Available languages

Taxonomy tags

Info

References in this case

References to this case

Share

Highlight in text

Go

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. PAOLO Mengozzi

présentées le 13 mai 2009 (1)

Affaire C-242/08

Swiss Re Germany Holding GmbH

contre

Finanzamt München für Körperschaften

[demande de décision préjudicielle formée par le Bundesfinanzhof (Allemagne)]

«TVA – Système commun de taxe sur la valeur ajoutée – Détermination du lieu de la prestation – Exonérations – Notion d’‘opérations d’assurance et de réassurance’ – Cession à titre onéreux, à une personne établie dans un État tiers, d’une série de contrats de réassurance»





1.        Dans la présente affaire, qui a pour origine une série de questions préjudicielles posées par le Bundesfinanzhof (Allemagne), juridiction suprême en matière fiscale, la Cour est appelée à préciser certains aspects du régime de la taxe sur la valeur ajoutée (ci-après la «TVA») applicable aux opérations d’assurance. Il lui faudra, en particulier, déterminer si une cession de contrats d’assurance par un assureur à un autre peut également être considérée, à des fins fiscales, comme une «opération d’assurance».

I –    Le cadre réglementaire

2.        La sixième directive 77/388/CEE (2) répartit les opérations imposables, de manière générale, en deux grandes catégories: les livraisons de biens et les prestations de service. L’article 5 de cette directive définit en particulier les livraisons de biens de la manière suivante:

«1.      Est considéré comme ‘livraison d’un bien’ le transfert du pouvoir de disposer d’un bien corporel comme un propriétaire.

2.      Sont considérés comme biens corporels le courant électrique, le gaz, la chaleur, le froid et les choses similaires.

[…]»

3.        L’article 6 de la sixième directive affirme qu’«est considérée comme ‘prestation de services’ toute opération qui ne constitue pas une livraison d’un bien au sens de l’article 5». Ce sera le cas, en particulier, de la «cession d’un bien incorporel représenté ou non par un titre».

4.        Dans l’optique qui nous intéresse ici, la sixième directive traite spécifiquement des opérations d’assurance et de réassurance dans ses articles 9 et 13.

5.        L’article 9 de la sixième directive prévoit que, en principe, aux fins de la TVA, on considère que le lieu d’une prestation de service est celui dans lequel le prestataire est établi. Le même article formule toutefois certaines exceptions à ce principe général, en particulier, au paragraphe 2, sous e), qui prévoit ce qui suit:

«le lieu des prestations de services suivantes, rendues à des preneurs établis en dehors de la Communauté ou à des assujettis établis dans la Communauté mais en dehors du pays du prestataire, est l’endroit où le preneur a établi le siège de son activité économique ou un établissement stable pour lequel la prestation de services a été rendue ou, à défaut, le lieu de son domicile ou de sa résidence habituelle:

[…]

–        les opérations bancaires, financières et d’assurance, y compris celles de réassurance, à l’exception de la location de coffres-forts,

[…]»

6.        L’article 13 de la sixième directive prévoit une série d’exonérations du régime de la TVA. En particulier, la partie B de cet article dispose:

«Sans préjudice d’autres dispositions communautaires, les États membres exonèrent, dans les conditions qu’ils fixent en vue d’assurer l’application correcte et simple des exonérations prévues ci-dessous et de prévenir toute fraude, évasion et abus éventuels:

a)       les opérations d’assurance et de réassurance, y compris les prestations de services afférentes à ces opérations effectuées par les courtiers et les intermédiaires d’assurance;

[…]

c)      les livraisons de biens qui étaient affectés exclusivement à une activité exonérée en vertu du présent article ou en vertu de l’article 28 paragraphe 3 sous b), si ces biens n’ont pas fait l’objet d’un droit à déduction, ainsi que les livraisons de biens dont l’acquisition ou l’affectation avait fait l’objet de l’exclusion du droit à déduction conformément à l’article 17 paragraphe 6;

d)       les opérations suivantes:

[…]

2.      la négociation et la prise en charge d’engagements, de cautionnements et d’autres sûretés et garanties ainsi que la gestion de garanties de crédits effectuée par celui qui a octroyé les crédits;

3.       les opérations, y compris les négociations, concernant les dépôts de fonds, comptes courants, paiements, virements, créances, chèques et autres effets de commerce, à l’exception du recouvrement de créances;

[…]»

II – Les faits, la procédure au principal et les questions préjudicielles

7.        La société Swiss Re Germany Holding GmbH (ci-après: «Swiss Re»), qui a son siège en Allemagne, exerce son activité dans le secteur des réassurances. Au cours de l’année 2002, elle (3) a cédé à la société S, qui a son siège en Suisse et appartient au même groupe qu’elle, 195 contrats de réassurance. Les cocontractants de Swiss Re dans ces contrats étaient des compagnies d’assurance établies dans des États autres que l’Allemagne, aussi bien communautaires qu’extracommunautaires.

8.        La cession des contrats est intervenue contre paiement d’une somme d’argent par la société S. Cette somme a été calculée, notamment, par l’attribution d’une valeur négative à 18 des 195 contrats. Ainsi, pour la détermination du prix définitif de la cession, la valeur de ces 18 contrats a été déduite du total des 177 autres.

9.        En outre, la cession des contrats de réassurance n’est devenue parfaite qu’avec l’accord des personnes qui avaient signé ces contrats avec Swiss Re (c’est-à-dire des compagnies d’assurance, pour ainsi dire «de niveau 1»). La société S s’est substituée à Swiss Re dans les droits et obligations prévus par les contrats cédés.

