voir jurisprudence citée à la note en bas de page 23.


13 – Voir points 83 à 91 des présentes conclusions.


14 – Voir points 92 à 95 des présentes conclusions.


15 – Voir points 96 à 103 des présentes conclusions.


16 – Voir points 104 à 117 des présentes conclusions.


17 –      Arrêt Collée (C-146/05, EU:C:2007:549, point 29).


18 –      Arrêt Collée (C-146/05, EU:C:2007:549, point 30).


19 –      Arrêt Collée (C-146/05, EU:C:2007:549, point 31).


20 –      Arrêts Bockemühl (C-90/02, EU:C:2004:206, points 49 à 52); Ecotrade (C-95/07 et C-96/07, EU:C:2008:267, points 62 à 65); Uszodaépítő (C-392/09, EU:C:2010:569, points 39 à 45); Nidera Handelscompagnie (C-385/09, EU:C:2010:627, points 42 à 51); Dankowski (C-438/09, EU:C:2010:818, points 32 à 37); Kopalnia Odkrywkowa Polski Trawertyn P. Granatowicz, M. Wąsiewicz (C-280/10, EU:C:2012:107, points 43 à 49); EMS-Bulgaria Transport (C-284/11, EU:C:2012:458, points 60 à 63); Ablessio (C-527/11, EU:C:2013:168, points 32 et 33); Fatorie (C-424/12, EU:C:2014:50, point 35); Idexx Laboratories Italia (C-590/13, EU:C:2014:2429, points 38 à 40), ainsi que Salomie et Oltean (C-183/14, EU:C:2015:454, points 58 à 61).


21 –      Arrêts Collée (C-146/05, EU:C:2007:549, points 29 à 31); Mecsek-Gabona (C-273/11, EU:C:2012:547, points 59 à 61); VSTR (C-587/10, EU:C:2012:592, points 45 et 46), et Traum (C-492/13, EU:C:2014:2267, points 35, 36 et 43).


22 – Arrêts Nidera Handelscompagnie (C-385/09, EU:C:2010:627, points 48 à 51); Dankowski (C-438/09, EU:C:2010:818, points 31 à 36); Kopalnia Odkrywkowa Polski Trawertyn P. Granatowicz, M. Wąsiewicz (C-280/10, EU:C:2012:107, point 47); EMS-Bulgaria Transport (C-284/11, EU:C:2012:458, points 60 et 63); Mecsek-Gabona (C-273/11, EU:C:2012:547, points 59 à 63); Ablessio (C-527/11, EU:C:2013:168, point 33), ainsi que Salomie et Oltean (C-183/14, EU:C:2015:454, points 60 et 61).


23 –      Arrêts VSTR (C-587/10, EU:C:2012:592, points 47 à 51) et Traum (C-492/13, EU:C:2014:2267, point 43).


24 – Arrêts Ecotrade (C-95/07 et C-96/07, EU:C:2008:267, points 60 à 64); Uszodaépítő (C-392/09, EU:C:2010:569, points 41 à 45), et Idexx Laboratories Italia (C-590/13, EU:C:2014:2429, points 42 à 46).


25 –      Arrêts Bockemühl (C-90/02, EU:C:2004:206, points 49 à 53); Uszodaépítő (C-392/09, EU:C:2010:569, points 41 à 45); Kopalnia Odkrywkowa Polski Trawertyn P. Granatowicz, M. Wąsiewicz (C-280/10, EU:C:2012:107, points 44 à 49), et Idexx Laboratories Italia (C-590/13, EU:C:2014:2429, points 42 à 46).


26 – Arrêts Collée (C-146/05, EU:C:2007:549, points 28 à 31); Ecotrade (C-95/07 et C-96/07, EU:C:2008:267, points 60 à 64), et Idexx Laboratories Italia (C-590/13, EU:C:2014:2429, points 42 à 46).


27 – Voir point 42 des présentes conclusions.


28 – Voir points 83 à 87 des présentes conclusions.


29 –      Arrêts R. (C-285/09, EU:C:2010:742, point 54) et VSTR (C-587/10, EU:C:2012:592, point 46).


30 – Arrêts Mecsek-Gabona (C-273/11, EU:C:2012:547, point 53) et Traum (C-492/13, EU:C:2014:2267, point 41).


31 –      Selon les termes utilisés par la juridiction de renvoi, la communication par M. Plöckl d’un numéro espagnol d’identification à la TVA «n’aurait pas contribué à clarifier le contexte factuel puisque celui-ci était déjà connu». Voir point 42 des présentes conclusions.


32 – Voir point 20 des présentes conclusions.


33 – Voir point 32 des présentes conclusions.


