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CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

MME VERICA Trstenjak

présentées le 13 janvier 2011 (1)

Affaire C-262/09

Wienand Meilicke

Heidi Christa Weyde

Marina Stöffler

contre

Finanzamt Bonn-Innenstadt

[demande de décision préjudicielle formée par le Finanzgericht Köln (Allemagne)]

«Libre circulation des capitaux – Prévention de la double imposition de dividendes – Impôt sur le revenu – Impôt sur les sociétés – Attestation de l’impôt sur les sociétés versé en amont – Autonomie procédurale des États membres – Principe d’équivalence – Principe d’effectivité»





Table des matières

I –   Introduction

II – Cadre juridique

A –   Droit de l’Union 

B –   Droit national

III – Faits et demande de décision préjudicielle

A –   Les faits

B –   Première demande de décision préjudicielle et arrêt du 6 mars 2007

C –   Deuxième demande de décision préjudicielle

IV – Procédure devant la Cour

V –   Arguments des parties

A –   Première question préjudicielle

B –   Deuxième question préjudicielle

C –   Troisième question préjudicielle

D –   Quatrième question préjudicielle

VI – Appréciation juridique

A –   Observations liminaires

B –   Première question préjudicielle

C –   Deuxième question préjudicielle

D –   Troisième question préjudicielle

E –   Quatrième question préjudicielle

1.     La quatrième question, sous b)

2.     La quatrième question, sous a)

VII – Conclusion

I –    Introduction

1.        Par la présente demande de décision préjudicielle, le Finanzgericht Köln (Allemagne) s’adresse une deuxième fois à la Cour dans un litige, porté devant lui, concernant l’imposition de dividendes étrangers. Il demande, en substance, de préciser la manière de mettre concrètement en œuvre les indications que la Cour a données dans l’arrêt du 6 mars 2007, Meilicke e.a. (2), en réponse à sa première demande de décision préjudicielle.

2.        Le litige au principal oppose M. W. Meilicke ainsi que Mme H. C. Weyde et Mme M. Stöffler, héritiers de M. H. Meilicke, décédé le 3 mai 1997, en tant que demandeurs, d’une part, et le Finanzamt Bonn-Innenstadt, en qualité de défendeur, d’autre part. Il porte notamment sur l’application d’une règle nationale évitant la double imposition aux dividendes versés à feu M. H. Meilicke dans les années 1995 à 1997 par des sociétés établies au Danemark et aux Pays-Bas.

3.        Dans l’arrêt Meilicke e.a., la Cour a déterminé qu’un régime national de prévention des doubles impositions qui compense l’impôt sur les sociétés grevant les dividendes versés en accordant un crédit d’impôt sur le revenu à même hauteur aux actionnaires soumis à l’impôt sur le revenu résidant en Allemagne (ci-après les «actionnaires contribuables») doit s’appliquer de manière équivalente aux dividendes allemands et aux dividendes provenant d’autres États de l’Union européenne.

4.        Bien que cette réponse ait donné à la juridiction de renvoi la précision voulue sur les règles à appliquer dans la procédure au principal, elle est à présent confrontée au problème créé par les difficultés de calculer concrètement l’impôt sur les sociétés grevant les dividendes versés dans les autres États de l’Union européenne. C’est à ce titre qu’elle sollicite à présent la Cour de préciser plus avant en substance de quelle manière et selon quelles règles de procédure il convient, dans la procédure au principal, d’imputer concrètement dans l’impôt sur le revenu l’impôt sur les sociétés grevant les dividendes versés par les sociétés établies dans d’autres États de l’Union européenne (ci-après les «dividendes UE»).

II – Cadre juridique

A –    Droit de l’Union (3)

5.        La coopération entre les administrations fiscales dans la Communauté fait l’objet de la directive 77/799/CEE du Conseil, du 19 décembre 1977, concernant l’assistance mutuelle des autorités compétentes des États membres dans le domaine des impôts directs et des taxes sur les primes d’assurance (4).

6.        Aux termes de l’article 2, paragraphe 1, de cette directive, l’autorité compétente d’un État membre peut demander à l’autorité compétente d’un autre État membre de lui communiquer toutes les informations susceptibles de leur permettre l’établissement correct des impôts sur le revenu et sur la fortune. L’autorité compétente de l’État requis n’est pas tenue de donner une suite favorable à cette demande lorsqu’il apparaît que l’autorité compétente de l’État requérant n’a pas épuisé ses propres sources habituelles d’information, qu’elle aurait pu, selon les circonstances utiliser pour obtenir les informations demandées sans risquer de nuire à l’obtention du résultat recherché.

7.        D’après l’article 2, paragraphe 2, de la directive 77/799, l’autorité compétente de l’État membre requis fait effectuer, s’il y a lieu, les recherches nécessaires pour obtenir les informations. Pour se procurer les informations demandées, l’autorité requise, ou l’autorité administrative saisie par cette dernière, procède comme si elle agissait pour son propre compte ou à la demande d’une autre autorité de son propre État membre.

B –    Droit national

8.        Aux termes des articles 1er, 2 et 20 de la loi allemande relative à l’impôt sur le revenu (Einkommensteuergesetz) du 7 septembre 1990 (5), dans la version en vigueur dans les années en cause (ci-après l’«EStG»), les dividendes distribués par des sociétés de capitaux qui bénéficient à des assujettis résidant en Allemagne y sont imposés comme revenus de capitaux.

9.        D’après l’article 27, paragraphe 1, de la loi allemande relative à l’impôt sur les sociétés (Körperschaftsteuergesetz) du 11 mars 1991 (6), dans la version en vigueur dans les années en cause (ci-après le «KStG»), le capital propre soumis à l’impôt sur les sociétés et distribué en tant que dividende par des sociétés de capitaux assujetties à titre principal en Allemagne à l’impôt sur les sociétés est soumis à un impôt de distribution au taux de 30 %.

10.      Aux termes de l’article 36, paragraphe 2, point 3, lu conjointement avec l’article 20 de l’EStG, les assujettis peuvent déduire de l’impôt sur le revenu dû au fisc allemand 3/7 des dividendes qui leur ont été versés par des sociétés ou des associations de personnes assujetties à titre principal en Allemagne, pour autant que ceux-ci proviennent de versements subissant l’impôt sur les sociétés et que l’impôt sur les sociétés imputable soit intégré dans l’assiette de l’impôt en tant que revenu imposable.

11.      Aux termes de l’article 36, paragraphe 2, point 3, sous b), de l’EStG, la déduction de l’impôt sur les sociétés requiert la production de l’attestation de l’impôt sur les sociétés visée aux articles 44 et 45 du KStG.

12.      Conformément à l’article 175, paragraphe 1, point 2, du code allemand des impôts (Abgabenordnung), du 16 mars 1976, dans la version en vigueur les années en cause (ci-après l’«AO»), un avis d’imposition doit être établi, annulé ou modifié si intervient un événement qui a un effet fiscal pour le passé (événement à effet rétroactif). La loi du 9 décembre 2004 (7) de transposition de la directive a modifié, avec effet au 29 octobre 2004, l’article 175 de l’AO en ce sens que la délivrance ou la présentation a posteriori d’une attestation ou d’une confirmation n’est plus assimilée à un événement rétroactif. Aucun régime transitoire n’a été prévu.

III – Faits et demande de décision préjudicielle

A –    Les faits

13.      Au cours des années 1995 à 1997, M. H. Meilicke, ressortissant allemand résidant en Allemagne, a perçu des dividendes de sociétés néerlandaises et danoises pour des actions qu’il détenait. Ces revenus de capitaux ont subi en Allemagne l’impôt sur le revenu sans imputation de l’impôt sur les sociétés qui avait été prélevé aux Pays-Bas et au Danemark sur les bénéfices des sociétés distribués sous forme de dividendes.

14.      L’avis d’imposition établi au titre de l’impôt sur le revenu de M. H. Meilicke pour l’exercice 1995, du 16 février 1998, et celui établi au titre de l’impôt sur le revenu de M. H. Meilicke pour l’exercice 1996, du 7 septembre 1998, l’ont été sous réserve de vérification. L’avis d’imposition établi au titre de l’impôt sur le revenu de M. H. Meilicke pour l’exercice 1997, du 26 juillet 2000, ne comporte pas de réserve de vérification.

15.      Les demandeurs sont les héritiers de M. H. Meilicke, décédé en 1997.

16.      Par lettre du 30 octobre 2000, les demandeurs ont demandé au défendeur d’imputer l’impôt sur les sociétés sur l’impôt sur le revenu calculé pour M. H. Meilicke sur les dividendes des actions néerlandaises et danoises des années 1995 à 1997.

17.      Le défendeur a rejeté cette demande d’imputation de l’impôt sur les sociétés par décision du 30 novembre 2000 contre laquelle les demandeurs ont introduit une réclamation le 16 janvier 2001. Celle-ci a été rejetée à son tour par décision rendue sur réclamation le 25 mars 2002. Le défendeur y a conclu que, dans l’état de la législation de l’époque, seul l’impôt sur les sociétés afférent aux dividendes distribués prélevé sur une société assujettie à titre principal à l’impôt sur les sociétés en Allemagne peut être imputé sur l’impôt sur le revenu des actionnaires. Les demandeurs y voyant une restriction inadmissible au libre mouvement des capitaux et à la libre prestation de services ont saisi la juridiction de renvoi d’un recours.

B –    Première demande de décision préjudicielle et arrêt du 6 mars 2007

18.      Par décision parvenue à la Cour le 9 juillet 2004, la juridiction de renvoi a suspendu une première fois la procédure et demandé à titre préjudiciel à la Cour si l’article 36, paragraphe 2, point 3, de l’EStG, en vertu duquel seul l’impôt sur les sociétés prélevé sur une société ou une association assujettie à titre principal en Allemagne à l’impôt sur les sociétés est imputé sur l’impôt sur le revenu, à hauteur de 3/7 des revenus au sens de l’article 20, paragraphe 1, points 1 ou 2, de l’EStG, est compatible avec les articles 56, paragraphe 1, CE et 58, paragraphes 1, sous a), et 3, CE.

19.      En réponse à cette question, la Cour a dit pour droit, dans l’arrêt Meilicke e.a. (8), que les articles 56 CE et 58 CE doivent être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à une réglementation fiscale en vertu de laquelle, lors d’une distribution de dividendes par une société de capitaux, un actionnaire assujetti à titre principal dans un État membre bénéficie d’un avoir fiscal, calculé en fonction du taux d’imposition des bénéfices distribués au titre de l’impôt sur les sociétés, lorsque la société distributrice est établie dans le même État membre, mais non lorsque ladite société est établie dans un autre État membre.

C –    Deuxième demande de décision préjudicielle

20.      Considérant les indications données dans l’arrêt du 6 mars 2007 sous l’angle du droit de l’Union, la juridiction de renvoi estime désormais que les demandeurs remplissent en principe les conditions pour imputer sur l’impôt sur le revenu l’impôt sur les sociétés grevant les dividendes distribués par les sociétés danoises et néerlandaises. La juridiction de renvoi n’aperçoit toutefois pas clairement comment, à quelles conditions et selon quelles règles de procédure cette imputation doit s’opérer concrètement. Elle se demande, en particulier, de quelle manière la preuve de l’impôt sur les sociétés versé en amont à l’étranger doit être rapportée et par quelles parties. Une autre question à laquelle la juridiction de renvoi est confrontée est de savoir si et, le cas échéant, de quelle manière l’impôt sur les sociétés grevant les dividendes UE doit s’imputer sur l’impôt sur le revenu, lorsque l’impôt sur les sociétés effectivement dû ou acquitté ne peut pratiquement pas être déterminé et peut même être supérieur à l’impôt sur les sociétés grevant les dividendes versés par les sociétés allemandes. Enfin, elle se demande aussi si et à quelles conditions l’impôt sur les sociétés étranger prélevé en amont doit pouvoir être imputé ultérieurement en dépit d’avis d’imposition définitifs fixant l’impôt sur le revenu.

21.      C’est dans ces circonstances que la juridiction de renvoi a décidé de suspendre une nouvelle fois la procédure dont elle est saisie et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes:

«1)      La libre circulation des capitaux, consacrée par l’article 56, paragraphe 1, CE et par l’article 58, paragraphe 1, sous a), et paragraphe 3, CE, ainsi que le principe d’effectivité et le principe de l’effet utile s’opposent-ils à une règle telle que l’article 36, paragraphe 2, deuxième phrase, point 3, de l’EStG (Einkommensteuergesetz, loi allemande relative à l’impôt sur le revenu) (dans la version en vigueur au cours des exercices en cause) voulant que l’impôt des sociétés soit imputé sur l’impôt sur le revenu à hauteur de 3/7 des dividendes bruts pour autant que ceux-ci ne proviennent pas de versements pour lesquels le capital propre visé à l’article 30, paragraphe 2, point 1, du KStG (Körperschaftsteuergesetz, loi allemande relative à l’impôt des sociétés) (dans la version en vigueur au cours des exercices en cause) est réputé utilisé, bien que l’impôt des sociétés effectivement acquitté qui grève les dividendes versés par une société établie dans un autre État membre ne puisse pratiquement pas être déterminé et puisse être supérieur?