10.      Les autorités fiscales allemandes, et plus précisément le Finanzamt München für Körperschaften (le service des contributions des personnes morales de Munich, ci-après le «Finanzamt»), ont considéré la cession des contrats comme une livraison de biens localisée en Allemagne, et ont par conséquent exigé le paiement de la TVA sur la valeur de cette opération. Toutefois, estimant pour sa part que la TVA n’était pas due, Swiss Re a attaqué cette décision devant les juridictions nationales.

11.      La juridiction de renvoi estime que, au regard du droit allemand, l’opération en question constitue une prestation de services localisée en Allemagne, au titre de laquelle la TVA doit être acquittée. Cette juridiction n’est cependant pas certaine que la réglementation nationale soit compatible avec les règles communautaires et a donc posé à la Cour les questions préjudicielles suivantes:

«1)      Les dispositions de l’article 9, paragraphe 2, sous e), cinquième tiret, et de l’article 13, B, sous a) et d), points 2 et 3, de la sixième directive […] doivent-elles être interprétées en ce sens que la reprise par un acquéreur à titre onéreux d’un contrat de réassurance vie sur la base de laquelle ledit acquéreur reprend avec l’accord de l’assuré les activités exonérées de réassurance exercées jusque-là par l’ancien assureur, fournissant dorénavant à l’assuré des prestations de réassurance exonérées en lieu et place de l’ancien assureur, doit être considérée comme

a)       une opération d’assurance ou bancaire au sens de l’article 9, paragraphe 2, sous e), cinquième tiret, de la sixième directive ou

b)       une opération de réassurance en vertu de l’article 13, B, sous a), de la sixième directive ou

c)       une opération qui consiste pour l’essentiel, d’une part, en une prise en charge exonérée d’un engagement et, d’autre part, en une opération exonérée concernant des créances, en vertu de l’article 13, B, sous d), points 2 et 3, de la sixième directive?

2)      La réponse à la première question est-elle différente si c’est non pas l’acquéreur, mais bien l’ancien assureur, qui paie une contrepartie pour cette reprise?

3.      Si la première question, sous a), b) et c) doit recevoir une réponse négative:

–        l’article 13, B, sous c), de la sixième directive doit-il être interprété en ce sens que la transmission à titre onéreux de contrats de réassurance vie constitue une livraison de biens, et

–        en cas d’application de l’article 13, B, sous c), de la sixième directive, ne convient-il pas de distinguer selon que le lieu des activités exonérées se situe dans l’État membre de la livraison ou dans un autre État membre?»

III – Analyse juridique

A –    Sur la nature de l’opération en cause (réponse à la troisième question)

12.      Afin de pouvoir répondre à la juridiction de renvoi, la première étape logique consiste à déterminer, au regard de la sixième directive, quelle est la nature de l’opération en cause, et en particulier si elle doit être considérée comme une livraison de biens ou comme une prestations de services.

13.      La troisième question préjudicielle, relative à l’éventualité d’une exonération de l’opération en cause sur la base de l’article 13, B, sous c), de la sixième directive, présuppose en effet que l’opération citée puisse être considérée comme une livraison de biens, de sorte que si l’on devait qualifier celle-ci de prestation de services, cela suffirait déjà pour répondre à cette question par la négative.

14.      Comme je l’ai indiqué plus haut, les autorités fiscales allemandes sont parties du principe que la cession des contrats constituait une livraison de biens. La juridiction de renvoi considère, au contraire, que, au regard du droit national, il s’agit d’une prestation de services. Tous ceux qui ont présenté des observations dans la présente procédure, à la seule exception du Finanzamt, s’accordent également pour considérer que l’on est en présence d’une prestation de services, dès lors que la sixième directive ne qualifie de livraisons de biens, à l’article 5, que les livraisons de biens corporels, et que l’article 6 de cette directive qualifie de prestations de services toutes les opérations qui ne sont pas des livraisons de biens. En particulier, le gouvernement allemand insiste sur la nature immatérielle de l’objet de la cession, qui est constitué d’un ensemble de contrats englobant chacun une série de droits et d’obligations, c’est-à-dire d’entités par définition incorporelles. Le gouvernement hellénique et celui du Royaume-Uni, ainsi que la Commission des Communautés européennes, se prononcent dans le même sens, sans juger particulièrement nécessaire d’approfondir la question, qui ne donnerait lieu, à leur avis, à aucun doute interprétatif.

15.      Il est d’ailleurs intéressant de noter que Swiss Re, elle-même, dans ses propres observations écrites, a soutenu qu’il était impossible d’appliquer dans le cas d’espèce l’exonération prévue à l’article 13, B, sous c), de la sixième directive, en faisant valoir que cette exonération ne peut jouer que pour les biens corporels et que les contrats cédés ne sont pas des biens corporels, et ce alors que Swiss Re pourrait avoir, au moins à titre subsidiaire, un intérêt à qualifier la cession des contrats de livraison de biens, dans le but de bénéficier de l’exonération envisagée par la juridiction de renvoi dans sa troisième question.

16.      Le principal élément sur lequel le Finanzamt s’appuie pour affirmer que la cession des contrats en cause constituerait une livraison de biens est la déclaration annexée au procès-verbal de la séance du Conseil de l’Union européenne qui a approuvé la sixième directive (4), aux termes de laquelle le Conseil et la Commission affirment que les cessions de clientèle relatives à une activité exonérée relèvent de l’exonération prévue à l’article 13, B, sous c), de ladite directive.

17.      J’estime toutefois que la thèse du Finanzamt ne peut pas être suivie et que la cession des contrats par Swiss Re à la société S doit être considérée, aux fins de la sixième directive, comme une prestation de services.