34 –      Arrêts EMS-Bulgaria Transport (C-284/11, EU:C:2012:458, point 71) et Idexx Laboratories Italia (C-590/13, EU:C:2014:2429, point 39).


35 –      Arrêts Collée (C-146/05, EU:C:2007:549, point 31); Mecsek-Gabona (C-273/11, EU:C:2012:547, point 61), et VSTR (C-587/10, EU:C:2012:592, point 46).


36 –      Arrêts Twoh International (C-184/05, EU:C:2007:550, point 26); R. (C-285/09, EU:C:2010:742, point 46), et VSTR (C-587/10, EU:C:2012:592, point 43).


37 – Arrêts Bockemühl (C-90/02, EU:C:2004:206, point 51); Ecotrade (C-95/07 et C-96/07, EU:C:2008:267, point 64); Uszodaépítő (C-392/09, EU:C:2010:569, point 40); Nidera Handelscompagnie (C-385/09, EU:C:2010:627, point 42); Dankowski (C-438/09, EU:C:2010:818, point 35); Kopalnia Odkrywkowa Polski Trawertyn P. Granatowicz, M. Wąsiewicz (C-280/10, EU:C:2012:107, point 43); EMS-Bulgaria Transport (C-284/11, EU:C:2012:458, points 62 et 71); Idexx Laboratories Italia (C-590/13, EU:C:2014:2429, point 40), ainsi que Salomie et Oltean (C-183/14, EU:C:2015:454, point 59).


38 – Arrêt VSTR (C-587/10, EU:C:2012:592, points 48 et 49).


39 – Voir point 61 des présentes conclusions et jurisprudence citée à la note en bas de page 6.


40 – Voir point 20 des présentes conclusions.


41 – Voir point 30 des présentes conclusions.


42 –      Arrêts Ablessio (C-527/11, EU:C:2013:168, point 32); Fatorie (C-424/12, EU:C:2014:50, point 35); Equoland (C-272/13, EU:C:2014:2091, point 39); Idexx Laboratories Italia (C-590/13, EU:C:2014:2429, point 38), ainsi que Salomie et Oltean (C-183/14, EU:C:2015:454, point 58).


43 – Voir jurisprudence citée aux notes en bas de page 24, 25 et 26.


44 – Voir jurisprudence citée à la note en bas de page 22.


45 – Voir jurisprudence citée à la note en bas de page 23.


46 – Arrêts Twoh International (C-184/05, EU:C:2007:550, point 25); R. (C-285/09, EU:C:2010:742, point 45); Mecsek-Gabona (C-273/11, EU:C:2012:547, point 36), et Traum (C-492/13, EU:C:2014:2267, point 27).


47 – Voir jurisprudence citée à la note en bas de page 21.


48 –      Voir, notamment, arrêts Collée (C-146/05, EU:C:2007:549, point 26); VSTR (C-587/10, EU:C:2012:592, point 44), et Idexx Laboratories Italia (C-590/13, EU:C:2014:2429, point 37). Voir également, en ce qui concerne l’article 273 de la directive 2006/112 qui a remplacé l’article 22, paragraphe 8, de la sixième directive, dans sa rédaction résultant de l’article 28 nonies de celle-ci, arrêts Nidera Handelscompagnie (C-385/09, EU:C:2010:627, point 49); EMS-Bulgaria Transport (C-284/11, EU:C:2012:458, point 47), ainsi que Salomie et Oltean (C-183/14, EU:C:2015:454, point 62).


49 –      Voir points 83 à 87 des présentes conclusions.


50 – Voir point 94 des présentes conclusions.


51 – Arrêts Teleos e.a. (C-409/04, EU:C:2007:548, points 69 à 72) et VSTR (C-587/10, EU:C:2012:592, points 55 à 57).


52 – Arrêt R. (C-285/09, EU:C:2010:742, points 51 à 55).


53 – Voir point 94 des présentes conclusions.


54 – Le transfert serait imposé une première fois dans l’État d’origine, en tant que livraison de biens (non exonérée), et une seconde fois dans l’État de destination, en tant qu’acquisition intracommunautaire.


55 –      Arrêts Nidera Handelscompagnie (C-385/09, EU:C:2010:627, point 52) ainsi que, en ce sens, Salomie et Oltean (C-183/14, EU:C:2015:454, point 63).


56 –      Arrêts Rēdlihs (C-263/11, EU:C:2012:497, point 44) et, en ce sens, Equoland (C-272/13, EU:C:2014:2091, point 34).


57 –      Arrêts Rēdlihs (C-263/11, EU:C:2012:497, point 47) et Equoland (C-272/13, EU:C:2014:2091, point 35).


58 –      Voir points 69 à 71 des présentes conclusions.


59 – Arrêt Equoland (C-272/13, EU:C:2014:2091, point 48).