2)      La libre circulation des capitaux, consacrée par l’article 56, paragraphe 1, CE et par l’article 58, paragraphe 1, sous a), et paragraphe 3, CE, ainsi que le principe d’effectivité et le principe de l’effet utile s’opposent-ils à une règle telle que l’article 36, paragraphe 2, deuxième phrase, point 3, quatrième phrase, sous b), de l’EStG (dans la version en vigueur au cours des exercices en cause) voulant que l’imputation de l’impôt des sociétés requiert de produire l’attestation de l’impôt des sociétés visée aux articles 44 et suivants du KStG (dans la version en vigueur au cours des exercices en cause) qui doit indiquer notamment le montant imputable de l’impôt des sociétés ainsi que la consistance du paiement en précisant les différents postes du capital propre utilisable fondés sur la ventilation spéciale du capital propre visée à l’article 30 du KStG (dans la version en vigueur au cours des exercices en cause), bien que l’impôt étranger sur les sociétés effectivement acquitté, appelé à être imputé, soit pratiquement impossible à déterminer et que l’attestation afférente aux dividendes étrangers soit pratiquement impossible à produire?

3)      Si l’attestation de l’impôt des sociétés visée à l’article 44 du KStG (dans la version en vigueur au cours des exercices en cause) est effectivement impossible à produire et que l’impôt des sociétés effectivement acquitté qui grève les dividendes étrangers ne peut pas être déterminé, la libre circulation des capitaux, consacrée par l’article 56, paragraphe 1, CE et par l’article 58, paragraphe 1, sous a), et paragraphe 3, CE, commande-t-elle d’estimer le taux prélevé au titre de l’impôt des sociétés et, le cas échéant, de prendre en compte à cet égard les impositions intervenues indirectement en amont au titre de l’impôt des sociétés?

4) a)      Si la deuxième question appelle une réponse négative et qu’une attestation de l’impôt des sociétés est bel et bien nécessaire:

Faut-il comprendre les principes d’effectivité et de l’effet utile en ce sens qu’ils s’opposent à une règle, telle que celle découlant des dispositions combinées de l’article 175, paragraphe 2, deuxième phrase, de l’AO (Abgabenordnung, code allemand des impôts), et de l’article 97, paragraphe 9, troisième alinéa, de l’EGAO (Einführungsgesetz zur Abgabenordnung, loi d’introduction du code allemand des impôts), qui, depuis le 29 octobre 2004, n’assimilent plus à un événement à effet rétroactif notamment la production d’une attestation de l’impôt des sociétés, rendant de ce fait techniquement impossible l’imputation de l’impôt étranger sur les sociétés lorsque les avis d’imposition sont définitifs, sans avoir aménagé un délai transitoire permettant de faire jouer l’imputation de l’impôt étranger sur les sociétés?

b)      Si la deuxième question appelle une réponse affirmative et qu’aucune attestation de l’impôt des sociétés n’est nécessaire:

Faut-il comprendre l’article 56 CE, les principes d’effectivité et de l’effet utile en ce sens qu’ils s’opposent à une règle, telle que l’article 175, paragraphe 1, point 1, de l’AO, voulant qu’un avis d’imposition soit modifié lorsque survient un événement à effet rétroactif, notamment la production d’une attestation de l’impôt des sociétés, permettant ainsi d’imputer l’impôt des sociétés pour des dividendes allemands même si les avis d’imposition sont définitifs alors que cela ne serait pas possible pour des dividendes étrangers faute d’attestation de l’impôt des sociétés?»

IV – Procédure devant la Cour

22.      La décision de renvoi du 14 mai 2009 est parvenue au greffe de la Cour le 13 juillet 2009. Dans la procédure écrite, des observations ont été présentées par les demandeurs, le défendeur, le gouvernement allemand ainsi que la Commission européenne. Les demandeurs, le défendeur, le gouvernement allemand ainsi que la Commission ont été représentés à l’audience du 27 octobre 2010.

V –    Arguments des parties

A –    Première question préjudicielle

23.      Par sa première question, la juridiction de renvoi souhaite savoir si une réglementation nationale préventive de doubles impositions des bénéfices distribués par une société sous forme de dividendes est compatible avec le droit de l’Union lorsque, dans cette réglementation, l’impôt sur les sociétés grevant les dividendes distribués est invariablement imputé sur l’impôt sur le revenu sous la forme d’un crédit d’impôt d’un taux fixe de 3/7 des dividendes bruts aussi bien à l’égard des dividendes distribués par les sociétés allemandes que des dividendes UE, alors que l’impôt sur les sociétés grevant les dividendes UE ne peut pas être calculé en pratique et pourrait être supérieur à l’impôt de distribution prélevé au taux fixe de 30 % sur les dividendes distribués par les sociétés allemandes.

24.      La Commission estime que, par sa première question, la juridiction de renvoi souhaite que la Cour précise si le taux de l’impôt étranger sur les sociétés, imputable selon les enseignements de l’arrêt Meilicke e.a., doit se calculer en principe selon la charge fiscale grevant effectivement le dividende distribué ou plutôt selon la fraction des 3/7 du dividende brut fixée par la loi. Si le principe est la charge fiscale effective, la juridiction de renvoi souhaite alors savoir s’il faut se référer à d’autres critères quand le calcul de cette charge fiscale est, en pratique, impossible ou présente des difficultés insurmontables.

25.      La Commission soutient que l’imputation de l’impôt étranger sur les sociétés doit se faire par référence à la charge fiscale grevant effectivement les dividendes. Celle-ci ne doit toutefois pas dépasser la fraction imputée des dividendes distribués par les sociétés allemandes. Si le calcul de la charge fiscale effective est impossible ou présente des difficultés insurmontables, cela ne changerait rien au fait que la charge fiscale effective est bel et bien la valeur de référence. Cela ne conduirait en effet pas à devoir se rabattre sur une autre valeur de référence, par exemple au montant de 3/7 des dividendes visé à l’article 36, paragraphe 2, point 3, de l’EStG.

26.      Le gouvernement allemand ainsi que le défendeur estiment que l’impôt étranger sur les sociétés doit s’imputer à concurrence de la charge fiscale effective sans prendre en compte les impôts indirectement prélevés en amont. De plus, il estime que l’imputation est plafonnée à la dette fiscale de l’actionnaire afférente aux dividendes perçus.

27.      Les demandeurs soutiennent en substance que l’impôt sur les sociétés à imputer doit se calculer par référence à la dette fiscale théorique de la société distributrice, grevant directement ou indirectement les dividendes distribués. À cet égard, l’imputation ne saurait en aucun cas être plafonnée à la dette fiscale de l’actionnaire afférente aux dividendes perçus.

B –    Deuxième question préjudicielle

28.      Par sa deuxième question, la juridiction de renvoi souhaite savoir si et à quelles conditions l’imputation de l’impôt sur les sociétés grevant les dividendes UE peut être conditionnée par la production de l’attestation de l’impôt sur les sociétés conforme au modèle administratif prescrit que la loi impose pour l’imputation de l’impôt sur les sociétés grevant les dividendes distribués par les sociétés allemandes.

29.      La Commission estime que, pour répondre à la deuxième question, qui est de savoir si, à l’égard des dividendes UE, on peut exiger des contribuables l’attestation de l’impôt sur les sociétés visée aux articles 44 et suivants du KStG, il convient de faire la distinction entre les preuves nécessaires en elles-mêmes et les dispositions précises des articles 44 et suivants du KStG. Il se trouve que le droit de l’Union n’oblige normalement pas les États membres à accorder des avantages fiscaux en l’absence des justificatifs requis. Cela ne veut toutefois pas dire qu’un État membre puisse, dans une situation comme celle-ci, déterminer à son gré les formes et modes de preuve. Il doit, selon elle, se limiter à ce qui est effectivement nécessaire au regard de l’objectif poursuivi et des dispositions nationales applicables, et qui répond ainsi à un intérêt justifié à recueillir des informations. À ce titre, l’État membre concerné ne peut exiger que la société consigne toutes les informations utiles dans un document unique strictement conforme au modèle visé aux articles 44 et suivants du KStG. Il devrait suffire de communiquer à l’administration fiscale les pièces justificatives et les informations utiles sous une forme exploitable. De surcroît, l’État membre concerné ne peut persister à solliciter des informations et des justificatifs parfaitement inutiles dans le cas d’espèce. Une telle exigence serait, elle aussi, disproportionnée.

30.      Le gouvernement allemand estime ne pas enfreindre les principes d’effectivité et d’équivalence ni les articles 56 CE et 58 CE en exigeant du contribuable qui prétend à un crédit d’impôt sur le revenu une attestation fiscale ou des justificatifs analogues de l’impôt étranger sur les sociétés. Même si cette preuve ne devait pas nécessairement être conforme à un modèle, seule peut être admise pour une imputation la preuve indiquant de manière claire et intelligible l’impôt sur les sociétés grevant effectivement les dividendes perçus. Au reste, les autorités fiscales ne sont pas tenues, selon lui, de recourir à l’assistance des autorités compétentes des États membres, mise en place par la directive 77/799, pour combler des lacunes dans les données et preuves fournies par le contribuable.

31.      Toujours dans la deuxième question, le défendeur a soutenu dans ses observations écrites que ni les articles 56 CE et 58 CE ni les principes d’effectivité et de l’effet utile ne s’opposeraient à une règle nationale requérant, dans l’impôt sur le revenu, l’attestation de l’impôt sur les sociétés visée aux articles 44 et suivants du KStG pour imputer l’impôt sur les sociétés grevant les dividendes UE. Interrogé sur ce point à l’audience, le défendeur est toutefois revenu sur cette conception pour se rallier à la position de la Commission.

32.      Les demandeurs soutiennent en substance que, dans l’impôt sur le revenu, l’imputation de l’impôt sur les sociétés grevant les dividendes UE ne peut pas être tributaire de la production de l’attestation de l’impôt sur les sociétés visée aux articles 44 et suivants du KStG.

C –    Troisième question préjudicielle

33.      Par sa troisième question préjudicielle, la juridiction de renvoi souhaite que la Cour précise si les articles 56 CE et 58 CE commandent au juge national d’estimer l’impôt sur les sociétés grevant les dividendes UE si l’attestation de l’impôt sur les sociétés visée à l’article 44 du KStG est impossible à produire et que l’impôt sur les sociétés effectivement acquitté ne peut pas être déterminé. La juridiction de renvoi demande de surcroît si, le cas échéant, cette estimation doit également prendre en compte les impositions intervenues indirectement en amont au titre de l’impôt des sociétés.

34.      La Commission estime que la combinaison du droit de l’Union avec le régime interne de calcul de la base imposable peut déboucher sur une obligation d’estimer l’impôt sur les sociétés grevant les dividendes UE. Une telle obligation se conçoit si le contribuable se trouvant dans une situation purement nationale analogue bénéficiait également de cette estimation. Indépendamment de ces régimes internes de calcul de la base imposable, les autorités fiscales seraient tout de même tenues au titre de l’article 56 CE d’imputer l’impôt acquitté en amont à hauteur du montant que le contribuable aura établi à suffisance, même si le montant exact de l’impôt acquitté en amont ne peut pas être déterminé.

35.      Quant à la prise en compte ou non des impositions qui ont indirectement grevé les dividendes UE au titre de l’impôt sur les sociétés, la Commission soutient que le contribuable actionnaire tire de l’article 56 CE un droit à la prise en compte des impositions intervenues en amont au niveau des filiales de la société distributrice à partir du moment où il peut imputer ces mêmes impositions pour des dividendes de sociétés allemandes.

36.      Le gouvernement allemand expose, d’une part, que les impositions qui ont indirectement grevé les dividendes UE au titre de l’impôt sur les sociétés ne devraient pas être prises en compte, car l’ancien régime fiscal allemand des sociétés était conçu de manière à éviter la double imposition économique des dividendes à chaque maillon supérieur de la chaîne de sociétés. Seul l’impôt sur les sociétés propre à la société distributrice s’impute. De surcroît, la déduction dans l’impôt sur le revenu de l’actionnaire de l’impôt sur les sociétés grevant les dividendes d’entreprises allemandes suppose de produire une attestation de l’impôt sur les sociétés. On voit ainsi que l’impôt sur les sociétés dû à l’étranger ne peut, lui aussi, être imputé sur l’impôt sur le revenu de l’actionnaire que si celui-ci produit des justificatifs montrant de manière claire et intelligible l’impôt sur les sociétés effectivement dû.