18.      En effet, il convient tout d’abord d’observer que, comme l’ont justement indiqué toutes les autres parties, la sixième directive considère comme livraisons de biens uniquement celles qui ont pour objet des biens corporels ou qui, par leur nature même, font normalement l’objet de ventes comme s’il s’agissait de biens corporels (gaz, énergie électrique, etc.). L’article 6 de la sixième directive classe, en revanche, expressément dans la catégorie des prestations de services la «cession d’un bien incorporel représenté ou non par un titre». Il s’ensuit qu’il semble plus exact de classer dans cette seconde catégorie la cession d’un contrat, c’est-à-dire d’un ensemble de droits et d’obligations découlant d’un acte juridique.

19.      En ce qui concerne, ensuite, la position prise par le Conseil et la Commission au moment de l’approbation de la sixième directive, position selon laquelle la cession de clientèle réalisée dans le cadre d’une activité exonérée de TVA pourrait bénéficier d’une exonération, j’observe, en premier lieu, que selon une jurisprudence constante, le contenu des travaux préparatoires ne saurait être pris en considération pour l’interprétation d’une norme de droit communautaire lorsqu’il ne trouve aucune expression dans le texte de la disposition à interpréter (5).

20.      Il faut, en outre, relever que la cession de contrats en cause dans la présente affaire ne constitue pas un cas exactement équivalent à l’hypothèse examinée dans la déclaration du Conseil et de la Commission. Cette déclaration semble en effet impliquer une véritable «vente» de tous les éléments relatifs à la clientèle, accompagnée éventuellement aussi d’une cession des contrats. Dans notre affaire, en revanche, seul ce deuxième élément est présent, et non la «cession de clientèle» dans son ensemble.

21.      Ainsi, puisque, en vertu de la sixième directive, il faut considérer la cession des contrats en cause comme constituant une prestation de services et non une livraison de biens, la troisième question préjudicielle, relative à la possibilité d’exonérer l’opération sur la base de l’article 13, B, sous c), de ladite directive peut d’ores et déjà être résolue de façon négative, dès lors qu’elle présuppose que l’opération constitue une livraison de biens.

22.      En outre, à supposer même, simple hypothèse, que l’on puisse retenir ici la qualification de livraison de biens, la possibilité d’exonérer la cession des contrats en cause sur la base de l’article 13, B, sous c), de la sixième directive devrait être exclue, étant donné le but de cette disposition, qui est d’exonérer de la TVA les livraisons de biens précédemment acquis avec paiement de la TVA et utilisés (6) exclusivement pour exercer une activité exonérée (7). Or, dans le cas d’espèce, les contrats cédés ne sont pas des biens ayant été précédemment acquis avec paiement de la TVA et utilisés pour l’exercice de l’activité exonérée (à savoir l’activité d’assurance): au contraire, ils sont le résultat même de l’activité de Swiss Re.

23.      Je propose donc de répondre à la troisième question préjudicielle qu’une cession de contrats de réassurance telle que celle qui fait l’objet de l’affaire au principal constitue une prestation de services au regard de la sixième directive et ne peut donc pas être exonérée en application de l’article 13, B, sous c), de cette directive.

B –    Observations générales sur le régime de TVA des opérations d’assurance

24.      La sixième directive consacre certaines dispositions spécifiques aux activités d’assurance (et de réassurance, qui y sont assimilées). En premier lieu, l’article 9, paragraphe 2, sous e), de cette directive prévoit, comme on l’a vu, que, aux fins de la TVA, le lieu dans lequel ces prestations sont présumées être exécutées est celui dans lequel leur preneur est établi.

25.      En second lieu, les «opérations d’assurance et de réassurance» sont des activités exonérées de TVA en vertu de l’article 13 de la sixième directive. Cette exonération, qui a été confirmée à l’article 135 de la directive 2006/112/CE du Conseil, du 28 novembre 2006, relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée (JO L 347, p.1), ne trouve pas de justification explicite ou évidente dans le contexte de la sixième directive elle-même. On peut donc supposer que tant des éléments de type sociopolitique que des considérations tenant à la difficulté de taxer la valeur ajoutée d’une opération d’assurance (8) ont pu jouer un rôle dans ce choix du législateur. Par ailleurs, il ne faut pas oublier que l’article 33 de la sixième directive autorise en général le «maintien ou […] l’introduction […] de taxes sur les contrats d’assurance» par les États membres. Cette autorisation a été confirmée à l’article 401 de la directive 2006/112.

26.      Dans cette affaire, de toute évidence, considérer la cession des contrats d’assurance comme une opération d’assurance aurait pour conséquence que les autorités fiscales allemandes ne seraient pas en droit de réclamer le paiement de la TVA sur la cession proprement dite. Plus précisément, la cession devrait être considérée comme localisée en Suisse en application de l’article 9, paragraphe 2, sous e), cinquième tiret de la sixième directive. Il s’agirait en effet d’une prestation de services, dont le prestataire serait Swiss Re, établie en Allemagne, et dont le preneur serait la société S, établie en Suisse. En tant qu’État du siège du preneur, différent de l’État du siège du prestataire, la Suisse serait précisément le lieu de la prestation. De plus, l’opération serait en toute hypothèse exonérée en application de l’article 13 de la sixième directive (9).

27.      Il s’ensuit que la première question fondamentale qu’il faut se poser est de savoir si, d’une façon générale, une cession de contrats d’assurance peut être considérée, aux fins de la TVA, comme une opération d’assurance.

C –    La nature de l’opération en cause: première question

28.      Par sa première question préjudicielle, la juridiction de renvoi demande à la Cour de préciser, en premier lieu, si la cession de contrats objet de l’affaire au principal constitue une opération d’assurance, avec pour conséquence que celle-ci doit être considérée comme réalisée hors de la Communauté en application de l’article 9 de la sixième directive (première partie de la question) et/ou exonérée de TVA en application de l’article 13 de la même directive (deuxième partie de la question). Enfin, dans la troisième partie de la question, la Cour est invitée à se prononcer sur la possibilité d’exonérer l’opération en cause sur le fondement des dispositions combinées des exonérations prévues à l’article 13, partie B, sous d), points 2 et 3, de la sixième directive.

29.      J’analyserai ci-après d’abord les deux premières parties de la première question qui, parce qu’elles présupposent toutes les deux que la cession des contrats puisse être qualifiée d’opération d’assurance, peuvent être traitées ensemble.

1.      Sur la possibilité de qualifier la cession de contrats en cause d’«opération d’assurance»

a)      Les positions des parties

30.      Sur le problème qui est au cœur de la présente affaire, à savoir la possibilité de considérer comme une opération d’assurance la cession d’un ensemble de contrats de réassurance, les positions des parties sont nettement divisées.

31.      D’un côté, Swiss Re et la Commission proposent de répondre à la question par l’affirmative. En particulier, le fait que les parties aux contrats cédés – à savoir les sociétés d’assurance signataires des contrats de réassurance avec Swiss Re – aient dû donner leur consentement à la cession, qui a impliqué pour ces entités un changement de cocontractant (passage de Swiss Re à la société S), permettrait de conclure à l’existence d’une relation de droit entre les (ré)assureurs et les (ré)assurés, relation que la jurisprudence de la Cour a jugé nécessaire pour qu’il y ait activité d’assurance au regard de la sixième directive.

32.      En revanche, les gouvernements allemand, hellénique et du Royaume-Uni contestent la possibilité de considérer la cession des contrats comme une opération d’assurance et de la soustraire, par conséquent, au paiement de la TVA, et ce, en particulier, parce que, comme il est précisé dans la jurisprudence, l’activité d’assurance consiste exclusivement dans le paiement de la prime en contrepartie de la couverture du risque. La cession d’un contrat d’assurance ne correspond pas à ce schéma et ne peut donc pas être soustrait à la TVA. Le Finanzamt défend une thèse très comparable.

33.      Toutes les parties, indépendamment de la solution qu’elles préconisent, font référence non seulement aux mêmes dispositions normatives, mais aussi aux mêmes précédents jurisprudentiels. Le point sur lequel les positions divergent est donc la façon dont les faits de l’espèce et la jurisprudence de la Cour doivent être appréciés.

b)      Appréciation

34.      La sixième directive ne définit pas les opérations d’assurance. La jurisprudence de la Cour a toutefois eu l’occasion d’interpréter cette notion dans certains arrêts importants, ayant trait en particulier à l’article 13 de la directive.

35.      Il est d’abord clair, et cela est régulièrement affirmé dans la jurisprudence, que l’opération d’assurance est une notion de droit communautaire (10). Cette affirmation, effectuée par la Cour dans le contexte de l’article 13 de la sixième directive, doit incontestablement, à mon avis, être étendue aussi à toutes les autres occurrences de la même expression à l’intérieur de ladite directive, et donc aussi à l’article 9. Comme je l’ai déjà indiqué (11), en effet, je ne vois aucune raison pour considérer que les opérations d’assurance dont parle l’article 9 seraient différentes de celles dont parle l’article 13. En outre, même si n’est pas par référence aux opérations d’assurance, la Cour a déjà eu l’occasion de souligner la nécessité d’une interprétation uniforme, au niveau communautaire, des notions juridiques contenues à l’article 9, paragraphe 2, sous e), de la sixième directive (12).

36.      On trouve de façon tout aussi constante dans la jurisprudence, à propos de l’article 13 de la sixième directive, l’affirmation de la nécessité de recourir à une interprétation de type strict, dès lors que l’article 13 contient une série d’exceptions à la règle générale de l’assujettissement à la TVA de toutes les livraisons de biens et prestations de services (13). Ce principe, de par sa nature même, semble plus difficilement applicable à l’article 9 de la sixième directive, qui ne prévoit pas d’exception au régime de la TVA, mais constitue, simplement, une norme destinée à définir le champ du pouvoir d’imposition des États membres (14). J’estime toutefois que, comme nous le verrons dans la suite des présentes conclusions, il est possible de définir une notion communautaire d’opération d’assurance sans devoir faire référence au critère de l’interprétation stricte. Ainsi la possibilité de donner à la notion précitée une interprétation uniforme tant dans la cadre de l’article 9 que de l’article 13 de la sixième directive subsiste.

37.      La Cour a affirmé qu’«une opération d’assurance se caractérise […] par le fait que l’assureur se charge, moyennant le paiement préalable d’une prime, de procurer à l’assuré, en cas de réalisation du risque couvert, la prestation convenue lors de la conclusion du contrat» (15). Ce qui caractérise donc une opération d’assurance, c’est l’échange de la prime, d’une part, contre la protection face au risque, d’autre part.

38.      Il faut toutefois préciser que, même si une opération d’assurance peut être considérée comme telle également dans le cas où elle est fournie par une personne qui n’a pas la qualification formelle d’assureur (16), il est absolument indispensable, comme la Cour l’a précisé dans l’arrêt Skandia (17), qu’il existe une relation juridique directe entre la personne qui effectue l’opération et les assurés.

39.      Or, il me semble clair que, dans le cas d’espèce, les conditions définies par la jurisprudence ne sont pas remplies. L’opération qu’il faut qualifier ici constitue, en effet, simplement l’échange entre, d’une part, un ensemble de contrats, considérés globalement comme source de gains possibles, et, d’autre part, un prix. Il ne fait pas de doute que, à la suite de la cession des contrats, il s’est créé une relation de droit entre la société S, qui les a acquis, et les sociétés d’assurance qui avaient conclu à l’origine les contrats de réassurance avec Swiss Re (qui, il faut le rappeler, avaient dû donner leur accord à la cession). Toutefois, cette relation juridique, qui a, il est vrai, la nature d’opération d’assurance, se rattache à une phase postérieure à celle de l’opération examinée ici: la cession qui fait l’objet de notre affaire ne concernait que Swiss Re et la société S, les parties aux contrats cédés ne se voyant reconnaître qu’une sorte de «droit de veto» quant à la réalisation finale de la cession.