37.      Le défendeur estime, lui aussi, qu’il est exclu de prendre en compte les impositions qui ont indirectement grevé les dividendes UE au titre de l’impôt sur les sociétés. De plus, même dans les dossiers transfrontaliers, l’attestation de l’impôt sur les sociétés reste nécessaire pour établir les impositions indirectement prélevées en amont. Quant à la question de savoir si les autorités fiscales nationales qui ont imposé le bénéficiaire des dividendes sont ou non tenues, en raison de la directive 77/799, de s’adresser aux autorités de l’autre État membre pour obtenir les renseignements qui font défaut, la réponse est négative selon lui.

38.      Les demandeurs approuvent en substance la faculté de procéder par estimation lorsque l’impôt des sociétés qui grève effectivement les dividendes des sociétés étrangères ne peut pas être déterminé. Il convient de prendre aussi en compte dans ce contexte les impositions qui ont indirectement grevé les dividendes au titre de l’impôt sur les sociétés.

D –    Quatrième question préjudicielle

39.      Par sa quatrième question préjudicielle, la juridiction de renvoi souhaite savoir, d’une part, s’il est conforme au droit de l’Union d’interpréter l’article 175 de l’AO, dans la version en vigueur jusqu’au 28 octobre 2004, en ce sens qu’il permet de rectifier un avis d’imposition du revenu qui a acquis un caractère définitif en produisant l’attestation de l’impôt sur les sociétés visée aux articles 44 et suivants du KStG, alors que cette même rectification est exclue quand sont produites des déclarations ou des attestations étrangères ne répondant pas aux conditions de forme des articles 44 et suivants du KStG [quatrième question, sous b)]. La juridiction de renvoi demande en outre si l’abrogation rétroactive de cette possibilité de rectifier des avis d’imposition du revenu définitifs prévue à l’article 175 de l’AO est conforme au droit de l’Union [quatrième question, sous a)].

40.      La Commission estime que l’article 175 de l’AO est une règle de procédure qui doit, de ce fait, répondre au principe d’équivalence. Il s’ensuit qu’une règle interne, tel l’article 175 de l’AO, est incompatible avec le droit de l’Union si elle permet, pour les dividendes de sociétés allemandes, d’imputer malgré tout l’impôt sur les sociétés payé en amont, même si l’avis d’imposition a acquis un caractère définitif, en produisant plus précisément ultérieurement une attestation de l’impôt sur les sociétés qui établit le droit à l’imputation de l’impôt payé en amont, mais ne permet pas cette même rectification des avis d’imposition définitifs pour les dividendes UE, même lorsque le droit à imputation est établi ultérieurement par d’autres documents pertinents.

41.      De plus, le droit de l’Union fait obstacle, selon elle, à la modification rétroactive de l’article 175 de l’AO, exposée par la juridiction de renvoi, en ce qu’elle aboutit à ce que la production ultérieure des documents nécessaires à l’imputation d’un impôt sur les sociétés versé en amont ne permet désormais plus de rectifier les avis d’imposition définitifs pour les dividendes UE, sans avoir aménagé un délai convenable pour pouvoir déposer ces documents afin de faire jouer l’imputation.

42.      D’après le gouvernement allemand et le défendeur, une règle interne qui érige la production ultérieure de l’attestation de l’impôt sur les sociétés visée aux articles 44 et suivants du KStG en condition fondamentale requise par la procédure pour rectifier les avis d’imposition définitifs, alors que cette rectification est exclue si sont produites a posteriori des attestations ou des déclarations étrangères qui ne répondent pas aux conditions de forme des articles 44 et suivants du KStG, est parfaitement conforme au droit de l’Union. De plus, l’abrogation rétroactive de cette règle est également conforme au droit de l’Union dans les circonstances particulières de l’espèce, même si la faculté d’imputer a posteriori l’impôt sur les sociétés des autres États de l’Union européenne disparaissait, elle aussi, de ce fait rétroactivement et sans régime transitoire. Il convient, à cet égard, de considérer en particulier que le régime fiscal applicable ratione temporis à l’imputation de l’impôt sur les sociétés grevant les dividendes – le système dit «d’imputation intégrale» – n’a été en vigueur que jusqu’en 2001. Il s’ensuit qu’il n’y a aucune objection en droit de l’Union à ce que le législateur allemand ait apporté près de quatre ans après la fin du système d’imputation intégrale un certain nombre de modifications procédurales qui ont aussi une incidence sur ce système.

43.      Les demandeurs estiment que ce qui est décisif pour répondre à la quatrième question, c’est que la République fédérale d’Allemagne n’a émis à ce jour aucun modèle administratif d’attestation de l’impôt sur les sociétés pour les dividendes étrangers. Dès lors que la République fédérale d’Allemagne persiste à exiger la production de cette attestation pour imputer l’impôt sur les sociétés grevant les dividendes UE, elle rendrait en pratique impossible ou excessivement difficile l’exercice des droits conférés par le droit de l’Union en fixant un délai transitoire assortissant la modification de l’article 175 de l’AO qui expire avant même d’avoir émis un tel modèle d’attestation en sorte que la production d’une attestation de l’impôt sur les sociétés conforme au modèle administratif pour les dividendes étrangers ne puisse plus donner lieu à une rectification des avis d’imposition définitifs.

VI – Appréciation juridique

A –    Observations liminaires

44.      Les quatre questions préjudicielles auxquelles il convient de répondre dans la présente procédure sont énoncées de manière particulièrement technique en renvoyant à différentes dispositions fiscales de droit interne. La clarté commande, me semble-t-il, de brosser à gros traits le contexte fiscal interne de ces questions. Cela permettra en plus de s’en tenir au cœur des questions qui intéresse le droit de l’Union.

45.      La procédure au principal soulève des questions d’imposition de dividendes que des sociétés de capitaux soumises à titre principal à l’impôt sur les sociétés ont versés à leurs actionnaires soumis à titre principal à l’impôt sur le revenu en Allemagne. Il ressort de la décision de renvoi et des observations présentées par les parties que, dans la législation interne applicable à l’époque, les dividendes sont prélevés du capital propre utilisable pour les distributions de ces sociétés. Avant d’être distribués, ces dividendes subissent en principe l’impôt sur les sociétés dû par la société et, une fois distribués aux actionnaires soumis à l’impôt sur le revenu, ils subissent l’impôt sur le revenu.

46.      Pour éviter une double imposition de ces distributions, la législation fiscale allemande applicable à l’époque en question comportait un régime complexe remboursant aux actionnaires, soumis à l’impôt sur le revenu, l’impôt sur les sociétés que l’entreprise avait subi sur les dividendes distribués, sous la forme d’un crédit d’impôt sur le revenu d’un montant de 3/7 du dividende brut (9).

47.      Une caractéristique importante de ce système d’imputation est que les taux variables de l’impôt sur les sociétés, applicables au capital propre utilisable pour des distributions, sont adaptés au crédit d’impôt sur le revenu d’un montant fixe de 3/7 du dividende brut. Cela consiste dans le fond, en cas de distribution de dividendes, à augmenter ou à réduire l’impôt sur les sociétés déjà prélevé sur cette distribution pour arriver au bout du compte à un «impôt de distribution», relevant de l’impôt sur les sociétés, de 30 % du dividende brut. Certaines tranches des distributions exonérées de l’impôt sur les sociétés ne rentrent toutefois pas dans le calcul de cet «impôt de distribution» et restent ainsi en définitive exonérées de l’impôt sur les sociétés. La distribution de ce capital propre non imposé ne confère à l’actionnaire aucun crédit d’impôt sur le revenu. L’imputation de l’impôt sur les sociétés fixée à 3/7 des dividendes correspond ainsi en principe à l’impôt sur les sociétés effectivement payé par la société qui a distribué les dividendes (10).

48.      Pour permettre aux différents bureaux de taxation chargés de la déclaration de revenu des différents actionnaires d’établir le montant exact du crédit d’impôt sur le revenu, les actionnaires sont tenus de produire une attestation de l’impôt sur les sociétés qu’il appartient à l’entreprise qui a distribué les dividendes d’établir selon un modèle administratif. Cette attestation permet de calculer l’impôt sur les sociétés grevant effectivement les dividendes distribués. En l’absence de cette attestation de l’impôt sur les sociétés, la loi exclut toute imputation de l’impôt sur les sociétés grevant les dividendes.

49.      Enfin, une autre caractéristique de ce régime est que l’imputation de l’impôt sur les sociétés dû se fait indépendamment de l’acquittement effectif de ce même impôt sur les sociétés. D’après les indications de la juridiction de renvoi, le régime fiscal allemand conduit toutefois généralement en pratique à ce que l’imputation de l’impôt sur les sociétés fixée à 3/7 des dividendes bruts corresponde à l’impôt sur les sociétés effectivement acquitté par la société qui a distribué les dividendes.

B –    Première question préjudicielle

50.      Par sa première question, le juge de renvoi souhaite en substance savoir si l’imputation de l’impôt sur les sociétés grevant les dividendes des sociétés d’autres États de l’Union européenne sur l’impôt sur le revenu des actionnaires doit ou peut se faire sous la forme d’un crédit d’impôt égal aux mêmes 3/7 des dividendes bruts applicables aux dividendes distribués par les sociétés allemandes lorsque l’impôt sur les sociétés grevant effectivement ces dividendes UE est indéterminable et peut donc être supérieur à l’impôt de distribution au taux fixe de 30 % grevant les dividendes des sociétés allemandes.

51.      Pour répondre à cette question, il convient, tout d’abord, de rappeler une nouvelle fois que, dans l’arrêt Meilicke e.a. (11), la Cour a dit pour droit que les articles 56 CE et 58 CE s’opposent à une réglementation fiscale en vertu de laquelle, lors d’une distribution de dividendes par une société de capitaux, un actionnaire assujetti à titre principal en Allemagne bénéficie d’un avoir fiscal, calculé en fonction du taux d’imposition des bénéfices distribués au titre de l’impôt sur les sociétés, lorsque la société distributrice est établie dans le même État membre, mais non lorsque ladite société est établie dans un autre État membre (12).

52.      L’arrêt Meilicke e.a. permet ainsi de dire que l’impôt sur les sociétés grevant les dividendes UE doit être imputé sur l’impôt sur le revenu des actionnaires de manière équivalente à l’impôt sur les sociétés grevant les dividendes des sociétés allemandes.

53.      Cette obligation peut être remplie en faisant jouer plusieurs solutions offertes par la procédure fiscale (13). Dans sa question, le juge de renvoi considère que le régime du crédit d’impôt applicable aux dividendes versés par les sociétés allemandes peut aussi s’appliquer aux dividendes UE. Cette méthode est en principe compatible avec le droit de l’Union.

54.      La double imposition des dividendes versés par les sociétés allemandes est en substance évitée en compensant l’impôt sur les sociétés grevant les dividendes par la voie d’un crédit d’impôt sur le revenu dont le montant est fonction du taux de l’impôt sur les sociétés effectivement applicable aux bénéfices distribués: le crédit d’impôt sur le revenu «fixe» de 3/7 des dividendes bruts versés par les sociétés allemandes correspond en principe à un impôt sur les sociétés effectif de 30 % (14). Il s’ensuit directement que les crédits d’impôt sur le revenu destinés à prévenir la double imposition des dividendes UE doivent, eux aussi, être fonction de l’impôt sur les sociétés grevant effectivement ces dividendes. L’impôt sur les sociétés grevant effectivement les dividendes doit s’entendre à cet égard comme étant l’impôt sur les sociétés que la société distributrice a versé ou doit effectivement verser sur les distributions de dividendes.

55.      Au cas où l’impôt sur les sociétés grevant effectivement les dividendes UE s’élève à 30 % ou moins, ces considérations conduisent à accorder un crédit d’impôt sur le revenu calculé en fonction de cet impôt prélevé en amont. Si l’impôt sur les sociétés grevant des dividendes UE s’avère être de 20 %, les actionnaires devront donc se contenter d’un crédit d’impôt sur le revenu de 2/8 des dividendes bruts. Si l’impôt sur les sociétés prélevé en amont s’avère être de 25 %, il devra être compensé par un crédit d’impôt sur le revenu de 25/75 des dividendes bruts.

56.      On voit ainsi que ce n’est que lorsque l’impôt sur les sociétés grevant les dividendes s’avère être effectivement de 30 % que les contribuables recueillant les dividendes UE sont en droit de se voir accorder, au titre du droit de l’Union, un crédit d’impôt de 3/7 des dividendes bruts correspondant au taux nominal applicable aux dividendes versés par les sociétés allemandes. Cela est au reste logique, dès lors que la libre circulation des capitaux ne requiert pas de réserver un régime fiscal plus favorable aux dividendes versés par les entreprises étrangères.

57.      La libre circulation des capitaux n’interdisant toutefois pas de réserver un régime fiscal plus favorable aux dividendes UE, si l’impôt sur les sociétés grevant les dividendes UE s’élève à 30 % ou moins, tant le crédit d’impôt sur le revenu établi «en fonction» de cet impôt prélevé en amont que l’imputation forfaitaire de 3/7 des dividendes bruts devraient au final être jugés conformes au droit de l’Union.

58.      Les choses s’apprécient en revanche différemment lorsque l’impôt sur les sociétés grevant effectivement les dividendes UE dépasse 30 %.