40.      La cession des contrats par Swiss Re à la société S n’est donc pas, en soi, une opération d’assurance.

41.      Il faut, en outre, exclure que l’on puisse considérer l’opération en cause comme la composante «externalisée» d’une activité d’assurance exonérée, au titre d’une application par analogie de la jurisprudence Abbey National (18). Dans cet arrêt, en effet, la Cour avait affirmé, à propos de la «gestion de fonds communs de placement», exonérée de TVA en vertu de l’article 13, B, sous d), de la sixième directive, que les services de gestion administrative et comptable fournis à un fonds commun de placement par un tiers peuvent aussi bénéficier de l’exonération, à condition qu’ils «forment un ensemble distinct, apprécié de façon globale, et [soient] spécifiques et essentiels pour la gestion de fonds communs de placement» (19). Cette jurisprudence n’est, à mon avis, pas applicable ici, pour deux raisons au moins.

42.      Tout d’abord, l’arrêt Abbey National, précité, se réfère de façon spécifique aux services financiers, dont la nature est sensiblement différente de celle des services d’assurance. Il faut ici se souvenir de la définition de l’activité d’assurance donnée par la Cour dans l’arrêt Skandia (20). C’est pourquoi il ne semble pas que, en l’état actuel du droit communautaire, l’externalisation de certains aspects d’une activité d’assurance puisse bénéficier de l’exonération de la TVA.

43.      Il est vrai qu’une récente proposition de directive(21), présentée par la Commission afin d’actualiser la réglementation de la TVA en ce qui concerne les services financiers et d’assurance , souhaite étendre également à l’activité d’assurance le principe énoncé dans l’arrêt Abbey National, précité, (22). Toutefois, même si l’on admettait en théorie la possibilité d’appliquer en l’espèce la jurisprudence Abbey National, cette applicabilité devrait en tout état de cause être écartée au vu de la constatation selon laquelle il existe non pas, dans le cas qui nous occupe, une externalisation d’une partie définie de l’activité d’assurance, mais la cession intégrale (par Swiss Re à la société S) d’une série de contrats d’assurance. Le fait que Swiss Re et la société S appartiennent au même groupe, de sorte que la raison d’être ultime de la cession pourrait être analogue à celles de l’externalisation (23), est dépourvu de pertinence dans ce cadre.

44.      On peut, ensuite, trouver une confirmation de cette interprétation de la réglementation dans la jurisprudence de la Cour relative à une autre exonération prévue à l’article 13, B, de la sixième directive. Je pense à l’exonération, prévue au point b) de cette disposition, en faveur de la location de biens immeubles. En effet, s’il est vrai que, dans l’arrêt Lubbock Fine (24), on a admis l’exonération pour une opération de «résiliation conventionnelle anticipée [d’un contrat de location] moyennant indemnité», postérieurement dans l’arrêt Cantor Fitzgerald International (25), la Cour a exclu la possibilité que la cession du contrat de location par le locataire précédent à un nouveau locataire puisse bénéficier de l’exonération.

45.      Il semble donc, d’une façon générale, émaner de la jurisprudence de la Cour, tant relative aux opérations d’assurance qu’à la location de biens immeubles, un principe selon lequel les exonérations de la TVA admises dans ces domaines ne peuvent être étendues, au-delà de l’opération «principale» (c’est-à-dire le contrat d’origine conclu entre l’assureur et l’assuré, ou entre le propriétaire et le locataire), qu’aux opérations «secondaires» qui constituent des aménagements «internes» des contrats d’origine, à l’exclusion des cas où, comme dans l’affaire qui nous occupe, l’opération litigieuse se situe hors du cadre contractuel initial.

46.      Il est vrai que, sur la base de considérations tirées de la raison d’être générale des règles d’exonération de la TVA, on pourrait soutenir qu’il serait opportun d’accorder l’exonération également dans le présent cas, afin d’éviter la présence d’une TVA cachée dans le prix final payé par le consommateur.

47.      Il faut toutefois observer à ce propos que, d’une part, éviter de façon absolue toute forme de TVA cachée est impossible (26). D’autre part, il me semble que la cession des contrats par Swiss Re à la société S ne peut pas être considérée comme une opération en amont par rapport au service d’assurance fourni par la société S à ses clients. En d’autres termes, on ne peut pas soutenir que la somme payée pour acquérir les contrats entre directement dans le prix exigé (par la société S) auprès des assurés, qui, au moment de la cession des contrats, étaient déjà parties (contractuelles) à un accord dont les conditions – et donc aussi le prix du service d’assurance – avaient déjà été définies antérieurement, au moment de la conclusion du contrat avec Swiss Re.

48.      J’estime, par conséquent, que la première et la deuxième parties de la première question préjudicielle doivent être résolues par l’affirmation selon laquelle une cession de contrats de réassurance telle que celle qui fait l’objet de l’affaire au principal ne constitue pas une opération d’assurance ni au regard de l’article 9 ni de l’article 13 de la sixième directive.