59.      Dans une analyse mettant unilatéralement l’accent sur l’effet des libertés fondamentales, on pourrait soutenir que le crédit d’impôt sur le revenu de 3/7 des dividendes versés par les sociétés allemandes correspond en principe toujours intégralement à l’impôt sur les sociétés de 30 % grevant les dividendes en sorte que l’impôt sur les sociétés versé par les sociétés allemandes est imputé sur l’impôt sur le revenu sans être plafonné par la loi. On pourrait à nouveau en conclure que l’imputation de l’impôt sur les sociétés versé par les sociétés d’autres États de l’Union européenne ne pourrait pas non plus être plafonnée par la loi. Dans cette logique, un impôt sur les sociétés de 40 % grevant effectivement les dividendes UE justifierait que le bénéficiaire soumis à l’impôt sur le revenu obtienne, au titre du droit de l’Union, un crédit d’impôt sur le revenu de 4/6 de ces dividendes (15).

60.      Ce genre d’analyse perdrait toutefois de vue que le régime allemand d’imputation procède finalement de la décision que la République fédérale d’Allemagne a prise, dans l’exercice de sa souveraineté fiscale, de mettre en place dans la fiscalité des sociétés un impôt de distribution uniforme de 30 % sur le capital propre utilisé pour distribuer des dividendes. Le crédit d’impôt sur le revenu accordé aux actionnaires à hauteur de 3/7 de la distribution de dividendes visant en définitive à compenser l’impôt sur les sociétés grevant les distributions de dividendes, cette décision de principe, prise par la République fédérale d’Allemagne, de soumettre les distributions de dividendes à un taux uniforme de l’impôt sur les sociétés de 30 % se traduit dans la fraction de 3/7.

61.      Si la République fédérale d’Allemagne était à présent tenue de compenser, même au-delà d’un taux de 30 %, l’impôt sur les sociétés grevant les dividendes UE, cela signifierait qu’elle devrait neutraliser l’impôt sur les sociétés grevant les dividendes UE au-delà du niveau de l’impôt allemand sur les sociétés. Cela aboutirait en définitive à obliger la République fédérale d’Allemagne à compenser dans l’impôt sur le revenu les conséquences de la décision prise par un autre État membre, dans l’exercice de sa souveraineté fiscale, d’imposer, dans sa fiscalité des sociétés, les distributions de dividendes à un taux supérieur à 30 %.

62.      On ne saurait déduire une obligation aussi exorbitante des libertés fondamentales. Si les dividendes UE ont subi un impôt sur les sociétés supérieur à 30 %, l’actionnaire soumis en Allemagne à l’impôt sur le revenu ne tire donc du droit de l’Union qu’un droit à se voir accorder un crédit d’impôt sur le revenu de 3/7 de cette distribution de dividendes. Les différences observées dans l’imputation de cet impôt dans l’impôt sur le revenu par rapport aux dividendes versés par les sociétés allemandes doivent être qualifiées à cet égard d’inconvénients dus aux disparités dans la fiscalité des sociétés des États membres impliqués. Compte tenu de la compétence que les États membres ont conservée dans la fiscalité directe (16), ce sont les contribuables en question qui doivent en définitive supporter ce genre d’inconvénients (17).

63.      On renverra à cet égard tout particulièrement à l’arrêt Test Claimants in the FII Group Litigation (18), dans lequel la Cour a été amenée à aborder notamment un régime fiscal national de prévention de l’imposition en chaîne de dividendes distribués à une société résidente. Ce régime prévoyait une exonération fiscale pour les dividendes versés par les sociétés résidentes et une imputation de l’impôt versé en amont pour les dividendes versés par les sociétés non résidentes. La Cour a estimé un tel système conforme aux libertés fondamentales pour autant que, d’une part, les dividendes d’origine étrangère ne soient pas soumis, dans cet État membre, à un taux d’imposition supérieur au taux appliqué aux dividendes d’origine nationale et que, d’autre part, cet État membre évite l’imposition en chaîne des dividendes d’origine étrangère en imputant le montant d’impôt acquitté par la société distributrice non résidente sur le montant de taxation applicable à la société bénéficiaire résidente dans la limite de ce dernier montant (19). S’agissant de la mise en œuvre concrète de cette imputation, la Cour a ensuite indiqué que, lorsque les bénéfices sous-jacents aux dividendes d’origine étrangère sont soumis dans l’État membre de la société distributrice à un impôt inférieur à l’impôt prélevé par l’État membre de la société bénéficiaire, ce dernier doit accorder un crédit d’impôt total correspondant à l’impôt acquitté par la société distributrice dans son État membre de résidence. Lorsque, en revanche, ces bénéfices sont soumis dans l’État membre de la société distributrice à un impôt supérieur à l’impôt prélevé par l’État membre de la société bénéficiaire, ce dernier n’est contraint d’accorder un crédit d’impôt que dans la limite du montant de l’impôt sur les sociétés dû par la société bénéficiaire (20).

64.      Compte tenu du contexte particulier dans lequel s’inscrivait la procédure au principal, la Cour a déterminé en définitive dans l’arrêt Test Claimants in the FII Group Litigation que l’obligation faite par les libertés fondamentales de prévenir la double imposition ne va pas jusqu’à contraindre un État membre à rembourser à la société résidente, qui perçoit des dividendes UE, la portion de l’impôt versé en amont qui dépasserait le taux d’imposition en vigueur dans cet État membre. À cet égard, tout État membre n’est tenu au regard du droit de l’Union de prévenir la double imposition qu’à concurrence de son propre niveau d’imposition (21).

65.      Dans la présente affaire, il me semble qu’il faille aussi considérer que l’obligation faite par la liberté de circulation des capitaux de prévenir la double imposition des dividendes UE ne doit pas aller jusqu’à devoir accorder au contribuable soumis à l’impôt sur le revenu allemand qui perçoit des dividendes UE un crédit d’impôt sur le revenu dépassant le taux unique de l’impôt national sur les sociétés grevant les dividendes et le remboursement correspondant opéré sur l’impôt sur le revenu.

66.      Tout cela m’amène à conclure que les contribuables soumis à l’impôt sur le revenu en Allemagne, qui perçoivent de sociétés d’autres États de l’Union européenne des dividendes effectivement grevés d’un impôt sur les sociétés dépassant 30 %, ont le droit d’imputer cet impôt versé en amont à concurrence du taux de 30 % de l’impôt sur les sociétés en vigueur en Allemagne. Dans un tel cas de figure, l’octroi du crédit d’impôt sur le revenu de 3/7 des dividendes doit, par conséquent, être jugé conforme au droit de l’Union.

67.      Si, contrairement à ce que je soutiens, la Cour devait déterminer en définitive que l’impôt sur les sociétés grevant les dividendes UE doit être intégralement imputé, même quand il dépasse 30 %, cela signifierait qu’un impôt sur les sociétés grevant effectivement des dividendes de 40 % devrait donner lieu à un crédit d’impôt sur le revenu de 4/6 des dividendes perçus; un impôt de 50 % justifierait un crédit d’impôt sur le revenu de ½ des dividendes perçus.

68.      Compte tenu des lourdes répercussions que cette solution pourrait avoir, il conviendrait alors d’examiner en plus si l’obligation d’imputer sans plafond l’impôt sur les sociétés grevant les dividendes des sociétés d’autres États de l’Union européenne sape la cohérence du système fiscal national et, le cas échéant, les conséquences qu’il faudrait en tirer.

69.      Il faudrait notamment rechercher à ce titre si la fixation par l’Allemagne de l’impôt de distribution sur les dividendes allemands à 30 % et le crédit d’impôt sur le revenu qui y répond à hauteur de 3/7 des dividendes bruts conduit normalement à ce que ce crédit d’impôt soit inférieur à la dette d’impôt sur le revenu afférente aux dividendes. Si tel est le cas, il faudrait alors toujours rechercher dans la procédure concrète d’imputation des impôts sur les sociétés grevant les dividendes UE si le crédit d’impôt sur le revenu à accorder dépasse la dette d’impôt sur le revenu afférente à ces dividendes. Dans les cas où le crédit d’impôt dépasserait en fait cette dette fiscale, on risquerait de compromettre la cohérence du système fiscal allemand. La préservation du système fiscal national (22), en tant que cause de justification générale, requerrait alors d’examiner en plus si, dans un tel cas, la République fédérale d’Allemagne devrait être autorisée à limiter le crédit d’impôt sur le revenu pour les dividendes UE à la dette d’impôt sur le revenu de l’actionnaire afférente à ces mêmes dividendes.

70.      En résumé, je conclus par tous ces motifs que les articles 56 CE et 58 CE doivent être interprétés en ce sens qu’ils commandent, dans un cas comme celui qui se présente dans la procédure au principal, d’imputer l’impôt sur les sociétés grevant les dividendes UE sur l’impôt sur le revenu des actionnaires, sous la forme d’un crédit d’impôt sur le revenu calculé en fonction de l’impôt sur les sociétés grevant effectivement ces dividendes. Cette imputation ne doit toutefois pas dépasser le taux de l’impôt sur les sociétés applicable aux dividendes versés par les sociétés résidentes.

C –    Deuxième question préjudicielle

71.      Par sa deuxième question préjudicielle, le juge de renvoi souhaite entendre préciser si et, le cas échéant, à quelles conditions l’imputation, sur l’impôt sur le revenu des actionnaires, de l’impôt sur les sociétés grevant les dividendes UE peut être liée à la production d’une attestation de l’impôt sur les sociétés qu’il appartient à la société distributrice d’établir dans un modèle prescrit par la loi, étant entendu que cette obligation de produire l’attestation vaut aussi pour l’imputation de l’impôt sur les sociétés grevant les dividendes versés par les sociétés résidentes.

72.      Pour répondre à cette question, on rappellera tout d’abord que, dans l’arrêt Meilicke e.a., la Cour a réaffirmé en définitive que l’actionnaire contribuable en Allemagne, qui perçoit des dividendes UE, doit se voir délivrer, au titre des articles 56 CE et 58 CE et au regard de la législation interne applicable ratione temporis, un crédit d’impôt sur le revenu calculé en substance en fonction du taux de l’impôt sur les sociétés applicable aux bénéfices distribués par la société distributrice.

73.      La mise en œuvre de ce droit que l’actionnaire en question tire du droit de l’Union présuppose toutefois de pouvoir déterminer l’impôt sur les sociétés grevant effectivement les dividendes dans l’État où la société distributrice est soumise à l’impôt sur les sociétés.

74.      Sous cet angle, on doit comprendre la deuxième question préjudicielle en ce sens que la Cour est invitée à préciser si une règle interne de procédure voulant que l’impôt sur les sociétés grevant les dividendes UE ne puisse être prouvé que par une attestation que les sociétés distributrices doivent établir selon un modèle particulièrement précis prescrit par la loi est compatible avec le droit de l’Union.

75.      Il convient de répondre à cette question en considérant le principe de l’autonomie procédurale des États membres que la Cour a développé dans sa jurisprudence.

76.      Selon cette jurisprudence, en l’absence de réglementation de l’Union en la matière, il appartient à l’ordre juridique interne de chaque État membre de régler les modalités procédurales des recours en justice destinés à assurer la sauvegarde des droits que les justiciables tirent du droit de l’Union, pour autant, d’une part, que ces modalités ne soient pas moins favorables que celles des recours similaires dans les affaires de nature interne (principe d’équivalence) et, d’autre part, qu’elles ne rendent pas pratiquement impossible ou excessivement difficile l’exercice des droits conférés par l’ordre juridique de l’Union (principe d’effectivité) (23).

77.      On se demande, en particulier, à cet égard si la production requise de l’attestation visée aux articles 44 et suivants du KStG pour prouver l’impôt grevant effectivement les dividendes provenant d’autres États de l’Union européenne ne rend pas pratiquement impossible ou excessivement difficile l’exercice du droit – conféré par l’ordre juridique de l’Union – à l’imputation de cet impôt versé en amont sur l’impôt sur le revenu, au mépris du principe d’effectivité.

78.      Même s’il appartient en définitive au juge de renvoi de répondre à cette question, il se trouve que la décision de renvoi renferme un ensemble d’indices montrant que la production requise de l’attestation visée aux articles 44 et suivants du KStG pour prouver l’impôt sur les sociétés grevant les dividendes UE enfreint très probablement le principe d’effectivité. Le juge de renvoi expose, en effet, de manière circonstanciée que l’attestation de l’impôt sur les sociétés visée par les articles 44 et suivants du KStG est indissociablement liée aux règles complexes visant à établir un impôt de distribution de 30 % des dividendes bruts, étant entendu que ces règles connaissent à leur tour un certain nombre d’exceptions. L’attestation de l’impôt sur les sociétés reflétant dans le fond cette fiscalité complexe des sociétés, elle ne peut normalement être établie que par les entreprises soumises à ces règles.

79.      Par ces motifs, il convient de répondre à la deuxième question préjudicielle qu’une règle interne voulant que l’imputation dans l’impôt sur le revenu de l’impôt sur les sociétés grevant les dividendes UE requière toujours l’attestation visée aux articles 44 et suivants du KStG pour prouver cet impôt prélevé en amont enfreint le principe d’effectivité, dans la mesure où l’on devrait constater que cette exigence rend impossible en pratique ou excessivement difficile l’imputation de l’impôt sur les sociétés versé par les sociétés des autres États de l’Union européenne. Il appartient au juge de renvoi de le constater en l’espèce.

D –    Troisième question préjudicielle

80.      Par sa troisième question préjudicielle, le juge de renvoi souhaite savoir si et, le cas échéant, à quelles conditions, lorsque l’impôt sur les sociétés grevant les dividendes UE ne peut pas être déterminé, les articles 56 CE et 58 CE commandent de l’estimer aux fins de l’imputation. Le juge de renvoi demande au reste de préciser si, le cas échéant, cette estimation doit aussi prendre en compte l’impôt sur les sociétés prélevé indirectement en amont.

81.      Même si, par cette question, le juge de renvoi souhaite simplement savoir si et, le cas échéant, à quelles conditions et de quelle manière l’impôt sur les sociétés grevant les dividendes des sociétés d’autres États de l’Union peut ou doit être déterminé par voie d’estimation, il me semble utile, dans un cas comme celui qui se présente dans la procédure au principal, de répondre à la demande de décision préjudicielle en creusant, dans l’analyse de la question, la problématique de la charge de la preuve et du risque de la preuve ainsi que celle de l’appréciation de la preuve dans son ensemble. Le juge de renvoi ayant exprimé à plusieurs reprises dans sa demande de décision préjudicielle ses doutes sur différents aspects de la charge de la preuve et de l’appréciation de la preuve dans la procédure au principal, les parties ont également présenté des observations sur ces points. De surcroît, bien qu’elle ne soit pas appelée à apprécier elle-même les faits du litige au principal, la Cour peut néanmoins donner à la juridiction de renvoi toutes les indications utiles, au regard des particularités de l’espèce, qui faciliteront la solution du litige au principal.

82.      La question de savoir de quelle manière le contribuable et les autorités fiscales nationales doivent, dans un cas comme celui qui se présente en l’espèce, contribuer à déterminer l’impôt sur les sociétés grevant effectivement les dividendes UE ainsi que la question du rôle de la juridiction nationale dans l’examen et l’appréciation des preuves trouveront leur réponse au regard des principes découlant de l’autonomie procédurale des États membres.

83.      Ainsi que je l’ai déjà exposé, le principe de l’autonomie procédurale des États membres doit se comprendre en ce sens que, en l’absence de réglementation de l’Union en la matière, il appartient à l’ordre juridique de chacun des États membres de définir les procédures appelées à garantir la protection des droits que le citoyen tire du droit de l’Union, dans le respect du principe d’équivalence et du principe d’effectivité (24).

84.      Il ressort de la décision de renvoi que l’actionnaire contribuable doit prouver l’existence et l’étendue de l’impôt sur les sociétés grevant les dividendes versés par les sociétés résidentes en produisant une attestation de l’impôt sur les sociétés. Si cette attestation n’est pas produite, aucune imputation n’est opérée. On voit ainsi que, dans le régime fiscal allemand, le contribuable ne supporte pas seulement la charge de la preuve, mais également le risque de la preuve. De surcroît, l’assujetti ne dispose en principe que d’un seul moyen de preuve, à savoir l’attestation de l’impôt sur les sociétés visée aux articles 44 et suivants du KStG.

85.      Ainsi que je l’ai déjà indiqué dans la réponse à la deuxième question préjudicielle, la production de l’attestation visée aux articles 44 et suivants du KStG requise pour prouver l’impôt sur les sociétés grevant les dividendes UE heurterait le principe d’effectivité dans la mesure où cela rend pratiquement impossible ou excessivement difficile l’exercice du droit conféré par l’ordre juridique de l’Union d’imputer dans l’impôt sur le revenu l’impôt sur les sociétés versé en amont (25). Cela ne veut toutefois pas dire que, de ce fait même, la répartition de la charge et du risque de la preuve dans la fiscalité allemande doive être qualifiée de contraire au droit de l’Union dans les affaires transfrontalières.

86.      On doit plutôt considérer qu’une règle voulant qu’un actionnaire contribuable en Allemagne ne puisse se prévaloir de l’impôt sur les sociétés grevant les dividendes UE que si et dans la mesure où il prouve réellement l’impôt effectivement prélevé en amont est compatible avec le principe d’effectivité. Une telle répartition faisant peser la charge et le risque de la preuve sur le contribuable n’aboutit pas en soi à rendre pratiquement impossible ou excessivement difficile l’exercice du droit d’imputer l’impôt sur les sociétés grevant les dividendes UE (26).

87.      Dans l’esprit du juge de renvoi, cette répartition de la charge et du risque de la preuve aboutirait de facto, dans un cas comme celui qui se présente dans la procédure au principal, à empêcher durablement les actionnaires d’imputer l’impôt sur les sociétés (27). Compte tenu de la fiscalité danoise et néerlandaise dans les années en cause, il est en effet pratiquement impossible selon lui, ou seulement au prix d’efforts démesurés, de prouver l’impôt sur les sociétés grevant effectivement les distributions de dividendes danois et néerlandais en cause.

88.      Selon moi, les objections d’ordre pratique évoquées par le juge de renvoi ne ruinent pas la conformité au droit de l’Union d’un régime d’imputation faisant peser sur l’actionnaire contribuable tant la charge que le risque de la preuve à l’égard de l’impôt sur les sociétés grevant les dividendes UE. Ces objections d’ordre pratique touchent en effet à l’architecture des fiscalités danoises et néerlandaises des sociétés qui, d’après les indications du juge de renvoi, ne permettent que difficilement de déterminer l’impôt sur les sociétés grevant effectivement les dividendes. En l’absence d’harmonisation sur le plan de l’Union en matière de fiscalité directe, les États membres sont toutefois compétents pour définir unilatéralement ces aspects de leur fiscalité des sociétés dans le respect du droit de l’Union. Les désavantages qui peuvent découler pour les contribuables de l’exercice non concerté de ces compétences par les États membres ne constituent pas des restrictions interdites par le droit primaire pour autant que cet exercice ne soit pas discriminatoire (28). Le droit de l’Union ne crée, en effet, pas d’obligation autonome à charge des États membres de concilier mutuellement leurs systèmes fiscaux nationaux dans les matières dans lesquelles ils ont conservé leur autonomie fiscale à ce stade de l’harmonisation (29).

89.      La répartition en cause faite dans le régime allemand de la charge et du risque de la preuve étant, selon moi, conforme au principe d’effectivité (30) sans être susceptible d’être jugée discriminatoire envers les actionnaires des sociétés d’autres États de l’Union européenne, les objections que le juge de renvoi tire de l’impossibilité pratique de prouver l’impôt sur les sociétés danois ou néerlandais grevant effectivement les dividendes en raison de l’architecture des fiscalités danoise et néerlandaise doivent, en définitive, être qualifiées d’inconvénients pour les actionnaires contribuables sans constituer des restrictions interdites dans l’état actuel du droit de l’Union.

90.      La question qui se pose également dans la procédure au principal est de savoir si, dans les dossiers transfrontaliers, la directive 77/799 n’aboutit pas à renverser la charge de la preuve en la faisant passer des actionnaires contribuables aux autorités fiscales. À mon sens, cette question appelle également une réponse négative.

91.      Selon une jurisprudence constante de la Cour, la directive 77/799 peut être invoquée par un État membre afin d’obtenir des autorités compétentes d’un autre État membre toutes les informations nécessaires pour lui permettre d’établir correctement le montant des taxes couvertes par ladite directive (31). L’article 2, paragraphe 1, de cette directive prévoit notamment la faculté pour les administrations fiscales nationales de demander des informations qu’elles ne peuvent obtenir elles-mêmes. La Cour a estimé que l’emploi du verbe «peut» dans ce contexte est de nature à indiquer que les administrations ont certes la faculté de demander des informations à l’autorité compétente d’un autre État membre, mais ne sont pas tenues de le faire. Il appartient à chaque État membre d’apprécier les cas spécifiques dans lesquels des informations concernant les transactions de contribuables établis sur son territoire font défaut et de décider si ces cas justifient de demander des informations à un autre État membre (32).

92.      Il appartient toutefois aux États membres de décider de présenter ou non une demande d’information au titre de la directive 77/799, en ayant toujours en vue le principe d’équivalence. Dans la mesure où les autorités nationales compétentes pour prélever l’impôt sur le revenu afférent aux distributions de dividendes des sociétés établies sur leur territoire demandent habituellement, en cas de doute pour une raison ou une autre sur le montant de l’impôt sur les sociétés prélevé en amont, des informations aux autorités compétentes pour prélever l’impôt sur les sociétés afférent aux bénéfices distribués, le principe d’équivalence veut que, dans les dossiers transfrontaliers aussi, les autorités compétentes pour prélever l’impôt sur le revenu demandent, en cas de doute, aux autorités compétentes pour prélever l’impôt sur les sociétés de l’État membre dans lequel la société est établie, des informations, au titre de la directive 77/799, sur l’impôt sur les sociétés grevant les dividendes concernés.

93.      Quant à savoir par quels moyens de preuve l’actionnaire contribuable doit rapporter la preuve de l’impôt sur les sociétés grevant les dividendes UE, j’ai déjà indiqué que la production requise de l’attestation visée aux articles 44 et suivants du KStG n’est très vraisemblablement pas conforme au principe d’effectivité.

94.      Le principe d’effectivité commande en plus, dans un cas comme celui qui se présente dans la procédure au principal, de donner à l’actionnaire contribuable les moyens procéduraux de rapporter effectivement cette preuve (33).

95.      La question de savoir quels sont les moyens de preuve qui, dans ce contexte, doivent être admis dans un cas comme celui qui se présente dans la procédure au principal ne peut pas recevoir de réponse dans l’abstrait. On devrait toutefois normalement considérer que l’administration de la preuve serait rendue excessivement difficile à l’actionnaire d’une société de capitaux d’un autre État de l’Union européenne si les déclarations ou attestations établies par cette entreprise n’étaient jamais reçues comme preuve. Les difficultés d’ordre administratif rencontrées par l’administration fiscale dans la vérification de preuves recueillies à l’étranger ne suffisent pas, dans ce contexte, pour rejeter en bloc ce type de preuves (34). Il est toutefois loisible aux États membres d’insister sur la production de preuves probantes permettant en pratique aux administrations fiscales de vérifier avec une précision suffisante si et dans quelle mesure la société distributrice a subi un impôt sur les sociétés grevant les dividendes UE versés (35).

96.      Il appartient en définitive, dans ce contexte, aux juridictions nationales d’apprécier la preuve dans le respect des principes d’effectivité et d’équivalence.

97.      La question du juge de renvoi visant à savoir si et, le cas échéant, à quelles conditions les articles 56 CE et 58 CE commandent d’estimer l’impôt sur les sociétés grevant effectivement les dividendes UE lorsqu’il ne peut pas être déterminé ne peut recevoir de réponse complète qu’en prenant en compte les missions et compétences du juge national appelé à apprécier des preuves dans les recours fiscaux analogues concernant des affaires purement nationales. Le principe de l’équivalence ne dicterait, en effet, une estimation en justice de l’impôt sur les sociétés grevant les dividendes UE que si, dans un recours fiscal analogue concernant une affaire purement nationale, le juge national appelé à apprécier une preuve était également tenu de se livrer à une estimation d’un impôt prélevé en amont qui ne pourrait pas être déterminé concrètement.

98.      Si, en revanche, les règles de procédure fiscale nationales n’imposent pas au juge national de se livrer à des estimations de cet ordre, cette obligation ne découlerait pas non plus du principe d’effectivité. En effet, ainsi que je l’ai déjà exposé (36), une règle de droit interne voulant qu’un actionnaire contribuable dans le pays ne puisse se prévaloir de l’impôt sur les sociétés grevant les dividendes UE que si et dans la mesure où il prouve réellement l’impôt effectivement prélevé en amont est compatible, comme telle, avec le principe d’effectivité. Il s’ensuit directement que le principe d’effectivité ne requiert pas d’estimation en justice de l’impôt sur les sociétés grevant les dividendes UE quand cet impôt versé en amont ne peut pas être déterminé.

99.      La question de savoir si l’imputation de l’impôt sur les sociétés grevant les dividendes UE doit aussi prendre en compte les impôts prélevés indirectement en amont ne peut pas recevoir de réponse dans l’abstrait. Ainsi que je l’ai déjà exposé, l’arrêt Meilicke e.a. (37) doit être interprété en ce sens que, dans un cas comme celui qui se présente dans la procédure au principal, l’imputation de l’impôt sur les sociétés grevant les dividendes provenant du Danemark et des Pays-Bas doit en principe se faire de manière équivalente à l’imputation de l’impôt sur les sociétés grevant les dividendes provenant d’Allemagne (38). Dans ce contexte, les impôts sur les sociétés grevant indirectement les dividendes UE doivent être pris en compte dans le calcul du montant du crédit d’impôt si et dans la mesure où les impôts sur les sociétés grevant indirectement les dividendes allemands ont, eux aussi, une incidence sur le montant du crédit d’impôt accordé aux actionnaires.