2.      Sur la troisième partie de la première question

49.      Avec la troisième et dernière partie de la première question préjudicielle, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’opération en cause peut être exonérée sur la base de l’application conjointe des points 2 et 3, sous d), de la partie B de l’article 13 de la sixième directive. En particulier, en pareille hypothèse, la cession des contrats par Swiss Re à la société S et le paiement du prix s’y rapportant constitueraient une opération composée d’une «prise en charge d’engagements» (au sens dudit point 2) et d’une «opération […] relativ[e] […] aux créances» (au sens dudit point 3). Plus précisément, les «engagements» seraient les obligations assumées par la société S à l’égard des assurés, tandis que les «créances» seraient constituées du droit pour la société S elle-même de percevoir auprès des assurés les primes d’assurance.

50.      Comme le note la juridiction de renvoi elle-même, pour que l’on puisse accorder l’exonération à l’opération en cause, les points 2 et 3, sous d) de la partie B de l’article 13 de la sixième directive doivent pouvoir être appliqués cumulativement. En effet, pris individuellement, ces deux cas d’exonération ne sont pas suffisants.

51.      Sur ce point spécifique, les parties sont divisées, comme sur la réponse aux deux premières parties de la question. D’un côté, en effet, Swiss Re et la Commission estiment que, si l’opération en cause ne devait pas être considérée comme une opération d’assurance, elle pourrait être exonérée à titre subsidiaire par l’application cumulative des deux clauses d’exonération précitées. À l’inverse, tous les gouvernements intervenus ainsi que le Finanzamt insistent sur le caractère exceptionnel et sur l’obligation d’interprétation stricte qui caractérisent les exonérations de la TVA afin d’exclure, pour des raisons de principe, que deux cas d’exonération puissent être appliqués cumulativement à une seule et même opération.

52.      Sur cet aspect également, la position des gouvernements concernés et du Finanzamt me paraît plus convaincante que celle de Swiss Re et de la Commission.

53.      À mon avis, la possibilité d’appliquer conjointement deux cas d’exonération doit être exclue, de façon générale, au vu de l’obligation d’interpréter strictement les règles dérogatoires (27). Admettre la possibilité de diviser de façon artificielle une opération unique, dans le but de pouvoir assimiler ses éléments à des cas particuliers d’exonération de la taxe, risquerait en effet de compromettre le bon fonctionnement du système de la TVA. Comme on l’a vu plus haut, en effet, une opération d’assurance est constituée de l’échange entre le paiement d’une prime (effectué par l’assuré) et la prise en charge du risque (assumé par l’assureur). Séparer les deux aspects de la relation juridique, en les exonérant sur la base de deux dispositions de droit différentes, constituerait une dénaturation.

54.      Il existe ensuite un autre argument qui, au-delà du problème de la possibilité d’appliquer de façon conjointe les deux cas d’exonération, permet d’exclure ici l’application des points 2 et 3, sous d), de la partie B de l’article 13 de la sixième directive. Toutes les exonérations prévues audit point d) concernent des opérations financières et bancaires, même si certaines versions linguistiques, telles que les versions allemande et italienne, contiennent des formulations plus génériques, qui, à première vue, pourraient sembler applicables également à des activités d’autres types (28). Il ne suffit, cependant, pas que les opérations examinées aient une nature pécuniaire pour pouvoir bénéficier de ces exonérations, comme semble le penser la juridiction de renvoi (29). Il doit s’agir d’opérations financières ou bancaires, et une cession de contrats d’assurance ne paraît pas pouvoir rentrer dans cette catégorie (30).

55.      J’estime, par conséquent, que l’opération en cause dans l’affaire au principal ne peut pas non plus être exonérée de la TVA sur la base des points 2 et 3, sous d), de la partie B de l’article 13 de la sixième directive.

3.      Conclusion sur la première question préjudicielle

56.      Ainsi, pour conclure mon analyse de la première question préjudicielle, je propose à la Cour d’y répondre en affirmant qu’une cession de contrats de réassurance telle que celle qui fait l’objet de l’affaire au principal ne constitue pas une opération d’assurance ni au regard de l’article 9, ni au regard de l’article 13 de la sixième directive, et qu’elle ne peut pas non plus être exonérée de la TVA sur la base des points 2 et 3, sous d), de la partie B de l’article 13 de la même directive.

D –    Sur la deuxième question préjudicielle

57.      Par sa deuxième question préjudicielle, la juridiction de renvoi demande, en substance, si la solution apportée à la première question peut être confirmée, même dans l’hypothèse où celui qui paie une contrepartie est non pas celui qui acquiert les contrats, mais celui qui les cède. La question est posée parce que, dans le cas d’espèce, comme on l’a vu plus haut, 18 des 195 contrats cédés ont été considérés comme ayant une valeur négative, qui a été soustraite de la valeur totale des 177 autres pour arrêter le prix final de la cession. Considérée isolément, la cession de ces 18 contrats serait une opération qui, du point de vue de la TVA, se déroulerait «en sens inverse»: le prestataire serait en effet la société S, qui prendrait à sa charge les contrats désavantageux contre compensation, libérant de ceux-ci le destinataire de la prestation (c’est-à-dire Swiss Re).

58.      Tous ceux qui ont présenté des observations dans la présente procédure se sont prononcés en faveur d’une réponse positive. La présence des 18 contrats à valeur négative n’aurait pas d’incidence sur la réponse à donner à la première question. En particulier, Swiss Re, le Finanzamt et la Commission insistent sur la nature strictement unitaire de l’opération en cause, qui devrait donc être appréciée dans son ensemble, sans que l’on considère séparément les contrats à valeur négative. De leur côté, les gouvernements allemand et du Royaume-Uni, tout en n’excluant pas a priori la possibilité de considérer séparément les contrats à valeur positive et les contrats à valeur négative, estiment que, en tout état de cause, cela ne peut pas modifier la réponse à donner à la question, dès lors que ces cessions, même considérées séparément, ne sont ni l’une ni l’autre des opérations d’assurance.