100. Par tous ces motifs, il convient de répondre à la troisième question préjudicielle que, en l’absence de réglementation de l’Union en la matière, c’est aux États membres qu’il appartient de déterminer, dans le respect du principe d’équivalence et du principe d’effectivité, les règles de répartition de la charge et du risque de la preuve ainsi que celles régissant l’appréciation de la preuve par le juge, applicables dans la détermination de l’impôt sur les sociétés grevant les dividendes UE. Le principe d’effectivité ne crée aucune obligation d’estimer en justice l’impôt sur les sociétés grevant les dividendes UE qui ne peut pas être déterminé. Le principe d’équivalence dicte toutefois cette obligation au cas où un juge national serait tenu de se livrer à une estimation de cette nature dans une situation analogue purement interne. Les impôts sur les sociétés grevant indirectement les dividendes UE doivent être pris en compte dans la mesure où les impôts sur les sociétés grevant indirectement les dividendes versés par les sociétés résidentes ont, eux aussi, une incidence sur le montant du crédit d’impôt accordé aux actionnaires.

E –    Quatrième question préjudicielle

101. Dans sa quatrième question préjudicielle, le juge de renvoi part du constat que l’avis d’imposition du 26 juillet 2000 couvrant les revenus de 1997 de M. H. Meilicke ne comporte pas de réserve de vérification en sorte qu’il a acquis un caractère définitif dans l’intervalle. Aux termes de l’article 175 de l’AO, dans la version en vigueur jusqu’au 28 octobre 2004, ce type d’avis d’imposition pouvait être rectifié, en dépit de son caractère définitif, en cas de survenance d’un événement qui avait un effet fiscal pour le passé (événement à effet rétroactif), étant entendu que la production ultérieure de l’attestation de l’impôt sur les sociétés visée par les articles 44 et suivants du KStG devait être assimilée à un événement à effet rétroactif. La loi du 8 décembre 2004 (39) transposant des directives de l’Union européenne (ci-après la «loi modificative du 8 décembre 2004») a modifié l’article 175 de l’AO avec effet au 29 octobre 2004 sans période transitoire en ce sens que la délivrance ou la production ultérieures d’une attestation ou d’un certificat n’ont pas valeur d’événement à effet rétroactif. Il n’y a, de ce fait, plus eu moyen rétroactivement à partir du 29 octobre 2004 de revenir sur le caractère définitif acquis par les avis d’imposition en produisant ultérieurement une attestation de l’impôt sur les sociétés.

102. Au cas où la Cour devrait répondre à la deuxième question préjudicielle en ce sens que l’imputation dans l’impôt sur le revenu de l’impôt sur les sociétés grevant les dividendes UE peut être liée à la production de l’attestation visée aux articles 44 et suivants du KStG, le juge de renvoi souhaite savoir, d’une part, si la modification rétroactive de l’article 175 de l’AO est conforme au droit de l’Union [quatrième question, sous a)].

103. Au cas où la Cour devrait répondre à la deuxième question préjudicielle en ce sens que l’impôt sur les sociétés grevant les dividendes UE peut être prouvé par d’autres moyens que l’attestation visée aux articles 44 et suivants du KStG, le juge de renvoi souhaite savoir, d’autre part, s’il est conforme au droit de l’Union d’interpréter l’article 175 de l’AO, dans la version en vigueur jusqu’au 28 octobre 2004, en ce sens qu’un avis d’imposition définitif peut être rectifié sur production ultérieure de l’attestation de l’impôt sur les sociétés visée aux articles 44 et suivants du KStG, alors que cette même rectification est exclue sur production de déclarations ou d’attestations relatives aux dividendes UE, ne répondant pas aux formes prescrites par les articles 44 et suivants du KStG [quatrième question, sous b)].

104. Dès lors qu’il convient, selon moi, de répondre à la deuxième question en ce sens que l’impôt sur les sociétés grevant les dividendes UE peut aussi être prouvé par d’autres moyens que l’attestation visée aux articles 44 et suivants du KStG, je commencerai par examiner la quatrième question, sous b). Une fois cette analyse faite, j’examinerai ensuite le problème suscité par la modification rétroactive de l’article 175 de l’AO évoquée dans la quatrième question, sous a). En effet, bien que cette sous-question n’ait été posée qu’au cas où l’impôt sur les sociétés grevant les dividendes UE doit être prouvé par l’attestation visée aux articles 44 et suivants du KStG, elle présente également un intérêt au cas où cette preuve peut être rapportée par d’autres moyens.

1.      La quatrième question, sous b)

105. C’est une nouvelle fois au regard des principes de l’autonomie procédurale des États membres qu’il convient de répondre à la quatrième question, sous b), visant à savoir s’il est conforme au droit de l’Union qu’un avis d’imposition ayant acquis un caractère définitif puisse être rectifié aux fins d’imputer l’impôt sur les sociétés grevant les dividendes imposés (40) lorsque cet impôt versé en amont est prouvé par la production ultérieure de l’attestation de l’impôt sur les sociétés visée aux articles 44 et suivants du KStG, alors que cette même rectification est exclue sur production de déclarations ou d’attestations relatives aux dividendes UE, ne répondant pas aux formes prescrites par les articles 44 et suivants du KStG.

106. Il convient de relever, tout d’abord, à cet égard qu’une réglementation prévoyant, pour les seuls dividendes versés par les sociétés du pays, la possibilité de rectifier ultérieurement des avis définitifs d’imposition aux fins d’imputer l’impôt sur les sociétés grevant les dividendes imposés et pas, en revanche, pour les dividendes UE, doit être jugée défavorable aux dividendes UE et restrictive de la libre circulation des capitaux et, de ce fait, en principe interdite (41). On doit, dès lors, considérer sous cet angle que l’ordre juridique de l’Union accorde aux contribuables qui perçoivent des dividendes UE, dans un cas comme celui qui se présente dans l’affaire au principal, un droit à la rectification ultérieure de l’imposition de ces dividendes figurant dans les avis d’imposition aux fins d’imputer l’impôt sur les sociétés grevant ces dividendes, dans la mesure où cette rectification ultérieure peut aussi être sollicitée par les contribuables qui perçoivent des dividendes versés par les sociétés du pays.

107. Conformément aux principes développés dans la jurisprudence de la Cour en matière d’autonomie procédurale des États membres, il appartient à ces derniers, en l’absence de réglementation de l’Union en la matière, de définir les procédures mettant en œuvre ce droit dans le respect des principes d’équivalence et d’effectivité (42). À cet égard, on se demande ici en particulier si l’on ne méconnaît pas le principe d’effectivité en exigeant, par analogie avec les dividendes versés par les sociétés du pays, de produire ultérieurement l’attestation de l’impôt sur les sociétés visée aux articles 44 et suivants du KStG pour prouver l’impôt sur les sociétés grevant les dividendes UE.

108. Il appartient, en définitive, au juge de renvoi de trancher cette question de la méconnaissance éventuelle du principe d’effectivité. La décision de renvoi comporte toutefois un ensemble d’indices montrant que la production ultérieure requise de l’attestation visée aux articles 44 et suivants du KStG pour prouver l’impôt sur les sociétés grevant les dividendes UE heurterait le principe d’effectivité dans le présent contexte. En effet, ainsi que je l’ai déjà exposé dans la réponse à la deuxième question préjudicielle, l’attestation de l’impôt sur les sociétés visée aux articles 44 et suivants du KStG est indissociablement liée aux règles complexes visant à établir un impôt de distribution de 30 % des dividendes bruts, en sorte que les entreprises des autres États de l’Union européenne, qui ne sont pas soumises à ce régime, ne peuvent normalement pas établir ce genre d’attestation (43).

109. Si le juge de renvoi devait constater une atteinte au principe d’effectivité, il se trouve que ce principe veut en outre que les règles de procédure donnent au contribuable qui perçoit des dividendes UE la possibilité de rapporter la preuve de l’impôt sur les sociétés versé en amont à l’étranger aux fins de voir rectifier les avis d’imposition définitifs établis au titre de l’impôt sur le revenu (44).

110. La question de savoir quelles sont les preuves qui doivent être reçues dans ce cas ne peut recevoir de réponse dans l’abstrait. On pourrait toutefois considérer normalement que l’administration de la preuve se trouverait excessivement compliquée pour l’actionnaire d’une société de capitaux établie dans un autre État de l’Union européenne si les déclarations et les attestations établies par cette société de capitaux n’étaient en aucun cas reçues comme preuves à cet égard. Il est toutefois loisible aux États membres d’insister sur la production de preuves probantes. L’appréciation de la preuve reste, elle aussi, du ressort des juridictions nationales dans le respect des principes d’effectivité et d’équivalence (45).

111. Par tous ces motifs, il convient de répondre à la quatrième question, sous b), qu’une réglementation nationale voulant que l’imposition des dividendes versés tant par les entreprises du pays que par celles d’autres États de l’Union européenne, figurant dans un avis d’imposition définitif établi au titre de l’impôt sur le revenu, ne puisse être rectifiée aux fins d’imputer l’impôt sur les sociétés grevant ces dividendes que sur production de l’attestation de l’impôt sur les sociétés visée aux articles 44 et suivants du KStG méconnaît le principe d’effectivité lorsque cela rend la rectification de l’imposition de dividendes UE en pratique impossible ou excessivement difficile. Il appartient au juge de renvoi de le constater en l’espèce.

2.      La quatrième question, sous a)

112. Par sa quatrième question, sous a), le juge de renvoi souhaite en substance savoir si la modification d’une règle interne de procédure conduisant à exclure rétroactivement la rectification de l’imposition, figurant dans un avis d’imposition définitif établi au titre de l’impôt sur le revenu, de dividendes tant allemands que d’autres États de l’Union européenne sur production de l’attestation de l’impôt sur les sociétés visée aux articles 44 et suivants du KStG, méconnaît le droit de l’Union.

113. Compte tenu de la réponse que je propose à la quatrième question, sous b), la «production de l’attestation de l’impôt sur les sociétés visée aux articles 44 et suivants du KStG» évoquée par le juge de renvoi doit se comprendre dans le présent contexte comme étant une allusion à la production requise conformément au droit de l’Union d’une «preuve valable de l’impôt sur les sociétés versé en amont». Ce n’est qu’en la reformulant ainsi que l’on peut répondre utilement à cette question.

114. Il convient de relever au reste que le juge de renvoi a énoncé cette question en considérant expressément que la modification de la loi en cause est conçue en termes à ce point généraux qu’elle ne vise pas seulement à éviter l’imputation de l’impôt sur les sociétés versé à l’étranger et qu’elle vaut uniformément pour les contribuables non résidents et résidents. On ne trouve, dans les pièces de procédure, aucune information récusant clairement cette analyse du juge de renvoi.

115. Les doutes du juge de renvoi quant à la conformité au droit de l’Union de la modification apportée par la loi du 8 décembre 2004 aux règles de procédure fiscale allemandes, excluant, à compter du 29 octobre 2004 et donc rétroactivement, toute rectification des avis d’imposition définitifs établis au titre de l’impôt sur le revenu sur production ultérieure de preuves valables de l’impôt sur les sociétés grevant tant les dividendes allemands que les dividendes UE, tiennent au fait que cette modification de la loi fait perdre, sans délai transitoire, aux contribuables qui perçoivent des dividendes UE la faculté que leur offraient les anciennes règles de procédure de faire valoir, en dépit du caractère définitif acquis par l’avis d’imposition en question, un droit à imputation de l’impôt sur les sociétés grevant les dividendes imposés.

116. Cette question préjudicielle doit, elle aussi, recevoir une réponse au regard des principes que la Cour a développés dans sa jurisprudence sur l’autonomie procédurale des États membres. La question à laquelle il convient de répondre en définitive est celle de savoir si la modification apportée par la loi du 8 décembre 2004 aux règles de procédure fiscale allemandes enfreint le principe d’effectivité.

117. Il convient, tout d’abord, de relever à cet égard qu’une réglementation nationale dans laquelle les avis d’imposition acquièrent un caractère définitif à l’expiration d’un délai convenable est en principe conforme au droit de l’Union, même si cette réglementation devait conduire à ne plus pouvoir contester à terme des impôts sur le revenu établis pour le passé, ce qui paralyse l’exercice de droits tirés du droit de l’Union.