59.      La position des gouvernements allemand et du Royaume-Uni me semble fondamentalement correcte, en ce qu’ils font observer que, en effet, de même que la cession des contrats pour laquelle la société S verse une compensation à Swiss Re ne peut pas être considérée comme une opération d’assurance, de même, il n’y a aucune raison de considérer comme une opération d’assurance l’opération par laquelle des contrats sont cédés à la société S qui, parce qu’elle les prend à sa propre charge, perçoit une compensation. Le sens de l’opération est inversé, mais il s’agit néanmoins toujours d’une opération qui ne présente pas les caractéristiques que l’on a décrites plus haut comme typiques d’une opération d’assurance en droit communautaire.

60.      J’estime toutefois que l’examen de la question ne peut pas s’arrêter là, même si le problème formulé par la juridiction de renvoi trouve déjà une réponse dans les observations qui précèdent.

61.      Il faut, en effet, vérifier si, indépendamment de la possibilité de qualifier les opérations de cession de contrats d’assurance d’opérations d’assurance, une cession de 195 contrats telle que celle qui est en cause peut être décomposée, aux fins de la TVA, en un ensemble de deux cessions distinctes, l’une ayant pour objet les contrats à valeur positive, et l’autre les contrats à valeur négative. On pourrait aussi considérer, alternativement, chaque contrat comme l’objet d’une cession séparée: il y aurait alors 195 cessions distinctes.

62.      Ce point peut paraître sans intérêt, mais mérite cependant une certaine attention. En effet, même si l’on exclut a priori que la cession des contrats constitue une opération d’assurance, la possibilité de considérer séparément sa partie à valeur positive et sa partie à valeur négative pourrait avoir des conséquences non dénuées de pertinence sur le paiement de la TVA (31).

63.      Cette possibilité doit toutefois, à mon avis, être exclue. Dans la négociation qui a conduit à l’accord entre Swiss Re et la société S, en effet, les 195 contrats de réassurance qui ont été cédés ont été pris dans leur ensemble et, pour leur cession, la société S a versé un prix unique – incluant à la fois des contrats à valeur positive et des contrats à valeur négative – à Swiss Re, estimant évidemment que celle-ci avait fourni un service unique. Cela a pour conséquence qu’il faut appliquer le principe affirmé par la Cour dans l’arrêt CPP, précité, selon lequel «la prestation constituée d’un seul service au plan économique ne doit pas être artificiellement décomposée pour ne pas altérer la fonctionnalité du système de la TVA» (32). Ainsi, puisqu’il n’est pas possible de séparer, aux fins de la TVA, la cession des contrats ayant une valeur positive de la cession des contrats ayant une valeur négative, l’opération en cause doit être considérée comme une opération unique.

64.      Je propose donc de répondre à la deuxième question préjudicielle que la réponse donnée à la première question n’est pas modifiée dans le cas où une partie des contrats cédés a une valeur négative.

IV – Conclusion

65.      Au vu des considérations développées, je propose à la Cour de répondre aux questions préjudicielles posées par le Bundesfinanzhof dans les termes suivants:

«1) Une cession de contrats de réassurance telle que celle qui fait l’objet de l’affaire au principal ne constitue pas une opération d’assurance ni au regard de l’article 9 ni au regard de l’article 13 de la sixième directive 77/388/CEE du Conseil, du 17 mai 1977, en matière d’harmonisation des législations des États membres relatives aux taxes sur le chiffre d’affaires – Système commun de taxe sur la valeur ajoutée: assiette uniforme, et elle ne peut pas non plus être exonérée de la taxe sur la valeur ajoutée sur la base des points 2 et 3, sous d), de la partie B de l’article 13 de ladite directive.

2) La réponse donnée à la première question n’est pas modifiée dans le cas où une partie des contrats cédés a une valeur négative.

3) Une cession de contrats de réassurance telle que celle qui fait l’objet de l’affaire au principal constitue une prestation de services au regard de la sixième directive 77/388 et ne peut donc pas être exonérée en vertu de l’article 13, B, sous  c), de cette directive.»


1 – Langue originale: l’italien.


2 – Sixième directive du Conseil du 17 mai 1977 en matière d’harmonisation des législations des États membres relatives aux taxes sur le chiffre d’affaires – Système commun de taxe sur la valeur ajoutée: assiette uniforme (JO L 145, p. 1, ci-après la «sixième directive»).


3 – Plus précisément, c’est une société contrôlée par Swiss Re, non spécifiée, qui a cédé les contrats. Cette société contrôlée était en outre le signataire initial des contrats de réassurance. Dans l’impossibilité de trouver dans le dossier la dénomination précise de la société contrôlée, je me référerai toujours dans le texte à Swiss Re – demanderesse dans cette affaire – comme étant le sujet ayant cédé les contrats en question.


4 – Note R/716/77 (FIN 151).


5 – Voir, notamment, arrêt du 8 juin 2000, Epson Europe (C-375/98, Rec. p. I-4243, point 26 et jurisprudence citée).


6 – Sans objet pour la version française.


7 – L’objet de la disposition est, évidemment, d’éviter une double imposition, dès lors que celui qui a utilisé les biens pour exercer des activités exonérées n’a pas pu récupérer la TVA acquittée sur ces biens, et a donc payé la taxe de façon définitive comme un consommateur final. La revente ultérieure de ces biens, sur lesquels la TVA a été acquittée, est donc exonérée pour éviter de faire payer la taxe à nouveau, cette fois par le nouvel acquéreur. Voir arrêt du 25 juin 1997, Commission/Italie (C-45/95, Rec. p. I-3605), ainsi que points 14 à 20 des conclusions de l’avocat général Ruiz-Jarabo Colomer présentées le 10 décembre 1996 dans la même affaire. Voir, également, ordonnance du 6 juillet 2006, Salus et Villa Maria Beatrice Hospital (C-18/05 et C-155/05, Rec. p. I-6199, points 29 et 30).