118. Il convient à cet égard de relever, d’une part, que ce caractère définitif contribue en soi à la sécurité juridique, laquelle est reconnue dans une jurisprudence constante comme un principe général de droit (46) tant au bénéfice des contribuables que des administrations fiscales. D’autre part, on doit évoquer la jurisprudence constante de la Cour voulant que la fixation de délais de recours raisonnables à peine de forclusion est, en principe, conforme au droit de l’Union dans l’intérêt de la sécurité juridique en sorte que l’écoulement de ces délais peut aussi paralyser l’exercice de droits tirés du droit de l’Union (47).

119. Ici se pose néanmoins la question particulière de savoir si une modification législative annulant rétroactivement, sans délai transitoire, une règle permettant de rectifier des avis d’imposition définitifs, susceptible d’être invoquée pour exercer ultérieurement des droits à imputation tirés du droit de l’Union, est conforme au principe d’effectivité.

120. Pour répondre à cette question, il convient de partir du constat que nous venons de faire qu’il est, en principe, conforme au droit de l’Union que des avis d’imposition acquièrent un caractère définitif à l’expiration d’un délai convenable. Il s’ensuit directement qu’une modification législative modifiant et abrogeant en partie une réglementation nationale permettant, dans certaines conditions, de rectifier des avis d’imposition en dépit du caractère définitif qu’ils ont acquis est elle aussi, en principe, conforme au droit de l’Union.

121. Le principe d’effectivité ainsi que le principe de la protection de la confiance légitime commandent néanmoins d’assortir ce genre de modification législative d’un délai transitoire convenable.

122. S’agissant du principe d’effectivité, on rappellera à cet égard que les procédures nationales qui ont vocation à garantir la protection des droits que le citoyen tire du droit de l’Union ne peuvent pas rendre l’exercice de ce droit en pratique impossible ou excessivement difficile. Si l’on apporte aux règles de procédure fiscale des modifications qui excluent de mettre en œuvre un certain nombre de droits tirés du droit de l’Union en renforçant les règles régissant le caractère définitif des avis d’imposition, sans prévoir de délai transitoire convenable, cela complique excessivement l’exercice de ces droits en sorte que l’on doit reconnaître dans un tel cas que le principe d’effectivité est méconnu (48).

123. S’agissant du principe de la protection de la confiance légitime, la Cour a décidé au reste que ce principe est méconnu lorsqu’une modification de la législation nationale prive rétroactivement le contribuable d’un droit acquis à la restitution d’une taxe prélevée au mépris du droit de l’Union (49).

124. La modification législative en cause ici, du 8 décembre 2004, ne comporte pas de régime transitoire convenable. Du fait de cette modification législative, il n’est plus possible, depuis le 29 octobre 2004, de revenir sur le caractère définitif d’avis d’imposition en produisant ultérieurement des preuves valables de l’impôt sur les sociétés grevant les dividendes UE. L’actionnaire contribuable est ainsi privé rétroactivement de la faculté de faire valoir un droit à imputation de l’impôt sur les sociétés au titre des règles nationales alors en vigueur et en dépit du caractère définitif acquis par les avis d’imposition concernés. Cette modification rétroactive de la législation enfreint le principe d’effectivité en ce qu’elle rend en pratique impossible l’exercice de droits acquis au titre de l’ordre juridique de l’Union. Elle enfreint aussi le principe de la protection de la confiance légitime.

125. L’absence de délai transitoire convenable dans la loi modificative du 8 décembre 2004 n’a toutefois pas automatiquement pour effet de devoir reconduire pour une durée illimitée l’ancienne législation régissant la rectification de l’imposition de dividendes UE figurant dans un avis d’imposition définitif établi au titre de l’impôt sur le revenu (50). Un tel effet juridique irait au-delà de l’objectif d’une protection juridique effective et heurterait, de ce fait, le principe général de proportionnalité.

126. Dans ce contexte, le principe d’effectivité et le principe de protection de la confiance légitime commandaient, dans un cas comme celui qui se présente dans la procédure au principal, d’assortir l’entrée en vigueur de la loi modificative du 8 décembre 2004 d’un délai transitoire au cours duquel les actionnaires contribuables auraient pu solliciter la rectification de leurs avis d’imposition définitifs en produisant des preuves valables de l’impôt sur les sociétés grevant les dividendes UE.

127. Ce délai transitoire doit en principe être calculé de manière à laisser aux actionnaires contribuables, qui pensaient au départ pouvoir exercer sans limite de temps leur droit à imputation de l’impôt sur les sociétés grevant les dividendes UE, un délai convenable pour exercer ce droit. Ils doivent, en tout état de cause, avoir la possibilité de préparer leur action autrement que dans la précipitation liée à l’obligation d’agir dans une urgence sans rapport avec les délais sur lesquels ils pouvaient initialement compter (51).

128. Ce délai transitoire assortissant l’entrée en vigueur des nouvelles règles de procédure fiscale en cause ici se calculera en tenant compte, d’une part, du fait qu’avant la loi modificative du 8 décembre 2004 la demande de rectification d’un avis d’imposition définitif pouvait être introduite sans limite de temps. D’autre part, on doit considérer qu’un certain nombre d’actionnaires contribuables ne pouvaient pas demander sans plus aux sociétés distributrices une preuve valable de l’impôt sur les sociétés grevant les dividendes UE, mais devaient préalablement faire un certain travail d’explication et de persuasion.

129. Ces éléments m’amènent à conclure que la durée minimale du délai transitoire nécessaire à garantir l’effectivité de la mise en œuvre des droits tirés du droit de l’Union, permettant aux bénéficiaires de dividendes UE soumis à l’impôt sur le revenu, normalement diligents, de prendre connaissance de la loi modificative du 8 décembre 2004 et de la nouvelle réglementation, et de préparer et de présenter leur demande de rectification des avis d’imposition définitifs établis au titre de l’impôt sur le revenu dans des conditions ne compromettant pas leurs chances de succès, doit raisonnablement être fixée à douze mois.

130. Par tous ces motifs, il convient de répondre à la quatrième question, sous a), que la modification d’une réglementation nationale conduisant à exclure rétroactivement et sans délai transitoire la rectification de l’imposition des dividendes UE figurant dans un avis d’imposition définitif établi au titre de l’impôt sur le revenu sur production d’une preuve valable de l’impôt sur les sociétés grevant ces dividendes, ce qui exclut aussi rétroactivement l’imputation de ce même impôt sur les sociétés, enfreint le principe d’effectivité et le principe de la protection de la confiance légitime. Ces deux principes commandent d’assortir l’entrée en vigueur d’une réglementation comme la loi modificative du 8 décembre 2004 d’un délai transitoire convenable de douze mois au moins à compter de la publication de cette loi.

VII – Conclusion

131. Par les motifs qui précèdent, je propose à la Cour de répondre comme suit aux questions préjudicielles du Finanzgericht Köln:

«1)      Les articles 56 CE et 58 CE doivent être interprétés en ce sens qu’ils commandent, dans un cas comme celui qui se présente dans la procédure au principal, d’imputer l’impôt sur les sociétés grevant les dividendes versés par les sociétés d’autres États de l’Union européenne sur l’impôt sur le revenu des actionnaires, sous la forme d’un crédit d’impôt calculé en fonction de l’impôt sur les sociétés grevant effectivement ces dividendes. Cette imputation ne doit toutefois pas dépasser le taux de l’impôt sur les sociétés applicable aux dividendes versés par les sociétés résidentes.

2)      Une règle interne voulant que l’imputation dans l’impôt sur le revenu de l’impôt sur les sociétés grevant les dividendes versés par les sociétés des autres États de l’Union européenne requière toujours l’attestation visée aux articles 44 et suivants de la loi allemande relative à l’impôt sur les sociétés du 11 mars 1991 (Körperschaftsteuergesetz, ci-après le ‘KStG’) pour prouver cet impôt prélevé en amont enfreint le principe d’effectivité, dans la mesure où l’on devrait constater que cette exigence rend impossible en pratique ou excessivement difficile l’imputation de l’impôt sur les sociétés versé par les sociétés des autres États de l’Union européenne. Il appartient au juge de renvoi de le constater en l’espèce.

3)      En l’absence de réglementation de l’Union en la matière, c’est aux États membres qu’il appartient de déterminer, dans le respect du principe d’équivalence et du principe d’effectivité, les règles de répartition de la charge et du risque de la preuve ainsi que celles régissant l’appréciation de la preuve par le juge, applicables dans la détermination de l’impôt sur les sociétés grevant les dividendes versés par les sociétés d’autres États de l’Union européenne. Le principe d’effectivité ne crée aucune obligation d’estimer en justice l’impôt sur les sociétés grevant les dividendes versés par les sociétés d’autres États de l’Union européenne qui ne peut pas être déterminé. Le principe d’équivalence dicte toutefois cette obligation au cas où un juge national serait tenu de se livrer à une estimation de cette nature dans une situation analogue purement interne. Les impôts sur les sociétés grevant indirectement les dividendes versés par les sociétés d’autres États de l’Union européenne doivent être pris en compte dans la mesure où les impôts sur les sociétés grevant indirectement les dividendes versés par les sociétés résidentes ont, eux aussi, une incidence sur le montant du crédit d’impôt sur le revenu accordé aux actionnaires.

4)      Une réglementation nationale voulant que l’imposition des dividendes versés tant par les entreprises du pays que par celles d’autres États de l’Union européenne, figurant dans un avis d’imposition définitif établi au titre de l’impôt sur le revenu, ne puisse être rectifiée aux fins d’imputer l’impôt sur les sociétés grevant ces dividendes que sur production de l’attestation de l’impôt sur les sociétés visée aux articles 44 et suivants du KStG méconnaît le principe d’effectivité lorsque cela rend la rectification de l’imposition de dividendes versés par les sociétés des autres États de l’Union européenne en pratique impossible ou excessivement difficile. Il appartient au juge de renvoi de le constater en l’espèce.

5)      La modification d’une réglementation nationale conduisant à exclure rétroactivement et sans délai transitoire la rectification de l’imposition des dividendes versés par les sociétés d’autres États de l’Union européenne figurant dans un avis d’imposition définitif établi au titre de l’impôt sur le revenu sur production d’une preuve valable de l’impôt sur les sociétés grevant ces dividendes, ce qui exclut aussi rétroactivement l’imputation de ce même impôt sur les sociétés, enfreint le principe d’effectivité et le principe de la protection de la confiance légitime. Ces deux principes commandent d’assortir l’entrée en vigueur d’une réglementation comme la loi modificative du 8 décembre 2004 d’un délai transitoire convenable de douze mois au moins à compter de la publication de cette loi.»


1 – Langue originale: l’allemand.


2 – C-292/04, Rec. p. I-1835.


3 – Nous inspirant des références faites dans le TUE et le TFUE, nous utilisons l’expression «droit de l’Union» comme notion générique englobant à la fois le droit communautaire et le droit de l’Union. Les dispositions particulières de droit primaire qui figurent dans la suite des conclusions sont toujours citées dans la version de l’article en vigueur à l’époque donnée.


4 – JO L 336, p. 15, dans la version issue de la directive 2006/98/CE du Conseil, du 20 novembre 2006, portant adaptation de certaines directives dans le domaine de la fiscalité, en raison de l’adhésion de la Bulgarie et de la Roumanie (JO L 363, p. 129).


5 – BGBl. 1990 I, p. 1898.


6 – BGBl. 1991 I, p. 638.


7 – BGBl. 2004 I, p. 3310.


8 – Précité à la note 2.


9 – Au final, cette imputation aboutit à traiter l’impôt sur les sociétés grevant les dividendes comme une avance de l’impôt sur le revenu de l’actionnaire et à le prendre intégralement en compte dans son imposition. Voir, à ce sujet, Mössner, J., «Rückgewähr europarechtswidrig erhobener Steuern», dans Europa im Wandel: Festschrift für Hans-Werner Rengeling, Cologne, 2008, p. 339, 341 et suiv. Un des aspects de ce système est que le crédit d’impôt doit être rangé dans les recettes soumises à l’impôt sur le revenu. Voir à ce sujet Gosch, D., «Anrechnung ausländischer Steuern nach dem EuGH-Urteil in der Rechtssache ‘Manninen’ trotz Bestandskraft?», DStR, 2004, 1988, 1989.


10 – Ainsi que le juge de renvoi l’indique expressément aux pages 30 et 43 de la décision de renvoi. Dans la mesure où les observations que les demandeurs ont présentées dans la procédure écrite et dans la procédure orale complètent ces constatations du juge de renvoi ou les contestent, on relèvera qu’il incombe à la Cour de prendre en compte, dans le cadre de la répartition des compétences entre les juridictions communautaires et nationales, le contexte factuel et réglementaire dans lequel s’insère la question préjudicielle, tel que défini par la décision de renvoi (arrêts du 29 avril 2004, Orfanopoulos et Oliveri, C-482/01 et C-493/01, Rec. p. I-5257, point 42; du 2 octobre 2008, Heinrich Bauer Verlag, C-360/06, Rec. p. I-7333, point 15; du 27 octobre 2009, ČEZ, C-115/08, Rec. p. I-10265, point 57, et du 8 septembre 2010, Winner Wetten, C-409/06, non encore publié au Recueil, point 35).


11 – Précité à la note 2.


12 – Dans l’arrêt Meilicke e.a., la Cour a réaffirmé en définitive sa jurisprudence constante voulant que, si la fiscalité directe relève de la compétence des États membres, ces derniers doivent toutefois exercer celle-ci dans le respect du droit de l’Union (arrêts du 29 avril 1999, Royal Bank of Scotland, C-311/97, Rec. p. I-2651, point 19; du 7 septembre 2004, Manninen, C-319/02, Rec. p. I-7477, point 19; du 17 septembre 2009, Glaxo Wellcome, C-182/08, Rec. p. I-8591, point 34; du 3 juin 2010, Commission/Espagne, C-487/08, non encore publié au Recueil, point 37, et du 1er juillet 2010, Dijkman et Dijkman-Lavaleije, C-233/09, non encore publié au Recueil, point 20).


13 – Voir arrêt du 12 décembre 2006, Test Claimants in the FII Group Litigation (C-446/04, Rec. p. I-11753), dans lequel la Cour a dit pour droit que, lorsqu’un État membre entend prévenir par la voie d’un régime d’exonération la double imposition économique des dividendes versés à des résidents par des sociétés résidentes, le régime qui doit être équivalent pour les dividendes versés par des sociétés non résidentes peut jouer par voie d’imputation de l’impôt prélevé en amont, pour autant que le taux d’imposition des dividendes versés par des sociétés non résidentes ne soit pas supérieur à celui applicable aux dividendes des sociétés résidentes et que le montant d’impôt acquitté à l’étranger soit imputé à concurrence des impôts prélevés dans le pays de résidence. Pour une analyse pénétrante de la question de principe de l’équivalence des méthodes d’exonération et d’imputation dans la prévention de la double imposition économique de dividendes, voir points 15 et suiv. des conclusions que l’avocat général Kokott a présentées le 11 novembre 2010 dans l’affaire Haribo et Österreichische Salinen (C-436/08 et C-437/08, toujours pendante devant la Cour).


14 – Voir points 46 et suiv. des présentes conclusions.


15 – En ce sens notamment Stuhrmann, G., § 36 de l’EStG, point 29 bis, dans Blümich – Kommentar EStG – KStG GewStG (éd. Heuermann, B.), Verlag Franz Vahlen, Munich, 106e mise à jour (au 1er mai 2010), selon qui la jurisprudence de la Cour doit se comprendre en ce sens que l’impôt étranger sur les sociétés doit s’imputer au taux en vigueur dans l’État du siège de la société qui distribue les dividendes. Cela peut porter l’imputation à un montant supérieur ou inférieur aux 3/7 du dividende brut. Dans le même sens également, Lüdicke, J., «Pending Cases Filed by German Courts I: The Meilicke, CLT-UFA, Keller Holding, Lasertec, Rewe Zentralfinanz, Ritter-Coulais, Kolumbus Container Services, and Stauffer Cases», dans Lang, Schuch et Staringer (éd), ECJ: recent developments in direct taxation, Vienne, 2006, p. 113, 119.


16 – Sur la prise en compte, dans la jurisprudence de la Cour, de la compétence que les États membres ont conservée dans la fiscalité directe, voir Lenaerts, K., «Die Entwicklung der Rechtsprechung des Gerichtshofs der Europäischen Gemeinschaften auf dem Gebiet der direkten Besteuerung», EuR, 2009, p. 728, 737 et suiv.


17 – Voir conclusions que l’avocat général Geelhoed a présentées dans l’affaire Test Claimants in the FII Group Litigation (arrêt précité à la note 13), point 45, et le 23 février 2006 dans l’affaire Test Claimants in Class IV of the ACT Group Litigation (arrêt du 12 décembre 2006, C-374/04, Rec. p. I-11673), points 43 et suiv.


18 – Précité à la note 13. L’enseignement de cet arrêt a été réaffirmé dans l’ordonnance du 23 avril 2008, Test Claimants in the CFC and Dividend Group Litigation (C-201/05, Rec. p. I-2875).


19 – Arrêt Test Claimants in the FII group Litigation (précité à la note 13, points 48 et suiv.).


20 – Ibidem, points 51 et suiv.


21 – Voir, en ce sens, points 153 et suiv. des conclusions que l’avocat général Kokott a présentées le 11 novembre 2010 dans l’affaire Haribo et Österreichische Salinen (précitée à la note 13).


22 – Selon une jurisprudence constante, des mesures nationales restreignant la libre circulation des capitaux peuvent être justifiées par les raisons mentionnées à l’article 58 CE ou par des raisons impérieuses d’intérêt général, à condition qu’elles soient propres à garantir la réalisation de l’objectif qu’elles poursuivent et n’aillent pas au-delà de ce qui est nécessaire pour qu’il soit atteint; voir arrêt Dijkman et Dijkman-Lavaleije (précité à la note 12, point 49). Sur la qualification de la «nécessité de préserver la cohérence du système fiscal national» de raison impérieuse d’intérêt général, voir arrêts du 28 janvier 1992, Bachmann (C-204/90, Rec. p. I-249, points 21 et suiv.); Meilicke e.a. (précité à la note 2, points 26 et suiv.); Manninen (précité à la note 12, point 42), et du 27 novembre 2008, Papillon (C-418/07, Rec. p. I-8947, point 43).


23 – Arrêts du 13 mars 2007, Unibet (C-432/05, Rec. p. I-2271, point 43); du 7 juin 2007, van der Weerd e.a. (C-222/05 à C-225/05, Rec. p. I-4233, point 28); du 12 février 2008, Kempter (C-2/06, Rec. p. I-411, point 57), et du 8 juillet 2010, Bulicke (C-246/09, non encore publié au Recueil, point 25).


24 – Voir point 76 des présentes conclusions.


25 – Voir point 79 des présentes conclusions


26 – Voir arrêt du 27 janvier 2009, Persche (C-318/07, Rec. p. I-359), dans lequel la Cour a dit pour droit que l’article 56 CE s’oppose à une législation d’un État membre en vertu de laquelle, en ce qui concerne les dons faits à des organismes reconnus d’intérêt général, le bénéfice de la déduction fiscale n’est accordé que par rapport aux dons effectués à des organismes établis sur le territoire national, sans possibilité aucune pour le contribuable de démontrer qu’un don versé à un organisme établi dans un autre État membre satisfait aux conditions imposées par ladite législation pour l’octroi d’un tel bénéfice (point 72 et dispositif). La Cour a toutefois souligné dans le même temps que, si la vérification des informations fournies par le contribuable s’avère difficile, rien n’empêche les autorités fiscales concernées de refuser la déduction demandée si les preuves qu’elles jugent nécessaires pour l’établissement correct de l’impôt ne sont pas fournies (point 69). Sur cette dernière considération, voir arrêts du 30 janvier 2007, Commission/Danemark (C-150/04, Rec. p. I-1163, point 54); du 11 octobre 2007, ELISA (C-451/05, Rec. p. I-8251, points 95 et suiv.), et du 18 décembre 2007, A (C-101/05, Rec. p. I-11531, points 58 et suiv.).


27 – Décision de renvoi du 14 mai 2009, p. 44.


28 – Voir arrêt Commission/Espagne (précité à la note 12, point 56), dans lequel la Cour a expressément souligné à l’endroit de l’exercice parallèle des compétences fiscales des différents États membres que les désavantages pouvant découler de l’exercice parallèle des compétences fiscales des différents États membres, pour autant qu’un tel exercice n’est pas discriminatoire, ne constituent pas des restrictions interdites par le traité. En ce sens aussi, arrêts du 14 novembre 2006, Kerckhaert et Morres (C-513/04, Rec. p. I-10967, points 19, 20 et 24); du 20 mai 2008, Orange European Smallcap Fund (C-194/06, Rec. p. I-3747, points 41, 42 et 47), et du 16 juillet 2009, Damseaux (C-128/08, Rec. p. I-6823, point 27).


29 – Voir, à cet égard, arrêts du 6 décembre 2007, Columbus Container Services (C-298/05, Rec. p. I-10451, point 51); du 28 février 2008, Deutsche Shell (C-293/06, Rec. p. I-1129, point 43), et du 23 octobre 2008, Krankenheim Ruhesitz am Wannsee-Seniorenheimstatt (C157/07, Rec. p. I-8061, point 50).


30 – Voir point 86 des présentes conclusions.


31 – Arrêts précités à la note 26 ELISA (point 92) et Commission/Danemark (point 52).


32 – Arrêts Persche (précité à la note 26, point 65) et du 27 septembre 2007, Twoh International (C-184/05, Rec. p. I-7897, point 32).


33 – Voir, à cet égard, aussi arrêt du 14 septembre 2006, Centro di Musicologia Walter Stauffer (C-386/04, Rec. p. I-8203, point 49), dans lequel la Cour a souligné qu’une une réglementation nationale qui empêche de manière absolue le contribuable d’apporter dans un dossier fiscal international des preuves de faits, survenus dans d’autres États de l’Union européenne, utiles au bénéfice d’une exonération fiscale, ne saurait être justifiée au titre de l’efficacité des contrôles fiscaux en tant que raison impérieuse d’intérêt général.


34 – Voir arrêts Persche (précité à la note 26, point 55) et Centro di Musicologia Walter Stauffer (précité à la note 33, point 48).


35 – Voir arrêts Persche (précité à la note 26, points 54 et 60); Heinrich Bauer Verlag (précité à la note 10, point 41); du 25 octobre 2007, Geurts et Vogten (C-464/05, Rec. p. I-9325, point 28), et ELISA (précité à la note 26, point 95).


36 – Voir point 86 des présentes conclusions.


37 – Précité à la note 2.


38 – Voir point 52 des présentes conclusions.


39 – BGBl. 2004 I, p. 3310.


40 – Pour autant que l’on puisse en juger, le juge de renvoi se voit confronté, à cet égard, notamment au problème de procédure que pose le fait qu’une imputation dans l’impôt sur le revenu de l’impôt sur les sociétés grevant les dividendes suppose que l’impôt sur les sociétés à rembourser soit imposé dans le chef de l’actionnaire en tant que recette soumise à l’impôt sur le revenu. Pour les distributions de dividendes couvertes par un avis d’imposition définitif, cela suppose que cet avis puisse être modifié en dépit de son caractère définitif aux fins d’imposer l’impôt sur les sociétés versé en amont à imputer.


41 – Une telle inégalité de traitement entre les dividendes versés par les sociétés du pays et ceux versés par les sociétés des autres États de l’Union européenne ne pourrait, par conséquent, être considérée comme conforme aux dispositions du traité relatives à la libre circulation des capitaux que si elle concerne des situations qui ne sont pas objectivement comparables ou si elle est justifiée par des raisons impérieuses d’intérêt général (voir arrêts Commission/Espagne, précité à la note 12, point 47; du 8 novembre 2007, Amurta, C-379/05, Rec. p. I-9569, point 32, et Manninen, précité à la note 12, point 29). On n’aperçoit ici aucune circonstance qui puisse conduire à ne pas pouvoir comparer objectivement la rectification ultérieure d’avis d’imposition définitifs pour des dividendes versés par les sociétés du pays, d’une part, et la rectification ultérieure pour des dividendes versés par les sociétés d’autres États de l’Union européenne, d’autre part. De surcroît, on n’aperçoit aucune raison impérieuse d’intérêt général susceptible de justifier une différence de traitement entre la rectification ultérieure d’avis d’imposition définitifs pour des dividendes versés respectivement par les sociétés du pays et par les sociétés d’autres États de l’Union européenne.


42 – Voir point 76 des présentes conclusions.


43 – Voir point 78 des présentes conclusions.


44 – Voir point 94 des présentes conclusions.


45 – Voir point 95 des présentes conclusions.


46 – Voir arrêts du 13 janvier 2004, Kühne & Heitz (C-453/00, Rec. p. I-837, point 24), et du 12 février 2008, Kempter (C-2/06, Rec. p. I-411, point 37).


47 – Voir arrêts Bulicke (précité à la note 23, point 36); du 24 mars 2009, Danske Slagterier (C-445/06, Rec. p. I-2119, point 32); du 29 octobre 2009, Pontin (C-63/08, Rec. p. I-10467, point 48), et du 15 avril 2010, Barth (C-542/08, non encore publié au Recueil, points 28 et suiv.).


48 – Voir, à cet égard, la jurisprudence de la Cour relative à la modification de délais de forclusion nationaux dans la récupération de montants prélevés au mépris du droit de l’Union: arrêts du 11 juillet 2002, Marks & Spencer (C-62/00, Rec. p. I-6325, points 36 et suiv.), et du 24 septembre 2002, Grundig Italiana (C-255/00, Rec. p. I-8003, points 35 et suiv.).


49 – Arrêt Mark & Spencer (précité à la note 48, point 46).


50 – Voir, à cet égard, arrêt Grundig Italiana (précité à la note 48, point 41).


51 – Ibidem, point 38.