8 – Voir, à ce propos, point 26 des conclusions de l’avocat général Fennelly, présentées le 11 juin 1998, dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 25 février 1999, CPP (C-349/96, Rec. p. I-973), et point 13 des conclusions de l’avocat général Poiares Maduro, présentées le 12 juin 2005, dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 3 mars 2005, Arthur Andersen (C-472/03, Rec. p. I-1719).


9 – Il ne semble pas, en effet, exister de raisons pour interpréter autrement les opérations décrites dans les deux textes précités, désignées respectivement par «opérations […] d’assurance, y compris celles de réassurance» à l’article 9 et par «opérations d’assurance et de réassurance» à l’article 13. J’estime par conséquent que les deux passages qui viennent d’être cités se réfèrent aux mêmes activités.


10 – Voir, notamment, arrêts du 5 juin 1997, SDC (C-2/95, Rec. p. I-3017, point 21), et Arthur Andersen, précité note 8 (point 25).


11 – Voir note 9.


12 – Arrêt du 17 novembre 1993, Commission/France, (C-68/92, Rec. p. I-5881, point 14).


13 – Arrêt Arthur Andersen, précité note 8 (point  24 et jurisprudence citée).


14 – Voir arrêt du 6 décembre 2007, Commission/Allemagne (C-401/06, Rec. p. I-10609, point 29).


15 – Arrêt CPP, précité note 8 (point 17).


16 – Arrêt CPP, précité note 8 (point 22). Voir aussi, par analogie, arrêt SDC, précité note 10 (point 32).


17 – Arrêt du 8 mars 2001 (C 240/99, Rec. p .I 1951, points 39 et 40).


18 – Arrêt du 4 mai 2006 (C-169/04, Rec. p. I-4027).


19 – Arrêt Abbey National, précité note 18 (point 72).


20 – Précité, note 17.


21 – Proposition de directive du Conseil modifiant la directive 2006/112/CE relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée en ce qui concerne le traitement des services d’assurance et des services financiers [COM(2007) 747 final].


22 – En particulier, ledit projet de directive propose d’insérer à l’article 135 de la directive 2006/112 un paragraphe 1 bis ainsi formulé: «L’exonération prévue au paragraphe 1, points a) à e), s’applique à la fourniture de tout élément constitutif d’un service d’assurance ou d’un service financier dès lors que cet élément forme un ensemble distinct et qu’il présente le caractère spécifique et essentiel du service exonéré concerné».


23 – On peut penser, par exemple, à des économies d’échelle, à une rationalisation dans l’organisation et, naturellement, à des raisons d’ordre fiscal.


24 – Arrêt du 15 décembre 1993 (C-63/92, Rec. p. I-6665, points 9 et 10).


25 – Arrêt du 9 octobre 2001 (C-108/99, Rec. p. I-7257, points 21 à 24).


26 – Cela ne signifie pas naturellement qu’il faut minimiser le problème, qui est particulièrement important précisément dans les secteurs de la finance et de l’assurance. La volonté de réduire la TVA cachée est l’une des raisons indiquées par la Commission au soutien de sa proposition de directive précitée note 21. Voir, aussi, avis exprimé sur cette proposition par le Comité économique et social (JO 2008, C 224, p. 124), en particulier, au point 3.


27 – Voir point 36 des présentes conclusions.


28 – Voir sur ce point, arrêt du 19 avril 2007, Velvet & Steel Immobilien (C-455/05, Rec. p. I-3225, points 21 et 22).


29 – Comme la Cour l’a elle-même observé dans l’arrêt Velvet & Steel Immobilien, précité note 28 (point 18), le fait que les exonérations concernent uniquement les activités financières et bancaires est, par exemple, particulièrement évident dans la version anglaise et dans la version espagnole de la sixième directive. En effet, dans l’arrêt Velvet & Steel, qui présente certains écarts entre les versions linguistiques, écarts dus en partie aux différences présentes dans les divers textes de la sixième directive, la Cour s’est bornée à affirmer que, pour l’exonération prévue à l’article 13, B, sous d), point 2, de cette directive la nature pécuniaire de l’opération est nécessaire, mais n’a pas, en revanche, soutenu qu’elle serait suffisante pour que l’on puisse appliquer l’exonération.


30 – Vu la teneur et le contexte de la disposition, on pourrait se demander si, dans l’esprit des auteurs de la sixième directive, les «engagements» dont il est question, par exemple, dans les versions allemande, française et italienne, mais qui font défaut par exemple dans la version anglaise, ne doivent pas se comprendre tout simplement comme des «engagements de garantie». Pour le recours à l’interprétation systématique en tant que conséquence des différences dans les versions linguistiques de l’article 13 de la sixième directive, voir arrêts du 13 juillet 1989, Henriksen (173/88, Rec. p. 2763, points 10 et 11); du 26 juin 2003, MKG-Kraftfahrzeuge-Factoring (C-305/01, Rec. p. I-6729, points 69 et 70), et Velvet & Steel Immobilien, précité note 28 (point 20 et jurisprudence citée).


31 – En effet, si l’on applique le principe général selon lequel le lieu de la prestation est celui dans lequel est établi le prestataire (et non pas celui prévu spécifiquement pour les opérations d’assurance, qui sont, pour leur part, localisées dans le lieu où est établi le preneur), en vertu de l’article 9 de la sixième directive, la cession des 177 contrats à valeur positive serait localisée en Allemagne tandis que celle des 18 contrats à valeur négative le serait en Suisse.


32 – Arrêt CPP, précité note 8 (point 29).